politique

François Hollande, que va-t-il faire des écologistes ?

François Hollande avait noué d’étroites relations avec Daniel Cohn-Bendit auquel il proposait de réserver une trentaine de circonscriptions aux législatives en échange d’une non-candidature des Verts à la présidentielle. On n’en est plus là, Eva Joly a été désignée lors de primaires écolos et elle avait même estimé que ce n’était pas la place de ses militants d’aller voter aux primaires socialo. Quand dimanche soir 16 octobre, François Hollande prononce son premier discours de candidat socialiste à la présidentielle 2012, c’est pour percevoir « les atteintes multiples à notre environnement », mais c’est surtout pour égrener «  les inquiétudes qui entourent notre avenir commun, les désordres de la finance, les excès de la mondialisation, les insuffisances de l’Europe ».

Il n’empêche que la société civile s’inquiète de son environnement. Samedi 15 octobre, la mobilisation antinucléaire avait réuni plus de 20 000 manifestants à Rennes*. Les colloques de scientifiques se succèdent pour dénoncer la planète au pillage. L’opinion publique sait plus ou moins confusément qu’il y a crise écosystémique globale, surpopulation, déplétion des énergies fossiles, pénurie des matières premières, pollutions, dérèglements climatiques, déforestation, désertification, sixième extinction des espèces, tarissement de l’eau potable, cancers environnementaux, disparités alimentaires, etc. Les médias donnent désormais au moins autant place à l’insécurité environnementale qu’à l’insécurité civile. François Hollande sait donc pertinemment qu’il va falloir s’occuper de la transition énergétique et de bien d’autres problèmes environnementaux. Tout cela facilitera les négociations entre les écologistes et les socialistes ; il est quasiment certain qu’Hollande proposera à EELV un groupe parlementaire en échange du ralliement des Verts pour le deuxième tour des présidentielles.

Contrairement à ce qu’affirme LEMONDE.FR**, les écologistes ne sont pas fragilisés par la désignation de M.Hollande. La maire de Lille prévoyait la fermeture de 60 % des centrales françaises d’ici 2025, alors que le candidat élu ne propose qu’une réduction de l’atome à 50 % dans le mix énergétique. Les politiques aiment bien se disputer entre camarades, il faut bien marquer son territoire. Mais les politiques connaissent aussi les vertus de l’alliance face aux électeurs, le grand rassemblement unitaire des socialistes dès la fin de leur primaire en est un signe évident. C’est pourquoi la tiédeur des « Hollandais » à l’égard des thèses défendues par l’écologie (sortie du nucléaire, gestion de la descente énergétique, représentation des acteurs absents, etc.) deviendra des retrouvailles avec EELV bien mises en scène au fur et à mesure qu’on se rapprochera des élections de 2012.

* LEMONDE.FR | 16.10.11 | Pour les Verts, le nucléaire sera le débat prioritaire pendant la campagne de 2012

** LEMONDE.FR | 17.10.11 | Les écologistes sont fragilisés par la désignation de M. Hollande

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Aubry-Hollande, deux dangereux croissancistes

Aubry-Hollande sont de dangereux extrémistes. En effet ils sont partisans de la croissance. Or un simple taux de croissance annuel de 3 % du PIB, généralement considéré par les socialistes comme un minimum pour garantir la prospérité de la France, impliquerait au bout de 300 ans une multiplication du PIB par 7098. Le taux de croissance de 10 % réalisé par la Chine entraînerait sur la même période une multiplication du PIB par 2000 milliards ! L’extrémisme de la croissance infinie dans un monde fini se traduit déjà par la consommation en 200 ans du pétrole qui a nécessité environ 200 millions d’années pour être formé : une consommation un million de fois plus rapide que la production ! Mais de l’urgence écologique, il n’a pas été question dans le débat télévisé du 12 octobre 2011 entre Aubry et Hollande. Par contre les occurrences du mot croissance ont été innombrables :

Aubry : « Moi, je ne veux pas d’une règle où on me dit que demain on sera sérieux, je propose tout de suite au Président de faire un certain nombre de choses qui permettent à la fois de réduire les déficits publics, mais aussi de relancer la croissance et l’emploi… Je veux à la fois réduire les déficits publics et relancer la croissance et l’emploi… Nous sommes des gens raisonnables au parti socialiste, nous avons voté un projet à l’unanimité, nous n’avions pas pris les prévisions de croissance du gouvernement. Nous avions pris 1,7 % pour cette année… On va, nous, relancer la croissance. Parce qu’en dessous de 3 %, la dette diminue en France et c’est ça qu’il faut obtenir… Je dis que dans le climat actuel, on ne sait pas ce que sera la situation internationale et la croissance française, même si nous ferons tout pour la relancer… Si je mets tout sur les déficits, il n’y a pas de croissance, pas de rentrées fiscales… On baisse les dépenses publiques et on cogne sur les couches populaires et moyennes, par exemple en augmentant la CSG ou le prix sur les mutuelles et dans ce cas-là, effectivement, on réduit le déficit public formellement la première année mais on casse la croissance. Donc je suis pour un équilibre, il y a des dépenses fiscales à réduire mais il y a aussi à avoir de la croissance… On a cassé la croissance grecque. Monsieur Papandréou me disait : « nous avons perdu 12 % de croissance ». 12 % de croissance ce sont des recettes fiscales et c’est surtout une situation pour les Grecs qui est catastrophique… Il faut les deux choses : la baisse des déficits et ne pas casser la croissance. »

Hollande : « Nicolas Sarkozy va nous donner son paquet de dettes et sa faible croissance… il va falloir soutenir la croissance. De ce point de vue-là, Martine a raison… Mais je vais vous corriger sur un point, ce n’est pas les emplois d’avenir qui relanceront la croissance. C’est ce qui permet d’améliorer le niveau de l’emploi. Et c’est vrai qu’en améliorant le niveau de l’emploi, on améliore le pouvoir d’achat, ça a un effet sur la croissance mais la croissance structurelle, parce que c’est ça qui compte, c’est l’investissement, c’est l’éducation. C’est ça qui permet d’avoir, pas tout de suite, mais le plus haut niveau de compétitivité, le plus haut niveau d’emploi et donc le plus haut niveau de croissance… Mme Merkel dit : « on a fait un effort, pourquoi ne l’avez-vous pas fait ? » Nous allons dire : « si nous faisons un effort pour maîtriser notre dette vous devez faire un effort pour soutenir notre croissance… On a une chance formidable avec les territoires. C’est un levier de croissance. »

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Aubry-Hollande, il n’y a pas d’urgence écologique

Aubry et Hollande disent d’une même voix avoir le « courage » d’affronter la « transition énergétique ». Mais ils ne disent rien du scénario négawatts (sobriété énergétique), rien sur la taxe carbone nécessaire au niveau national, rien de précis sur la sortie du nucléaire, rien sur les efforts qui vont être demandé aux citoyens pour préparer l’après-pétrole, rien d’abouti sur l’entente avec le mouvement écologiste nécessaire pour remporter le deuxième tour des présidentielles. Or le choc que va devoir affronter le ou la président(e) de la république après 2012 ne va pas être simplement une crise financière continue, mais une raréfaction des ressources naturelles, beaucoup plus grave.  Voici, dans le débat télévisé du 12 octobre 2011, les rares occurrences du mot écologie :

Aubry : « (J’ai) le courage de mener la transition  énergétique et la sortie du nucléaire… J’ai rassemblé, j’ai passé 3 ans ensuite à avoir des relations de confiance, Cécile Duflot le disait hier, avec les écologistes, avec tous les partis de Gauche. »

Hollande : « Il faut affronter effectivement une transition écologique, un défi énergétique. Il faudra le faire, avec courage… Troisième réforme, la contribution écologique, parce que c’est très important que nous puissions avoir une contribution sur la pollution, qui se substituera à des cotisations sur le travail. Ça, c’est un principe et je vais l’appliquer… Il y a une manière aussi de nous protéger, utilement. C’est la contribution carbone aux frontières de l’Europe, c’est-à-dire de dire : « Voilà, chaque fois que vous venez avec un produit qui n’a pas respecté un certain nombre de règles environnementales, vous payez une taxe aux frontières »… moi je suis pour de grands débats citoyens. On n’a pas évoqué ce soir la transition énergétique, le débat écologique, l’avenir du nucléaire… Et bien ça se fera à partir, aussi, des débats citoyens. Moi, j’aurais ma position, elle est connue. Mais ça sera à travers des débats citoyens qu’on clôturera cette procédure et qu’on déterminera l’avenir du pays sur la transition énergétique. »

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Aubry ou Hollande le 16 septembre, pour qui voter ?

