anthropisation

systèmique alimentaire

Dans un quotidien, l’information sur la vie de notre planète a  ceci de particulier qu’elle n’envisage qu’un seul aspect des choses. Ainsi l’ONU veut contrôler la ruée vers les terres agricoles (LeMonde du 16 juin). Alors qu’il faudrait trouver 120 millions d’hectares de terres agricoles d’ici à 2030 pour répondre à la demande de produits alimentaires, certains pays comme la Chine préemptent des millions d’hectares en Afrique. Des cultivateurs seront donc privés d’accès aux ressources essentielles à leur survie.

            Dans cette histoire, il y  a sous-jacent le fait que l’utilisation des terres ne sert pas simplement à l’alimentation. N’oublions pas le problème des agrocarburants, de la destruction des forêts, des ressources en eau et surtout, quelque chose qu’on n’aborde jamais, le problème de l’extinction de la biodiversité. En effet l’anthropisation des terres pour l’usage humain empêche les autres espèces de conserver leur espace vital. A trop vouloir conforter la suprématie humaine sur la nature, l’espèce homo « sapiens » oublie qu’elle doit savoir partager l’espace non seulement à l’intérieur de la génération présente, non seulement avec les générations futures (conservation des sols), mais aussi avec les non-humains.

Les Chinois ont ceci de respectable qu’ils ne misent pas seulement sur l’agriculture, ils essayent aussi à réduire leur population avec la politique de l’enfant unique. Au-delà de cette analyse malthusienne (fondée), il faudrait qu’ils comprennent autre chose : il est immoral de consacrer des terres à un endroit pour nourrir des populations à un autre endroit si on veut respecter le principe de la souveraineté alimentaire et de la conservation des sols. Exporter de la nourriture, c’est exporter la biomasse d’un sol et  réduire en conséquence ses capacités productives pour les années suivantes. Nourrir les Chinois en Afrique, c’est une forme d’exploitation et d’appauvrissement non seulement des sols et des populations étrangères, mais aussi de la vie sauvage qui avait pu se maintenir en Afrique.

Le système d’information par la presse n’est pas un système d’éducation. Il faudrait que chacun puisse remettre l’information ponctuelle dans son ensemble, ce qui présuppose d’avoir une vision systémique et transdisciplinaire de la situation de notre planète.

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le monde des jardins

Le Cahier « LeMonde des livres » du 12 juin  n’est ouvert comme d’habitude que sur une dimension de la littérature, l’imaginaire, le roman, les classiques comme Gide ou Colette. Quelques incursions sur la vie religieuse et sur l’histoire, rien ou presque sur l’activité humaine concrète. Ah si ! Aujourd’hui Pascal Cribier pour qui « jardiner, c’est abîmer la nature ». Ce qui ne l’empêche pas d’être payé fort cher pour ses œuvres inutiles, lui qui aime avant tout les zones industrielles et l’odeur de la pluie d’été sur le bitume. Pascal propose quand même de créer des zones de biodiversité ouvertes aux seuls scientifiques. Sur ce point, il rejoint presque Jean-Claude Génot (La nature malade de la gestion) :

– Si la nature est ce qui échappe à la volonté de l’homme comme il est normal de le penser, alors cette nature-là n’a rien à gagner des tables, bancs, escaliers, panneaux et autres équipements qui la transforment.

– Laisser faire la nature, c’est forcément augmenter la biodiversité, car cette dernière est une nécessité fonctionnelle pour la nature. La nature a plus besoin de temps et d’espace que de ce jardinage incessant, servant surtout aux gestionnaires à toucher des subventions.

– La seule restauration à la hauteur de nos enjeux écologiques d’aujourd’hui passe par la destruction de routes, de bâtiments et de barrages pour redonner de l’espace à la nature.

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HOME, notre planète

HOME, en Français « notre planète », est sorti hier soir sur plein d’écrans. Normal pour la génération de l’écran. Mais même multiplié par 126 pays et 65 chaînes de télévision, le pari de Yann Arthus-Bertrand est perdu d’avance : « Je vais vite parce que dans dix ans, si on ne fait rien, la planète sera foutue » ( LeMonde du 4 juin). Pourquoi ? Il suffit pour le comprendre de lire le commentaire de François-Henri Pinault, le commanditaire du film pour 10 millions d’euros : « La nature humaine n’est pas disposée à renoncer à son bien-être. » Normal pour quelqu’un qui s’est enrichit en faisant du superflu sa marque de fabrique. Nous ne ferons donc presque rien, les humains sont conditionnés pour privilégier le superflu au détriment de l’essentiel..

En effet il n’y a pas de nature humaine, il n’y a qu’un conditionnement social. La sophistication du cerveau humain lui permet de tout imaginer et de tout détruire selon sa libre volonté de l’instant. Cette « volonté » est actuellement formatée par la société productiviste qui règne en ce moment sur la Terre. Tant que l’espèce homo sapiens ne se considérera pas comme partie intégrante de notre planète, comme simple locataire avec toutes les autres espèces vivantes, ce n’est pas la planète qui sera foutue, c’est l’espèce humaine qui connaîtra le désastre. Après le désastre, il sera peut-être possible de refaire une civilisation plus soucieuse de respecter une Nature qui vit en dehors des humains et qui permettra aux humains de survivre.

