Nos présidents se font un point d’honneur de glorifier la technique dite « de pointe ». De Gaulle inaugure le sous-marin Le Redoutable (1967), Pompidou vole en Concorde de Paris à Toulouse (1971), Giscard visite la centrale nucléaire de Gravelines (1980), Mitterrand inaugure le TGV (1981), Emmanuel Macron adoore « le TGV, Ariane, le Concorde et le nucléaire. »
Jean-Baptiste Fressoz : « Difficile de trouver dans ce panthéon une technologie qui ait rendu les Français plus prospères. Mais il s’agit de valoriser par la technologie le patriotisme des électeurs. Le Concorde fut un formidable fiasco, quatorze exemplaires en tout et pour tout. Le TGV a renforcé le tropisme parisien : huit trajets à grande vitesse sur dix commencent ou finissent dans la capitale. »
Moriarti : Moi dit Fressoz, du haut de ma « Recherche » je vous garantis que Macron retarde, il a tout faux. Le Monde ne devrait pas jouer le jeu de ces donneurs de fausses leçons soi disant rehaussés par leurs titres universitaires. En quoi ces titres les qualifient ils pour parler de ces sujets ? En rien. Ce monsieur le prouve.
Mle @ Moriarty : J’adore votre argumentaire ! Vous avez dénigré le messager sans jamais donner des arguments contre le message. Votre commentaire peut se résumer à : il est nul parce qu’il est nul.
Biosphere : L’innovation technologique et sa démesure mérite mieux que ces coups de griffes. L’économie de la promesse technologique n’est que l’avatar contemporain des paradis religieux et des utopies sociales des siècles antérieurs. Cette promesse doit contenir un tiers de prouesse scientifique, un tiers de rêve de progrès humain for good (pour le bien), et un grand tiers de profitabilité exponentielle. Et tout problème posé par la technique est réglé par la promesse… d’une nouvelle technique. Le progrès technique est présenté comme un dogme indiscutable par l’ensemble des dirigeants et des médias. Il a infusé dans l’état d’esprit de la population, « on trouvera bien quelque innovation pour s’en sortir ». Quand on l’élève au rang d’un culte, toute remise en cause, tout débat rationnel deviennent impossibles et ceux qui osent élever la voix sont aussitôt considérés comme des apostats. Nous sommes dans la configuration que décrivait Jacques Ellul, dès 1960, dans La technique ou l’enjeu du siècle, où la démocratie n’a plus sa place puisqu’il faut croire sans poser de questions.
Dans un monde où le discours enchanté de la technique s’écarte de plus en plus d’une réalité faite de limites, d’effets indésirables, de pannes et d’accidents, la question de la délibération politique autour des choix techniques ne peut plus être éludée. Vive les techniques douces contre les techniques inappropriées.
Pour en savoir plus grâce à notre blog biosphere :
10 juin 2021, Le temps long et incertain de l’innovation
26 février 2021, Les mirages de l’innovation technologique
25 décembre 2018, Jean-Baptiste Fressoz annonce l’apocalypse joyeuse
J-B Fressoz est historien des sciences et des techniques. Et aussi de l’environnement.
Moriarti ne voit pas l’intérêt de cette discipline (cette «Recherche») et il reproche au Monde de «jouer le jeu de ces donneurs de fausses leçons soi disant rehaussés par leurs titres universitaires».
En suivant Mle lui dit que son commentaire est nul. NUL pour la seule et simple raison qu’il dénigre le messager «sans jamais donner des arguments contre le message». Est-ce là un argument ?
L’argument de Mle se résume à : «il est nul parce qu’il est nul».
Moriarti aurait pu lui répondre : «Toi aussi t’es nul !»
Et ainsi de suite, ce qui aurait été encore plus nul.
Remarquons que nos échanges se résument souvent à ça : il est nul parce qu’il est nul.
C’est vrai qu’il est nul, le commentaire de Moriarti. Mais encore ? Il aurait été donc bien que Mle argumente, et nous en dise plus. Comme le fait Biosphère, qui lui argumente.
Si Biosphère argumente c’est parce qu’il a des billes (des éléments, des connaissances), parce qu’il a lu Jacques Ellul (entre autres) et parce qu’il voit parfaitement le caractère sacré attribué à la technoscience.
Moriarti ne connaît probablement pas Ellul. Et ce n’est peut-être pas sa faute. Probable aussi qu’il soit comme beaucoup d’entre nous, en adoration devant toutes ces innovations (à la con). Et qu’il croit, comme on peut croire en Dieu, à ce Progrès qui progresse pour des siècles et des siècles amen. En tous cas et en attendant, il nous montre là que son imaginaire et sa réflexion sont comme celles de nos présidents, en panne.