Certains organismes vivants se reproduisent par simple duplication (bactéries, amibes…) et sont de ce fait immortels. Pour les autres le corps, une fois fourni l’effort nécessaire à la reproduction, va lentement décliner jusqu’à la mort : la mouche va vivre 17 jours en moyenne, le rat 6 années et le séquoia géant 6 000 ans. Ces différences sont inscrites dans les gènes qui donnent à une espèce une durée de vie maximale. Comme les autres espèces, les humains sont programmés pour mourir, mais ils modifient leur environnement pour mieux résister au processus de vieillissement. Ainsi la réduction de la mortalité infantile, les progrès de l’hygiène publique et privée et la lutte contre les infections ont fait passer l’espérance de vie moyenne à la naissance en France de 25 ans en 1750 à 45 ans en 1900 et 83 ans en 2017. On a même pu calculer que sept années de vie supplémentaire découlaient de traitements médicaux ou chirurgicaux très coûteux. Les dépenses de santé sont en constante augmentation et représentent actuellement près de 11 % du PIB, soit environ 271 milliards d’euros annuels. Le jeu en vaut-il la chandelle ?
Certains technophiles veulent agir contre les processus de vieillissement, faire de la télomérase, lutter contre les radicaux libres, encombrer les centres de soins palliatifs. Le transhumaniste Laurent Alexandre vise même à « euthanasier la mort » pour vivre mille ans. Il suffirait selon lui de modifier notre nature humaine par des interventions technologiques en utilisant la puissance des NBIC (nanotechnologies, biologie, informatique et sciences cognitives) : « La demande de vivre plus longtemps est insatiable… La fixation des limites dans la modification de l’espèce humaine conduira très certainement à des oppositions violentes entre bioconservateurs et transhumanistes. » Quel est le point de vue possible des écologistes face à l’hubris transhumaniste et trop coûteux de l’homme « augmenté » ? Soulignons d’abord que si les inconvénients du système technico-médical commencent à prendre le pas sur les bénéfices qu’ils nous ont apporté, c’est pour des raisons globales. Les gains en termes d’espérance de vie n’augmentent plus en proportion des dépenses par la faute des maladies de civilisation ! L’inactivité physique et la malnutrition jouent un rôle majeur, ainsi que l’exposition à la pollution, aux stress de la vie socioprofessionnelle, aux pesticides, à la consommation de sodas, aux produits ultra-transformés, etc. La prévalence croissante de l’obésité, de la stéatose hépatique, du diabète, de l’hypertension artérielle, des maladies chroniques cardio-vasculaires, respiratoires, rénales… et les cancers deviennent des maladies chroniques largement liée à notre mode de vie. Les maladies de civilisation pèsent désormais plus lourd dans la mortalité que les maladies naturelles. L’espérance de vie en bonne santé commence à régresser dans bon nombre de pays. La mortalité par Covid-19 ne fait donc que se rajouter à un tableau clinique peu encourageant.
Il est donc utile de se demander si cela est durable de perfectionner sans cesse nos moyens d’assistance sanitaire au prix d’un épuisement de nos ressources fossiles (non renouvelables), si c’est respecter les cycles vitaux que de s’attarder sur la planète et prendre un peu de l’espace vital à toutes les autres espèces, si c’est écologique de lutter indéfiniment contre notre mort inéluctable, si c’est bien vivre que de vivre centenaire. Enfin n’oublions pas qu’une part importante de l’accroissement de la population mondiale vient de l’allongement de l’espérance de vie : si nous en étions restés au niveau de l’espérance de vie en 1900, nous serions quelques milliards de moins. Pour en savoir plus grâce à notre blog biosphere :
9 mai 2020, espérance de vie et équivalent pétrole
11 spetembre 2017, Sans pétrole, nous nous baladerons dehors et tout nu (Jean- Marc Jancovici)
4 janvier 2017, longévité, intelligence…. tout commence à décroître
14 mars 2015, Mainmise de l’industrie sur nos repas : trop de sucre
6 juin 2013, Le fantasme de l’immortalité, une perte de sens
L’espérance de vie stagne, voire régresse. Or c’est la longévité que les transhumanistes souhaitent repousser, jusqu’à l’infini. Ce sont ces fous, qui veulent s’affranchir des limites et des lois naturelles, que nous devons combattre avant tout. La longévité d’un être humain a une limite naturelle, estimée par les scientifiques aux alentours de 120-125 ans. Tout porte à croire qu’il y a eu des centenaires de tous temps, moins que ne nos jours certes, jusqu’à présent le record officiel est de 122 ans (Jeanne Calment 1875-1997). Enfin c’est comme pour tout, il y a centenaire ET centenaire. Il y a celui qui à 100 ans pète encore la forme, façon de dire, et puis celui qui vit depuis des années comme un légume, ou branché à des machines.
