démographie

Une forte natalité française qu’il nous faut enrayer

Le débat sur la modulation des allocations familiales est un faux débat. En effet, et ce depuis l’origine, la politique familiale n’est pas une politique sociale, encore moins une politique de redistribution, c’est une politique de natalité. Comme l’exprime l’ex-président de l’INED Jean-Claude Barreau dans LE MONDE*, « Le quotient familial, l’universalité des allocations a pour but de faire en sorte qu’un couple qui offre des enfants au pays ne soit pas désavantagé par rapport au foyer de même revenu sans enfant ». Mais cette politique, si elle pouvait se concevoir en 1944 dans un pays dévasté par la guerre, a-t-elle encore un sens en 2014 ? Qu’est-ce qu’une bonne santé démographique pour un pays ? Et pourquoi privilégier encore les familles nombreuses au détriment des familles nullipares ou avec enfant unique ?

Les raisonnements de Jean-Claude Barreau dans son article sont d’une « naïveté » confondante pour un spécialiste de la démographie. Notons d’abord que si l’Institut national d’études démographique était à l’origine ouvertement nataliste, cette idéologie proclamée a été abandonnée. L’INED était en effet chargé à la Libération d’examiner « les moyens matériels et moraux susceptibles de contribuer à l’accroissement quantitatif et à l’amélioration qualitative de la population ». Depuis, si les encouragements financiers à faire des enfants subsistent, la loi répressive de 1920 interdisant contraception et avortement n’est plus qu’un mauvais souvenir : fini le quantitatif forcé. Jean-Claude Barreau croit que les socialistes « ont toujours été malthusiens ». La réalité historique est inverse. Au XIXe siècle, Karl Marx s’est violemment opposé aux idées malthusiennes et depuis les socialistes ont toujours voté comme la droite en faveur des familles nombreuses, même pour la loi de 1920 ! Jean-Claude Barreau estime que « les enfants assurent le dynamisme d’une société ». S’il s’agit dans un bidonville surpeuplé de snifer de la colle et de mendier, où est le dynamisme ? Le dynamisme d’une personne ne reflète pas un âge, mais une socialisation d’un certain type (apprentissage de l’initiative) dans un milieu qui permet de s’y épanouir. Trop de gens deviennent des moutons ou des loups solitaires par manque d’affection et/ou d’emploi. Jean-Claude Barreau affirme que les écologistes sont encore plus malthusiens que les socialistes alors que l’écologie politique n’a aucune doctrine en la matière : le malthusianisme de René Dumont a été abandonné depuis longtemps. Face à l’explosion démographique planétaire, Jean-Claude Barreau met tous ses espoirs dans la transition démographique, la tendance à l’équilibre entre natalité et mortalité dans les pays qui se développent. Or le taux d’accroissement démographique mondial est encore de 1 %, ce qui représente une évolution exponentielle avec doublement de la population en 70 ans. D’ailleurs les perspectives statistiques ont été revues à la hausse. De toute façon avec 7 milliards d’humains sur la planète, près d’un milliard ne mangent pas à leur faim. Et le développement économique bat de l’aile. Que se passera-t-il quand nous serons plus de dix milliards sachant que les sols s’appauvrissent, que les mers se vident et que le pétrole qui permet rendements agricoles et circulation des denrées alimentaires viendra à manquer ? Le problème des démographes comme Jean-Claude Barreau est qu’ils n’envisagent jamais les contraintes écologiques dans leurs raisonnements. Ils sont comme les économistes, ils pensent « hors sol » !

Que la France ait fait moins d’enfants entre 1815 et 1940 est traité par Jean-Claude Barreau de catastrophe, « le pays a failli mourir de dénatalité ». Comme si la croissance d’une population était une loi inéluctable à laquelle il fallait se soumettre ! Par contre il traite le fait que la France est passé de 39 millions d’habitants en 1944 à 65 millions aujourd’hui de « démographie saine ». Il n’a pourtant aucune idée de la véritable capacité de charge du territoire Français. Sans exploitation de l’ensemble des ressources de la planète, la France est-elle encore capable de fournir suffisamment d’énergie, de métaux et de nourriture à 65 millions de personnes ?

