La question démographique porte son lot de fantasmes et d’approximations. Voici un échange qui reflète une bonne partie des opinions sur la controverse nataliste/malthusien.
Alain. Je suis et resterai, par principe, profondément hostile à toute politique – nécessairement autoritaire – visant à contrôler la démographie.
Michel. Ta phrase pose d’abord un problème de forme, je ne connais rien qui ne puisse bouger, et surtout pas une opinion personnelle. Au niveau du fond, dire qu‘une politique de planning familial est « nécessairement autoritaire » ne repose pas sur des faits valables partout et toujours.
A. L’exemple de la politique chinoise, est pour moi une parfaite justification de ma position. Je ne peux en effet admettre qu’un gouvernement puisse, de manière autoritaire, réguler ma vie amoureuse et ma vie de parent.
M. Les politiques malthusiennes autoritaires dans certains pays n’ont rien à envier aux.politiques natalistes coercitives dans d’autres pays. Les exemples de Ceaucescu, de Khomeini et de bien d’autres le prouvent. En France, la loi du 31 juillet 1920 réprimait la provocation à l’avortement et à la propagande anticonceptionnelle. L’avortement était considéré comme un crime et passible de la cour d’Assises. C’était bien là une manière de réguler la vie amoureuse et la vie de parent. Nous ne pouvons je pense qu’être d’accord sur le fait que la liberté de choix des parents en matière de fécondité est seule digne d’une démocratie véritable. Encore faut-il que les couples se comportent en véritable citoyens, conscients que leur désirs d’enfant peuvent impacter à la fois le devenir de cet enfant et le bien-être collectif. Les droits bien compris s’accompagnent de devoirs si on veut préciser la notion de liberté.
Lire, Iran, le planning familial en berne
A. Ceci étant j’admets que la question de la surpopulation (encore faudrait-il définir par rapport à quel seuil ?) soit posée dans le contexte des dérèglements climatiques que nous observons.
M. Il est vrai que la question de la capacité de charge des territoires est une question qui demande des réponses. Par exemple quel niveau de population mondiale est viable et vivable dans l’avenir ? Les chiffres sont très variables selon les analystes, allant de 1 milliard de personnes (la population en 1804, avant la révolution industrielle) à bien plus de 10 milliards si on accepte de considérer l’espèce humaine comme des sardines en boîte. Ce qu’on sait déjà de manière scientifique (GIEC, IPBES, ASPO, etc.), c’est que les seuils de durabilité sont dépassé, et ce n’est pas seulement à cause des dérèglement climatiques. On le sait statistiquement depuis le rapport au club de Rome de 1972 sur les limites de la croissance.
Lire, démographie mondiale et capacité de charge planétaire
Lire, Les limites de la croissance ou rapport Meadows (1972)
A. L’observation montre que dans tous les pays où les questions sociales sont prises en compte, où la pauvreté est réduite, où l’éducation est généralisée à tous les enfants, où le travail des femmes est accessibles à toutes, quel que soient leurs conditions, où la parité homme/femme dans tous les domaines de la société est une préoccupation, où la contraception est accessible à toutes les femmes gratuitement…… he bien! dans tous ces pays on constate une diminution de la natalité.
M. Là aussi nous ne pouvons qu’être d’accord. Mais cet idéal atteint par le développement n’est pas généralisé à tous les pays d’une part, et d’autre part on prévoit que les conditions même de développement dans le futur sont bien compromis par la raréfaction des ressources. Sans prise de conscience malthusienne, sans aide publique au développement orientée vers le planning familial, on ne changera pas la situation des pays en perdition parce que surpeuplés.
Lire, Planning familial, que disent les chiffres
A. Cette diminution de la natalité est toutefois contrecarrée par « l’importation » d’émigrés, qu’en plus on peut payer à moindre coût !
M. Est-ce à dire qu’il faut arrêter l’immigration en France parce que la fécondité moyenne des entrants est plus importante que celle des autochtones ?