Désormais, à chaque scrutin, les consignes de vote sont au centre des colonnes des journaux. LE MONDE du 10 octobre n’échappe pas à la règle. Ségolène Royal donnera « prochainement » sa consigne de vote pour le second tour de la primaire. François Hollande a écarté l’idée d’un report mécanique des voix d’Arnaud Montebourg, au second tour de la primaire, en faveur de Martine Aubry, ça l’arrange : « Les additions de score ne fonctionnent pas, les électeurs sont libres ». Cela n’empêche pas Manuel Valls d’appeller à voter Hollande. Aubry et Hollande se lancent donc dans la course aux ralliements pour le 16 octobre. Exception, Arnaud Montebourg, arrivé en troisième position avec 17 % des voix, ne va pas appeler ses électeurs à voter pour un candidat, car « ses électeurs ne lui appartiennent pas ». Mais il a le malheur d’ajouter qu’il pourrait se prononcer à titre personnel pour l’un des deux candidats !!

Cette ingérence des apparatchiks dans les consciences des électeurs s’est répandue au sein de tous les partis et dans les colonnes des médias sans que personne ne trouve à redire. Mais alors, à quoi servent les isoloirs ? A rien ! Dominique Strauss-Kahn, après avoir mis le 9 octobre son bulletin dans l’urne des primaires socialistes, confie à un journaliste :  «  Ce n’est un secret pour personne, j’ai voté pour Martine Aubry ». Le problème, c’est que les votes des apparatchiks ou leurs consignes de vote ont une certaine influence. La consigne de vote, inventée par le Parti communiste dans les années 20, est devenue une pathologie française. Au parti socialiste, on aime pratiquer cette forme de viol des consciences et la vie des fédérations est emplie de ces votes programmés par les personnalités du coin. A l’UMP, c’est pire : ils ont paraît-il un candidat « naturel » ; tous les pontes inféodés prétendent contre l’évidence qu’il n’y a pas d’alternative à Sarkozy. Donc il n’y a pas d’alternative !

Ce n’est pas ainsi que la démocratie doit fonctionner. Rien à cirer des consignes de vote. Ce procédé infantilisant consiste à indiquer aux électeurs quel est le vrai et bon candidat. Foutaises, le nom d’un éligible n’a jamais été un programme. Soyons plus précis. Le secret du vote est constitutionnalisé en France depuis 1795. Louis Napoléon Bonaparte tenta d’abolir cette mesure lors du plébiscite de 1851 : un régime autoritaire veut savoir pour qui nous voulons voter. C’est pourquoi l’isoloir est instauré en Australie en 1857. En France, il faut attendre 1913 pour que la loi du 29 juillet introduise l’enveloppe, l’isoloir et le dépôt dans l’urne par l’électeur lui-même. La consigne de vote, ou expression publique de son choix et appel à suivre, va à l’encontre du secret du vote et de la démocratie. Car nous ne devrions jamais voter pour une personne, même soutenue par beaucoup de personnalités, mais pour des idées. Quelles idées véhiculent Martine Aubry ou François Hollande, c’est de cela seulement que nous devrions parler dans le débat public

Le seul projet politique qui compte pour notre avenir, c’est celui qui pourrait faire face à l’urgence écologique : déplétion pétrolière, déperdition des sols arables, réchauffement climatique, extinction des espèces, etc. C’est là un problème national, européen et même mondial qui devrait mobiliser autant les instances internationales que modifier le comportement de chacun. Ni François Hollande, ni Martine Aubry ne sont porteurs de  cette vision, seule digne d’un(e) président(e) de la République au XXIe siècle.

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faut-il voter aux primaires socialistes ?

Si vous avez une sensibilité écolo, faut-il ou non participer aux primaires socialistes ? Constatons d’abord que nous sommes dans une optique de concurrence, certainement pas de coopération. Quelques rares responsables du PS, par exemple au sein de son pôle écologique, oeuvrent pour que l’écologie ne soit plus sous-traitée aux Verts, pour que le PS prenne en compte directement l’écologie : exit la synergie entre partis. De toute façon le courant écolo au sein du PS est aujourd’hui moribond, après avoir fait seulement 1,58 % des voix au dernier congrès : le PS ne peut pas être un parti écologisé dans l’état actuel de la mentalité de ses militants. D’autant plus qu’une analyse comparative d’Aubry, Hollande, Montebourg, Royal et Valls montre qu’aucun de ces candidats à la présidentielle ne porte les valeurs de l’écologie politique. Au PS, personne ne milite aujourd’hui pour un rapprochement avec EELV, type « Union de la gauche ». Nous avons seulement la promesse d’un « contrat » qui se résumera à des négociations occultes pour octroyer quelques sièges aux législatives (comme cela a été fait pour le sénat). On ne peut pas bâtir un programme commun de gouvernement entre les deux tours de la présidentielle !

Plus fondamentalement, quand vous avez participé aux primaires écologistes qui ont désigné Eva Joly, vous vous engagez logiquement à soutenir cette candidate dès le premier tour. Réciproquement, quand vous participez aux primaires socialistes, vous ne vous engagez pas simplement en faveur des valeurs de « la gauche », mais pour un prétendant socialo-socialiste à la présidentielle. Si les écolos ne sont pas clairs dans leur soutien à la candidate de l’écologie politique, comment voudriez-vous que d’autres sensibilités écologistes les rejoignent. L’écologie politique, en présentant sans cesse depuis 1974 un candidat à la présidentielle, ne veut pas faire de la figuration : l’écologie politique veut vraiment aller au second tour pour que la société française devienne une société écologisée. C’est son objectif, c’est sa tâche historique.

Enfin, dans le détail des procédures de la primaire socialiste, rien n’est fait pour que les écologistes se sentent concernés :

–          Tous les citoyens inscrits sur les listes électorales peuvent participer au scrutin. Mais les primaires « citoyennes » ne sont en fait que des primaires « socialistes » pour désigner un ou une socialiste comme président(e) de la république. C’est un scrutin en apparence ouvert à tous, mais en réalité fermé. Si une primaire citoyenne avait concerné tout le peuple de gauche, on aurait pu y voter aussi bien pour le PS, le PCF ou EELV. Le partage des postes de députés aurait été tranché à la proportionnelle par les électeurs. Un programme commun aurait pu être établi avant mai 2012. Mais le PS n’a pas choisi l’Union de la gauche pour cette primaire, il a choisi le repli sectaire, misant sur « le vote utile » en sa faveur.

–  Le jour du vote aux primaires « citoyennes », les votants devront, avant de prendre leurs bulletins de vote signer un engagement de reconnaissance dans les valeurs de la gauche : « Je me reconnais dans les valeurs de la Gauche et de la République, dans le projet d’une société de liberté, d’égalité, de fraternité, de laïcité, de justice et de progrès solidaire. » Mais ce ne sont pas les valeurs « de la gauche », ce sont les valeurs de la République française, à savoir liberté, égalité, fraternité…que tous les citoyens se doivent de défendre : même un membre de l’UMP pourrait signer un tel engagement. De toute façon l’écologie politique transcende les notions de gauche et de droite, elle ne fait pas de distinction entre les citoyens, tout le monde est concerné pour gérer au mieux notre maison commune la Terre…

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5/5) Arnaud Montebourg, un Jaurès de l’écologie qui se limite à la démondialisation

Arnaud Montebourg pourrait être le Jaurès de l’écologie ! Sa contribution en 2005 au Congrès socialiste du Mans était remarquable : « La conjonction de l’explosion démographique et de l’épuisement prévisible des ressources de combustible fossile entraîne un choc énergétique qui met directement en cause le mode de développement industriel et son corollaire, la délocalisation systématique des facteurs de production. L’approvisionnement en pétrole de l’économie mondiale est menacé à moyen terme par l’entrée de la production de pétrole en déclin continu. C’est le phénomène de « pic pétrolier ». Il est susceptible d’intervenir d’ici 2015 (la production journalière atteindre son maximum pour décroître ensuite). L’effet principal sera d’entretenir une pression constante sur les prix, et ce d’autant plus que les économies consommatrices sont fortement dépendantes. Suivra inéluctablement une baisse de la consommation du fait de la raréfaction de la ressource. Nous avons le choix entre anticiper ce bouleversement de nos économies ou subir la crise annoncée et ses conséquences sur le plus grand nombre… »

Fin août 2010, Arnaud Montebourg était comme à son habitude à Saint Ciers avec le pôle écologique du parti socialiste. Son discours était percutant : « Une synthèse “rose-verte” est nécessaire à cause des enjeux qui pèsent sur l’avenir de notre société… le Parti Socialiste fait une analyse de classe et exonère des responsabilités individuelles un certain nombre de personnes qui sont dominées dans la société. L’écologie proclame au contraire la responsabilité de chaque individu quelle que soit sa place dans la société. C’est une des raisons pour lesquelles la question écologique dépasse les clivages gauche/droite. Si tout le monde est responsable de la situation qui est faite sur la nature, l’avenir, le futur, si même nos modes de vie les plus modestes engagent cette responsabilité, alors, cela dépasse en réalité la question politique… Le propre de la transition, de la mutation écologique de l’économie est finalement bien une forme de décroissance. La question politique porte sur le choix des secteurs… La politique va devoir revisiter la vie privée des gens, ce qui est explosif dans notre société individualiste. On aura peut-être besoin de redire aux gens comment mieux dépenser leur argent, de nous exprimer sur leurs achats d’écrans plats et d’Ipad fabriqués par des esclaves chinois, de mettre en place des péages urbains dans les grandes villes, même si aujourd’hui tout cela semble liberticide. »