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puissance de la Nature

LeMonde des livres du 22 mai consacre deux pages à la puissance de la nature. Cette préoccupation écolo est si rare que je m’empresse de te présenter quelques citations :

– Même lorsque la nature n’est pas représentée explicitement dans une histoire ou dans un poème, elle reste la toile sur laquelle travaille l’artiste, car elle est, avant toute chose, le sol sur lequel l’artiste se tient.

– Je crois que si la nature devient tristement plus visible, c’est aussi parce que nombre de ses trésors éclatants disparaissent suite à notre manque de respect.

– Des vacanciers arrivent de l’autre bout du monde par  avion, et se ruinent en s’offrant des nuitées dans des hôtels hors de prix juste pour pouvoir jouir de l’environnement naturel luxuriant qui règne dans les endroits exotiques.

– L’homme se situe depuis la nuit des temps dans un rapport de prédation vis-à-vis de la nature.

– Nous avons arraisonné la Nature, comme un navire ; on s’en empare, on s’en croit propriétaire.

– Nous sommes des animaux dénaturés et nous appartenons à cette Nature. Nous devons apprendre à vivre autrement avec tout ce qui est sur la terre, sous le ciel.

– Certains d’entre nous peuvent bien être séparés ou en train de se détacher de la nature, mais nous faisons malgré tout partie d’elle.

– Me retrouver encerclé d’arbres, de collines et de rochers déclenchait en moi une certaine nervosité, et ma respiration désormais saccadée ne se fluidifiait de nouveau qu’une fois de retour dans mon habitat urbain naturel.

– Implicitement ou explicitement, la nature est toujours le personnage le plus important de l’histoire, tout comme elle est aussi le personnage qui est en nous.

– Pour les Chinois, il est difficile d’isoler un concept de nature car tout est nature, que ce soit la polarité du ciel et de la terre ou encore le Yin et le Yang, à la fois opposés et complémentaires.

– La pluie ne lave pas les hommes de leurs péchés, elle s’abat sur eux de toute sa diluvienne magnificence, elle les étreint de sa poigne humide.

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éternels perdants

Les pauvres sont traditionnellement les victimes privilégiées des catastrophes d’origine naturelles, ils vont rester les principales victimes des catastrophes d’origine anthropique. Par la faute de l’homme, 60 % des services rendus par les écosystèmes sont en déclin. Or les paysans dépendent directement de ces écosystèmes. De plus les riches provoquent le réchauffement climatique, et ce sont les plus démunis qui vont en subir les conséquences. Ainsi s’exprime le rapport de l’ONU dans le cadre de la Stratégie internationale de réduction des risques (LeMonde du 19 mai).

Vous êtes un politique dans le monde occidental, vous savez que les catastrophes pénalisent surtout les pauvres des pays pauvres. Que faites-vous ? Rien. Pourquoi agir quand ce ne sont pas vos électeurs qui sont touchés par les risques émergents ! Il y a les invisibles de la représentation. Bien sûr les habitants du tiers-monde, les pauvres, les chômeurs, les exclus, les immigrés sans papier. Mais pour une considération bio-politique, il s’agit aussi des tiers-absents, à savoir les générations futures et les non-humains. Toutes ces catégories n’ont aucun droit de vote réel, ils ne peuvent qu’être ignorés dans les choix dits démocratiques qui sont pourtant trop souvent opérés à leur détriment.

Il faudrait donc que nos élus s’expriment non seulement pour les pauvres de tous les pays, mais aussi à la place des tiers-absents, comme un avocat s’exprime au nom de la victime. En résumé, nos politiques devraient penser et agir en privilégiant les équilibres à long terme, que ce soit dans la société humaine ou dans nos relations avec les écosystèmes. Mais quand on voit l’indigence des campagnes électorales en France en vue des élections européennes du 7 juin, nous savons déjà que les pauvres présents et futurs seront les éternels perdants.

Votez écolos, ce sera un moindre mal…

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sauvons les confettis

L’éditorial du Monde du 14 mai se termine par ces mots « La nature ne peut être que gagnante. » Quel optimisme bat ! Chaque année, 60 000 hectares d’espaces naturels sont grignotés par l’anthropisation humaine (villes, routes, entrepôts…), soit l’équivalent d’un département en moyenne tous les dix ans. La loi de 1976 sur la protection de la nature stipulait que tout projet d’aménagement doit « supprimer, réduire et si possible compenser » les dommages à l’environnement. Vu son flou artistique, on comprend tout de suite pourquoi cette loi n’a jamais été appliquée. Aujourd’hui LeMonde fait des gorges chaudes du fait que 357 hectares de vergers laissés à l’abandon vont être transformés en coussoul, milieu pierreux ouvert adapté à certaines espèces. Un  confetti de 357 hectares contre 60 00 hectares qui disparaissent chaque année… Déjà les ingénieurs et les machines arrachent pêchers et peupliers. Comment des techniques humaines peuvent-elles nous permettre de retrouver la nature ? Impossible !

