Haïti peut être aidé, mais après?
Les écologistes profonds sont quasiment les seuls à se poser les vraies questions à propos des souffrances en Haïti : « Que se passera-t-il dans un monde aussi inégal qu’aujourd’hui, quand les catastrophes liées au changement climatique se multiplieront ? » La réponse est déjà en cours d’exécution, ce sont des guerres du climat. « Pourra-t-on supporter des aides d’urgence de plus en plus répétées ? » La réponse est NON. D’autant plus que les victimes du climat ne seront pas la seule source des difficultés géopolitiques. La raréfaction du pétrole va par exemple bloquer matériellement et financièrement les pays anciennement industrialisés, ces donateurs en dernier recours qui sont déjà si endettés. Bien entendu, il vaudrait mieux prévenir les catastrophes. Mais cela suppose d’en terminer avec la civilisation thermo-industrielle. Cela n’est pas à l’agenda des décideurs de ce monde, on l’a bien vu à Copenhague.
Alors on engage aujourd’hui des actions humanitaires, on décide des interventions militaires pour étendre la démocratie. Il se pourrait qu’un jour ce modèle occidental, avec toutes ses conquêtes en matière de démocratie, de libertés, de tolérance, de créations artistiques, apparaisse aux yeux d’un historien du XXIIe siècle comme un vestige incongru. Si du moins il y a encore des historiens au XXIIe siècle.
Ce modèle de société, si implacablement efficace qu’il ait été pendant 250 ans, parvient maintenant à une limite de son fonctionnement, une limite que personne ou presque n’avait soupçonnée si proche et si nette. Comme les ressources vitales s’épuisent, il y aura de plus en plus d’hommes qui disposeront de moins en moins de moyens pour assurer leur survie. Il est évident que cela entraînera des conflits violents entre ceux qui prétendent boire à la même source en train de se tarir, et il est non moins évident que, dans un proche avenir, on ne pourra plus faire de distinction pertinente entre les réfugiés fuyant la guerre et ceux qui fuient leur environnement. Le XXIe siècle verra non seulement des migrations massives, mais des solutions violentes aux problèmes de réfugiés. La violence a toujours été une option de l’action humaine.
Sur le questionnement d’Hervé Kempf (LeMonde du 17-18 janvier), les réponses d’Harald Welzer (les guerres du climat)
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