* LE MONDE du 23 octobre 2014, Préservons notre forte natalité

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Tout écologique, même au moment de notre enterrement

L’écologie commence à imprégner notre existence entière, y compris notre mort. Selon l’IFOP un tiers des Français souhaite « plus de produits funéraires écologiques ». LE MONDE* fait un article sur l’empreinte écologique de nos obsèques. On apprend que la crémation génère 160 kg de CO2 contre 39 kg pour une inhumation. Nous fantasmons sur le cercueil en pure laine vierge, le corbillard à pédales et le cimetière forestier. Nous apprenons même de nouveaux mots : l’aquamation qui consiste à plonger la dépouille mortelle dans une eau alcaline pour dissoudre les tissus et ne conserver que les os a posteriori mis en poussière et la promession, où on plonge le corps du défunt dans l’azote liquide pour le rendre friable, le tout sans émission de CO2 ni émanation de produit toxique. Ces deux dernières méthodes sont encore interdites en France, qui accuse toujours un grand retard en matière d’écologisme.

                Nous avons sur ce blog déjà revendiqué une sépulture propre et verte, mais notre préférence va vers les méthodes de recyclage programmé par notre mère nature. Hélène Crié-Wiesner a vu grandir ces dernières années aux USA la vogue des green burials (enterrements verts) J’ai même fait mon testament écolo en la matière.

* LE MONDE du 25 octobre 2014, Tu redeviendras poussière, en passant par l’azote liquide

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La politique familiale entre natalisme et malthusianisme

L’éditorial du MONDE* pose une problématique qui nous semble cruciale : « La politique familiale a besoin de sens. » Voici un résumé de ce texte :

« … La finalité d’une politique familiale conçue à la Libération avec une visée clairement nataliste. Sans en être la seule cause, cette orientation a permis à la France d’afficher une robuste démographie… La politique familiale a longtemps profité surtout aux hauts revenus. Et le principe d’universalité a déjà été mis à mal avec toute une série de prestations déjà sous conditions de ressources. Mais on n’introduit pas une modulation des allocations familiales en fonction des revenus en improvisant, comme par effraction. On inscrit (éventuellement) une telle mesure dans une politique repensée et on lance un débat sur ses finalités… Le souci de justice sociale aurait pu amener le gouvernement à choisir la voie d’une réforme de la fiscalité… Une fois de plus, M. Hollande bute sur le péché originel de son quinquennat : l’absence de vision d’ensemble… il faut savoir donner du sens aux réformes. »

Nous attendons vos commentaires sur le sens à donner aujourd’hui à une politique familiale dans un pays surpeuplé dont chaque bébé est déjà un consommateur très exigeant… Un gouvernement doit-il être nataliste ou malthusien en France?

* LE MONDE du 22 octobre 2014

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Une fausse tradition catholique qui encourage la natalité

 La position des papes sur la contraception ou l’avortement ne se justifie par aucun des textes du Nouveau Testament. On pourrait comprendre que le Pape dise : « Le préservatif permet d’éviter le Sida et les grossesses non désirées, mais il ne doit pas vous encourager à l’infidélité, ni à avoir des relations sexuelles hors mariage. Une bonne maîtrise de vos pulsions sexuelles, par respect pour les personnes que vous rencontrez, par respect pour votre corps, et par respect pour votre famille, peut seule vous conduire à une élévation spirituelle. » Ils seraient alors en parfaite cohérence avec le message évangélique. Malheureusement, ce n’est pas ce qu’ils disent ou font :

– Si l’Église dissuade les couples d’adopter des méthodes modernes non naturelles de contraception, elle ne s’est jamais opposée aux méthodes modernes pour limiter la mortalité, même lorsque ces méthodes sont extrêmement artificielles (médicaments chimiques, greffes, assistance respiratoire etc…).

–  Paradoxalement, les membres du clergé sont eux-mêmes célibataires, et n’ont pas d’enfants. Les saints sont presque tous, à quelques exceptions près, des célibataires consacrés et sans enfants. La sainte la plus vénérée, Marie, est supposée n’avoir eu qu’un seul enfant : Jésus. Les saintes femmes qui suivent Jésus, et dont parle l’Évangile, ne semblent pas avoir d’enfants.

