Peut-on se passer du nucléaire… et de carbone ?
thèse : Dans une tribune publiée le 3 décembre, quatre climatologues parmi les plus titrés de leur discipline – James Hansen, Ken Caldeira, Tom Wigley et Kerry Emanuel – précisaient qu’« en tenant compte du développement des pays les plus pauvres ainsi que de l’augmentation de la demande due à la démographie » il faudrait construire « 115 réacteurs [nucléaires] par an d’ici à 2050 pour décarboner entièrement la production mondiale d’électricité ». Ces spécialistes du climat (et pas du nucléaire) tablent sur le développement de réacteurs de quatrième génération, dits « à neutrons rapides », du même type que le célèbre Superphénix français, arrêté en 1996.
antithèse : Deux semaines plus tard, l’historienne des sciences Naomi Oreskes affirmait que « de nombreuses études de qualité montrent que nous pouvons passer à une économie décarbonée sans développer l’énergie nucléaire, en se focalisant sur l’éolien, l’hydroélectrique, le photovoltaïque, cela couplé à l’intégration des réseaux, à l’efficacité énergétique et à la gestion de la demande ». Elle allait jusqu’à assimiler la prise de position des quatre chercheurs à une « nouvelle forme de déni climatique ».
synthèse du journaliste Stéphane Foucart* :
«Déployer, à un rythme de plusieurs dizaines par an, des réacteurs à neutrons rapides un peu partout à la surface de la planète est, un projet parfaitement irréaliste : immaturité de la filière, risques d’accident plus grands qu’avec les réacteurs actuels, coût exorbitant, disponibilité très insuffisante des compétences scientifiques et techniques nécessaires, instabilité dans de nombreuses régions du monde, etc. Par ailleurs le « 90 % d’électricité renouvelable » est possible s’il y a une diminution… de 50 % de l’ensemble de la consommation énergétique nationale ! Cela représente un effort énorme et une volonté politique d’airain – il faudrait par exemple trouver les financements pour isoler plus les logements au rythme effréné d’un demi-million par an –, des changements profonds dans notre rapport à l’énergie – aujourd’hui abondante, toujours disponible, gaspillable, etc. Une grande part de la question ne se résume donc ni à une question technique ni à un débat économique, mais à savoir s’il est politiquement possible de faire changer radicalement nos comportements. »
conclusion de biosphere : la présidentielle 2017, c’est pour bientôt. Votons pour le candidat qui aura le courage de demander d’intenses efforts de sobriété énergétique (et partagée) aux électeurs.
* LE MONDE du 5 janvier 2015, Pourra-t-on se passer du nucléaire ?
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