Il est donc évident qu’Arnaud Montebourg est le seul des candidats aux primaires socialistes à avoir un discours incisif. Il a le courage que n’a pas eu Martine Aubry qui avait même refusé de demander des comptes à Jean-Noël Guérini dans l’espoir d’avoir le soutien des Bouches-du-Rhône ! Il a le mérite d’être le seul à proposer une nouvelle voie au socialisme, la démondialisation : « Le bilan de la dernière décennie de mondialisation est un désastre  : délocalisation en série, destruction d’emplois et d’outils de travail, diminution des revenus du travail par la pression à la baisse. Si l’on voulait résumer les quinze années écoulées, il ne serait pas excessif de dire que la mondialisation a fabriqué des chômeurs au Nord et augmenté le nombre de quasi-esclaves au Sud. Cette ouverture aux marchandises et aux capitaux est l’ennemi déclaré de l’économie locale, y compris au niveau alimentaire. »

Avec la démondialisation, Arnaud Montebourg semble reprendre l’analyse de Walden Bello. Nuance, Walden Bello s’adressait d’abord aux pays du Sud ; il souhaitait une revitalisation de ce que l’on appelait dans les années 1960-1970 un développement autocentré et une politique de substitution aux importations. Nous sommes au plus près de ce qu’on appelle les communautés de résilience pour résister localement, grâce à une recherche de l’autonomie énergétique et alimentaire, aux jumeaux de l’hydrocarbure (le pic pétrolier et le réchauffement climatique). Il ne s’agit nullement d’un protectionnisme des riches. Mais Arnaud s’intéresse plutôt à l’Europe et particulièrement au couple franco-allemand. Le but est de rester compétitif, pas de rechercher l’autonomie locale de chaque territoire particulier. Arnaud s’était exprimé début mai 2011 devant des salariés de General Motors : « la démondialisation sera l’axe fort de son programme économique ». Mais, si on ne s’abuse, une démondialisation véritable ne peut que mettre au chômage les salariés de General Motors !

Arnaud Montebourg adopte pour le moment une analyse passe-partout, présidentialisation exige. Arnaud ne porte pas encore un grand projet pour une civilisation de l’après-pétrole, présidentialisation exige. Dans son discours liminaire à Frangy-en-Bresse le 21 août 2011, il n’y avait plus que deux occurrences sur l’écologie : « L’écologie n’est pas une expédition punitive, elle est un investissement productif qui rapproche les lieux de production et de consommation »… « Le visage de la Nouvelle France est celui d’un pays où l’on préfère l’investissement écologique plutôt que la destruction des ressources naturelles. » Pour un texte de dix pages, cela fait bien peu pour l’urgence écologique. Quant au nucléaire, le député de Saône-et-Loire n’a pas creusé la question puisque Areva est fortement implanté dans son département. Arnaud avait d’ailleurs participé, en 2008, à une campagne de recrutement local du géant français du nucléaire !

Parmi les différents candidats à la primaire socialiste, il n’en reste pas moins qu’Arnaud Montebourg reste le plus proche des thèses écologistes puisque la démondialisation va nécessairement de pair avec la relocalisation.

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4/5) Martine Aubry à l’image de son parti, l’écologie est sous-traitée

Le parti socialiste n’a jamais été écolo. Pas un mot sur l’urgence écologique dans la Revue Socialiste n°42 (2e trimestre 2011) qui brosse héritages et espérances sur la période du 10 mai 1981 au 10 mai 2011. Trente ans à ne pas s’apercevoir que la température monte, que les eaux baissent, que le pétrole rejoint les espèces en voie de disparition. Il n’est donc pas étonnant que les débats pour la primaire socialiste prévue le 9 octobre soient d’une banalité à pleurer.

L’abandon du favori Strauss-Kahn avait obligé Martine Aubry à sortir du bois ; le mardi 28 juin 2011, elle annonce sa candidature, carrément croissanciste : « Une offensive de civilisation est fondée sur un autre modèle de croissance… Sans croissance on ne peut rien… ». Aubry veut donc simplement prendre le relais d’un Sarkozy qui cherchait la croissance avec ses dents. Elle en rajoute un peu plus tard des louches dans un discours où la dette imposerait encore plus de croissance (LE MONDE du 13 août 2011) : « La vérité est que la politique actuelle est une impasse. Sans croissance, dette et déficit ne se réduiront pas… Je propose trois décisions qui pourraient relancer la croissance tout en réduisant les déficits…  C’est en agissant rapidement sur l’investissement et l’emploi que nous rétablirons la croissance…. C’est par une croissance durable que nous réduirons dette et déficits…. Oui, il faudra assumer que certaines politiques essentielles pour la croissance reçoivent des moyens nouveaux… (Avec moi) le pays renouera avec la croissance, l’emploi et le progrès… Il est temps de passer aux actes pour réduire les déficits et soutenir la croissance… »

Martine Aubry n’a pas encore compris que la volonté de croissance nous mène droit dans le mur ! A croire que Martine n’a pas écouté les avertissements de Jean-Marc Jancovici et Yves Cochet lors d’un colloque sur le pic pétrolier à l’Assemblée nationale pourtant organisé par la branche écolo de son propre Parti ! Si Martine parle de construire des logements sociaux, pas un mot sur l’efficacité énergétique de cet habitat. En définitive, rien sur le blocage énergétique que va rencontrer prochainement la croissance économique. Ce n’est pas ainsi qu’un Parti dit de gouvernement nous prépare des lendemains qui chantent.

Martine Aubry a bien lâché sa bombinette après Fukushima, « Je crois qu’il faut sortir du nucléaire ». (…). Il faut aller, ça va être 20 ou 30 ans (…). Mais dans sa motion au Congrès de Reims (novembre 2008), Martine écrivait le contraire : « S’agissant du nucléaire, le fonctionnement et le renouvellement de la filière, dans notre pays, doivent se faire. » Martine est à l’image de son parti, adepte d’une critique molle du capitalisme négligeant l’incompatibilité entre les forces de l’argent et celles de la nature. Dans l’affrontement capital/travail, le PS a oublié l’environnement et une donnée désormais vitale : les ressources de la planète ne sont ni infinies ni éternelles. Menacé par l’activité humaine, l’état de la biosphère chamboule les axiomes. Mais le PS n’en a cure, il se tourne encore et toujours vers son passé.

Martine Aubry continue de voir les événements par le petit bout de la lorgnette. Pour cette présidentiable Strauss-kahnienne, il n’y a rien à dire sur les sujets qui vont bouleverser la planète, le pic pétrolier, la descente énergétique, la raréfaction des ressources… Martine préfère parler d’augmentation des crédits pour la culture, de mieux rémunérer les intermittents… ou de la victoire du LOSC (Lille olympique sporting club) qui « donne une immense fierté à Lille, rejaillissant sur l’énergie de tous ». On cultive chaque électorat sans plan d’ensemble. Le PS s’acharne à produire des programmes affadis par une pseudo-concertation, gauchis par concession à son aile gauche, réécrits cent fois et jamais lus véritablement. Martine est à l’image de son parti, l’écologie continuera d’être sous-traitée puisqu’il existe un parti vert qui est là pour ça et avec lequel on négociera des accords de circonstances qui ne seront pas suivis d’effet.

Nous pouvons donc estimer que Martine Aubry ne va pas assez loin face à l’urgence écologique. Mais nous ne devons jamais oublier que Nicolas Sarkozy est le président des riches et qu’à ce titre, la détérioration de la planète ne peut que s’amplifier. N’oublions pas la soirée du Fouquet’s où, pour la première fois, une victoire à la présidentielle était fêtée par les figures du CAC 40. N’oublions pas que les niches fiscale représentent 75 milliards, les modalités particulière de calcul de l’impôt à l’avantage des riches 80 milliards, à comparer à un déficit public de 95 milliards. N’oublions pas que dans une société de plus en plus inégalitaire, les riches vivent entre eux et oublient le reste du monde. N’oublions pas, et votons aux élections pour le candidat le plus écolo et le plus égalitariste.

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3/5) François Hollande se veut normal, l’écologie n’existe pas

Bientôt les primaires socialistes, le 9 octobre. Oublions que François Hollande a suivi un régime amaigrissant pour paraître présidentiable, c’est anodin. En panne d’argument probant, François se disait donc un candidat « normal », c’est-à-dire qu’il déclarait « avoir des qualités exceptionnelles » ! Mais son attitude, son incapacité à faire travailler le PS pendant 10 ans dévoilent beaucoup de sa personnalité. En tant que premier secrétaire du PS, François a toujours recherché le compromis mou et les synthèses bancales. Il a même refusé de sanctionner Fabius et Mélenchon après leur NON au traité européen alors que le référendum interne au PS avait dit OUI. Gouverner « normalement », ce serait selon François rechercher l’équilibre, faire preuve de modération et rompre avec l’image présidentielle donnée par Sarkozy. Mais dans un contexte écologique aux multiples menaces, il ne s’agit pas de préparer une gouvernance « normale », mais une candidature de rupture avec la société thermo-industrielle. François ne paraît pas capable d’une action de cette envergure.