– Quand Jésus parle du mariage, il en proclame l’indissolubilité « ce que Dieu a uni, l’homme ne doit point le séparer » (Mat.19.6). Mais rien n’est dit sur l’éventuel devoir d’avoir des enfants, et encore moins, d’avoir de nombreux enfants. Ceci contraste avec la Bible de l’Ancien Testament, où à diverses reprises, la venue de nombreux enfants est proclamée comme une bénédiction de Dieu, et surtout le si souvent cité verset 28 de la Genèse, chapitre 1, où juste après avoir créé l’homme (homme et femme il les créa), Dieu lui dit : « Soyez féconds, multipliez-vous, emplissez la terre et soumettez-la »

– Dans l’Ancien Testament, il y a de nombreux cas où Dieu intervient pour guérir des femmes stériles (Sarah femme d’Abraham, Rébecca femme d’Isaac, Léa, Anne …), sans compter les nombreux psaumes et chants où on trouve des actions de grâce pour des femmes stériles qui ont enfin, grâce à Dieu, des enfants. La guérison d’une femme stérile, c’est même selon l’Ancien Testament, LE miracle par excellence, celui qui démontre le mieux l’amour de Dieu. Tout au contraire, les Évangiles ne nous rapportent aucun cas où Jésus aurait guérit une femme stérile.

– Lorsque Jésus évoque la ruine de Jérusalem, il dit « Malheur à celles qui seront enceintes et à celles qui allaiteront en ces jours-là !» (Mathieu, ch. 24, v. 19). La phrase de Jésus « malheur à la femme enceinte » est dans 3 évangiles (Mathieu, Marc, Luc), associée aux cataclysmes de la fin des temps. On peut y voir comme un avertissement : lorsque des catastrophes se préparent et que vous en voyez les signes, évitez de faire des enfants et de les plonger dans ce malheur, soyez responsables.

– Les premiers chrétiens qui pensaient que la fin du monde était toute proche à cause de la parole de Jésus, « En vérité, je vous le dis, cette génération ne passera pas que tout ne soit arrivé », (Luc, ch.21, v ; 32)  n’encourageaient absolument pas le mariage ni la natalité, bien au contraire.

(Résumé d’un texte sur le site de Démographie responsable)

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Contradictions de la politique démographique de l’Eglise

Marybeth Lorbiecki : Il devient évident qu’une population plus nombreuse sur terre conduit à une multiplication à l’infini des crises écologiques et morales et des tensions autour des ressources naturelles dans le monde entier… Plus une population est importante, plus il y a compétition pour un emploi ou pour obtenir n’importe quoi que ce soit, ce qui ajoute du stress, voire de l’agressivité et des agressions comme cela surviendrait dans n’importe quel poulailler surpeuplé. De ce fait le contrôle de la population n’est pas l’affaire d’un Etat, mais de toutes les régions car, au bout du compte, toutes sont interconnectées et affectées.

 Jean-Paul II : Nous avons des devoirs à l’égard des générations futures : c’est une dimension essentielle du problème et elle nous oblige à fonder nos propositions sur des perspectives concrètes et sérieuses concernant la croissance de la population et la disponibilité des ressources… Nous devons faire face à la croissance de la population non seulement en exerçant une parentalité responsable, dans le respect de la loi divine, mais aussi à l’aide de moyens économiques, qui ont un effet en profondeur sur les institutions sociales… C’est la responsabilité des autorités publiques de fixer des directives conciliant des limitations du nombre de naissance et le respect d’une expression libre de la responsabilité selon chaque individu… Les gens ont besoin de redécouvrir la signification morale du respect des limites ; ils doivent croître et mûrir dans leur sens des responsabilités à l’égard de tous les aspects de la vie… L’Eglise soutient le principe de la parentalité responsable et attire l’attention sur la moralité des méthodes employées. (Discours à la semaine d’études « Ressources et population » de l’Académie pontificale des sciences, 22 novembre 1991)

 Aux formateurs en PFN (Osservatore romano, 22 janvier 1997) : Utiliser des méthodes naturelles implique le respect de la nature. Elles entretiennent cette écologie humaine qui est l’harmonie entre les demandes de la nature et le comportement personnel. Au niveau mondial, ce choix des méthodes naturelles soutient les processus d’émancipation des femmes et des peuples s’affranchissant des programmes injustes de planning familial qui amènent dans leur triste sillage les différentes formes de contraception, d’avortement et de stérilisation.