Dans le livre de Jean-Claude Génot La nature malade de la gestion, les choses sont claires :  « Ma définition de la nature est celle universellement admise, à savoir ce qui échappe à la volonté humaine, ce qui est indépendant des usages humains. Destruction et gestion sont deux facettes d’une même attitude de notre société, caractérisée par l’illusion de la domination. Faut-il acheter un bulldozer sur des crédits destinés à la protection de l’environnement ? Les institutions en charge de l’environnement, n’ayant ni la volonté, ni la capacité de remettre en cause ce qui conduit à la destruction, assument la pénurie de nature et entérinent la gestion de la biodiversité dans les confettis non aménagés par le rouleau compresseur économique. La seule restauration à la hauteur de nos enjeux écologiques d’aujourd’hui passe par la destruction de routes, de bâtiments et de barrages pour redonner de l’espace à la nature. Chercher un compromis et ne pas vouloir apparaître trop extrémiste ou radical peuvent vous rendre malléable et inefficace. »

La nature est en train de perdre, mais comme les humains vivent de la nature…

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dogmatisme et aveuglement

Les gouvernants font preuve de dogmatisme et d’aveuglement, les hommes démontrent leur vanité, prompt à se servir du moindre prétexte pour décider n’importe quoi, les fabricants falsifient leurs produits, et de toute façon on fait preuve d’inertie tout en courant après des mythes non démontrés. De quoi s’agit-il ? On pourrait croire qu’il s’agit de l’impréparation totale dont nous faisons preuve face à l’épuisement prochain de presque toutes les ressources naturelles. On pourrait croire qu’il s’agit des atermoiements sans fin face au réchauffement climatique en marche. En fait il s’agit du risque d’embrasement nucléaire avec la présentation du livre du jour, Les armes nucléaires, mythes et  réalités (LeMonde du 2 mai).

C’est à cause de notre cerveau tout puissant qui fomente les idées les plus baroques que nous arrivons trop souvent à l’impasse la plus totale. C’est ce que nous disait déjà un autre livre, La politique de l’oxymore de Bertrand Méheust : « Je suis convaincu qu’une catastrophe est en gestation, mais je ne partage pas la conviction que les démocraties modernes possèdent les ressorts nécessaires pour la prévenir et l’affronter. Je crains que la métamorphose espérée n’intervienne trop tard pour enrayer la crise écologique, et ne manifeste ses effets que pendant et après la catastrophe, un peu comme le pacifisme n’empêche pas les guerres mais se développe dans leur sillage. En effet toute société cherche à persévérer dans son être. Mais comme nous vivons dans un monde fini, sa saturation globale est inéluctable, ou, pour dire les choses de façon plus brutale, la saturation se traduira pour l’humanité par une véritable descente aux enfers. Chaque instant qui passe nous éloigne davantage du moment où un autre avenir serait encore possible. »

Certes, la guerre nucléaire n’a servi à rayer que deux villes avant la reddition japonaise, mais avec la guerre que nous menons contre notre propre planète, notre adversaire ne déposera pas les armes, il n’a pas de cerveau.

NB : un autre exemple de notre suprême bêtise est l’irruption « imprévisible » du tsunami financier…

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tiers sauvage

L’anthropisation de la planète est si envahissante que nous n’avons respecté aucun des équilibres vitaux de la Biosphère. La surexploitation des ressources halieutiques a conduit la proportion des espèces de poissons en danger ou épuisées à passer d’environ 10 % dans les années 1970 à 24 % en 2003. Maintenant les pêcheurs pleurent la baisse de leurs prises et on va donc organiser pour eux un Grenelle de la mer (LeMonde du 14 avril) en France.

Le but fixé par le Conservatoire du littoral en 1975 était le tiers sauvage, à savoir protéger le tiers du littoral à l’horizon 2030. En 2005, après 30 ans d’acquisition de terres pour protéger la Nature d’une urbanisation sauvage, on avait rendu inaliénable seulement 10 % du linéaire côtier. L’institution avait racheté 860 kilomètres de rivages maritimes, et même 20 % des côtes de la Corse. Mais l’objectif du tiers sauvage ne sera pas atteint en 2030 ou en 2050, avec ou sans le Grenelle de la mer. Les Etats ont de l’argent pour financer les requins de la finance, ils n’en ont plus pour sauvegarder le littoral et les requins face à l’appétit des promoteurs immobiliers et la toute puissance de la pêche industrielle.

En 2005 au niveau mondial, on croyait à l’idée d’aires marines protégées pouvant couvrir 20 à 30 % de la surface des mers. Mais comme il faudrait aussi créer un million d’emplois de gendarmes des mers pour contrôler les trois à quatre millions de pêcheurs menaçants le capital naturel, alors on n’a rien fait ! Les objectifs internationaux pour 2012 prévoient maintenant de placer au moins 10 % des écosystèmes en aire marines protégées. Bavardage diplomatique !           

Pourtant le tiers pour la Nature et les deux tiers pour l’impérialisme humain, ce serait un pas dans la bonne direction. Encore faudrait-il que la population humaine baisse pour permettre à la population de poissons d’augmenter.

