Le passage à une alimentation plus carnée dans notre lignée serait le moteur de la croissance de notre cerveau. Alors, les végans font-ils fausse route ?
Hervé Morin : Notre cerveau a un appétit ogresque, consommant 20 % de l’énergie que nous ingérons – et jusqu’à 70 % durant la petite enfance. Les anthropologues ont fait l’hypothèse que notre encéphale a bénéficié d’un changement de régime alimentaire, plus carné, à un moment de notre évolution. La proportion d’azote 15 – ayant quinze neutrons dans son noyau atomique – par rapport à l’azote 14 y augmente en effet à mesure que l’on monte dans la chaîne alimentaire, c’est-à-dire en fonction de la proportion de viande ingérée. Une nouvelle technique d’analyse de la concentration de l’isotope de l’azote dans l’émail dentaire a permis de déterminer que la consommation carnée était encore minimale chez les australopithèques sud-africains il y a près de 4 millions d’années. Les sept australopithèques sud-africains testés se situent en moyenne au même niveau que chez les herbivores contemporains.
Une interrogation centrale est de déterminer pourquoi, si l’apport de la viande a été aussi décisif dans l’évolution de notre cerveau, les espèces carnivores n’ont pas bénéficié de cet avantage à un tel degré. Un gros cerveau pour les humains prédateurs est encore plus nécessaire que pour les prédateurs animaux, car pour être efficaces comme prédateurs, les humains doivent développer des stratégies de chasse en groupe, des armes pour tuer et des outils pour dépecer. Donc une gamme d’activités cognitives que beaucoup de prédateurs animaux effectuent grâce à des adaptations biologiques – dents, griffes, vitesse, etc., plutôt que culturelles.
Le point de vue des écologiste omnivores
Reste tout de même à vérifier si cette étude n’est pas financée par un groupe d’influence d’éleveurs bovins, mais si cette découverte est confirmée, les véganes n’auront plus qu’à faire profil bas…
Nos ancêtres ont été d’abord charognards, dans le climat chaud de la savane , la viande reste consommable pour l’homme pendant 48 heures. La viande contient toutes les protéines nécessaires dans un volume réduit. C est son grand avantage pour un cerveau quia besoin de beaucoup d énergie . Homo sapiens a été un chasseur cueilleur, avec une dentition d’omnivore. Si la viande n’a pas fait le cerveau, produit de l’évolution, le cerveau a permis d’accroître la part carnée de son alimentation. La chasse en groupe, en meute comme les loups, devait demander beaucoup d’efforts et une bonne organisation. On sait déjà que le chimpanzé, notre plus proche parent, mange à l’occasion de la viande, et élabore des stratégies de chasse en groupe pour capturer, tuer et manger des proies. Quand il vit librement dans la nature, le chimpanzé « consomme en moyenne 65 gr de viande par jour pour un adulte …
Et si c’est la viande qui a contribué à l’éveil du cerveau, que va-t-il advenir quand nous n’aurons plus que les protéines végétales ? Nous retournerons là d’où nous venons ? A l’heure où les réseaux sociaux et les consoles de jeu dominent la pensée humaine, pas besoin de changer de régime alimentaire pour constater une liquéfaction du cerveau…
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extraits : « L’homme consomme, engloutit à lui seul plus de chair que tous les animaux ensemble d’en dévorent ; il est donc le plus grand destructeur, et c’est plus par abus que par nécessité ; au lieu de jouir modérément des biens qui lui sont offerts, au lieu de les dispenser avec équité, au lieu de réparer à mesure qu’il détruit, de renouveler lorsqu’il anéantit, l’homme riche met toute sa gloire à consommer, toute sa grandeur à perdre en un jour à sa table plus de biens qu’il n’en faudrait pour faire subsister plusieurs familles ; il abuse également des animaux et des hommes, dont le reste demeure affamé, languit dans la misère, et ne travaille que pour satisfaire à l’appétit immodéré et à la vanité encore plus insatiable de tous ces riches qui, détruisant les autres par la disette, se détruisent eux-mêmes par les excès. »
Buffon (1707-1788), extrait de son article sur le bœuf
Repas, manger est un acte politique
extraits : « Si j’utilise une feuille de thé, un peu de sucre et de l’eau bouillante, puis que j’en bois le produit, je soutiens le prix du thé et du sucre et, plus indirectement, j’interfère dans les conditions de travail au sein des plantations de sucre et de thé dans les pays en voie de développement. Pour chauffer l’eau, j’ai probablement utilisé du bois ou de l’électricité ou un autre type d’énergie, et ce faisant, je prends part à la grande controverse concernant l’utilisation de l’énergie. J’utilise de l’eau et prends aussi part à une myriade de problèmes politiquement brûlants qui concernent les réserves d’eau. J’ai donc une influence politique quotidienne. Je peux par exemple penser que les pays en voie de développement ne doivent pas exporter le thé, mais plutôt produire plus de nourriture… »
[Arne Naess, Ecologie, communauté et style de vie (1ère édition 1976, éditions MF 2008)]….
Écovégétarien, flexitarien, végétalien…
extraits : Certains se qualifient maintenant de flexitarien pour signifier qu’ils sont des mangeurs occasionnels de viandes. Nous aurions besoin d’un mot plus signifiant, celui d’« écovégétarien », que je vous invite à adopter dans la vie de tous les jours. Une attitude écoresponsable devrait donc nous conduire à diminuer d’environ de moitié notre consommation de produits animaux pour que la part des calories animales dans nos assiettes passe de 30 % à 15 % des calories totales. A titre indicatif, cela équivaut à consommer de la viande (environ 100-120 g) seulement quatre ou cinq fois par semaine, du poisson une fois par semaine, des produits laitiers quatre ou sept fois, des œufs deux à quatre fois et de la charcuterie quatre ou cinq fois par mois seulement….
Locavore, l’art de cuisiner dans le futur
extraits : Les locavores mangent local. Tout ce qui n’a pas été produit, préparé et emballé dans un rayon de 160 km (ou 30, ou 200) est interdit de séjour dans les assiettes de ceux qui adoptent la façon de manger locavore. Le New Oxford American dictionary a fait de locavore son mot de l’année 2007. Ce sera le mot d’ordre du XXIe siècle. Pour économiser l’énergie et conforter la sécurité alimentaire, il faudra produire et consommer le plus possible localement sa nourriture. Mais le locavore que nous deviendrons tous de gré ou de force après le choc pétrolier n’aura pas la vie facile. Manger local, ce sera souvent faire vache maigre, avec de préférence un régime très végétarien…
Manger cru ou manger cuit, un débat pas si anodin
extraits : Un écologiste conséquent devrait se pencher sur tous les actes quotidiens, à commencer par celui de manger : cru ou cuit ? Pour Angela Sirigu, « L’expansion de notre cerveau, très gourmand en calories, s’est effectuée au détriment du système digestif, dont la taille a rétréci en même temps que nous commencions à cuire les aliments, ce qui a permis de réduire l’utilisation d’énergie pour la mastication et la digestion. La cuisson a procuré un avantage reproductif aux groupes humains. » Les précieux nutriments (vitamines, oligo-éléments, minéraux, enzymes…) que nous croyons épargner en mangeant cru, nous coûtent en fait cher car leur assimilation n’est pas garantie. pour qu’un aliment soit facilement transformé en énergie, il faut qu’il soit, au moment de son absorption, à la température de l’estomac. En d’autres termes, les aliments crus demandent davantage d’effort à l’estomac pour la digestion. D’ailleurs les céréales doivent impérativement être complètement cuites pour être bien digérées….