Donner un prix à la vie, voilà de quoi choquer les romantiques. Un prix, ça renvoie à une vulgaire étiquette de supermarché, horreur, un un code barre !
Il vaut pourtant la peine de se creuser les méninges. Au niveau macro-économique, l’argent renvoie grossièrement à une quantité de travail, même si certaines pondérations sont farfelues, mais c’est un autre problème.
Autrement-dit, quelles proportions de notre activité voulons nous consacrer à quels buts ? Là on comprend mieux qu’il y a une limite, pas la même pour tout le monde bien sûr, mais une limite quand même : doit-on consacrer 5-10-20-50 % du travail (de nos vies) pour allonger notre vie de 1-2-36-72 mois et dans quelles conditions ? Il y a un vrai débat, et l’esquiver en décrétant bêtement « La Vie n’a pas de Prix » ne rend service à personne.
Avant de réfléchir à la quantité de travail qu’il serait «raisonnable» de consacrer à un certain niveau de santé, assurons nous déjà de bien voir le temps passé à travailler pour nous offrir des futilités. Ne serait-ce déjà que pour la sacro-sainte Bagnole indispensable pour aller bosser. L’argent ne renvoie pas seulement à une quantité de travail ou d’énergie, on sait très bien que l’argent peut très bien «faire des petits» tout seul (en bourse par exemple). L’argent revoie tout simplement à l’économie, et dans notre cas au capitalisme, au Système. Ce système où désormais tout doit être mesuré, quantifié, où tout doit d’avoir un prix (étiquette + code barre).
On en est donc arrivé à mettre un prix sur une vie humaine. Ce prix variant selon de nombreux critères, comme si effectivement la vie d’Untel valait plus que celle d’Ontel.
Lorsqu’on en est à arrivé à trouver ça normal, dans l’ordre des choses, c’est pour moi déjà le signe qu’on est malade. On l’est depuis longtemps. En continuant ainsi, à penser et à vivre comme des porcs (Gilles Châtelet), demain on bossera comme des bœufs (le travail c’est la santé) pour pouvoir se payer un certain nombre de litres d’air pur, un coucher de soleil, le rire d’un enfant etc.
Bonjour Michel C,
Mais cet article ne déplore pas la baisse de la mortalité infantile, il souligne juste qu’elle constitue un élément de l’augmentation de l’espérance de vie,. C’est assez différent, et incontestable cela augmente le nombre de personnes présentent à un instant donné sur la Terre (si on naît dans les mêmes quantités et qu’on y reste deux fois plus longtemps en moyenne, il y a à un instant précis deux fois plus de personnes).
C’est un argument très juste pour dire qu’il faut s’adapter et réduire notre fécondité, .
Quant aux choix entre les dépenses, tout le monde aimerait un monde parfait où il n’y aurait ni armement ni publicité. Remarquons toutefois que tendanciellement en France le budget militaire sur les 50 dernières années a largement baissé tandis que celui de l’éducation a augmenté (je ne sais pas si les résultats sont d’ailleurs à la hauteur de la dépense).
Mais en ce qui concerne les dépenses allouées aux dernières années, voire aux derniers mois de vie, on est bien obligé d’admettre qu’elles ne pourront poursuivre leur croissance exponentielle. D’ailleurs si l’on ponctionne trop sur les autres secteurs d’activité pour financer la santé, on les détruira et finalement… on aura moins pour financer la santé, il est donc assez logique de considérer qu’effectivement se pose un problème et que la solution est plutôt dans l’élimination des sources modernes de mauvaise santé (pollution, stress, alimentation trop industrielle) que dans une fuite en avant technologique qui se heurtera à la limite physique des ressources. L’article de biosphère me semble bien poser les problèmes
Que vaut notre espérance de vie ?