Nous avons échangé avec François Hollande sur la perspective d’une descente énergétique. Il disait partager nos inquiétudes face au déclin de la production pétrolière et savoir la nécessité d’un nouveau mode de développement face à la crise écologique, énergétique et climatique. Il pensait qu’un « plan de transition énergétique » était indispensable pour financer le développement des sources d’énergie renouvelable. Ce plan sur 10 ans viserait à modifier le mix énergétique de notre pays, il serait réalisé par un investissement à la fois de l’Etat et des collectivités locales complété par des fonds structurels européens. Cet élan, ajoutait-il, contribuerait à positionner la France sur les marchés des technologies propres, porteuses de croissance à long terme (énergies renouvelables, stockage de l’énergie, éolien, photovoltaïque, véhicules propres, voitures électriques). Il s’agirait donc autant, avait-il conclu, d’écologie que d’économie.

François Hollande se polarise sur l’idée de « croissance à long terme » alors que l’idée de croissance infinie dans un monde finie devrait être politiquement invalidée depuis 1972 et le rapport du Club de Rome sur les limites de la croissance. Il succombe au mirage facile de la croissance économique qui éliminerait tous les problèmes, la déplétion pétrolière, l’endettement public, et même le chômage… Au Congrès de Reims (14 au 16 novembre 2008), il proposait déjà : « Comment être plus fort dans la mondialisation ? Notre objectif doit être de faire un point de croissance de plus que la moyenne européenne comme cela a été le cas entre 1997 et 2002. » François n’a pas encore réalisé que « nouveau modèle de développement » ne veut pas dire, dans une perspective d’après-pétrole, croissance quantitative, mais au contraire décroissance conviviale et sélective. François se situe dans une perspective de production d’énergie (« mix énergétique ») ; il n’a pas encore compris que la première des priorités doit aller aux économies d’énergie, c’est-à-dire agir sur la demande et non sur l’offre d’énergie. Enfin François croit aux « technologies propres », aux « véhicules propres »… Or personne n’a réussi à démontrer la « propreté » des technologies actuelles (voiture électrique) ou imaginées (géo-ingénierie, ITER, Astrid…). Même le photovoltaïque, théoriquement renouvelable, pose problème.

Dans son mini-programme, « la France en avant », François Hollande parle bien de « progrès écologique ». Mais sa position sur le nucléaire reste en retrait, non seulement sur les objectifs chiffrés (passer de 75 % d’électricité d’origine nucléaire à 50 % à l’horizon 2025), mais aussi par sa propension à se cacher derrière les autres : « Nous mènerons un grand débat sur la production d’électricité issue de l’énergie nucléaire… Il faudra en discuter ». En réalité François reste pro-nucléaire. Il estime qu’abandonner une industrie nucléaire « où on est sans doute les meilleurs » ne serait « ni économiquement sérieux, ni écologiquement protecteur, ni socialement rassurant »… « Autant je suis favorable à l’exigence de sécurité et de transparence, autant sur la sortie du nucléaire, ce n’est pas aujourd’hui la réponse. » Quant au pétrole, sa raréfaction ne semble pas lui poser problème puisque l’Etat agira : « Pour absorber les chocs d’offres des énergies actuelles, je veux que l’Etat ne gagne pas le moindre centime sur la hausse du prix du pétrole. Chaque recette supplémentaire perçue devra être recyclée pour baisser le prix à la pompe. Et que nous bloquions les prix, dans les moments de hausse importante, pendant un certain temps. Pour que nos concitoyens mutent vers la société des énergies renouvelables, il faut que l’Etat les protège et leur donne confiance. L’économie doit continuer de fonctionner. » Pourquoi les pétrol-addicts que nous sommes devenus feraient-ils des efforts, François produira le pétrole à la place de la nature. D’ailleurs la taxe carbone généralisée n’est plus une mesure envisagée, elle reposera uniquement « sur les industries émettant beaucoup de gaz à effet de serre ».

Que fera François Hollande s’il était président face à un nouveau choc pétrolier, lui qui ignore le pic pétrolier et laisse la planification écologique à Mélenchon ! Il nous faudrait un candidat qui fasse un peu rêver autrement, du type l’écologie ou la mort… comme René Dumont en 1974 ! Mais une présidentielle peut-elle mettre en œuvre l’utopie ?

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2/5) Ségolène Royal, une transfuge de l’écologie

Ségolène Royal se présente aux primaires socialistes du 9 octobre prochain. Il y avait en Ségolène une réelle fibre écolo, elle a disparu. Dans sa  contribution thématique personnelle début 2003, elle écrivait pourtant de sa propre main à l’occasion d’un Congrès du PS :

–          Urgence à agir contre l’insécurité écologique : Chacun sait que la situation actuelle relève de l’état d’urgence, qu’il y a péril pour l’humanité, que chaque heure de perdue c’est une heure de plus pendant laquelle se déroule sous nos yeux un crime collectif contre la Terre, donc contre l’humanité. Personne ne pourra prétendre que l’on ne savait pas.

–          Ecologie et double langage : ça suffit ! : Que dire des belles âmes qui appellent à un programme de lutte contre l’effet de serre, et qui dans le même temps défendent le maintien d’une fiscalité subventionnant massivement le transport routier ? Au mieux il s’agit de lâcheté, au pire d’un cynisme électoraliste révoltant. Les pleurnicheries médiatisées, cela suffit. L’action contre l’insécurité écologique ne peut plus s’accommoder d’un double langage : l’écologie n’est pas négociable.

–          Morale de l’action, exiger l’efficacité : L’écart entre une posture déclamatoire radicale et une action inexistante n’est plus tolérable. La réalité de l’action, c’est que les comportements ne changent que s’ils y sont contraints. L’efficacité de l’action, c’est d’avoir le courage politique de l’imposer par la loi, par la fiscalité. Une politique effective de protection de l’environnement ne peut être que contraignante ou dissuasive. »

Sa fibre écolo devait beaucoup à son expérience ministérielle. En octobre 2006, une étude comparative des professions de foi des candidats à la primaire pour la présidentielle 2007 mettait Ségolène Royal aux avant-postes de l’écologie, bien loin devant Fabius et encore plus loin de Strauss-Kahn : « Ministre de l’environnement en 1992-1993, j’ai agi avec fermeté contre les lobbies (loi sur l’eau et sur les déchets), mené des négociations âpres, notamment au Sommet de la Terre de Rio, et  déjà soutenu les énergies renouvelables. Je retiendrai des perspectives exigeantes : Pour l’emploi, en choisissant résolument l’excellence environnementale, riche d’activité et de métiers nouveaux ; Pour l’excellence environnementale : je veux faire de la France un pays exemplaire en Europe et dans le monde dans la lutte contre le réchauffement de la planète, la gestion de l’eau, la priorité aux énergies renouvelables, le développement des transports propres, le traitement des déchets et la mise en place d’une véritable fiscalité écologique. »

Au Congrès de Reims (14 au 16 novembre 2008), Ségolène Royal estimait encore que pour « bien vivre dans l’après-pétrole », il nous fallait de toute urgence produire et consommer autrement pour garantir le développement soutenable de notre pays. Ségolène proposait de calculer autrement la croissance pour mieux évaluer les dommages ou les bénéfices de certaines activités et agir juste. Mais lors de sa confrontation avec Nicolas Sarkozy pour le second tour, Ségolène proposait aux électeurs le même objectif que la droite : intensifier la croissance des productions, des consommations et des déplacements sans s’interroger sur leur contenu. L’électoralisme de Ségolène, qui n’avait en fait qu’une envie « succéder à François Mitterrand », devient depuis lors évident. Barack Obama faisait répéter en boucle « Yes, we can », Ségolène se contente de « Fra-ter-ni-té ». Exit dorénavant l’écologie.

La suite est même de plus en plus anti-écolo. En 2009, Ségolène Royal a jeté médiatiquement le trouble sur la position du PS favorable à une contribution climat-énergie universelle, en d’autres termes une taxe carbone. Elle devient une militante pro-carbone. Son programme de lutte contre l’effet de serre se résume à un soutien à la voiture électrique ; Ségolène succombe au slogan publicitaire de la « voiture propre ». La sortie du nucléaire ne se fera pas tout de suite : « On peut sortir du nucléaire en 40 ans, c’est-à-dire fixer un objectif ferme pour que l’ensemble de la mutation énergétique et industrielle puisse se faire dans de bonnes conditions. » Après l’accident survenu à Fukushima, suite au séisme et au tsunami du 11 mars 2011, irritée par la résurgence de la polémique autour d’une technologie de toute évidence guère maîtrisable en cas d’emballement et potentiellement à très haut risque, Ségolène avait même reproché aux écologistes de ne pas respecter un « délai de décence ».

Depuis, l’écologie est aux abonnés absents chez Ségolène Royal, il ne faut pas parler des choses qui fâchent. Mais quand on est en perte de vitesse, autant ne pas renier ses fondamentaux… J’aurais bien aimé lui expliquer cela, mais Ségolène est devenue inaccessible, royale vraiment.