Lire, Problème, anti-migrants ou anti-immigration ?
A. En clair, je réfute la notion de « malthusianisme » et ce d’autant plus que, dans le monde actuel, les pays pauvres seraient les premiers concernés par une politique malthusienne.
M. Encore faut-il s’entendre sur le terme « malthusianisme ». Malthus, dans ses essais sur le principe de population, a simplement montré à partir de 1798 que si on laisse faire le libre cours des choses, la population humaine augmente plus vite que les ressources alimentaires. Comme agriculture est soumise structurellement aux rendements décroissants, il faut donc faire attention au nombre d’enfant qu’on met au monde. Malthus est donc un écologiste avant la lettre, on ne peut être plus nombreux que le milieu qui nous fait vivre. Je ne crois pas qu’on puisse échapper durablement à cette réalité biophysique, nous devrions tous être malthusiens. Tous les pays sont concernés par la maîtrise de la fécondité, pas seulement les pays pauvres. Un bébé français de plus, c’est dans le contexte actuel un poids démesuré sur la planète. En cas effondrement prévisible de la société thermo-industrielle, la France et tellement dépendante de ses importations d’énergies fossiles et autres matières qu’on se rendra compte alors de notre surpopulation absolue avec 67 millions d’habitants. Le spécialiste en énergie Jean-Marc Jancovici est une aide précieuse pour étayer ce genre de perspectives..
Lire, Un bébé de plus en France, une charge insupportable
Lire, Jean-Marc JANCOVICI devient malthusien
A. Je privilégie le combat politique pour atteindre les objectifs, qu’à titre d’exemples, je viens d’indiquer. J’ai conscience qu’il s’agit là d’une position difficile à tenir face à toutes les contraintes qu’elle soulève (Quels investissements privilégier ? Quelle politique industrielle? Quelle R&D ? Quelle agriculture ? …).
M. Autre point d’accord partiel, il faut donc agir politiquement. Or aucun parti ne porte un programme malthusien en France, à part le MEI de Waechter. Il y a aussi le combat associatif, mais en France seule Démographie Responsable porte une vision malthusienne des choses. Et nous savons pourtant que les voies de l’avenir sont non seulement étroites, difficile à définir et encore plus à mettre en œuvre.
Lire, Adhérer à une Démographie Responsable
A. Au risque de te choquer, je suis arrivé à la conclusion que les écologistes sont les « bolcheviques du XXI siècle ».
M. Cette phrase n’a pas de sens puisque tout le monde est devenu écologiste. Le chapitre « environnement » sera présent dans tous les programmes des présidentiables pour 2022. On ne peut plus se présenter devant l’électorat sans une composante (plus ou moins forte il est vrai) d’écologisme. Le concept de « bolcheviques du XXI siècle » est du même type que les saillies du type « Ayatollahs de l’écologie » et autre « Khmers verts ». Cela ne fait avancer ni la réflexion, ni l’intelligence collective.
A. L’observation de l’Histoire me montre que, partant d’idées « généreuses » et « nécessaires », tous les régimes qui se sont appuyé sur ces idées ont viré à la dictature: l’URSS, Cuba, Nicaragua, Venezuela, Algérie, Cambodge, Nigeria… et d’autres ! Finalement nous sommes aujourd’hui dans une situation où ce sont les populistes et les extrêmes droites qui sont sur le devant … et le risque existe même en France !
M. Comparaison en vaut pas raison. L’écologie politique possède l’immense avantage par rapport aux idéologies de « libération » de reposer sur toutes les avancées de l’écologie scientifique. Un écologiste n’est rien s’il ne fait pas référence à des écologues, comme un bon économiste est obligatoirement aussi un bon écologiste. Le gros problème c’est que
nos démocraties de masse en appellent le plus souvent à un leader bien-aimé quand les difficultés s’accroissent. Or il y a peu de probabilité que cette dictature soit éclairée et s’exerce pour atteindre le meilleur rapport entre les humains et la nature. C’est le plus souvent la politique des boucs émissaires, les juifs, les étrangers, les différents. Tu as raison, cette tendance mortifère est malheureusement visible dans tous les pays, mais ce n’est en rien la faute de ceux qui œuvrent pour une démographie responsable.