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Eco-cité, du bluff

La rubrique Planète (LeMonde du 11 avril) nous propose la ville durable, relais espéré de la croissance verte. Aucune critique dans l’article qui se termine ainsi : « Faire de l’émirat pétrolier la capitale de la durabilité, avec pour vitrine futuriste, l’éco-cité expérimentale de Masdar, en cours de construction dans le désert ». L’émirat d’Abu Dhabi a donc posé les premières pierres d’une cité écologique. En plein désert. Là où ne peuvent vivre que les campements de tentes et les chameaux. Abu Dhabi affiche déjà l’empreinte écologique la plus élevée de la planète. Masdar city ne peut qu’être sobre en comparaison !

            Mathis Wackernagel, le spécialiste de l’empreinte écologique, écrivait : « Imaginons ce qui arriverait à n’importe quelle ville si elle était enfermée sous une coupole de verre qui empêcherait les ressources matérielles nécessaires d’entrer et de sortir. Il est évident que cette ville cesserait de fonctionner en quelques jours et que ses habitants périraient (…) La vie dans les grandes villes brise les cycles naturels et nous coupe de notre lien intime avec la nature. Nous vivons dans des cités où nous oublions facilement que la nature travaille en cercles fermés. Nous allons au magasin pour acheter des aliments que nous payons avec de l’argent tiré du guichet automatique d’une banque et, ensuite, nous nous débarrassons des détritus en les déposant dans une ruelle ou en les jetant à l’égout (…) Ce modèle mental d’une coupole de verre nous rappelle assez brutalement la perpétuelle vulnérabilité écologique de l’espèce humaine. »           

Une ville n’est jamais écologique, elle ne peut vivre en circuit fermé et son empreinte carbone sera toujours largement insupportable. Les efforts pour la rendre verte ne peut qu’être une opération de greenwashing.  Celle du forum Global City à Abu Dhabi a rapporté beaucoup d’argent à l’organisateur…

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Sarko-Ségo, même discours

Notre Suffisance Sarko et Ségo de Sang Royal tiennent le même discours sur l’Afrique même s’ils miment le désaccord. Pour Nicolas Sarkozy, « Le drame de l’Afrique (traditionnelle), c’est qu’il n’y a pas de place pour l’idée de progrès (…) Le défi de l’Afrique, c’est d’entrer davantage dans l’histoire ». Pour Ségolène royal, « Vous aussi (les Africains) vous avez fait l’histoire (…) Il faut en finir avec cette idée fausse selon laquelle la démocratie n’aurait qu’un seul berceau, l’Occident. »

L’idée est donc la même, l’histoire à un sens, il faut pratiquer la démocratie à l’occidentale, il faut célébrer le progrès, il faut imiter l’occident. Sarko et Ségo se trompent donc en cœur, la colonisation n’est pas derrière nous, elle existe toujours, mais c’est celle des esprits, c’est celle d’un imaginaire cérébral qui se mondialise. Il faut tous regarder les mêmes émissions de télévision, il faut tous célébrer le Mondial du foot ou les Jeux olympiques, il faut tous posséder voiture et portable, il faut tous marchandiser son existence.

En fait l’Afrique traditionnelle telle que la présentait la plume de Sarko avait un avantage immense, celle de comprendre intuitivement que « sortir de la répétition pour s’inventer un destin » est nocif pour la planète, nocif pour notre façon de travailler, nocif pour notre communauté d’appartenance : « Le paysan africain vit avec les saisons, dont l’idéal de vie est d’être en harmonie avec la nature, ne  connaît que l’éternel recommencement du temps rythmé par la répétition sans fin des mêmes gestes et des mêmes paroles. Dans cet univers où la nature commande tout, l’homme échappe à l’angoisse de l’histoire qui tenaille l’homme moderne ». Henri Guaino faisait ainsi l’éloge d’une harmonie de l’homme avec la Biosphère, d’une histoire cyclique et non linéaire.

L’Afrique pendant des millénaires gardait un mode de vie qui permettait à la vie sauvage de continuer à s’épanouir et qui n’avait pas besoin d’antidépresseurs … et puis colonisateurs et marchands d’esclaves sont intervenus, et puis l’impérialisme actuel de l’idéologie occidentale achève le massacre.

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éoliennes et paysage

L’article 9 de la constitution italienne décrète : « La République protège le paysage et le patrimoine historique et artistique de la Nation ». Les adversaires de l’éolien exultent dans la péninsule, ils ont un argument juridique pour contester ces « forêts tournantes » qui détruisent le paysage Lors du colloque intitulé « Le paysage attaqué », Giscard accourt aussitôt dans la botte italienne(LeMonde du 3 avril).  Comme d’habitude il ne cache pas sa préférence nucléaire contre l’énergie éolienne. Mais il se garde bien de définir ce que serait un paysage à protéger.

Car qu’est-ce qu’un paysage à conserver tel qu’il est quand il a été partout dans la vieille Europe retravaillé par l’activité humaine ? Où est la nature naturelle, la nature sauvage que nous nous nous sommes acharnés à massacrer depuis la révolution industrielle  ? Qu’est qu’un panorama non défiguré quand des autoroutes, des pylônes électriques et des villes tentaculaires infectent tel ou tel terroir d’origine, tel ou tel lieu de rêve ? L’anthropocentrisme dominant ne reconnaît aucune valeur intrinsèque à la nature spontanée et non aménagée. Rien de ce qui donne un sens à la vie, temps libre, espace libre, nature libre, ne peut être préservé dans une société libérale. La liberté de concurrence dévore toutes les autres. Partout l’homme ne rencontre que lui-même. Alors une éolienne de plus ou de moins !