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1/5) Manuel Valls, plus proche de la droite que des écologistes

Manuel Valls, député et maire d’Evry, est candidat à la primaire socialiste qui aura lieu le 9 octobre en France. Il n’y a pas grand chose à dire d’un candidat pour lequel l’enjeu écologique n’existe pas. Il voudrait rassembler la gauche et les écologistes, mais c’est « à condition d’avoir clarifié de nombreux débats ». Rien n’est plus clair ! Quant à la sortie du nucléaire,  « il faudra des décennies pour cela » ! Manuel fixe à la France un objectif pour 2022 : « réduire la part du nucléaire dans la production électrique, à 50 % ». Il n’en dira pas beaucoup plus de l’écologie. La préparation de la convention « nouveau modèle de développement » ne pouvait changer notre point de vue : l’homme du consensus mou (François Hollande) ou l’homme du bougisme immobile (Manuel Valls) se rejoignaient pour célébrer la croissance économique dont tous les spécialistes, depuis 1972, témoignent de l’absurdité.

Manuel Valls veut concilier efficacité économique et justice sociale, il a oublié le troisième pilier du développement durable, la contrainte écologique. Par contre il « reste convaincu que des hommes et des femmes comme Dominique de Villepin, Français Bayrou ou Corinne Lepage »  trouveront leur place auprès de lui bien mieux que les membres éminents d’EELV. La démondialisation de Montebourg lui semble « un terme ringard, voire réactionnaire, car il apparaît comme un retour en arrière qui est impossible ». Manuel veut au contraire doper la compétitivité par une « TVA-protection » sortie de nulle part.

Manuel Valls croit que « le travail n’est pas un gâteau que l’on partage » et même l’idée de travailler davantage ne le gêne pas. Manuel a donc été convaincu par le slogan de Sarkozy « Travailler plus pour gagner plus ». Il voudrait un discours de vérité sur l’état des finances publiques, par principe il est pour une règle d’or d’équilibre budgétaire… mais il ne votera pas la réforme constitutionnelle si le Congrès est convoqué « parce que Nicolas Sarkozy a doublé la dette de la France de 900 à 1 800 milliards ». Le double discours ne le gêne pas. En résumé, Manuel est plus proche des thèses de la droite que des idées social-écologistes sur pratiquement tous les points.

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L’humain d’abord, un mauvais slogan de Mélenchon

« L’humain d’abord » est le sous-titre du programme du Front de Gauche que va défendre Jean-Luc Mélenchon aux présidentielles 2012. On pose pour postulat que « la richesse d’un pays réside dans le travail humain, dans la capacité de ses femmes et de ses hommes à inventer et à produire ». Mélenchon oppose le travail humain à la finance, il en oublie complètement le capital technique dont l’enveloppe monétaire n’est que le voile. Ce programme occulte donc la problématique de la techno-science et ne pose pas clairement la question : de quelle sorte de technologies avons-nous besoin ? Plus grave, le Front de Gauche oublie que la richesse d’un pays réside d’abord dans les ressources naturelles utilisables, le travail n’étant qu’un procédé de transformation de ces ressources avec l’aide du capital technique (ou « travail cristallisé » au sens marxiste). Un littoral durablement envahi par l’effet du réchauffement climatique ne fera vivre ni les villes, ni les services sociaux.

Dans les ressources naturelles, l’énergie fossile est prépondérante puisqu’elle permet de démultiplier le travail humain et même de le remplacer par des robots. Or la descente énergétique qui se profile (épuisement du pétrole et du gaz) va mettre à mal tous les avantages acquis. Comme l’exprime Jean-Marc Jancovici, « Conservez les neurones et supprimez les combustibles fossiles : nous ne serons plus capables de proposer des machines géniales à chaque consommateur occidental pour un prix qui n’a cessé de baisser au fil des temps… Si demain nous n’avons plus de pétrole, ni gaz, ni charbon, ce n’est pas 4 % du PIB que nous perdrions (la place de l’énergie dans le PIB), mais près de 99 %. ». Autant dire que Mélenchon ne nous prépare nullement à un avenir difficile en réclamant « tout de suite » le droit à la retraite à 60 ans à taux plein, le Smic à 1700 euros brut par mois et la titularisation immédiate des 800 000 précaires de la fonction publique.

Le gauchisme diffus dont Mélenchon est l’apôtre n’est qu’une variante du « toujours plus » de Nicolas Sarkozy. D’un côté le président des riches, de l’autre le représentant des pauvres. D’un côté l’oligarchie de la fuite en avant, de l’autre le populisme et ses bouffées nostalgiques. Mais Mélenchon a bien évolué depuis son passage chez les trotskistes (1972-1975), il laisse une place à la planification écologique dont nous dirons bientôt quelques mots. De notre côté nous n’avons pas changé, depuis notre vote pour René Dumont en 1974 : l’écologie d’abord ! Nous devons clairement expliquer aux citoyens que les facteurs de production sont à la fois le travail, le capital et surtout les richesses de la biosphère. Nous devons ajouter que le programme de la révolution industrielle, « les humains d’abord », nous amène au bord du gouffre maintenant que nous avons pillé toutes les richesses de la biosphère.

NB : le programme du Front de gauche (L’humain d’abord) est en vente en librairie pour 2 euros…

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2/2) appel à la désobéissance

Quatre cents prêtres et diacres en Autriche se prononcent pour l’ordination des femmes et la fin de la règle du célibat. Helmut Schüller, l’initiateur de l’appel à la désobéissance, insiste sur la nécessité de «  passer d’un système absolutiste, organisé autour du pouvoir romain, à une forme de démocratie telle qu’elle est pratiquée de longue date dans les communautés religieuses chrétiennes. » Les conservateurs ressentent ce choix du mot  » désobéissance  » comme une dangereuse provocation. Mais la véritable provocation, c’est le maintien d’un ordre injuste.

Cet appel à la désobéissance soutenue par des prêtres contre les conservateurs, nous réjouit profondèment : les Eglises partipent aussi de la soumission des peuples. Il est significatif que la langue française n’offre pas de substantif pour le verbe désobéir… comme si l’acte de désobéissance ne pouvait pas être légitimement revendiqué. On ne dispose que de l’adjectif désobéissant qui, selon le Petit Robert, « ne se dit guère que des enfants ». De celui qui désobéit, on peut dire qu’il est désobéissant, on ne peut pas dire qu’il est un désobéissant, comme on dit de celui qui milite qu’il est un militant. Plutôt que de substantiver le participe présent du verbe désobéir (désobéissant), il nous semble préférable avec Jean-Marie Müller de créer un mot nouveau, celui de désobéisseur : qui revendique haut et fort sa désobéissance et entend en assumer toute la responsabilité. 

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1/2) appel à la désobéissance généralisée

L’éducation des petits d’hommes a pour finalité d’en faire, non pas des citoyens obéissants, mais des citoyens responsables, capables d’apprécier et de juger la loi à laquelle l’Etat leur demande d’obéir. En clair, les enfants ne doivent pas obéir à un ordre injuste, quel que soit celui qui le leur demande ; à plus forte raison les adultes.

La liste des désobéissances citoyennes commence à être longue, mais à part Gandhi et Martin Luther King, trop peu connue. Tous les enfants de France devraient connaître la Déclaration des 121 sur le droit à l’insoumission en 1960 dans la guerre d’Algérie , le Manifeste des 343 en 1971 pour légaliser l’avortement, l’action illégale mais légitime des faucheurs volontaires, le collectif des déboulonneurs pour barbouiller les publicités, etc. Pour mieux connaître l’importance de la désobéissance civile, lire L’impératif de désobéissance de Jean-Marie Muller (éditions le passager clandestin, 2011). En résumé, si je suis libre en obéissant à la loi lorsque celle-ci garantit une juste égalité des chances pour tous, je ne peux rester libre qu’en lui désobéissant lorsque ce n’est manifestement pas le cas. L’homme n’accomplit son humanité qu’en devenant auto-nome, c’est-à-dire en n’obéissant qu’aux lois auxquelles sa conscience et sa raison donnent leur assentiment. L’histoire des résistances aux lois iniques fait partie intégrante de l’histoire des sociétés. La désobéissance civile est la respiration de la démocratie.

Le problème de nos sociétés pseudo-démocratiques, en fait soumises aux diktats de l’économie, c’est qu’il faudrait pratiquement désobéir à tout. Non seulement désobéir à la guerre, aux OGM, à la publicité…, mais désobéir aussi aux petits chefs dans les bureaux, à la consommation de masse, à la société du spectacle, au productivisme, au populationnisme, à la mondialisation, etc. Mais alors que des prêtres lancent un « Appel à la désobéissance »* vis à vis de leur hiérarchie, ce qui domine dans la société thermo-industrielle, c’est le culte de la soumission !

