François Galichet : « J’ai aidé des personnes à se procurer à l’étranger du pentobarbital, le produit permettant de quitter la vie dignement. J’ai été mis en examen. Pourtant l’assistance au suicide est légale en France. D’abord pour des raisons de principe : le suicide n’étant pas un délit, l’assistance à un acte qui n’est pas un délit ne saurait en être un. C’est pourquoi les poursuites à ce sujet ont toujours recouru au subterfuge juridique d’un autre article du code pénal : celui qui punit la « non-assistance à personne en danger ». Mais l’aide à une personne qui se met volontairement en danger n’est pas punissable, sinon, il faudrait poursuivre les moniteurs d’alpinisme et d’autres sports extrêmes ! Si l’on peut prouver la pleine lucidité et capacité de jugement de la personne, alors il ne saurait y avoir de délit. C’est ce qu’a jugé, en novembre 2016, la cour d’appel de Lyon (jugement confirmé en cassation). Il a acquitté Jean Mercier, qui avait aidé sa femme à prendre les médicaments lui permettant de mourir quand elle l’a souhaité. Cela n’a pas empêché les juges du parquet de Paris de poursuivre les dix membres de l’association Ultime liberté, dont je suis, pour « complicité d’acquisition et d’importation de substances illicites » et « propagande en faveur d’un produit susceptible d’entraîner la mort ». On ne peut donc pas procurer le seul produit permettant une mort douce, non violente, non traumatisante pour les autres, préservant sa lucidité jusqu’au bout (contrairement à la sédation terminale de la loi Claeys-Leonetti), entourée de ses proches.
Il suffirait que le pentobarbital soit susceptible d’être prescrit par un médecin, comme c’est le cas en Suisse et en Belgique, pour que tout obstacle disparaisse et que la France se retrouve, sans voter aucune loi, dans la situation de la Suisse. Ce médecin, choisi par le demandeur, pourrait être assisté par une personne de confiance et des bénévoles membres d’une association agréée, chargés d’accompagner la personne dans sa réflexion et la vérification de sa volonté. Et comme en Suisse, un contrôle a posteriori, éventuellement assuré par un juge, pourrait s’assurer que les conditions de volonté et de lucidité de la personne ont été respectées. »
Du point de vue des écologistes, la liberté de choisir d’avoir ou non un bébé, de faire ou non une IVG, de décider de vivre ou de mourir, nous paraît incontournable. Une société doit valoriser le fait de choisir sa destinée en toute connaissance de cause, envisageant aussi bien l’intérêt commun que son propre cas personnel. Il nous faut une éducation à la responsabilité, une autonomie de choix qui ne se réfère pas à des normes autoritaires imposées au nom de la religion ou d’une morale désuète.
Pour en savoir plus sur le suicide :
5 juillet 2013, Suicide mode d’emploi, voici les nouvelles recettes
extraits : La potion miracle, c’est le pentobarbital de sodium. Il suffit d’en ingérer quelques grammes, mélangés à un verre de jus de pomme, pour s’endormir dans les deux minutes et mourir dans la demi-heure...
