Agir contre les TGV, est-ce terrorisme ou bon sens ?

La neutralité d’un journaliste n’existe pas. En matière d’écologie, il y a des raisonnements superficiels et d’autres plus profonds. Prenons le journaliste Philippe Ridet qui parle du TGV: « L’écrivain italien Erri De Luca n’a jamais fait mystère de son opposition à la construction de la ligne à grande vitesse Lyon-Turin… Le site est sous protection de la police et de l’armée, qui tentent d’empêcher les attaques dont le chantier est régulièrement la cible de la part de certains opposants… Erri De Luca,  » les sabotages et les actes de vandalisme sont nécessaires pour faire comprendre que le TGV est un chantier inutile et nocif. »Les déclarations d’Erri De Luca concentrent les critiques… Les responsables du projet dénoncent dans la presse une « minorité archaïque qui ne représente qu’elle-même » La décision d’un patron de fermer son entreprise engagée sur le chantier du TGV à la suite d’un acte de malveillance a choqué, dans une Italie où le taux de chômage avoisine les 12 % de la population… Pour les opposants au chantier, au contraire, les propos de l’écrivain sont une bénédiction… Les propos d’Erri De Luca donneront-ils une nouvelle visibilité et une noblesse retrouvée au combat des « No TAV » ? »*

L’article semble objectif dans la mesure où il reprend les différents points de vue. Il n’est pas pertinent puisqu’il ne dit rien du débat de fond sur les lignes à grande vitesse. En France, les conseillers municipaux d’Albon dénonçaient déjà en 1833 l’effet tunnel : « Le chemin de fer est incapable d’être lucratif sauf aux grandes villes… tous les pays intermédiaires en souffriront par le défaut de communication ». Un TGV ne fait qu’accroître le désert entre deux mégalopoles alors même que les lignes secondaires sont délaissées. Il se situe dans l’ivresse de la vitesse alors que la pénurie d’énergie à venir obligera à limiter les déplacements et à prendre son temps. De plus une emprise au sol de 40 mètres en largeur sur des centaines de kilomètres n’est pas négligeable à cause de la fragmentation des terres à usage humain et de la délimitation des espaces pour la faune et la flore. Il faut construire des voies dédiées pour ces bolides, des murs antibruit, araser des montagnes, construire des viaducs et des tunnels surdimensionnés, etc. Le coût de construction est au minimum trois fois celui d’une autoroute 2×2 voies.

Bien entendu, cela ne veut pas dire que la circulation en automobiles individuelles est plus acceptable que le TGV. Avec les autoroutes il s’agit toujours de recherche de vitesse et d’emprise sur les terres. Vivement le temps où la circulation se fera à pied ou en vélo sur les rares vestiges de la civilisation thermo-industrielle qui n’auront pas été recouverts par la végétation.

* LE MONDE Culture&Idées du 7 septembre 2013, le « No TGV » d’Erri De Luca