* LE MONDE du 14 septembre 2011, Un  » appel à la désobéissance  » soutenu par des prêtres secoue l’Eglise d’Autriche

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Nicolas HULOT nous quitte, il reviendra après sa déprime

Nicolas Hulot vient d’exposer les raisons qui, à ses yeux, expliquent le « rejet » dont il a fait l’objet*. Pour lui, c’est d’abord le sectarisme des Verts. NH dénonce aussi la tentation d’EELV de passer un contrat de gouvernement avec le PS pour 2012. Pour NH l’écologie reste la « troisième dimension de la politique », hors du clivage gauche-droite. Nicolas, dont nous avons salué plusieurs fois l’engagement écolo sur ce blog, nous déçoit. Il a abandonné le combat, il devient le Jospin de l’écologie qui démissionne au moment le plus crucial. Dommage ! Nous laissons la parole aux commentateurs du monde.fr qui reflètent le mieux notre sentiment :

  • Un politique, ça donne des coups, ça prend des coups. Visiblement Hulot n’en a pas la trempe.

  • Et oui monsieur Hulot. Quand on s’engage dans un parti, quel qu’il soit, il faut s’attendre à n’être pas applaudi tout le temps. Et il faut ruser, il faut travailler et ne pas imaginer que son seul nom suffira…

  • Où est la cohérence ? Il regrette que les membres du parti l’aient considéré comme « un corps étranger suspect », mais qu’a-t-il fait pour mériter la confiance ? A-t-il milité au sein du parti dont il souhaitait les suffrages ? Non, il est juste entré en jeu à l’approche des élections. Maintenant, il râle, et cette aigreur dresse de lui un portrait pitoyable.

  • Il a essayé, peut-être, mais très peu. S’il avait eu la conviction d’être au bon endroit, il serait resté. S’il pensait forcer le destin à lui tout seul et d’un seul coup, il se fourrait le doigt dans l’œil. Et puis ce ne sont pas les militants EELV qui ont voté plutôt Eva JOLY, mais l’ensemble des sympathisants qui se sentaient concernés.

  • Voilà le mauvais joueur, le mauvais perdant. Il montre un mépris pour ses électeurs et une faible volonté.

  • Manifestement N.Hulot est un naïf, il ne comprend pas le fonctionnement et la logique d’un parti politique… EELV est un parti politique qui se présente devant les électeurs : il faut gagner. Pour gagner, il faut se positionner, faire des alliances, attaquer… Faire de la politique, c’est gérer des rapports de force dans un processus électoral.

  • Vous ne l’avez pas compris, il essaie JUSTEMENT de changer la manière dont la politique est faite. Le rapport de force ne me semble pas être compatible avec le débat de fond. Hulot avait la capacité de mobiliser bien au delà d’EELV.

  • M. HULOT découvre que l’intérêt commun n’est pas le moteur de la politique. Faire avancer l’écologie politique commence par prendre conscience de cela puis d’agir ensuite de façon tactique comme l’a bien fait Mme Joly.

  • Il est évident que NH avait été infiniment plus efficace pour l’environnement en 2007 qu’il ne l’aurait été en 2012 au sein du panier de crabes qu’est un parti. Même s’ils n’ont pas tenu toutes leurs promesses (loin de là…), le « Pacte écologique » puis le « Grenelle de l’environnement » ont plus fait concrètement que des générations de Voynet ou Cochet.

  • Hulot comme Bayrou est victime de cette bipolarisation droite-gauche qui ruine ce pays depuis 45 ans. L’élection présidentielle est une catastrophe, alors que dans une vraie démocratie on aurait des législatives, une majorité de circonstance avec des alliances et un vrai 1er ministre responsable. Toutes les sensibilités représentées, c’est ça la démocratie, pas ce cirque d’un monarque élu.

  • L’urgence écologique presse comme l’a fait remarquer M. Hulot dans ses documentaires. Alors ne vaudrait-il pas mieux contribuer à un parti « écologiste » imparfait que de ruiner ses chances en distillant son poison dans la tête des électeurs potentiels ? M. Hulot dessert la cause écologiste.

  • Imaginons Hulot désigné candidat. Il aurait fait, allez, soyons fous, 17 %. Il n’aurait pas donné de consignes de vote au second tour, comme Bayrou en 2007. L’essentiel de son état-major se serait quand même rallié au candidat socialiste, pour devenir ministre et obtenir un groupe parlementaire. L’exacte duplication du « Nouveau Centre » de 2007, à droite avec Sarkozy. Au fait, en 2011, c’est devenu quoi, le « Nouveau Centre » ? Les mecs du genre Hulot ou Bayrou n’ont malheureusement pas d’avenir.

  • Le centre de Bayrou ou Borloo est le ventre mou de la France, sans autre doctrine que l’ambition électoraliste. L’écologie politique, avec ou sans HULOT, est un projet de changement civilisationnel qui s’appuie sur les données de l’écologie scientifique et les images d’une planète dévastée si bien décrites par le Titanic de Nicolas. Ce n’est pas parce qu’on a échoué une fois dans l’écologisation du politique qu’il faut abandonner…. Nicolas, revient !

* LEMONDE.FR du 12.09.11, Nicolas Hulot règle ses comptes avec Europe Ecologie-Les Verts

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choisir entre écologie politique et Front National

Comment trancher entre écologie et extrême droite ? Marine Le Pen avait jugé le projet de l’écologiste Nicolas Hulot compatible avec celui de son propre parti : « On a relu avec mes conseillers le projet qu’il avait fait en 2007… Il y a énormément de choses qui sont tout à fait compatibles avec le projet du Front national ». Aujourd’hui les conseillers d’Eva Joly sont persuadés que leur candidate a des marges de manoeuvre et des électeurs à conquérir… du côté du Front national*. Par contre Eva Joly se dit opposée au Front National… sur la question européenne : « Nous sommes radicalement opposés au FN : ils ne tiennent pas compte de la réalité. Ils préconisent la sortie de l’euro. Les solutions sont européennes. Ne croyez pas des bonimenteurs. »

Soyons complexe, plus complexe que les petites phrases que les journalistes du MONDE ou les chargés de communication des politiques mettent en évidence. Le slogan fondamental de l’écologie politique pourrait être « produire local et consommer local pour résister à la mondialisation ». Il faut relocaliser, ce qui implique d’acheter plus européen que chinois, plus français qu’européen, plus régional que français. Cela ne veut pas dire à l’égal du Front National préférer sa soeur à ses cousines, les filles françaises plutôt que les étrangères. Que Laurent Ozon (membre du bureau politique au début de cette année et démissionnaire depuis) ait apporté à Marine le Pen le concept du « localisme », n’est pas un problème en soi. Si le FN reprend une bonne idée, cela reste une bonne idée. Sur un territoire qui tend à la résilience aux chocs provoqués par les hydrocarbures (descente énergétique et réchauffement climatique), peu importe votre étiquette, marxiste ou d’extrême droite, chef d’entreprise ou artisan, nous avons tous l’obligation de travailler ensemble pour bâtir une société viable, vivable et durable. Mettre en avant le collectif local, c’est obligatoirement miser sur des rapports démocratiques… contrairement au FN. Les jeux partisans de préparation à la présidentielle française ne devrait nous intéresser… que de très loin. Il n’y a pas de sauveur suprême, la solution aux crises se trouve d’abord dans notre comportement individuel, familial, local : ne pas vivre à crédit, diminuer sa consommation énergétique, instaurer des relations conviviales de proximité. Il n’y a de véritable démocratie que locale.

Pour conclure, cette phrase qui résume la philosophie d’Eva Joly : « Nous, les écolos, nous portons la complexité du monde, le FN porte une simplification mensongère. » Cette analyse rejoint la nôtre, lire notre post « écologisme contre extrême droite » : Il est plus facile dans l’adversité de montrer du doigt un coupable présumé. Face à cette tactique souvent utilisée dans la pratique électorale, l’écologie politique présente nombre d’analyses et de pratiques possibles, c’est-à-dire des réponses complexes.

* LE MONDE du 11-12 2011, Les écologistes s’adressent aux électeurs frontistes

 

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Aubry-Hollande face au dilemme croissance/environnement

Il y a une liaison fatale entre croissance économique et destruction environnementale ; le PS n’en a pas encore conscience. Au Congrès de Reims en 2008, la croissance était déjà dans toutes les têtes socialistes. La motion de Delanoë proposait la « Promotion d’un nouveau modèle de développement qui articule croissance, justice sociale et écologie ». La motion de Martine Aubry affirmait avec force que « la croissance économique et l’impératif écologique constituent un seul et même enjeu ». Aujourd’hui Aubry veut prendre le relais d’un Sarkozy qui cherchait la croissance avec ses dents : « Une offensive de civilisation est fondée sur un autre modèle de croissance… Sans croissance on ne peut rien… » (LE MONDE du 3 mars 2011, Le livre-programme du PS). Lors de leur université d’été les 27 et 28 août, même rengaine. Les mots «  crise écologique, après-pétrole, changement de civilisation » émaillent les discours. Mais les mots « croissance durable, croissance partagée, croissance verte » restent omniprésents ! Dans un discours devant ses fans, François Hollande était même radicalement croissanciste : « On ne peut pas transiger avec la croissance, je ne crois pas à la décroissance. Lorsque le PIB décroît, les conséquences sociales sont extrêmement négatives, chômage, déficit, dette. La décroissance, c’est un facteur de crise sociale. »

Or la croissance dans un monde fini est impossible et plus personne ne devrait croire à la hausse du PIB comme solution passe-partout. Comme le note Hervé Kempf, « raisonner avec un concept du passé ne permet pas de penser le monde de demain. Nombre de hiérarques du PS semblent continuer à rêver de l’âge d’or des « trente glorieuses » qui a pour première caractéristique d’être derrière nous… Se focaliser sur un objectif que l’on ne pourra pas atteindre, la croissance, prépare les pires déceptions »*.