Lire, Une évolution fatale vers le totalitarisme
A. Je te confirme aussi mon désaccord total avec cette phrase: « être anti-malthusien, c’est être de fait nataliste ».
M. Phrase encore dans l’attente de ton argumentation… Du côté malthusien, il suffit de renvoyer les opposants aux conséquences néfastes d‘une position nataliste : « Comme le prévoyait Malthus, puisque vous ne voulez pas d’une maîtrise de la fécondité humaine, alors vous aurez les épidémies, les guerres et/ou les famines. »
Lire, Malthusien ou nataliste, faut choisir
A. Je suis contre ce type de phrase: « Vous ne voulez pas une maîtrise de la fécondité humaine, alors vous aurez les épidémies, les guerres et/ou les famines ». Les épidémies ont toujours existé.
M. La réalité actuelle montre déjà la multiplication des guerres et des situations de famine qui sont en corrélation avec des surpopulations relatives. La notion d’espace vital, « lebensraum » hitlérien pour rappeler de mauvais souvenirs, a de beaux jours devant elle. Quant aux épidémies, relire les explications démographiques des zoonoses dans ma réponse à ta critique qui suit.
A. De plus, pour moi tu es dans un autre déni qui est celui de penser que les épidémies sont la conséquence de la techno-science. Relier l’apparition des épidémies à la démographie est une position idéologique.
M. Je n’ai jamais dit parlé d’une cause technico-scientifique au SARS-Cov2. A moins d’un virus chinois trafiqué dans le laboratoire de Wuhan, ce dont on n’a actuellement aucune preuve, il s’agirait d’une zoonose. Les grandes pandémies sont des maladies qui se propagent d’espèce en espèce et dont la diffusion est en grande partie dépendante des bouleversements écologiques provoqués par les humains. L’urbanisation, l’agriculture industrielle et l’expansion humaine entraînent la dégradation et le rétrécissement sans précédent des milieux anciennement peu anthropisés. Cette situation a eu pour effet que des espèces sauvages réservoirs de pathogènes se sont trouvées en contact beaucoup plus intense avec des humains vivant dans des habitats beaucoup plus denses… Relier l’apparition des épidémies à la démographie est une position réaliste. Tu m’as dit d’ailleurs que « les effets des épidémies seront d’autant plus importants que la densité des populations sera élevé. » Il s’agit en fait d’une causalité circulaire, la cause étant aussi une conséquence.
A. je te recommande la chronique de Philippe Bernard (Le Monde du 16-17 janvier 2022 ). Pour moi cette chronique place tes incantations malthusiennes dans le déni petit bourgeois (au sens léniniste du terme) à l’égard des conditions de vie des femmes des pays à forte natalité.
M. Je ne comprends pas cette critique. En effet je suis d’accord avec l’analyse de Philippe Bernard qui tranche de manière judicieuse avec la vulgate habituelle (nataliste) du MONDE en matière démographique, cf. mon article sur mon blog biosphere:
Je pense qu’il eut mieux valu titrer ça «Petit cours pour démagogues débutants». Voire «Petit cours pour dogmatiques débutants». Parce que si d’un côté la question démographique porte son lot de fantasmes et d’approximations, d’un autre elle charrie son flot de dogmatisme et de manipulations. Le dogmatique se reconnait à sa vision binaire. Ainsi qu’à sa façon de nous pousser à choisir un camp (nataliste ou malthusien), en insistant sur cette logique qu’il croit imparable :
– « Si tu n’es par POUR… alors c’est que tu es CONTRE ! »
A : … je suis arrivé à la conclusion que les écologistes sont les «bolcheviques» du XXI siècle.