28 janvier 2011, assistance au suicide et liberté humaine
extraits : Mourir est d’une banalité extrême. Non seulement il nous faut bien mourir un jour, mais l’espèce humaine s’ingénie à hâter notre trépas : victimes directes et collatérales des conflits armés, assassinats en tous genres, accidents du travail, de la route, domestiques, cancers causés par l’environnement que nous avons fabriqués, etc. Dans ce contexte de morts en série, l’art de la mort volontaire devrait tendre au consensus social, interruption volontaire de grossesse ou assistance médicale au suicide. Mais si en France l’avortement est légalisé, le droit à l’euthanasie pose encore problème…
19 mars 2008, Oui au suicide assisté
extraits : La demande de Chantal Sébire au droit à mourir a été refusée par la justice. Atteinte d’une maladie incurable et très invalidante, le tribunal lui a refusé, en l’état actuel de la législation, la prescription d’un produit létal. La convention européenne des droits de l’Homme fait jaillir la contradiction des principes, le droit à la vie (article 2) d’un côté, le droit à la liberté (article 5) de l’autre…
13 octobre 2007, suicide de Gérard Horst
extraits : André Gorz (de son nom de plume) s’est suicidé le 24 septembre 2007 en même temps que sa femme, Dorine, atteinte depuis longtemps d’une affection évolutive qui s’est doublée d’un cancer. L’écrasante beauté d’une communion dans le suicide de deux amoureux octogénaires ne peut que nous faire penser à Paul Lafargue qui écrivait, avant de se suicider en 1911 avec sa femme Laura Marx : « Sain de corps et d’esprit, je me tue avant que l’impitoyable vieillesse qui m’enlève un à un les plaisirs et les joies de l’existence et qui me dépouille de mes forces physiques et intellectuelles ne paralyse mon énergie, ne brise ma volonté et ne fasse de moi une charge à moi et aux autres. » Ce double exemple montre qu’il n’est pas nécessaire d’aller en Suisse pour avaler un cocktail létal et pratiquer ainsi une forme d’auto-euthanasie…
Quatre longues minutes d’applaudissements ininterrompus ont accueilli le vote de « la loi de régulation de l’euthanasie », approuvée, jeudi 18 mars, par le Parlement espagnol. Par 202 voix pour, 141 contre et deux abstentions, l’Espagne devient le quatrième pays d’Europe, après les Pays-Bas, la Belgique et le Luxembourg, à autoriser les soignants à « mettre fin à la vie d’un patient de manière délibérée, à la demande de celui-ci », et ce, dans les cas de « souffrance grave, chronique et invalidante ou de maladie grave et incurable, provoquant une souffrance intolérable ».
« Aujourd’hui, nous sommes un pays plus humain, plus juste et plus libre : la loi d’euthanasie, amplement demandée par la société, devient enfin une réalité », s’est félicité le chef du gouvernement espagnol, le socialiste Pedro Sanchez,
Je comprends que certains puissent applaudir, et surtout aussi longtemps. En Espagne on les appelle aficionados. Personnellement je n’applaudis pas. Et je ne siffle pas non plus. Même s’il n’y a pas photo, 202 à 141 c’est encore loin de faire l’unanimité. Les débats sont donc loin d’être terminés, même en Espagne.
Pays-Bas, Belgique, Luxembourg, Suisse, Espagne, l’étau se resserre. Si la France ne veut pas donner une image ringarde, si au contraire elle tient à être moderne, il va falloir suivre la Mode. L’Espagne est elle aussi un beau pays, mais elle peut faire beaucoup mieux. Pour aller encore plus loin en matière d’humanité (entendue ici comme compassion = souffrir avec) Pedro devrait maintenant penser à abolir la corrida.
Militer pour le «droit de choisir sa fin de vie», pour le «droit à mourir dans la dignité», autrement dit pour que «l’assistance médicale au suicide» voire l’euthanasie rentre dans le cadre de la Loi française, c’est une chose. Tout à fait respectable.
Par contre aider des personnes à se procurer du pentobarbital (à l’étranger ou n’importe où) , c’est tout autre. Déjà c’est un délit. Les dix militants de l’association Ultime liberté mis en examen sont des délinquants, plus exactement des trafiquants de drogues, il est donc normal qu’ils soient poursuivis.
Pour se justifier François Galichet se réfère à l’acquittement de Jean Mercier et dit :
– « Cela n’a pas empêché les juges du parquet de Paris de poursuivre les dix membres de l’association Ultime liberté, dont je suis, pour « complicité d’acquisition et d’importation de substances illicites » et « propagande en faveur d’un produit susceptible d’entraîner la mort».
François Galichet est un sophiste. Jean Mercier était-il un trafiquant de drogue ? Quelle était cette «pilule douce», cette quantité importante de médicaments qu’il a donné à son épouse ? Et d’où venaient-ils ? Le pentobarbital est peut-être «la potion miracle» mais je ne pense pas que le fait qu’il ne soit pas en «libre service» soit un problème. Paul Lafargue et André Gorz l’ont d’ailleurs démontré.