Sur le fond, le PS est un vieux parti d’élus, aux problématiques strictement électoralistes. Son pôle écologique est aux abonnés absents, n’osant même pas présenter un questionnaire écolo aux candidats aux primaires. Comme l’exprime un commentateur d’Hervé Kempf sur lemonde.fr, « les électeurs du PS ne comprennent pas que leurs valeurs sont bien mieux représentées, sur le fond, par l’Ecologie, et en disant cela je ne plaide pas pour EELV, dont l’intelligence reste à prouver, mais pour l’Ecologie. La croissance est, par définition, une exponentielle. Impossible ».

* LE MONDE du 31 août 2011, Socialistes écologistes ?

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croissance zéro et début de la sagesse

Victoire, croissance zéro de l’économie française : 0 % au deuxième trimestre 2011 selon l’Insee*. Bravo, le coup d’arrêt de la croissance va compliquer la préparation du budget 2012. Enfin les politiques vont devoir raisonner autrement, comme Maurizio Pallante** :

« Une économie qui ne croît pas est considérée comme un poisson qui ne nage pas. Une contradiction en soi. Un cauchemar dont on ne peut parler que par périphrase. Et donc, on continue… L’optique de la décroissance signifie au contraire réduire la quantité de marchandises dans sa vie. On choisit de ne pas avoir la  télévision parce qu’on n’accepte pas de passer son temps de manière idiote et qu’on a des choses plus intéressantes à faire. On choisit de ne pas se soumettre aux comportements standardisés par la publicité. On ne renonce à rien.

Le mouvement pour la décroissance heureuse se propose de promouvoir la substitution la plus vaste possible des marchandises produites industriellement et acquises dans les circuits commerciaux par l’autoproduction de biens. Ce choix entraîne une diminution du PIB, mais améliore la vie industrielle et collective et les conditions environnementales. Plus importante est la quantité de biens qui peuvent être autoproduits, moindre est la quantité de marchandises qu’il faut acheter, moins il faut d’argent pour vivre. Cette perspective implique que dans les pays industrialisé, on redécouvre et on valorise certains styles de vie du passé, abandonnés de façon irresponsable au nom d’une conception du progrès mal interprétée.

Pour adhérer au mouvement pour la décroissance heureuse, il suffit :

–          d’autoproduire le yaourt ou n’importe quel autre bien primaire : le coulis de tomate, la confiture, le pain, les tartes, l’énergie thermique ou électrique, des objets ou des outils ;

–          d’offrir gratuitement des services à la personne qui se font en général contre paiement : assistance aux enfants dans les premières années, aux personnes âgées, aux mourants. »

* LE MONDE du 13 août, le gouvernement face à la stagnation de l’économie

** La décroissance heureuse (la qualité de la vie ne dépend pas du PIB) de Maurizio Pallante

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6/6) Nicolas Sarkozy, un cancre de l’écologie à l’Elysée

En 2001, Nicolas Sarkozy n’accorde pas une seule ligne à l’écologie dans « Libre », son autobiographie de 400 pages. S’il évoque le naufrage de l’Erika, c’est parce que la marée noire a touché la côte où il roule l’été à bicyclette ! Même ignorance du sujet en 2006, avec « Témoignage », livre confession destiné à asseoir sa candidature présidentielle. Dix lignes sur 281 pages pour souhaiter que le ministre de l’écologie ait de « vrais leviers d’action ». La campagne présidentielle de 2007 va modifier la donne, sur la forme, pas sur le fond.

Sarkozy, sous la pression de Nicolas Hulot, a signé le pacte écologique en 2007, comme les autres présidentiables. Mais au second tour des élections présidentielles, Ségolène Royal et Nicolas Sarkozy proposaient à leurs électeurs le même objectif : intensifier la croissance des productions, des consommations et des déplacements sans s’interroger sur leur contenu. Sarko a été élu le 6 mai 2007, et puisque l’écologie est à la mode, il en fera un cheval de bataille. Il met Alain Juppé en charge de l’écologie et le dote du titre de ministre d’Etat, le seul du gouvernement. Alain Juppé, numéro 2 du gouvernement, obtient un périmètre ministériel considérablement élargi, énergie, transports, aménagement du territoire. Ainsi une des demandes du pacte écologique (un vice-président) est presque satisfaite. Jean-Louis Borloo va remplacer rapidement Juppé.

Sarkozy lance le Grenelle de l’Environnement en octobre 2007 : « C’est bien à une révolution que nous invite ce Grenelle, une révolution dans nos façons de penser, dans nos façons de décider, une révolution dans nos comportements, dans nos politiques, dans nos objectifs. » Dans un premier temps, le Grenelle de l’environnement est un succès. Avec la participation des ONG, le citoyen est presque placé au centre de la politique environnementale, du moins dans les débats préalables. On propose d’institutionnaliser les associations écologiques en leur donnant des sièges au Conseil économique et social, on le fera. Mais dans le même temps, Sarko instaure une commission pour « libérer la croissance » dont il disait à l’avance qu’il respecterait toutes les indications. Sarko mène deux discours incompatibles, répondre aux méfaits issus de la croissance et accélérer la croissance.

A la mi-2009, le chef de l’Etat se présentait encore comme le « premier écologiste de France » et offrait le DVD du film « Home » de Yann Arthus-Bertrand à son homologue américain Barack Obama. Devant le Conseil national de l’UMP début décembre 2009, Sarkozy affirmait : « L’écologie, ce n’est pas une lubie, un truc, un positionnement, c’est une conviction. Nous sommes la dernière génération à pouvoir agir avant qu’il ne soit trop tard. A Copenhague la semaine prochaine, c’est l’avenir de la planète  qui se joue. » Mais le 6 mars 2010, Sarko lâche au Salon de l’agriculture : « Je voudrais dire un mot de toutes ces questions d’environnement. Parce que là aussi, ça commence à bien faire. Je crois à une agriculture durable. […] Mais il faut que nous changions notre méthode de mise en œuvre des mesures environnementales en agriculture. »

Trois ans après les débats, la loi d’application dite Grenelle 2 n’avait toujours pas été approuvé par le Parlement. Les agriculteurs, les transporteurs routiers, les industriels demandent des aménagements de la loi « au nom de la crise économique ». Avec cette loi, les régressions sont inacceptables, sur les éoliennes, la taxe carbone, l’étiquetage carbone. Le nucléaire était hors-Grenelle, le gouvernement considère maintenant qu’un « accroissement significatif » de rejets radioactifs n’est pas une « modification notable » d’une installation nucléaire. Sarkozy poursuit la politique de ses prédécesseurs, glorification des centrales nucléaires, soutien inconditionnel à « l’assurance-vie » d’une nation que constituerait la dissuasion nucléaire.

Un des autres points du pacte écologique signé par Sarko devait être la taxe carbone comme réponse au changement climatique. Cette taxe carbone est déjà un échec avant même de se mettre en place. Le Premier ministre Fillon voulait fixer le prix du carbone à un prix ridicule, 14 euros la tonne. Lors d’un déplacement dans une exploitation céréalière en mars 2010, le chef de l’Etat confirmera : la taxe carbone ne sera pas appliquée en France, « sauf si l’Union européenne décidait de la reprendre à son compte ». La Fondation Nicolas Hulot a décidé à ce moment de se retirer des groupes de travail créés à l’issue du Grenelle de l’environnement.

Alors que les véritables menaces sont écologiques (pic pétrolier, réchauffement climatique, épuisement des ressources naturelles…) et conditionnent les bouleversements géopolitiques, tout montre que Nicolas Sarkozy n’a rien appris au cours des 4 premières années de son mandat.

NB : j’ai rédigé personnellement cette fiche sur Sarkozy en complément des 5 présidents précédents analysés par le livre de  Marc Ambroise-Rendu Des cancres à l’Elysée, sous titré « 5 Présidents de la république face à la crise écologique »

Michel Sourrouille

 

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5/6) Jacques Chirac, un cancre de l’écologie à l’Elysée

Jacques Chirac entre à l’Elysée le 17 mai 1995. Jusque là, Chirac n’avait jamais montré un réel intérêt pour la protection de la nature, l’environnement, l’écologie. Bien qu’il ait été ministre ou Premier ministre pendant 28 ans, de 1967 à 1995, on peine à dénicher une vraie pensée ou une action décisive en matière d’environnement. Ce petit-fils de paysan a cependant gardé le goût de la vie rurale. En mars 2004, on arrive à un accord avec la FNSEA, les paysans acceptent de contribuer davantage à la dépollution des  rivières. Mais les sondages donnent la majorité battue aux élections régionales. Chirac déclare alors : « Il ne sera pas touché aux redevances sur les nitrates. » Comme Premier ministre de Chirac en 1975, il avait porté sur les fonts baptismaux le Conservatoire du littoral auquel il voue un véritable attachement. Mais en 2006, le Premier ministre Villepin annonce triomphalement que les sommes que le Conservatoire pourra affecter à l’achat des terrains de bord de mer en 2007 atteindront 33 millions d’euros ; c’est le prix d’un kilomètre d’autoroute.