Giscard et autres nucléocrates n’ont pas choisi le bon combat. Il ne s’agit pas de défendre des paysages fait de main d’homme, il s’agit de défendre une autre image de la nature, à savoir ce qui échappe à la volonté humaine, ce qui est indépendant des usages humains. La seule restauration des paysages à la hauteur de nos enjeux écologiques d’aujourd’hui passe par la destruction de routes, de bâtiments et de pylônes de transmission pour redonner de l’espace à la nature. Je te conseille de lire La nature malade de la gestion de Jean-Claude Génot.

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le retour des paysans

Jean-Yves Carfantan me paraît optimiste. Pour éviter le Choc alimentaire mondial qui nous attend demain, il suffirait de relancer l’agriculture au Sud en développant les réseaux de transport, le crédit aussi, et y lever en plus les obstacles à l’essor des OGM (cf. le livre du jour, LeMonde du 25 mars). Carfantan est donc un optimiste libéral qui propose les mêmes remèdes que ceux qui ont créé la maladie.

L’ouverture des réseaux de transport a, pour reprendre l’expression de Karl Polanyi, désenchâsser l’économique du social en lui permettant de s’autonomiser. De dominantes, les sociétés agraires vont se trouver dominées. Détacher l’homme de la terre a été un moyen de faire « circuler » les hommes et la terre. C’est la « victoire du libre-échange » : ce qu’on appelle à tort « exode rural » est en fait le résultat d’une véritable déportation économique et sociale. La terre devient à la fois marchandise et moyen de production. La monétarisation, souvent forcée, des activités a fait perdre aux sociétés agraires une partie de leur autonomie. Le crédit a entraîné le surendettement et le suicide par ingestion de pesticides. La porte est ouverte de la transformation du paysan en exploitant agricole. Avec l’introduction des semences à haut rendement l’appauvrissement génétique, donc la fragilité des cultures, s’est accru au Nord comme au Sud. L’étape suivante est le développement d’OGM par les biotechnologies. Pour les agriculteurs, la dépendance s’accroît puisqu’ils doivent acheter très cher des semences et les produits qui les accompagnent. De plus ils doivent subir régulièrement les contrôles des entreprises qui tiennent à s’assurer qu’ils ne disposent pas des semences à leur guise.

Pourtant, quel que soit l’avenir de nos sociétés la terre travaillée à l’ancienne reste le fondement de leur alimentation. Face aux crises écologiques qui s’annoncent, on aura recours à l’agriculture biologique, seule activité durable indispensable à la survie de l’homme. Jean-Yves Carfantan devrait lire le livre de Silvia Pérez-Vitoria, Les paysans sont de retour

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Chine 2022

Alors qu’à la fin du siècle dernier la population chinoise était rurale à 70 %, elle est maintenant urbaine à 60 %. Difficile d’imaginer l’impact des migrations internes de centaines de millions de personnes ! Les illusions d’une vie urbaine plus facile et de meilleurs revenus se sont vite dissipés au contact des bidonville surpeuplés. Le gouvernement chinois, pris de panique par de tels mouvements, organisa « l’excursion sibérienne ». Il s’agit d’un programme d’incitation à l’émigration massive de Chinois vers certaines zones de Sibérie dont les terres se réchauffent sous l’effet du changement climatique et deviennent ainsi plus cultivables. Le gouvernement russe s’inquiète maintenant des trafics de minerais et de pétrole qui s’écoulent au nord de la péninsule de Vladivostok. Les mouvements nationalistes russes, qui hurlent à « la Sibérie perdue », ont contraint le gouvernement à dépêcher l’armée en Sibérie. De son côté, le gouvernement chinois bloque le trafic ferroviaire russe vers Vladivostok. Ca sent la guerre.

C’est ainsi qu’Yves Cochet voit la Chine en 2022 à la fin de son dernier livre antimanuel d’écologie. Le Monde du 19 mars 2009 se contente d’une brève : 6,5 %. C’est le taux de croissance que la Banque mondiale prédit en Chine en 2009. Le premier ministre chinois Wen Jiabao a déclaré qu’il serait difficile d’empêcher ce taux à descendre sous 8 %, trop faible pour éviter les troubles sociaux…

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modularité urbaine

Le mouvement global d’exode rural fait entrer la faim dans les villes (LeMonde du 17 mars). Nous avons vécu jusqu’à présent avec l’idée que l’urbanisation était un phénomène bienfaisant, nous commençons à constater l’inverse : « Les urbains ont peu accès direct aux biens agricoles, leur capacité à se nourrir dépend de l’argent qu’ils gagnent (…) Le plus petit choc économique et la moindre augmentation des prix est fatal (…) Les logiques de spécialisation économique ont fait disparaître des filières de production et d’approvisionnement de proximité (…) Le modèle de développement, qui s’appuie sur une échelle macroéconomique, ne fonctionne pas ». Il faudrait donc adopter un autre modèle. C’est ce que propose Yves Cochet dans son Antimanuel d’écologie récemment paru :