En Suisse un médecin prescrit le produit létal – après de nombreux examens du cas du candidat au suicide et le feu vert d’un psychiatre pour être sûr que la personne a bien tout son libre arbitre – mais ce n’est pas lui qui l’administre : ce sont des volontaires des associations « Dignitas » ou Circle of life.
Et l’opération est filmée et visionnée ensuite par la police car l’euthanasie est illégale en Suisse et il faut donc que le suicidé ait été capable de boire seul la potion létale ou de pousser seul la seringue dans sa perfusion s’il en a une. C’est très très contrôlé.
La Suisse est beau pays. D’ailleurs le 8 mars dernier Biosphère nous en faisait également de la pub : « Suicide assisté, faut aller en Suisse ! »
En Belgique aussi c’est très contrôlé, seulement ce n’est pas comme en Suisse. D’après le rapport mis en lien par Biosphère, page 25 on peut lire que l’«assistance médicale au suicide» (la personne ingère elle même la potion) représente seulement 0,2% des euthanasies. Pour ainsi dire rien. Je ne comprends d’ailleurs pas comment ça se fait qu’en Suisse se soit si différent. Quelqu’un pourrait-il m’éclairer ?
Voilà aussi ce que j’écrivais le MARS 2021 À 18:48 : «Suicide assisté», «assistance médicale au suicide» et autres expressions pleines de compassion et de bienveillance… là aussi je vois une forme d’hypocrisie à ne pas nommer la chose. Le mot «euthanasie» veut dire «mort bonne », ce n’est donc pas la peine de vouloir nous la vendre encore plus bonne que bonne.
– « Explique moi Papa, c’est quand qu’on va où ? » (Renaud Sechan)
En 1966 le chanteur Antoine réclamait la pilule en vente dans les Monoprix. Aujourd’hui c’est François Galichet et Biosphère qui nous font de la réclame pour le pentobarbital. Ces drôles de camelots demandent que «La potion miracle» soit «en libre service ».
Mais comme il faut vivre avec son temps (hi-han !) et aller de l’avant (*)… pas que dans les Monoprix. À la Foir’fouille, sur Amazon et Compagnie aussi ! Parce que c’est mon choix ! Parce que je le veau bien ! Parce que c’est ça la Liberté ! Misère misère.
* Dis Papa, c’est de quel côté l’avant ?
Bien sûr je force le trait. Mais c’est de bonne guerre comme on dit. Je ne suis pas juriste mais affirmer que «l’assistance au suicide est légale en France» est assez osé. Et l’argument selon lequel «il faudrait poursuivre les moniteurs d’alpinisme et d’autres sports extrêmes» est purement malhonnête, c’est un sophisme. Pour un philosophe ça la fout mal. Comme si l’alpinisme était réservé à celles et ceux qui désirent en finir. N’importe quoi !
En attendant j’ai horreur de la Pub ! Mais comme pour tout, il y a pub ET pub.
Je trouve celle-ci particulièrement toxique. Et personne ne pourra me démontrer le contraire.
La députée LRM Yaël Braun-Pivet, présidente de la commission des lois à l’Assemblée nationale, revendique le « droit de choisir sa fin de vie », dans une interview au Journal du dimanche du 14 mars.
Elle affirme qu’elle votera une proposition de loi qui sera examinée en avril au Palais-Bourbon, dans le cadre de l’espace réservé au groupe Libertés et territoires : « J’ai décidé de voter le droit de choisir sa fin de vie, en cohérence avec mes positions : j’avais signé la tribune de mon collègue Jean-Louis Touraine en ce sens, puis sa proposition de loi. Il est temps de débattre du sujet au Parlement, car il irrigue notre société depuis des décennies. »
Jean-Louis Touraine (LRM) a déposé le 26 janvier 2021 une autre proposition de loi en faveur d’une « aide médicalisée active à mourir » pour les personnes gravement malades et en fin de vie. Il a engrangé le soutien de plus de la moitié des députés LRM et au-delà, soit 164 élus de la majorité. Ce n’est toutefois pas le texte massivement soutenu par la majorité qui sera examiné en avril, mais celui du député Olivier Falorni (Libertés et territoires).
Reste à savoir si les soutiens au texte de M. Touraine voteront, à l’instar de Mme Braun-Pivet, cette proposition concurrente.