 Marybeth Lorbiecki : Le pape Jean-Paul II a fait la promotion de différentes méthodes de PFN (planification familiale naturelle) : méthode symptothermique, méthode de l’ovulation, méthode dite marquette. Ces méthodes sont fondées sur des processus naturels et non invasifs. Mais il faut bien avouer que les signes de fertilité ne sont pas toujours cohérents et clairs. Le moment de l’ovulation est imprévisible, même chez les femmes dont le cycle est régulier. Et il existe tant de situations où l’approche PFN devient l’inverse de l’idéal. Il y a tant de femmes qui n’ont aucun accès à une instruction quant à savoir déchiffrer leurs rythmes corporels. Et les papes n’ont pas abordé ce que les femmes peuvent faire dans des situations de violence, quand elles sont dans un rapport de pouvoir inégal. Pour beaucoup de catholiques, les recommandations de l’Eglise paraissent arbitraires et déraisonnables, et surtout ni fondées sur le Christ, ni sur les Ecritures, ni sur les valeurs fondamentales.

 source : Dans les pas de Saint François d’Assise (l’appel de Jean-Paul II en faveur de l’écologie) de Marybeth Lorbiecki

 Editions Dervy, 546 pages, 23 euros

 

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Les méthodes dites « naturelles » de contraception

Un écolo ne rejette pas toutes les techniques, seulement celles qui nous mettent en déséquilibre avec la biosphère. Alors, que peuvent penser les écolos des méthodes de contraception ? D’abord qu’elles sont nécessaires. La fécondité humaine laissée en liberté ne peut qu’accentuer l’explosion démographique et le niveau de surpopulation. Comme l’écrivait Malthus en 1798, « Nous pouvons tenir pour certain que, lorsque la population n’est arrêtée par aucun obstacle, elle va doubler tous les vingt-cinq ans, et croît de période en période selon une progression géométrique ». C’est pourquoi en matière de fécondité il opte pour l’obstacle « privatif » qui résulte d’une faculté de l’espèce humaine qui le distingue des animaux ; à savoir, la capacité de prévoir et d’apprécier des conséquences éloignées de ses actes. Sinon il y a obstacle « destructif » quand la population augmente au delà des moyens de subsistance. Si nous ne prenons pas nos responsabilités c’est la nature qui se charge de réguler la démographie humaine : « l’insalubrité des grandes villes, toutes les espèces de maladies et d’épidémies, la guerre, la peste, la famine », écrivait Malthus. 

                Mais Malthus, étant donné son statut de pasteur et ses convictions de l’époque, prônait la « contrainte morale » en matière de maîtrise de la fécondité : l’absence de mariages précoces jointe à la chasteté avant le mariage. C’est dans la lignée de ce message que s’inscrit l’Eglise catholique en ajoutant quelques notes de modernité. Le pape Jean-Paul II a fait la promotion de différentes méthodes de PFN (planification familiale naturelle) : méthode symptothermique, méthode de l’ovulation, méthode dite marquette. Ces méthodes sont fondées sur des processus naturels et non invasifs. Mais il faut bien avouer que les signes de fertilité ne sont pas toujours cohérents et clairs. Le moment de l’ovulation est imprévisible, même chez les femmes dont le cycle est régulier. Et il existe tant de situations où l’approche PFN devient l’inverse de l’idéal*.

                De toute façon les méthodes « naturelles » ne sont en rien naturelles : prendre sa température tous les jours ou observer la glaire cervicale ou bien interrompre l’acte sexe font injure à la nature du sexe. Aujourd’hui pourtant, selon un article du MONDE**, près d’une Française sur dix opte encore pour les méthodes de contraception dites naturelles (observation du cycle d’ovulation ou coïtus interruptus).  Tel couple avait opté pour le retrait avant éjaculation, cela a complètement gâché la relation sexuelle : elle lui disait tout le temps de faire gaffe. Et tous les mois, ils attendent ensemble la venue des règles « avec inquiétude ». Il est vrai qu’il y a aussi présence dans le liquide pré-éjaculatoire de spermatozoïdes capables de féconder l’ovocyte. D’un autre côté la prise quotidienne d’hormones dérègle pour partie la nature de la femme. Alors le stérilet paraît la meilleure méthode : un stérilet cuivre c’est environ 30 €, remboursé à 60 % et ça dure en moyenne 5 ans. Notons que cette contraception légèrement technicisée est bien préférable aux plus de 200 000 interruptions volontaires de grossesses décomptées chaque année dans la France actuelle.