La vie n’a pas de prix. Et pourtant, la crise aiguë dans les services de réanimation nous rappelle tous les jours que nous aurions pu payer plus d’impôts pour mieux financer ces services, mais que nous ne l’avons pas fait. Qu’on le veuille ou non, nous arbitrons collectivement entre la fin de vie et la fin du mois.
La valeur de la vie se limite concrètement à la somme actualisée du flux de revenu du travail. En moyenne, au niveau du PIB actuel projeté sur quatre-vingts ans, cela donne une valeur légèrement supérieure à 1 million d’euros. En d’autres termes une personne qui travaille pour 2000 euros par mois pendant 40 ans dégage une valeur de 960 000 euros. Les systèmes d’indemnisation des juges et des assureurs utilisent encore aujourd’hui ce calcul d’indemnité, à laquelle est ajouté un pretium doloris. Des économistes ont estimé la « valeur de la vie statistique » (VVS) des citoyens à partir de leurs comportements effectifs. En regardant la différence de valeur des « salaires de la peur » pour les métiers les plus risqués, on a calculé un « prix de la vie » statistique de 3 millions d’euros en France. L’Etat français utilise cette valeur tutélaire de 3 millions d’euros pour une vie entière. Aux États-Unis une vie « vaut » 10 millions de dollars, rien ne vaut le niveau des vie des Américains !
Le scandale est moins dans le fait que la vie ait un prix que dans le fait qu’elle n’a pas un prix qui soit le même pour tous…
– «Ainsi la réduction de la mortalité infantile, les progrès de l’hygiène publique et privée et la lutte contre les infections […]. On a même pu calculer que sept années de vie supplémentaire découlaient de traitements médicaux ou chirurgicaux très coûteux. Les dépenses de santé sont en constante augmentation et représentent actuellement près de 11 % du PIB, soit environ 271 milliards d’euros annuels. Le jeu en vaut-il la chandelle ?»
En tous cas ce passage vaut quelques mots. Déjà, le fait de mettre un prix sur des vies humaines me fera toujours réagir. Ensuite, je préfère de loin ce genre d’augmentation à celles des dépenses allouées à l’armement ou à la publicité. Enfin, même en accordant un tant soit peu de crédit à ces chiffres, comment peut-on se lamenter du recul de la mortalité infantile et des progrès de l’hygiène publique ? J’ai bien sûr une réponse à cette dernière question.
Bonjour Michel C,
Mais cet article ne déplore pas la baisse de la mortalité infantile, il souligne juste qu’elle constitue un élément de l’augmentation de l’espérance de vie,. C’est assez différent, et incontestable cela augmente le nombre de personnes présentent à un instant donné sur la Terre (si on naît dans les mêmes quantités et qu’on y reste deux fois plus longtemps en moyenne, il y a à un instant précis deux fois plus de personnes).
C’est un argument très juste pour dire qu’il faut s’adapter et réduire notre fécondité, .
Quant aux choix entre les dépenses, tout le monde aimerait un monde parfait où il n’y aurait ni armement ni publicité. Remarquons toutefois que tendanciellement en France le budget militaire sur les 50 dernières années a largement baissé tandis que celui de l’éducation a augmenté (je ne sais pas si les résultats sont d’ailleurs à la hauteur de la dépense).
Mais en ce qui concerne les dépenses allouées aux dernières années, voire aux derniers mois de vie, on est bien obligé d’admettre qu’elles ne pourront poursuivre leur croissance exponentielle. D’ailleurs si l’on ponctionne trop sur les autres secteurs d’activité pour financer la santé, on les détruira et finalement… on aura moins pour financer la santé, il est donc assez logique de considérer qu’effectivement se pose un problème et que la solution est plutôt dans l’élimination des sources modernes de mauvaise santé (pollution, stress, alimentation trop industrielle) que dans une fuite en avant technologique qui se heurtera à la limite physique des ressources. L’article de biosphère me semble bien poser les problèmes.