M : Cette phrase n’a pas de sens puisque tout le monde est devenu écologiste. Le chapitre «environnement» sera présent dans tous les programmes des présidentiables pour 2022. […]
Si les écolos sont les bolchéviks, alors je peux dire que les malthusiens sont les mencheviks.
(Littéralement menchevik signifie «minoritaire»). Notez combien je suis gentil, je pars du postulat que (tous) les malthusiens sont écolos. 🙂
Blague à part, ces deux phrases de M ont encore moins de sens que celle de A.
En effet tout le monde est devenu «écologiste». En effet l’environnement est dans tous les programmes et «programmes» des présidentiables. Nous voilà donc bien avancés.
La belle affaire ! La bonne blague oui plutôt ! Et en quoi sommes-nous plus avancés ?
En quoi cela fait-il réellement avancer la réflexion ? Sans parler de cette fameuse intelligence collective. Au risque de choquer… je suis arrivé à penser qu’il vaudrait mieux qu’on parle moins d’écologie. Mais que lorsqu’on en parle, on en parle alors comme il faut. Et non pas pour raconter n’importe quoi, pour nous enfumer etc. Et cela vaut pour d’autres sujets, la liberté par exemple.
– « Vous ne voulez pas une maîtrise de la fécondité humaine, alors vous aurez les épidémies, les guerres et/ou les famines»
Vous ne voulez pas de la dictature des Khmers Verts… alors vous aurez les épidémies, les guerres et/ou les famines. Vous ne voulez pas du nucléaire… alors vous aurez les épidémies, les guerres et/ou les famines. Vous ne voulez pas du Vaxin… alors vous aurez une vie de merde ! La manipulation consiste ici à prendre la forme d’une démonstration logique (si =>alors), alors que le seul levier qui agit c’est la peur.
Si tu ne fais pas ceci… alors t’es mort ! Autrement dit, la bourse ou la vie !
On appelle ça du chantage. Ou même du terrorisme.
Au petit détail près que les bolcheviques tuaient, emprisonnaient, refusaient toute opposition alors que les malthusiens proposent que l’humanité s’oriente vers une certaine modestie démographique et ne proposent pas de solutions liberticides. En tout cas tel est le point de vue de Démographie Responsable vous le savez bien, il suffit d’aller sur notre site pour s’en convaincre, vous ne verrez rien qui ressemble à cela.
Je suppose que c’est alors ce qui différenciait les bolchéviks des mencheviks (les écolos des malthusiens). C’est bien connu, les minioritaires sont en général plus modérés. 🙂
Blagounette, c’est blablabla…
sans aucune argumentation,
seulement le plaisir pervers
de déconsidérer autrui.
Et à quoi ça sert d’argumenter ? De toutes façons tout a été dit et redit des centaines de fois. Dialogue de sourds, «débat» miné, pipé ! Parties de ping-pong, voire de bourre-pifs ! Stratagèmes dans l’Art d’avoir toujours raison et d’esquiver les questions. etc. etc. !
Qu’est-ce qu’on peut répondre à la suite de 31 JANVIER 2022 À 13:13 ? N’est-ce pas vrai qu’on ferait mieux de moins parler d’écologie ? D’en parler moins pour en parler mieux ! Et puis et surtout d’oublier Malthus.
De toutes façons, un nataliste (c’est comme ça qu’il faut dire sur Biosphère) peut raconter tout ce qu’il voudra, il peut en remplir des pages, poser et/ou laisser des tas de questions en suspend… Du point de vue d’un malthusien ça ne sera toujours que du blablabla sans aucune argumentation et blablabla.
Maître M : « Encore faut-il que les couples se comportent en véritable citoyens […]
Les droits bien compris s’accompagnent de devoirs si on veut préciser la notion de liberté.»
Je crois entendre là le Grand Emmerdeur en Chef. Je sais très bien que ces marchands de salades, déguisés ici en professeurs de citoyenneté et de liberté, n’ont très envie que de m’attacher, me museler, me stériliser … et à la fin me piquer.