« La modularité désigne la façon selon laquelle les éléments du système sont reliés. Une Région telle que l’Ile de France, par exemple, ne présente pas une diversité globale suffisante : son poids démographique et ses activités économique, administrative et  culturelle, sont disproportionnés par rapport à ses capacités en énergie, en alimentation et en eau. Plus de 80 % de la nourriture des 500 millions d’habitants de l’Union européenne provient des grandes chaînes agroalimentaires. Il n’existe aucune modularité dans ce système, très sensible aux aléas du transport mondial. Comment initialiser la transition vers la descente énergétique ? Il est possible de trouver des issues, ensemble, au moins à l’échelon local. Une ferme moyenne de 50 hectares peut fournir l’essentiel de la nourriture pour 300 personnes… »

Pour nourrir l’Ile de France et tous les autres urbanisés, on sait dorénavant ce qu’il nous reste à faire

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prêcheurs d’apocalypse

Le quotidien Le Monde en vient-il à l’apologie de la catastrophe ? Son numéro du 22-23 février donne la parole à Hervé Kempf en page 2 : « Nous approchons de la limite de régénération par la biosphère des effets de l’activité humaine. Percuter cette limite nous plongerait dans un chaos écologique et social qui rendrait enviable le sort des chômeurs aujourd’hui ». Cela m’a fait penser irrésistiblement à ma dernière lecture, le livre prémonitoire de Fairfield Osborn, La planète au pillage (1948). Rien n’a changé depuis soixante ans, c’est-à-dire que tout s’est dégradé encore plus vite. Relisons Osborn, prophète des temps modernes :

– L’humanité risque de consommer sa ruine par sa lutte incessante et universelle contre la nature plus que par n’importe quelles guerres.

– Aujourd’hui les villes en ruine de l’Ancien empire maya témoignent avec éloquence que jadis il y a eu là les centres d’une population nombreuse et florissante. Cet épisode des Mayas nous apparaît comme un avertissement, auquel par malheur personne ne prend garde.

– L’homme continuera toujours à être une simple pièce sur le grand échiquier de la nature. Durant de nombreux millénaires, l’homme a adoré le soleil comme un dieu, et certes il a eu raison de la faire. La Nature représente la somme totale des conditions et principes qui influencent ou plus exactement conditionnent l’existence de tout ce qui a vie, y compris l’homme lui-même. Si nous continuons à faire fi de la nature et de ses principes, les jours de notre civilisation sont dès maintenant comptés !

            Fairfield vient d’être réédité (Actes  sud 2008), il mérite de prendre place dans ta bibliothèque.

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image du futur

« Les racines brisent les marches des temples et culbutent les bas reliefs, il ne reste que ruines. Les cités mayas, disséminés du Honduras  jusqu’au Chiapas, sont couvertes par la végétation. Ses dirigeants ont rompu un délicat équilibre écologique parce qu’ils se croyaient tout permis. Les élites ont sacrifié leur environnement à leurs rêves de magnificence : nous n’avons pas fini d’en tirer les leçons. » (LeMonde du 14 février)

Dans son livre de 2006, « Effondrement » (comment les sociétés décident de leur disparition ou de leur survie), Jared Diamond analysait l’échec de la civilisation maya, prémonitoire de ce qui peut arriver à la civilisation thermo-industrielle. Couvrant un territoire allant de l’actuel Yucatan (Mexique) jusqu’au Honduras, cette nation comptait à son apogée quelque quinze millions d’habitants. En quelques générations la société s’est effondrée, laissant derrière elles des villes désertées, des routes commerciales abandonnées et des pyramides en ruines. L’hypothèse climatologique de ce déclin semble aujourd’hui confirmée : c’est une période de sécheresse excessive qui serait à l’origine de cet effondrement entre 750 et 950 de notre ère. L’apogée de la consommation de ressources et de la production de déchets implique l’apogée de l’impact sur l’environnement, au risque de dépassement des ressources. Il n’est donc pas étonnant que le déclin ait tendance à suivre de près l’apogée.

              Aujourd’hui notre planète tout entière se retrouve face à une situation similaire aux Mayas, le réchauffement climatique, la surpopulation, les guerres intestines, les conflits sociaux, la déforestation. Pour Jared Diamond, la principale raison d’espérer est l’interconnexion du monde contemporain globalisé. Aujourd’hui, le flux d’information nous apprend en temps réel ce qui advient partout dans le reste du monde. Par ailleurs nous accumulons des connaissances sur l’effondrement des sociétés d’autrefois afin de tirer un bénéfice concret de ce savoir. Cette intelligence du temps et de l’espace serait notre chance. Il a donc écrit ce livre avec l’espoir de contribuer à ce qu’un nombre suffisant de nos contemporains saisissent cette chance et fassent la différence.

