Le droit à l’avortement est-il un droit ?

Devant les eurodéputés, Emmanuel Macron a défendu le 19 janvier 2022 le droit à l’IVG : « Je souhaite que nous puissions actualiser la Charte des droits fondamentaux [de l’Union européenne], notamment pour être plus explicites sur la reconnaissance du droit à l’avortement » Or la révision de la Charte des droits fondamentaux ne peut se faire qu’avec l’accord unanime des Vingt-Sept. La Pologne s’opposera à une telle idée. De plus un protocole annexé au traité d’adhésion de Malte à l’UE lui garantit que la législation européenne, actuelle et future, ne pourra modifier la loi nationale sur l’IVG. L’avortement est totalement illégal dans ce pays en cas d’infraction la peine encourue va de 18 mois à trois ans de prison.

Lire, Association nataliste versus malthusienne

En fait l’avortement n’est qu’une norme sociétale qui évolue dans le temps. En France, la loi du 31 juillet 1920 réprimait la provocation à l’avortement et à la propagande ‎anticonceptionnelle. L’avortement était considéré comme un crime et passible de la cour d’Assises. Cuba est devenu en 1965 le premier pays d’Amérique latine à légaliser l’avortement. L’interruption volontaire de grossesse (IVG) n’a été légalisée en France qu’en 1975. La ministre Simone Veil, a enduré stoïquement les vitupérations d’une horde de mâles, majoritaire à l’Assemblée nationale. Elle a été traitée de meurtrière, de pourvoyeuse d’une loi satanique ! En avril 1997, une réforme pénale au Salvador a interdit toute forme d’avortement, y compris en cas de viol, lorsque la vie de la mère est en danger ou quand le fœtus n’a aucune chance de survie. L’avortement reste un tabou dans de nombreux pays. L’IVG est totalement interdite dans une quinzaine de pays, Égypte, Nicaragua, Philippines, Sénégal… Dans de nombreux pays, l’avortement est soumis à des conditions extrêmement restrictives. Ainsi, l’IVG est accessible uniquement en cas de danger pour la vie de la mère en Afghanistan, Bangladesh, Côte d’Ivoire, Guatemala, Irak, Venezuela, etc. Par contre l’avortement a été légalisé en septembre 2021 dans le micro-Etat de Saint-Marin. Mais dans l’État américain du Texas, une loi particulièrement restrictive est entrée en vigueur le 1er septembre 2021. La législation interdit toute interruption de grossesse dès lors que les battements de cœur du fœtus sont perceptibles, soit à partir de la sixième semaine de grossesse environ. Et Amy Coney Barrett, bien connue pour son opposition à l’interruption volontaire de grossesse, est devenue membre de la Cour suprême des États-Unis la même année.

La question se pose, quelle est la position à prendre, selon quels critères ? On peut certes mettre en avant le droit de la femme à la libre disposition de son corps. D’autres sont contre l’IVG pour des raison religieuses, l’île de Malte par exemple est très catholique. Mais ce qui fait la cohérence des prises de positions anti-avortement est politique. Toutes étiquettes politiques confondues, historiquement les gouvernements, ivres de chair à canon ou de main d’œuvre servile, ont mené une lutte anti-malthusienne.Depuis Jean Bodin (1530-1596), on répète cette maxime, « Il ne faut jamais craindre qu’il y ait trop de sujets, trop de citoyens : vu qu’il n’y a richesse, ni force que d’hommes. » Pour les économistes, plus il y a de travailleurs, plus la croissance est forte. Pour les marxistes, la masse des prolétaires permettra la révolte et mènera à la prise du pouvoir. Tous ces arguments sont obsolètes. Cette mentalité nataliste ne tient aucun compte de la capacité de charge des territoires alors que tous les indicateurs montrent que la Terre est saturée d’humains. L’impératif biblique « croissez et multipliez » a donné à l’espèce humaine un droit exorbitant de pouvoir se développer en nombre bien plus que les capacités des écosystèmes le permettent. Ce tour de force ne peut réussir qu’au détriment des autres espèces (chute de la biodiversité). Les guerres, les famines et les épidémies ponctionnent le surplus de vies humaines. Si des pays interdisent encore l’IVG, aucun ne s’interdit la guerre. Pour éviter ces drames, les politiques auraient été responsables si, depuis très longtemps, ils avaient favorisé les méthodes de contraception et autorisé l’avortement. Rappelons qu’une loi libéralisant l’IVG n’oblige pas à avorter.

