L’indispensable VADE-MECUM de l’écologiste

L’interdépendance est une des caractéristiques de l’écologie. En matière humaine, il y a interrelation de fait entre notre comportement individuel, l’engagement dans des collectifs intermédiaires et l’état de la planète. Les recommandations suivantes s’adressent à tout citoyen qui cherche à construire une société plus égalitaire et conviviale en harmonie avec les possibilités matérielles de la biosphère.

Aujourd’hui se constitue progressivement un peuple écolo dont les idées vont structurer la pensée et l’action tout au cours du XXIe siècle. Nous sommes tous potentiellement partie prenante de ce changement. Ci-dessous une ébauche de vade-mecum (va-avec-moi) de l’écologiste, à garder toujours en tête. Mais à chacun de trouver sa propre voie.

Présentation synthétique du

Vade-mecum de l’écologiste

1) Les écologues indiquent que tous les indicateurs sont au rouge

2) Tous les citoyens sont écologistes par définition

3) Un écologiste montre l’exemple par son comportement

4) Notre action obéit au principe de la non-violence

5) Notre pensée intériorise les intérêts des acteurs absents

6) Un lieu à privilégier, la communauté de résilience

7) Un écologiste s’inscrit dans des réseaux

8) Une conception écologique du social et de l’économique

9) Un engagement qui ne peut être que politique

DÉVELOPPEMENT

1) Les écologues indiquent que tous les indicateurs ont au rouge

Le mot écologie a été inventé en 1866 pour désigner une science naissante qui étudie le biotope (territoire offrant des possibilités de vie durable pour une espèce) et la biocénose (ensembles des êtres vivants dans un même milieu). Etude longtemps limitée à des milieux naturels spécifiques, l’écologie est devenue une approche globale des problèmes. Les écologues, porteurs de l’écologie scientifique, démontrent que tous les indicateurs de la planète sont dégradés (stress hydrique, épuisement des ressources fossiles, des réserves halieutiques, des sols…, réchauffement climatique, etc.).

Les crises écologiques, à commencer par la descente énergétique qui va impacter tout notre tissu productif, s’ajoutent à la contrainte financière qui a déjà fait ses effets. Nous nous dirigeons avec une forte probabilité vers l’effondrement de la société thermo-industrielle. Loin du catastrophisme, nous devons faire preuve de réalisme et réagir par rapport à toutes ces menaces.

2) Tout les citoyens sont écologistes par définition

Par définition, tous les citoyens sans exception sont concernés par l’écologie, c’est-à-dire la meilleure manière de parler (logos) de notre maison la Terre (éco, oïkos). Nous sommes tous plus ou moins victimes et responsables du niveau insupportable d’exploitation de la planète qui ne peut que renforcer l’exploitation inadmissible de l’homme par l’homme. Nous sommes donc tous amenés à avoir un comportement écologique.

L’écologie déborde largement la division droite/gauche. Travailleurs ou capitalistes, riches ou pauvres, nous sommes sur la même planète, limitée dans ses possibilités. Nous devons apprendre à partager l’espace et les ressources, non seulement avec les autres humains, mais aussi avec toutes les autres espèces (la biodiversité). L’écologisme marque l’abandon de l’anthropocentrisme et les avancées de l’humilité.

3) Un écologiste montre l’exemple par son comportement

L’écologie montre que le tout et ses parties sont indissociables. C’est la somme des comportements individuels qui fait évoluer la société, c’est la société ainsi créée qui formate les individus. Nous fonctionnons en effet socialement par interaction spéculaire : « Tu fais, parce que je fais, parce que nous faisons tous ainsi. » Le changement social résulte donc de notre exemplarité dans notre comportement écologique. Soyons le changement que nous voulons voir pour ce monde.

Le mode de vie à l’occidentale est bien au-dessus des possibilités de la planète (cf. l’empreinte écologique), ce qui nécessite une cure d’austérité.  Cela présuppose aussi la lutte contre les inégalités. Individuellement nous devrions adopter le principe suivant : Faire preuve le plus possible dans ma vie de sobriété énergétique et d’autolimitationpour construire avec autrui une société plus conviviale et plus égalitaire. Comme à l’impossible nul n’est tenu, à chacun de faire son possible pour (re)trouver le sens des limites et la simplicité volontaire.  L’écologiste doit s’interroger sur la véritable signification de sa prétendue liberté, y compris en matière de procréation ; place à une démographie responsable.

4) Notre action obéit au principe de la non-violence

C’est l’obéissance servile aux mécanismes actuels de détérioration de la biosphère et des rapports humains qui nous prépare l’arrivée d’un autoritarisme. Nous savons que nous sommes tous profondément déterminés par les conditions sociales qui nous sont faites, le parcours de nos parents, notre statut professionnel, etc. Mais nous pouvons penser autrement et pratiquer la désobéissance civile. Nous pourrions tous être des objecteurs de conscience, des technocritiques, des objecteurs de croissance, des lanceurs d’alerte Il faut savoir résister de façon appropriée à la société industrielle de consommation et du spectacle. Non-violence ne veut pas dire passivité.