* Dans les pas de Saint François d’Assise (l’appel de Jean-Paul II en faveur de l’écologie) de Marybeth Lorbiecki (546 pages, 23 euros)

** LE MONDE du 12 août 2014, La contraception « naturelle » de plus en plus prisée

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Parler d’urgence démographique, une vérité qui dérange

 Rencontre de Causes toujours (19 septembre 2014) avec Michel Sourrouille*

Julie van der Kar : Selon la plupart des experts (écologistes, agronomes, démographes), la population ne pose pas un problème en soi. Les pressions exercées sur les ressources naturelles et l’environnement ne proviennent pas du nombre d’habitants mais de leurs habitudes de consommation. La planète pourrait accueillir 10 milliards d’individus, voire plus, ce n’est qu’une question de mode de vie et de partage. Qui plus est, l’Europe est globalement en voie de dénatalité et non d’accroissement démographique. Pourtant vous nous alertez sur les dangers d’une évolution démographique incontrôlée. Vous affirmez que « le dépassement des capacités de charge de la planète exige une réduction volontaire de la population humaine » et que « l’expansion illimitée d’une espèce dans un milieu limité aboutit à sa réduction inéluctable. Les humains ne peuvent pas faire exception à cette règle ». Sommes-nous vraiment trop nombreux sur terre ?

Michel Sourrouille : Il y a beaucoup de choses avant d’en arriver à la question proprement dite. Parlons d’abord des « experts ». La démographie ne pose aucun problème pour ceux qui, enfermés dans une discipline particulière, n’ont pas de vision globale des choses. Les démographes ne raisonnent qu’en termes de transition démographique, donc tout ira mieux demain puisque la fécondité va baisser comme par miracle. Les agronomes croient que des prouesses agricoles (incertaines) vont pouvoir nourrir la population demain, même à plus de 10 milliards de personnes. Les « écologistes » institutionnels, je pense à ceux qui courent après les places grâce à un parti, ne veulent pas faire de vagues puisqu’ils désirent être élus. Ensuite réduire les pressions sur l’environnement par une réduction de la consommation est exact en soi, mais incomplet. C’est là le raisonnement partial de personnes comme le rédacteur en chef du mensuel français La décroissance : il y aurait trop d’automobiles, peu importe le nombre d’hommes. Mais le nombre d’automobiles dépend forcément du nombre d’automobilistes. Il s’agit de considérer la formule I = PAT. A technologie constante T, l’impact écologique dépend de la multiplication de la population P par le niveau A d’affluence (le pouvoir d’achat mis en acte). Un expert ou un objecteur de croissance qui n’envisagerait qu’un seul terme de cette équation ne peut pas analyser la réalité telle qu’elle est. Si on applique ce raisonnement à l’Europe, peu importe qu’il y ait baisse de fécondité si le nombre de couches utilisées par un bébé (j’utilise là une image symbolique) est une source de pollution non négligeable.

Tout considéré, et pour en arriver à votre question, je peux affirmer qu’il y a en effet dépassement de la capacité de charge de la planète. Ce n’est pas moi qui le dit, cela résulte des calculs faits pour mesurer l’empreinte écologique de l’activité humaine. Le jour du dépassement (de la capacité de charge) a lieu pendant nos grandes vacances ; à partir de cette date on vit à crédit, ou plutôt on épuise le capital naturel de la planète. Encore faut-il remarquer que l’empreinte écologique ne calcule que l’impact de la sphère humaine sans tenir compte des besoins de toutes les autres espèces ! Nous sommes donc vraiment trop nombreux, que ce soit au niveau mondial ou au niveau européen. Une pratique malthusienne de maîtrise de notre fécondité est absolument nécessaire.

Notre humanisme serait anthropocentriste ?

Michel Sourrouille : Notre humanisme est en effet vécu comme un anthropocentrisme, « l’Homme avant tout », a abouti à l’impasse actuelle, aux crises financières, socio-économiques et écologiques que nous connaissons. Une surpopulation nous entraîne dans des situations qui peuvent même devenir inhumaines.

Je me positionne en faveur d’un humanisme élargi qui prend aussi en considération les générations futures et les non-humains. Toute personne engagée dans une délibération démocratique devrait aussi se faire le porte-parole des acteurs absents, tous ceux qui ne pouvaient participer directement à cette délibération mais qui sont concernés par leurs conséquences. Par exemple une décision qui ne respecte pas la biodiversité et/ou l’avenir de notre société ne peut pas être une bonne décision.

Notre surpopulation est-elle la vraie vérité qui dérange ? Pourquoi cet ostracisme généralisé envers la question démographique d’après vous ?
Michel Sourrouille :
L’ostracisme est particulièrement prononcé en France pour des raisons historiques. Tout au cours du XIXe siècle, il y a eu une volonté de suprématie géopolitique par le nombre pour essayer de transcender nos différentes défaites militaires. N’oublions pas que la loi répressive de 1920 interdisant la contraception et l’avortement a été votée toutes étiquettes confondues, de la gauche à la droite. Comme la pensée politique est une pensée qui en reste souvent à la ligne Maginot, le terme même de malthusien est devenu une insulte.