Lire, On interdit l’avortement, donc nous manquons d’eau

Amy Coney Barrett avait déclaré en 2006 que, « si vous pouvez garder à l’esprit que votre objectif fondamental dans la vie n’est pas d’être un avocat, mais de connaître, d’aimer et de servir Dieu, vous serez vraiment un autre type d’avocat…Gardez à l’esprit que votre carrière juridique n’est qu’un moyen pour une fin et cette fin est la construction du royaume de Dieu ». Rien de démocratique dans cette déclaration, ce sont des arguments d’autorité pour un but indéfinissable. La démocratie est certes un lieu vide où on peut déclarer légitime une chose et son contraire. Mais il y a un fil directeur. Une démocratie menée par des citoyens responsables, c’est au fond l’art de se plier aux contraintes extérieures. Le constat mondial de surpopulation devrait inciter à autoriser l’IVG dans tous les pays sans exception.

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9 réflexions sur “Le droit à l’avortement est-il un droit ?”

  1. Bonjour.

    Ce n’est pas honnête d’insinuez que les marxistes soient contre le droit à l’avortement ! La phrase que vous citez est un appel à ce que l’ensemble des travailleurs déjà nés se révoltent ; en aucun cas ce n’est un appel à maximiser la natalité au prix du piétinement du fait que les femmes disposent de leur propre corps !

    Ne confondez pas avec le stalinisme !

  2. Esprit critique

    – « En fait l’avortement n’est qu’une norme sociétale qui évolue dans le temps. »
    Exactement, et les exemples exposés par Biosphère nous montrent que ça évolue dans un sens comme dans l’autre. Ce n’est qu’une affaire de mentalités, voire de mode, l’air du temps.

    – « La question se pose, quelle est la position à prendre, selon quels critères ? […]
    Mais ce qui fait la cohérence des prises de positions anti-avortement est politique.»
    Là encore POUR ou CONTRE, choisis ton camp camarade ! Oui mais, suivant quels critères ?
    Le critère principal qui déterminera la réponse à cette question sera évidemment l’idée qu’on se fait du sujet. Seulement comme cette idée est fortement conditionnée par l’air du temps, la question sur la position à prendre est biaisée. Ce serait un peu comme demander quelle est la position à prendre pour les prochaines élections, et selon quels critères.

    1. Esprit critique

      Euh… les sondages peut-être… c’est un bon critère les sondages, non ?
      Oui pourquoi pas. Et depuis quand la cohérence (entendue comme harmonie de pensée) serait-elle le monopole des sondages ?
      Voire du (ou de la) politique, modèle parfait de cohérence. La bonne blague !
      Les critères pour prendre position (POUR ou CONTRE, ou Ni-Ni) ) sur ce genre de question (l’avortement, comme la peine de mort, l’euthanasie, pudiquement nommée «suicide assisté» etc.) sont purement individuels. Ce sont les idées que chacun se fait de la vie et de la mort, du bien et du mal, de la liberté, du bien commun etc. Ce sont donc des critères philosophiques voire religieux. Et ce n’est pas parce que la Loi ou le Curé dit qu’il faut être POUR ou CONTRE, que chacun se doit de s’agenouiller et dire amen.