Il savait pourtant que les élites vont tout faire pour ne pas prendre les décisions qui s’imposent, mieux vaut soutenir les rêves de magnificence. Aujourd’hui nous nous croyons tout permis, on ne jure que par la croissance économique (qu’il faut relancer) et par la pouvoir d’achat (qui doit toujours croître). Or consommation rime avec destruction de ressources naturelles. Nos routes seront un jour recouvertes de sable ou de terre, nos villes seront envahies par la végétation, notre avenir ressemblera à la destinée de la civilisation maya…

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ségrégations spatiales

L’ancien footballeur Lilian Thuram, avec sa fondation Education contre le racisme, voudrait que tout le monde sache qu’il n’y a qu’une seule race – l’Homo sapiens – et que tous nos ancêtres sont communs et viennent d’Afrique » (Le Monde du 4 février). Il est sûr que cela résoudrait grandement le problème du racisme. Mais le racisme actuel est beaucoup plus subtil.

La biologie et la génétique ont supprimé toute base objective aux stéréotypes liés à l’apparence. Les premières études sur les groupes sanguins menées à partir de 1914 montraient que leur répartition en Europe n’obéissait à aucune logique raciale. Depuis, les analyses effectuées un peu partout dans le monde démontrent que les caractères génétiques ainsi que les groupes sanguins, les groupes d’histocompatibilité comme les facteurs enzymatiques sont présents dans la totalité des populations. Blanc ou Noir, une proportion différente de mélanine, pas plus. La dispersion géographique de notre ancêtre commun africain n’a commencé qu’il y a 150 000 ou 200 000 ans, pas assez pour se diversifier biologiquement de manière significative.

Mais dans le discours des racistes modernes, ce ne sont plus les races qui sont déclarées incompatibles ou inégales, ce sont les coutumes, les croyances et dorénavant le marché de l’emploi. Le racisme n’est plus lié aux gènes, mais à l’ethnie ou à la nationalité. Dans le même numéro du Monde, les grèves sauvages se répandent en Grande-Bretagne contre l’emploi de main d’œuvre étrangère en ces temps de récession. « UK jobs for British Workers » est même devenu le slogan porté par le Premier ministre Gordon Brown. Alors on met en place la ségrégation même contre d’autres travailleurs européens, des Italiens, des Portugais ou des Polonais.

Contre l’enfermement planétaire sur une Terre  devenue trop petite, la résurgence xénophobe se généralise ; le racisme avance masqué. Il semble certain que les migrations massives sont derrière nous, tous les écosystèmes sont occupés et pillés. Chaque peuple devra gérer son propre territoire dans des frontières difficilement définissables : malgré notre unité d’homo sapiens, les lendemains s’annoncent sombres.

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coût de la complexité

 Les experts américains du FBI parlent en ce début d’année 2009 de cybergeddon ou apocalypse cybernétique. Dans notre société dite avancée, tout ce qui est important est lié, voire contrôlé, par les ordinateurs. Une attaque informatique mettrait en péril la sécurité d’une nation développée (LeMonde du 8 janvier). Cette crainte du cyberterrorisme n’est sans doute qu’un moyen de réclamer plus de moyens pour la cyberpolice déjà omniprésente. Plus grave est l’incapacité de notre société à maîtriser les coûts de la complexité.            

Pour Lewis Mumford dans Les transformations de l’homme (1956), l’homme a perdu avec la société thermo-industrielle le secret de son humanisation. Il prévoyait que le développement à venir des systèmes cybernétiques permettraient de prendre des décisions sur des sujets excédant les capacités humaines de calcul. Ce faisant, « l’homme posthistorique est sur le point d’évincer le seul organe humain dont il fasse quelques cas : le lobe frontal de son cerveau ».  En érigeant en absolus les connaissances scientifiques et les inventions techniques, il a transformé la puissance matérielle en impuissance humaine. L’homme moderne s’est dépersonnalisé si profondément qu’il n’est plus assez d’hommes pour tenir tête aux machines. Un système automatique fonctionne mieux avec des gens anonymes, sans mérite particulier, qui sont en fait des rouages amovibles et interchangeables. Nous ne maîtrisons plus la chaîne de la spécialisation des tâches, rendant chaque individu complètement dépendant de la bonne marche de la société. Plus la division du travail est poussée, plus la société est fragile.            

Pour Al Gore dans Urgence planète Terre (2007), nous avons avec l’ordinateur industrialisé la production d’informations en oubliant de tenir compte de notre capacité limitée à assimiler les connaissances nouvelles. Il y a tant d’informations nouvelles produites chaque jour que leur avalanche a étouffé le lent mécanisme de maturation qui change la connaissance en sagesse. De plus, la crise de l’environnement illustre la confiance suprême en notre capacité à relever n’importe quel défi en rassemblant à son sujet des tonnes d’informations, en les divisant en éléments simples à étudier et en trouvant finalement la solution technique. Mais l’idée selon laquelle de nouvelles technologies peuvent résoudre tous nos problèmes constitue l’élément central d’un mode de pensée défaillant. La technologie ne résout plus le problème, elle devient aussi le problème. 