                La force de la vérité pèse dans nos raisonnement, mais cette vérité n’est pas préétablie. Les limites (à ne pas dépasser) de la pression humaine sur la planète restent souvent indéterminées. L’autoformation permanente de l’écologiste est alors nécessaire ; il faut bien connaître pour mieux agir. Le réseau de documentation des écologistes n’est qu’un moyen parmi d’autres. Mais si nous ne pouvons convaincre par la parole, inutile de vouloir vaincre par la violence. La recherche de l’efficacité immédiate nuit à la pérennité des solutions.

5) Notre pensée intériorise les intérêts des acteurs absents

Il y a les invisibles de la représentation, les acteurs absents. Bien sûr les habitants du tiers-monde, les pauvres, les chômeurs, les exclus… Mais pour une considération écologiste, il s’agit aussi des acteurs absents, qui ne peuvent prendre la parole lors d’une négociation, ou qui ne sont pas invités à la table des négociations : par exemple les générations futures et les non-humains.

Ce n’est pas une procédure démocratique que de décider sans les acteurs absents de ce qui les intéresse au premier chef. Une telle délibération ne peut qu’entraîner de mauvaises décisions dans l’espace et/ou le temps. L’écologiste, élu ou non, doit savoir s’exprimer au nom des acteurs absents, élargir sa pensée dans l’espace et dans le temps.

6) Un lieu à privilégier, la communauté de résilience

Ce paradigme ou modèle de référence porte des noms différents : Communautés intentionnelles ou Ecovillages ou Agenda 21 local ou Towns transition ou Plan climat ou Cités jardins ou communautés de résilience Il ne s’agit pas d’une nouvelle théorisation, mais d’une pratique applicable au Nord comme au Sud, par les gens de droite comme par les gens de gauche, par les urbains et les paysans, par les chefs d’entreprise ou par les travailleurs. Tout le monde est concerné puisqu’il s’agit de rendre notre avenir durable.

Le souci principal d’un écologiste devrait être de chercher la relocalisation des activités et la décentralisation du pouvoir (principe de subsidiarité). Concrètement un écologiste soutient ou met en œuvre une communauté de résilience, espace territorial qui cherche localement l’autonomie alimentaire et énergétique pour assurer la transition de la civilisation thermo-industrielle vers des sociétés qui fonctionneront sans énergies fossiles. Un système démocratique durable est d’autant mieux préservé si l’Etat central programme la mise en place d’une autonomie territoriale. Il n’y a de véritable démocratie que locale. L’écologiste cherche la subtile synthèse entre une pensée ancrée dans l’espace mondial et dans le long terme d’une part, et d’autre part une pratique qui s’exerce de préférence dans son milieu d’appartenance. Le terme qui résume le mieux cette disposition d’esprit est glocal, fusion des deux mots « global » et « local » : agir localement tout en pensant globalement.

7) Un écologiste s’inscrit dans des réseaux

Coopérative ou mouvement, réseaux ou association, l’important est moins dans l’appellation que dans la capacité à créer une forme d’appartenance commune à ce qu’on pourrait appeler un « peuple écolo ». Il nous faut repenser notre façon de vivre et d’être ensemble pour préparer le futur. D’où la nécessité de se retrouver en groupe pour chercher la meilleure voie possible. Avec l’aide de l’écologie scientifique, nous devons débattre collectivement de nos besoins et de nos techniques, de notre manière de manger comme de nos moyens de déplacement.

                Un écologiste s’investit normalement dans une association à but environnemental. Savoir à quelle association adhérer relève d’une analyse personnelle des statuts de cette association. Par exemple Attac a « pour objet… de mener des actions de tous ordres en vue de la reconquête, par les citoyens, du pouvoir que la sphère financière exerce sur tous les aspects de la vie politique, économique, sociale et culturelle dans l’ensemble du monde. » Il n’y a nulle trace dans ces objectifs de préoccupation explicite à propos des rapports entre l’homme et la nature. Adhérer à Attac ne suffit pas pour un écologiste, sauf à œuvrer pour transformer les objectifs de l’association dans un but écologique.

8) Une conception écologique du social et de l’économique

La droite libérale donne priorité à l’économique, la gauche au social. Le concept de développement durable ne hiérarchise pas entre économique, social et environnemental. Or l’écologiste constate qu’aucune activité socioéconomique n’est possible si on n’accorde pas une attention première aux ressources naturelles (l’eau, l’énergie, etc.) qui permettent son existence (durable). Le facteur « terre » est devenu plus important que le travail et le capital car sans ressources naturelles, ni travail, ni capital ! D’où l’idée que sans considérations écologiques, on ne peut avoir des avancées sociales réelles, et sans société conviviale, il ne peut y avoir d’économie saine.

La disparition inéluctable de la plupart de nos esclaves énergétiques (les machines) indiquent que le temps de travail va augmenter, la division sociale du travail se simplifier et le détour de production se raccourcir. Il faudra d’abord compter sur sa force physique, les agriculteurs et les artisans redeviendront l’essentiel de l’emploi. Les techniques douces, à forte intensité d’énergie renouvelables, seront privilégiée. Le respect des cycles naturels formera un impératif.