  3. et bien dansez maintenant

    Amy Coney Barrett:
    Obéir entièrement à Dieu en lui soumettant sa vie (pourquoi pas, chacun fait ce qu’il veut avec son cul!) mais celles de ses concitoyens quand on est une élue, ce n’est pas défendable, car excluant, sans nuance et sans débat.
    Point inattaquable, indiscutable que d’attribuer le passé, le présent et l’avenir de toute chose ou tout être, à Dieu.
    En le plaçant au-dessus de tout, plus aucune discussion n’est possible, ni union! Il y a Dieu (tout là-haut dans les nuages!), les croyants et les autres.
    Je crois bien que c’est le paroxysme de l’autoritarisme absolu dans la tolérance pourtant chantée tous les dimanches matins!

    1. Allons allons soyons tolérant !

      Allons allons, vous ne pouvez pas juger cette Amy Coney Barrett, vous n’êtes pas américain. N’oubliez pas que Dieu fait partie de leur politique, que Dieu est dans la Constitution de chacun des 50 états, qu’il s’invite dans toutes les campagnes etc.
      Mais du côté de chez nous c’est quelque peu différent, il y a bien longtemps que Dieu est mort. Et du coup tout est permis. Et ce dans tous les domaines, en France, aux USA et finalement partout, tout et n’importe quoi ! Des dieux, des papes, des curés, des croyants, des mécréants et j’en passe… il en dégueule de partout ! 🙂

      1. – « Une démocratie menée par des citoyens responsables, c’est au fond l’art de se plier aux contraintes extérieures. Le constat mondial de surpopulation devrait inciter à autoriser l’IVG dans tous les pays sans exception.» (Biosphère)

        Soyons fous, soyons-le jusqu’au bout ! Fous ou tolérants, responsables ou irresponsables peu importe, au stade où nous en sommes ça n’a plus d’importance.
        Dans tous les pays sans exception, démocratie ou pas au stade actuel on s’en fout, le constat mondial de surpopulation devrait inciter chacune zé chacun à se faire stériliser. Et à se faire euthanasier le jour de sa retraite. Mais attention, inciter ça veut dire con vaincre, et non pas contraindre. La bonne blague. 🙂

  4. Esprit critique

    – « Le droit à l’avortement est-il un droit ? » (Biosphère)
    Cette question est des plus pertinentes. Particulièrement ces temps-ci où de plus en plus de mots sont «façonnés jusqu’à rendre méconnaissables les idées qu’ils véhiculent» (Goebbels, ministre de l’Éducation du peuple et de la Propagande du Reich). Une chose est certaine, en matière de propagande nous sommes servis. Et il faut reconnaître que Macron est un champion pour nous vendre des vessies pour des lanternes. Pas que lui bien sûr.

    1. – « Je souhaite que nous puissions actualiser la Charte des droits fondamentaux [etc.] »
      ( Macron le 19 janvier 2022 à la tribune du Parlement européen )

      Remarquons déjà que ce souhait ne figurait pas dans ses vœux pour 2022. Comme il ne nous a pas dit non plus qu’il avait «très envie» d’en emmerder certains.
      Mais ce n’est pas grave, retenons seulement : «Restons unis, bienveillants, solidaires.»
      Et en même temps retenons surtout le plus important. Désormais la division c’est l’union, la malveillance c’est la bienveillance, l’individualisme c’est la solidarité.
      La guerre c’est la paix, la vérité c’est le mensonge etc. Plus de doute, nous y sommes.

    2. – « Face à la tyrannie de l’anecdote et des divisions entre Européens, nous avons à retrouver le sens de l’unité » ( Macron à la même tribune )
      Là encore il a le culot de parler de tyrannie et d’unité. N’allons surtout pas croire que ce qu’il dit, ici ou là, relève seulement de l’anecdote.

      Pour en revenir à son «souhait», ou sa très grande envie de… n’oublions pas que Macron est en campagne. Et ce où qu’il soit et à toute occasion.
      Au sujet de l’avortement le fourbe sait très bien que la France n’est pas la Pologne.
      Autre point que notre grand «écolo» en chef souhaite inscrire dans la fumeuse Charte, la «protection de l’environnement». Jadot n’a pas raté l’occasion de lui dire le reste.
      Cette déclaration à Strasbourg ne l’engage absolument rien, c’est du vent, du pipo.
      Remarque, ce serait pareil avec une promesse.

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