Des quatre Premiers ministres qu’il a lui-même désignés, aucun ne montre le moindre intérêt pour l’écologie. Il n’est donc pas surprenant qu’en 1995 il stoppe la procédure de désignation des sites Natura 2000, édulcore les propositions d’une commission du développement durable et refuse de muscler le ministère de l’environnement. La première titulaire, Corinne Lepage, au 22e rang du gouvernement Juppé, dresse dans son livre On ne peut rien faire, Madame le ministre la longue liste des mesures que les lobbies et l’administration ont enterrées. Balladur en 1994 et Juppé en 1996 distribuent des subventions pour soutenir le marché automobile. Dominique de Villepin lancera même en 2006 l’idée de subventionner les employés prenant leur voiture pour aller au bureau. Erratique sur la pollution automobile, la politique chiraquienne sera plus courageuse sur l’amiante. Pendant son mandat cesse enfin un scandale qui durait depuis De Gaulle.

Il y au moins un élément de la politique écologique dont on ne pourra enlever la paternité à Chirac, c’est la Charte de l’environnement, promise au cours de la campagne pour les présidentielles de 2002. Ses propres ministres sont réticents, évidemment rejoints par les représentants des milieux économiques. Quant aux parlementaires, ils sont soit épouvantés par cette innovation, soit, pour ceux de l’opposition, hostiles par principe à la « marotte » de Chirac. Au terme de quatre années d’obstination, le Chef de l’Etat parvient à faire voter sa Charte adossée à la Constitution, le 28 février 2005, par le Congrès réuni à Versailles.

Chirac a évolué en 12 ans. Après avoir appréhendé l’écologie comme un sujet politiquement risqué, il a compris à l’aube de son deuxième mandat et avec l’aide de Nicolas Hulot, que cette politique être un thème porteur. Pour populariser les concepts écologiques, il s’est montré le plus éloquent des cinq présidents successifs de la République.  Mais il n’a pas eu le courage de se donner les moyens de sa politique. Par exemple un grand ministère de l’Environnement et des ministres ayant un véritable poids politique. Son « écologie humaniste » lui donne une vision anthropocentriste de la crise planétaire, une approche probablement trop frileuse pour être véritablement efficace.

Chirac ne fait pas exception. Nos présidents élus au suffrage universel, si volontaristes, si constants dans l’effort quand il s’agit de l’atome, n’ont rien fait de semblable dans le domaine de la crise écologique. Les présidents ont bien tenté de planifier leur ambition écologique : des catalogues de bonnes intentions et des mesures le plus souvent homéopathiques. La réponse à la crise écologique est restée balbutiante, quasiment marginale. Pourquoi ? Tous partagent la croyance chrétienne selon laquelle l’homme a été créé pour dominer la nature. Que l’univers ait ses propres lois, que l’homme n’en soit qu’un rouage, qu’il dépende de la nature pour survivre, voilà un renversement de perspective difficile à accepter. Tous sont persuadés que la croissance économique est seule capable de répondre aux besoins croissants de l’humanité. Tous sont convaincus que la recherche scientifique et ses applications techniques trouveront réponse aux problèmes écologiques planétaires. Ces trois credos – religieux, économique et scientifique – les confortent dans le sentiment que rien ne presse. Surtout, ils ont tous compris que la crise écologique mondiale est un sujet à la fois trop technique et trop anxiogène pour être électoralement vendeur. Issus du sérail, nos présidents sont des politiques comme les autres. Dès 1995, Chirac donnait l’ordre de reprendre les essais nucléaires dans le Pacifique !

Marc Ambroise-Rendu dans son livre Des cancres à l’Elysée (5 Présidents de la république face à la crise écologique)

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4/6) Mitterrand, un cancre de l’écologie à l’Elysée

Son affiche de campagne en 1974 présente Mitterrand sur un fond de cheminée d’usine et de ligne à haute tension.  Durant cette campagne présidentielle, le terme environnement n’est utilisé qu’une seule fois. Si le terme remplit plusieurs pages de ses livres, cela reste du domaine littéraire. Les neuf pages de sa campagne de 1981 consacrées à l’environnement résultent en fait des succès électoraux des écologistes en 1977. La crise écologique reste une notion assez floue pour Mitterrand, sous-tendue par l’intime conviction que la science lui portera remède. « J’adore les chemins de fer, les avions et tous les transports rapides, jusqu’aux fusées qui nous entraîneront ailleurs quand la terre sera devenue trop exiguë », écrit-il en 1978 dans L’Abeille et l’Architecte.

Le mouvement écologiste – associations de défense de l’environnement et comités anti-nucléaires – est comme anesthésié par la franche victoire de la gauche en 1981. Les militants croient naïvement que  tout va devenir rose. Le début du septennat leur donne raison. Au Larzac comme à Plogoff, Mitterrand tient ses promesses de campagne. Mais strictement celles-là. On ne connaît même pas le nom du conseiller chargé de l’environnement durant les deux premières années du septennat. D’ailleurs, y en a-t-il seulement un ? Très vite il n’est plus question d’un moratoire nucléaire ou de stopper la modernisation de la force de frappe. On dénombre 80 tirs plus ou moins discrets de 1981 à 1994.  Au cours des deux septennats, on va inaugurer 38 réacteurs sur les 58 en fonctionnement aujourd’hui. Au fond de lui-même, Mitterrand assimile la technologie nucléaire au progrès. Celui-ci ne se refuse pas ; il se maîtrise. Il autorise la fabrication du mox, un mélange d’uranium et de plutonium de récupération. En 1989, il s’exprime ainsi : « Il faut préparer l’avenir, mettre au point les centrales du XXIe siècle. »

Sur cinq Premiers ministres, aucun ne pousse le président à sortir de son indifférence écologique. Pour les ministres eux-mêmes, ce n’est guère mieux. Haroun Tazieff, secrétaire d’Etat chargé de la prévention des risques technologiques et naturels majeurs, ne voit en 1984 aucun danger pour les alentours à Mururoa. Dans un pamphlet de 1989, il conteste à la fois l’effet de serre et la disparition de la couche d’ozone. Comme gouverner droit avec de tels conseillers ? Dans le gouvernement Cresson, le ministre de l’environnement Lalonde figurait à la 19e place, dans le gouvernement Rocard à la 35e. Mitterrand exprime en revanche sa mégalomanie en lançant de nombreux « grands chantiers » qui témoigneront de sa gloire pour des siècles : le Grand Louvre, la Très Grande Bibliothèque, la « pataphar » de l’Opéra Bastille, le nouvel arc de triomphe de la Défense. Au regard de l’écologie urbaine, les monuments mitterrandiens sont autant de piètres exemples. Lorsqu’en 1983 Mauroy présente son plan de rigueur, Mitterrand intervient sur le fait que les difficultés budgétaires ne doivent pas retarder ses grands projets. Le chef de l’Etat négligera par contre l’aménagement du territoire.

La loi littoral est votée en janvier 1986, mais il faudra une condamnation du Conseil d’Etat pour que le décret d’application soit enfin publié en 2000. Au premier tour des élections municipales de mars 1989, on enregistre une poussée des Verts. Mitterrand est furieux : « La montée des écologistes n’est qu’un épiphénomène. Ces gens-là n’ont aucune idée, aucun projet. Ils sont d’une ignorance crasse, ce sont des ennemis du progrès. Le nucléaire ? Mais rien n’est plus sûr ! » Des cinq présidents qui se sont succédés à l’Elysée de 1959 à 2007, Mitterrand est celui qui a le moins légiféré sur l’environnement.  Il ne s’est jamais intéressé aux dommages créés sur l’environnement par les marées noires, les pollutions automobiles, l’envahissement des déchets. Le bilan législatif est donc modeste.

En définitive Mitterrand a une conception anthropomorphique de la nature. Il rapproche cette création humaine qu’est le paysage des innovations dues aux découvertes techniques. Dans les deux cas, c’est l’homme qui est central : cultivateur, forestier, inventeur, technicien. Il a reçu une éducation catholique et reste dans la tradition des hommes politiques français, tous nourris de concepts judéo-chrétiens. Comme pour De Gaulle, Pompidou et Giscard, le rapport de l’homme avec la nature est conditionné par le texte de la Genèse : « Croissez et multipliez et remplissez la terre et soumettez-là, dominez les poissons et la mer, les oiseaux du ciel et tout ce qui est sur terre. » Conçu à l’image de Dieu, l’homme a été placé dans l’univers pour le gouverner. Voilà pourquoi, comme ses devanciers, Mitterrand a du mal à passer du sentiment de la nature – phénomène culturel – à la science des équilibres écologiques ou à la gouvernance durable.

Marc Ambroise-Rendu dans son livre Des cancres à l’Elysée (5 Présidents de la république face à la crise écologique)

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