En matière de contraception, Ivan Illich opérait une nette distinction entre le préservatif, objet extrêmement simple dans son principe et son effet, et les contraceptifs chimiques, au mode d’action opaque et qui permettent, dans les relations sexuelles, de faire comme si le lien avec la conception n’existait pas. L’opposition entre contraception et absence de contraception a trop tendance à faire oublier la différence considérable entre le préservatif et la pilule : le premier manifeste le lien entre coït et procréation, la seconde le dissimule. En oblitérant ce lien, la diffusion de pilules contraceptives a joué un rôle important dans le développement des techniques de procréation artificielle.
Illich désapprouva l’interdiction prononcée par des évêques de Porto Rico d’accorder son vote à un candidat qui entendait mettre les préservatifs en vente libre. Ce qui critiquait Illich n’était pas l’opposition au contrôle des naissances en tant que telle, mais l’incohérence de cette opposition dans un monde ou, par ailleurs, on admettait toues sortes d’innovations techniques dénaturant l’existence humaine. Il se sentait lié à une Eglise qui avait le courage de dire : « Ceci est contre-nature ! »
Le problème, ajoutait-il, c’est que l’interdit pointe sur le mauvais objet. Mieux vaudrait condamner les moyens de transports motorisés, qui exercent leur monopole sur les déplacements « de telle sorte que les jambes, qui nous ont été données pour pérégriner sur la terre, s’atrophient en appendices de l’accélérateur et du frein. L’Eglise à laquelle j’appartiens dénonce haut et fort les préservatifs qui contrecarrent le fonctionnement naturel d’un organe, mais elle ne se rend pas compte que le fonctionnement naturel d’autres organes se trouve tout aussi entravé – du reste préservatifs et pneus sont tous faits de la même matière ! »
In Une question de taille d’Olivier Rey
(Stock 2014, 280 pages, 20 euros)
Homo homini lupus (l’Homme est un loup pour l’Homme, citation qui date de 195 avant notre ère !)… mais pas suffisamment. Les prédateurs sont généralement indispensables à la survie de l’écosystème dans lequel ils se situent. En ce qui concerne l’espèce humaine, les guerres n’ont pas un effet suffisant sur la réduction de population et le relatif équilibre avec quelques bactéries comme celle de la peste et quelques virus comme celui de la variole a été balayé par le progrès médical. On pourrait dire que l’écosystème planétaire essaye, le VIH, puis les virus de grippe aviaire, puis Ebola, mais en vain. Notre espèce s’est donc hissée au sommet de la chaîne alimentaire, pratiquement sans prédateur, alors qu’elle n’a pas adopté le comportement reproducteur parcimonieux d’un supercarnivore de sommet de chaîne. Elle doit donc entraîner la disparition de son écosystème, à moins que… la raison n’intervienne ? Des écologistes peu responsables (dont votre serviteur) pensent que l’écosystème planétaire ne peut supporter 9 milliards d’humains, alors…
Prof Ghislain (biologiste)