La sobriété est devenue une nécessité absolue… qui reste pourtant l’angle mort de notre société de consommation. La simplicité volontaire de certains n’est qu’un premier pas, les politiques publiques doivent soutenir le mouvement général de basculement. Pour faire passer la purge des économies d’énergie et de la sobriété partagée, non seulement les politiciens devraient imposer un revenu maximum admissible (3 fois le salaire minimum par exemple), mais ils devraient rendre obligatoire à l’école l’apprentissage de la tempérance. Quant aux parents, ne pas offrir de cadeaux pour Noël serait un grand pas dans le bon sens.
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Perrine Mouterde : Plusieurs « scénarios » visant à atteindre la neutralité carbone, celui de négaWatt, du Réseau de transport d’électricité, de l’Ademe ou de l’Agence internationale de l’énergie (AIE). Il en ressort un messages convergents, cet objectif exigera de réduire drastiquement nos besoins. Même le gouvernement français le dit par le biais de sa stratégie nationale bas carbone, il faut une réduction par deux de la consommation globale d’énergie. Or s’interroger sur ces besoins ne va pas de soi. L’énergie n’a plus de visibilité, de réalité physique, ce que l’on consomme est totalement abstrait…
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La nécessité de réfléchir collectivement à la notion de sobriété s’impose, mais cette notion, largement absente du débat public, est éminemment clivante. Sommes-nous prêts à remettre en cause la manière dont nous nous déplaçons, dont nous occupons nos logements, dont nous mangeons ? Ou souhaitons-nous préserver nos modes de vie actuels, quitte à rendre l’atteinte de nos objectifs climatiques impossible ? La sobriété, ce n’est ni un scénario du Moyen-Age ni un scénario où les trains s’arrêtent quand il n’y a plus de vent pour faire tourner les éoliennes, mais c’est clairement un scénario où le pacte de société n’est plus le même. Espérer atteindre la neutralité carbone implique de sortir totalement des fossiles, de développer les énergies renouvelables non électriques, de réformer les systèmes agricoles et alimentaires, de préserver les forêts et les océans qui sont des puits de carbone, de repenser le modèle de développement économique, l’organisation du territoire… Le défi est systémique et toutes ses dimensions doivent être prises en compte.
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Il y a urgence à agir, mais cela ne peu se faire qu’avec l’assentiment de la population et c’est là où le bât blesse. Un objectif de baisse du pouvoir d’achat n’a aucun chance d’aboutir. Et pour l’heure, on ne peut que s’inquiéter de la pauvreté des discussions sur l’écologie dans la campagne présidentielle. Il y a incapacité des Français et des dirigeants à se projeter dans l’avenir et à porter une vision de ce que pourrait être une société de la neutralité carbone en 2050.
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Notre plus ancien article sur la question de la sobriété :
13 janvier 2009, sobriété énergétique ?
– « il est en revanche certain qu’atteindre la neutralité carbone exigera de réduire drastiquement nos besoins. Et ce n’est pas seulement négaWatt, apôtre de la sobriété, qui le dit : le gouvernement français, par le biais de sa stratégie nationale bas carbone, prévoit une réduction par deux de la consommation globale d’énergie.» (Perrine Mouterde, Le Monde)
Ne faisons pas dire au gouvernement français ce qu’il ne dit pas. Tout le monde sait que ce gouvernement carbure au «et en même temps», il croit que nous pourrions diviser par deux la consommation d’énergie tout en continuant avec la Croissance. Or la Croissance nécessite toujours plus d’énergie. Et en même temps de nouveaux «besoins», dans le genre de ces innovations (à la con) pour «économiser» l’énergie.
Dans son rapport publié en novembre dernier (Energy Efficiency 2021) l’Agence internationale de l’énergie (AIE) annonce que les progrès d’efficacité énergétique dans le monde pourraient plus que doubler par rapport aux niveaux actuels. Rendant ainsi crédible le fameux «et en même temps» ainsi que la non moins fumeuse Neutralité Carbone en 2050. En attendant, on peut toujours y croire. Pas moi en tous cas.
Toujours selon l’AIE, ces 5 dernières années l’intensité énergétique a été réduite de seulement 1,3% par an. Soit près de 3 fois moins que cette évolution jugée nécessaire et indispensable. L’AIE croit donc qu’avec plus d’investissements (de Pognon) ça devrait le faire. Pas moi en tous cas. Les gains faits ici ou là sont immédiatement engloutis ailleurs par l’effet rebond.
-« non seulement les politiciens devraient imposer un revenu maximum admissible (3 fois le salaire minimum par exemple), mais ils devraient rendre obligatoire à l’école l’apprentissage de la tempérance. [etc.] » (Biosphère)
Oui, entre autres. L’apprentissage de la tempérance passe par l’enseignement de la philosophie, qui reste la discipline reine pour apprendre à penser et remettre les choses à leur juste place. L’énergie devrait également être enseignée dès la maternelle. Ainsi que le port du préservatif, bien sûr 😉
La sobriété ne pourra être acceptée et généralisée que si nous faisons disparaître le démesure (l’hubris). Encore faut-il la voir, d’où cette absolue nécessité d’y voir clair afin de ne pas se perdre dans des combats perdus d’avance.
Même si en termes d’émissions de CO2 ou d’impact écologique certaines choses semblent ne pas peser bien lourd, n’allons surtout pas croire que ces choses là ne constituent pas des priorités. La Priorité. Le trafic aérien, les prix bas aberrants, les jets privés, les yachts, les Rolex, les grosses fortunes, les grosses voitures, les courses de voitures etc. tout ça a des conséquences bien plus graves que ces quelques pour cents mis trop simplement dans l’équation de la fumeuse «Neutralité Carbone».
Parce qu’en attendant, quoi qu’on dise et quoi qu’on fasse, les fortunes et le train de vie indécents de quelques uns, les champions, les premiers de cordées, la compétition, la pub pour tout ça et tout le reste, voilà ce qui fait rêver et anime des milliards de gens.
Tout ça nous est présenté comme la réussite, le bonheur, le progrès, le modèle à suivre, la fin de l’histoire etc. Alors qu’en fait tout ça ne représente que la Démesure.
Je suis bien d’accord avec cette vision de la responsabilité des riches dans la destruction de la planète de par l’effet spirale infernale qu’ils exercent sur les couches sociales immédiatement inférieures et ainsi de suite (Hervé Kempf). Je suis assez convaincu qu’il ne serait pas aussi difficile qu’on le dit de rompre ce cycle mortifère dans la mesure où les gens en souffrent en général, sans forcément en avoir conscience.