l’affaire Strauss-Kahn en jugement

L’un des rares écolos des médias, Hervé Kempf*, fait un parallèle entre la démesure consumériste et l’hubris lubrique de DSK. Mais rien n’est dit sur l’origine de cette avidité inextensible. Quelle est la racine psychologique de cette envie irrepressible d’objets, de pouvoir et de femmes ? Pourquoi ce déni des contraintes écologiques ou morales ? L’explication première est le mécanisme de l’interaction spéculaire, en miroir. Je me réalise en échangeant avec autrui des modèles du monde formés par ces échanges. Je me représente la manière dont les autres se représentent les choses et moi-même. L’hypothèse de l’interaction spéculaire nous permet d’enterrer le vieux débat épistémologique sur l’antériorité de l’individu et de la société. L’un et l’autre se forment mutuellement. L’individu soumis à la société de consommation ne se demande pas s’il veut pratiquer la simplicité volontaire, mais seulement s’il le ferait au cas où un certain nombre d’autres le feraient aussi. L’écologie sociale part de ce constat psychologique.

                Ce qui est frappant dans l’affaire Strauss-Kahn, c’est le discours en miroir des socialistes : un parti ressemble à une meute, à une famille soudée autour de sa complicité. Pierre Moscovici considère DSK comme son frère en politique et bien sûr il faut défendre son frère. Jean-Paul Huchon ne monte pas les marches du festival de Cannes « par solidarité avec Dominique Strauss-Kahn ». Jack Lang s’emporte contre le système judiciaire qui « a envie de se payer un français, un Français puissant ».Plusieurs autres leaders socialistes interviennent pour témoigner leur amitié à DSK… Stupéfiant, indécent ! Une tentative de viol n’est presque rien pour eux, l’amitié avant tout. L’hubris lubrique de l’ex-futur président de la République a bien été soutenu implicitement par les protections de sa famille de gauche. L’hubris, lubrique ou non, peut s’exacerber lorsqu’on acquiert un sentiment d’impunité sous le regard complice de son miroir. Le  chef de famille peut-il se limiter quand il est défendu en toutes circonstances par sa famille ? Comme le dit l’avocate féministe Gisèle Halimi « le respect des femmes » devrait « prévaloir sur l’amitié et l’esprit de clan ». Evoquant « la levée de boucliers des amis » de Dominique Strauss-Kahn, elle se dit « déçue par la gauche ».

                Le sens du devoir envers les autres et la biosphère n’advient que pour les esprits libérés de l’esprit de famille, pour des militants libérés du culte du chef, pour des consommateurs libérés de la publicité, pour des travailleurs libérés des objectifs patronaux, pour des chercheurs libérés de l’obligation de l’application technique, pour des professeurs libérés de leur discipline, pour des élèves libérés de leurs écrans, pour des médias libérés de la pression de l’argent, pour des individus libérés de l’interaction spéculaire. C’est seulement à cette condition que nous pouvons échapper à la démesure actuelle d’un système social artificiellement dopée par l’énergie facile, par l’énergie fossile…

 LeMonde du 18 mai 2011, rubrique Ecologie, « Hubris » lubrique

4 réflexions sur “l’affaire Strauss-Kahn en jugement”

  1. Vandenkoornhuyse Françoise

    Je trouve cela scandaleux, qui a le droit de juger une personne ?
    Celui qui n’a jamais fauté léve le bras !!! c’est bizarre Personne !!!
    Bizarement on ne parle plus de Ben Laden ??????????????????????????
    Avant Monsieur Strauss Kahn on parlait de Ben Laden et bizarrement comme il y avait trop de média il fallait trouver un scoop pour brouiller les pistes.
    SCANDALEUX c’est cette personne qui en subit les conséquences.
    MONSIEUR LES AMERICAINS, QUE DEVIENT L ‘AFFAIRE BEN LADEN??????????????????

  2. Nous nous sommes étonnés de voir Jean-François Kahn confier sur un plateau télé son amitiés pour Strauss-Kahn. Mais quand nous avons appris que sa femme, Rachel Kahn, a été témoin lors du mariage de DSK et Anne Sinclair, nous avons compris que c’est encore la « famille », pour le meilleur et pour le pire.

    A croire qu’il ne peut y avoir qu’une victime, le mâle, même quand il y a démesure.

  3. Sarkozy et sa « famille »
    L’esprit de clan n’est pas propre à la gauche, mais à tout parti. Sarkozy à propos de Borloo, ex numéro 2 du gouvernement, quand il a divorcé de l’UMP :

    « La stratégie qui consiste à diviser est perdante. Il y a une ligne rouge, c’est l’unité de la famille. On ne décide pas de l’avenir politique parce que vous obtenez trois articles dans la presse. Vous gagnerez ensemble ou vous perdrez seuls dans votre coin. Les cimetières sont innombrables où reposent ceux qui avaient un projet présidentiel. »
    (LeMonde du 15 avril 2011)

  4. Sarkozy et sa « famille »
    L’esprit de clan n’est pas propre à la gauche, mais à tout parti. Sarkozy à propos de Borloo, ex numéro 2 du gouvernement, quand il a divorcé de l’UMP :

    « La stratégie qui consiste à diviser est perdante. Il y a une ligne rouge, c’est l’unité de la famille. On ne décide pas de l’avenir politique parce que vous obtenez trois articles dans la presse. Vous gagnerez ensemble ou vous perdrez seuls dans votre coin. Les cimetières sont innombrables où reposent ceux qui avaient un projet présidentiel. »
    (LeMonde du 15 avril 2011)

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