9) Un engagement qui ne peut être que politique

Au sens noble du mot « politique », il s’agit de participer à l’organisation de la cité. Au sens large, tous nos gestes sont politiques car ils entraînent des répercussions sur le fonctionnement de la société humaine insérée dans la biosphère. Nous ne pouvons échapper au politique. L’écologie politique porte en soi l’urgence écologique, mais elle ne s’incarne pas forcément dans un parti particulier puisque l’écologie a pour vocation de rassembler l’ensemble de l’humanité autour d’un avenir durable.

A chacun de s’investir dans un parti ou mouvement de son choix en sachant que l’essentiel est notre propre comportement. Un projet politique doit remonter d’en bas, de notre engagement personnel, et non l’inverse, descendant des institutions. Et notre critère d’engagement, c’est d’abord la préoccupation écologique. L’écologie, c’est-à-dire la gestion du long terme et le sens des limites, doit l’emporter sur le souci de la victoire électorale. L’essentiel est de porter en toutes circonstances par la pensée et par ses actes les principes généraux de ce vade-mecum.

Pour de plus amples développements,

Utopie 2050

5 réflexions sur “L’indispensable VADE-MECUM de l’écologiste”

  1. Je constate que le vade-mecum écologiste est surtout social. Et la vie, celle de la nature, est bien absent dans ce vade-mecum.
    Moi, il n’y a que la vie qui m’intéresse. Les hommes sont trop bizarres.

  2. VADE-MECUM. Voilà déjà là un mot pas courant. Alors commençons par jeter un coup d’œil à Larousse, ou à Wiki si vous préférez. Il s’agit donc d’un bouquin, d’un guide, d’un plan, d’un pense-bête… qu’on garde sur soi, pour le consulter. Juste pour savoir où on va, pour ne pas se perdre quoi. Le vade-mecun sert en quelque sorte de boussole. De lanterne et en même temps. Un outil donc. Comme par exemple :
    – Les vade-mecums d’inspection, des outils au service des garants de la sécurité sanitaire
    (agriculture.gouv.fr – 14 août 2023 )
    Ou encore le vade-mecun de l’achat public de livres à l’usage des bibliothèques (Ministère de la Culture)

    Après celui de l’inspecteur de la sécurité sanitaire et celui du bibliothécaire, voilà donc celui de l’écologiste. Plus exactement une ébauche… du vade-mecum de l’écologiste. ( à suivre )

    1. Une ébauche en 9 points. Qui pourrait l’être aussi bien en 2 ou 3, en 20 ou 30…
      Mais ce n’est là qu’une ébauche. Bien sûr qu’ON pourrait y passer des heures et des années à l’affiner, la peaufiner, à se creuser la tête sur tel ou tel point, sur tel ou tel mot, et même à s’engueuler, à vouloir faire de tout ça une bible, ou Le Petit Livre Vert.
      Mais à quoi bon ? Pour avoir une idée de ce que cette ébauche pourrait donner, jetez un œil à ces vade-mecums pondus par nos chers ministères. Des usines à gaz, qui se doivent d’évoluer en permanence, d’innover etc. Et finalement qui servent à quoi, hein ?
      Eh ben à rien, bien sûr ! Juste à faire joli, à se faire croire ce qu’ON a envie de croire etc.
      ( à suivre )

      1. Cette paperasse, ce blablabla, me rappelle ces manuels et autres procédures qualité, que seuls ont lu ceux qui les ont rédigés. Cette belle théorie qu’ON étale et qui fait la fierté de ces entreprises certifiées, labellisées, et qui en fin de comptes ne les empêchent nullement de faire de la merde. Bref, ce genre de truc c’est du pipeau ! Pour ne pas dire de la merde. D’autant plus que pour celui qui ne veut rien entendre, qui est bête à bouffer de la paille, qui a décidé que la droite était à gauche et patati et patata… vade-mecum ou pas, dictionnaire, boussole et lanterne ou pas… à la fin c’est kif-kif bourricot !
        Restons-en donc à l’ébauche, qui donne déjà suffisamment à penser comme ça. 😉

        1. À chacun sa bible, son Petit Livre Vert, son VADE-MECUM de l’écologie !
          Pour moi, l’indispensable VADE-MECUM de l’écologiste… c’est “le journal de la joie de vivre“. “Le 1er journal d’écologie politique“… La Décroissance. Pour moi celui-là devrait même être remboursé par la Sécu. Au diable le Déficit, je vous dis pas les économies que nous ferions avec ça !
          Ce mois-ci (N°203), ce journal nous donne (P.14.15) de quoi réfléchir sur une question essentielle, indispensable… à la base de tout le reste, bref une question que nous aurions tout intérêt à trancher, et vite :
          – Ravager l’environnement, est-ce inscrit dans la “nature humaine“ ?
          Nous connaissons tous certains spécimens, voire certains “spécialistes » en génétique… pour qui cette question ne se pose même pas. Et d’autres, souvent les mêmes, pour qui l’homme est un cancer, une saloperie etc.
          Et moi je dis qu’avec ceux-là, on n’avancera pas !

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