Terminons avec le blocage énergétique qui représente l’autre facette du blocage informatique. Pour Richard Heinberg dans Pétrole, la fête est finie ! (traduction française, 2003), entre 2 et 5 milliards d’êtres humains n’existeraient probablement pas sans les combustibles fossiles. Lorsque l’afflux d’énergie commencera à décliner, l’ensemble de la population  pourrait se retrouver dans une situation pire encore que si les combustibles fossiles n’avaient jamais été découverts. Les sociétés  complexes tendent à s’effondrer car leurs stratégies de captage de l’énergie sont sujettes à la loi des rendements décroissants. En effet les coûts d’entretien engendrés par chaque individu augmente avec la complexification sociale de telle façon qu’on doit allouer une proportion croissante du budget énergétique au fonctionnement des institutions organisationnelles. Alors que des points de tensions émergent nécessairement, de nouvelles solutions organisationnelles doivent être échafaudées à des coûts croissants jusqu’à l’effondrement final.

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CGLU abscons

Nous sommes tel que notre groupe d’appartenance nous fabrique. Hélène Gateau est secrétaire générale de l’organisation Cités et gouvernements locaux unis (CGLU). Hélène ne peut donc que célébrer la ville et ses intérêts. Elle ne peut que regretter que « les villes sont généralement les grandes absentes des négociations internationales » (LeMonde du 26 décembre 2008). A son avis, c’est via les villes que la Banque mondiale peut investir dans des projets de développement. Elle croit constater que nous faisons semblant de ne pas voir qu’il y a une urbanisation massive. Elle commence à faire des procès aux aveugles, mais c’est pour mieux souligner son propre aveuglement : «  Il y a encore un lobby rural très puissant dans certaines agences de Nations unies, qui défend une vision nostalgique de la campagne et alimente la croyance que les millions de migrants qui viennent grossir les bidonvilles finiront par partir. La crise est toujours ressentie plus durement dans les campagnes. Même dans un bidonville, on s’en sort mieux : la ville est une solutions aux problèmes des gens ».

 Quand la famine guettera les villes après le choc pétrolier ultime, il vaudra mieux être au plus près de la Terre nourricière qu’au plus  éloigné dans les banlieues des grandes villes.

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servitude volontaire

Le tyran de la Guinée, Lansana Conté, est mort de mort naturelle (nécrologie du Monde, 25 décembre). Pourquoi donc a-t-il pu rester tant de temps au pouvoir, 24 longues années? La réponse avait déjà été formulée clairement dès 1576. C’est l’ami de Montaigne, Etienne de La Boétie, qui analysait les bases de notre esclavage dans son essai sur La servitude volontaire :

« Comment il peut se faire que tant d’hommes, tant de bourgs, tant de villes, tant de nations endurent quelquefois un tyran seul, qui n’a de puissance que celle qu’ils lui donnent, qui n’a de pouvoir de leur nuire sinon tant qu’ils ont vouloir de l’endurer, qui ne saurait leur faire mal aucun sinon lorsqu’ils aiment mieux le souffrir que le contredire (…) Plus ils pillent, plus ils exigent, plus ils ruinent et détruisent, plus on leur donne, plus on les sert, de tant plus ils se fortifient  et deviennent toujours plus forts. Si on ne leur donne rien, si on ne leur obéit point, ils demeurent nus et défaits, et ne sont rien, sinon que, comme la racine n’ayant plus d’aliment, la branche devient sèche et morte ».

            Lansana Conté a succédé à un régime policier honni, celui de Sékou Touré, pour mettre en place le même système d’oppression. Les derniers temps de Lansana Conté, il ne se passait pas une semaine sans que la répression ne fasse au moins une victime dans la plus totale impunité. Même quand il était mourant, personne n’osait le contester et encore moins prendre le pouvoir. Toujours les effets de la servitude volontaire. Même le verdict des urnes renforce habituellement le tyran. Là encore La Boétie nous trace parfaitement ce qu’on appelle aujourd’hui la société du spectacle : « A la vérité, c’est le naturel du menu peuple d’être soupçonneux à l’endroit de celui qui l’aime, et naïf envers celui qui le trompe. Les théâtres, les jeux, les farces, les spectacles, les médailles et autres choses de peu, c’étaient les appâts de la servitude, les outils de la tyrannie ».

Un seul remède quand tout un peuple pratique assidûment la soumission volontaire, l’action solitaire de qui n’accepte pas l’exploitation/aliénation des individus. La Boétie nous donne quelques exemples historiques : « Qui voudra bien passer en revue les faits du temps passé, il s’en trouvera peu de ceux qui, voyant leur pays malmené et en mauvaises mains, aient entrepris, d’une intention bonne et entière, de le délivrer. Harmodios, Aristogiton, Thrasybule, Brutus le Vieux, Valérius et Dion, comme ils l’ont vertueusement pensé, l’exécutèrent heureusement ». (ndlr : tous ces personnages ont  chassé ou tué le tyran qui oppressait la cité).

Staline est mort seul dans sa chambre, personne n’osant aller voir ce qu’il en advenait du petit père des peuples. Hitler est passé à côté de quelques attentats, mais cela aurait pu aussi bien réussir. Si les dictateurs en herbe savaient qu’ils ne peuvent compter sur personne car quiconque peut abréger à tout moment le temps de leur forfaiture, il n’y aurait plus de dictature. Les citoyens ne lisent pas assez le petit texte d’Etienne de La Boétie.

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