Futur de l’écologie politique, disséminé dans les partis

Hier, en Italie et en Espagne, les mouvements citoyens « 5 étoiles » et « Podemos » ont ébranlé les grands partis qui croyaient contrôler indéfiniment la vie politique nationale. Aujourd’hui « les Insoumis » font de même en France. Jean-Luc Mélenchon aurait dit au secrétaire national d’EELV : « Vous devez disparaître du paysage. ». Le « vous » concernait aussi bien EELV que le PCF, le PS ou LR… Sans rentrer dans les méandres du dégagisme ambiant, il faut bien constater que le système des partis traditionnels, parfois centenaires, est profondément ébranlé. L’élaboration du programme avait été confié à des officines ou des tractations souterraines. Le choix du candidat dépendait de primaires ouvertes, qui privaient les militants de leur pouvoir. La communication politique est dorénavant réalisée par des professionnels. Le débat politique a lieu désormais dans les médias. L‘élection comme président français d’Emmanuel Macron à la tête d’un mouvement qui avait à peine un an d’existence est un autre signe de l’obsolescence des partis installés par impact médiatique interposé. Mais la marginalisation du PS à gauche ou du RPR/UMP/LR à droite ne peut émouvoir un militant écolo : il ne situe ni à droite, ni à gauche. Quelque orientation partisane qu’on puisse prendre, nous sommes tous écolos par définition parce que raisonnablement personne ne souhaite voir son habitat se dégrader. Alors, où l’écologie politique peut-elle se situer sur l’échiquier politique ?

L’avenir d‘Europe Ecologie Les Verts est incertain, tant dans son périmètre d’action que dans son existence même, car d’autres partis se sont emparé de manière forte de l’écologie politique. Pour la première fois depuis 1974, il n’y avait plus de candidature spécifiquement écolo lors de la présidentielle 2017 pour la bonne raison que le PS de Hamon reprenait une bonne partie du programme d’EELV et que Mélenchon faisait une large part dans son programme à l’urgence écologique. La nomination de Nicolas Hulot comme ministre d’État à l’écologie par Macron témoigne aussi de cette rupture historique. René Dumont expliquait très clairement en 1974 le pourquoi de sa candidature à la présidentielle : « A chaque élection, des écologistes en colère vont trouver les candidats des divers partis politiques. Ils sont reçus avec… une certaine condescendance. En juin 1972, le ministre des finances Giscard d’Estaing organise un colloque sur les conclusions fort alarmantes du Club de Rome sur les limites de la croissance. En mai 1974, le candidat à la présidentielle Giscard d’Estaing ne leur accorde plus la moindre considération, ne parle que de croissance ! » Dans le contexte actuel où la plupart des dirigeants politiques censés sont conscients du réchauffement climatique et autres risques environnementaux, cette justification d’une autonomie politique de l’écologie n’a plus cours. Même si l’ambiance générale est encore au croissancisme, le sentiment général est qu’il deviendra nécessaire de changer nos comportements. Emmanuel Macron a affirmé fin juin la nécessité « d’une forte volonté politique relayée par l’ensemble du gouvernement… Nous allons décarboner la production d’énergie, soutenir le prix du carbone, développer la finance verte, mobiliser les financements publics et privés, intégrer le changement climatique dans le commerce international et dans nos modes de production, maintenir les énergies fossiles dans le sous-sol... » Un programme décroissanciste sans s’en rendre compte ! Dès 2006, Nicolas Hulot exprimait ce qui devait advenir : « Nous avons besoin que chacun participe au changement. L’impératif écologique dessine un paysage politique radicalement différent de ceux auxquels nous sommes habitués. Il suppose une confluence d’intérêts plutôt qu’un conflit d’intérêts. Il faut en finir avec les logiques exclusives de parti, cette psychologie de horde où l’individu abdique toute conscience pour privilégier les intérêts de sa boutique. Si quelque chose émerge, ce ne sera ni à droite ni à gauche, ni au centre, mais au-dessus. Il est indispensable que toutes les familles politiques partagent le même diagnostic et votent de concert les grandes orientations pour une mutation écologique de notre société, d’autant plus qu’elles seront parfois rugueuses. »*

Dans son livre**, Michel Sourrouille n’avait pas perçu la rapidité de la prise de conscience politique : « Un ou une candidat(e) de l’écologie à une présidentielle est nécessaire puisque les tenants du système actuel n’ont pas encore compris que nous allons changer de civilisation. » Mais il ne s’est pas trompé sur l’essentiel : « Ne faisons pas de confusion sur cette expression – Bientôt l’écologie au pouvoir -. Elle n’est pas centrée sur une personne, mais sur un projet de société porté par l’écologie scientifique et politique. Pour que ce projet se concrétise vraiment, il faut que la plupart des électeurs pensent, vivent et agissent comme des écolos… C’est à ce moment-là seulement que l’écologie sera au pouvoir quel que soit le nom de notre président. »

* Nicolas Hulot avec le Comité de veille écologique, Pour un pacte écologique (édition calmann-lévy 2006)

** L’écologie à l’épreuve du pouvoir (éditions sang de la Terre, juillet 2016)

1 réflexion sur “Futur de l’écologie politique, disséminé dans les partis”

  1. Laissons tomber ces guéguerres stupides entre écolos de toutes les couleurs… admettons que le véritable écolo 100% pur jus serait ni de droite ni de gauche, mais au dessus.
    Simple exemple qui nous montre que nous n’avons rien à attendre ni espérer de certains écolos. Mais pire, que nous tournons en rond.

    On a aimé l’idée que Macron pourrait porter un espoir pour l’écologie et on s’est réjoui de l’arrivée de Nicolas Hulot dans ce gouvernement ni-ni qui croit pouvoir concilier le libéralisme et en même temps le social et en même temps l’écologie. Que l’on ait envie d’y croire, d’en faire le pari, de ramer avec eux… soit ! En tous cas c’est sans moi.

    Il y a quelques jours, à la question de savoir si il y aurait de nouvelles LGV… Nicolas Hulot a clairement annoncé que ce n’était pas franchement la priorité. J’aurais pu me réjouir d’une telle réponse.
    Sauf qu’il a rajouté : « Si on avait les moyens volontiers, mais on n’en a pas franchement les moyens, en tout cas je découvre que nous n’avons pas les moyens ».
    Les bras m’en sont tombés ! Et sur cette phrase, je n’ai entendu aucun commentaire.
    Que Nicolas découvre la lune n’est pas le problème le plus grave, mais il parlait là de moyens financiers ! Autrement dit, si nous avions de l’argent à ne pas savoir qu’en faire… alors OK pour toujours plus de LGV .

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