Que répondez-vous alors aux critiques voire aux insultes ? Il semblerait qu’il soit difficile impossible de discuter sereinement du sujet sans soulever des protestations et des amalgames.

Michel Sourrouille : Je suis assez souvent traité d’ayatollah de l’écologie ou d’écofasciste en herbe. Je ne prends pas cela pour une insulte mais comme une invitation au débat. Il y a trop souvent des controverses inutiles qui reposent le plus souvent sur des approximations à propos des termes utilisés. Ainsi le mot néo-malthusien est-il actuellement utilisé dans un sens de « restrictions économiques ». Ce n’est pas ma définition. Les néo-malthusiens comme Paul Robin ont oeuvré à la fin du XIXe siècle pour la libération de la femme et l’accès aux moyens de contraception. Ces ancêtres du planning familial se sont vus interdits de parole après la loi de 1920 dont nous avons parlé précédemment. Ceux qui à l’heure actuelle militent pour le respect de la vie (interdiction du préservatif, mouvement anti-avortement, etc.) relèvent de l’intégrisme et pas du libre débat. Ils sont cependant les bienvenus quand je participe à une conférence…

Êtes-vous parfois invité dans les médias ? Ressentez-vous un parti pris ou un discrédit de leur part ? Quelle est la « force de frappe » de votre militance sur Internet ?

Michel Sourrouille : Les malthusiens, dont je ne suis pas l’unique représentant, ne sont pas assez invités dans les médias. Mais l’association « Démographie responsable » commence à être audible. J’ai personnellement participé à une émission de RFI pendant une heure et je suis invité un peu partout en France, Paris, Lyon, Bordeaux… Je n’ai pas ressenti de discrédit, seulement une méfiance extrême des journalistes et producteurs d’émissions envers cette thématique malthusienne. On estime à ce niveau qu’il est dangereux de se lancer sur un terrain glissant. Comme pour toute idée d’avant-garde, il faut savoir affronter l’ignorance, puis le déni, auquel succède le rejet avant de commencer à faire sujet de société. Quant à l’audience précise du site que je gère, www.biosphere.ouvaton.org, je n’y accorde pas beaucoup d’importance. Il s’agit d’un réseau de documentation des écologistes, et c’est là l’essentiel : permettre à chacun de progresser dans sa réflexion personnelle. Pour ma part, j’aurai fait ce que j’estimais devoir faire… en sortant de la rubrique « faits divers » dans laquelle se complaisent la quasi-totalité des médias.

Vous avez coordonné l’ouvrage collectif Moins nombreux, plus heureux. L’urgence écologique de repenser la démographie (Ed. Sang de la Terre) avec les contributions d’Annaba, Didier Barthès, Yves Cochet, Théophile de Giraud, Alain Gras, Alain Hervé, Corinne Maier, Jacques Maret, Jean-Claude Noyé, Pablo Servigne, Michel Tarrier et Jean-christophe Vignal. Quel accueil les médias lui ont-ils réservé ?

Michel Sourrouille : Percer la barrière invisible que présente l’univers médiatique à tout ce qui n’est pas déjà connu est un exercice extrêmement difficile. Comme la décroissance démographique n’est pas dans l’agenda politique, comme il ne s’agit pas de sensationnalisme ou de court-termisme croustillant, cela n’intéresse pas. Si j’ai eu une recension dans le journal Libération, c’est uniquement parce que je connaissais personnellement la journaliste qui a fait l’article. Malgré mes contacts au journal Le Monde, j’attends toujours, même une simple phrase ! Il n’y a plus actuellement de grands médias de référence, juste des médiateurs de la société de consommation et du spectacle. Nous savons tous que la société croissanciste va dans le mur de plus en plus vite, mais nous préférons nos œillères.

* Michel Sourrouille est membre de l’association des journalistes-écrivains pour la nature et l’écologie (JNE) et gestionnaire d’un réseau de documentation des écologistes activistes (biosphere.ouvaton.org). Il a également coordonné l’ouvrage collectif Moins nombreux, plus heureux

 

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L’acharnement médicalisé à vouloir un enfant à tout prix

Geneviève Delaisi de Parseval a publié en 1983 « L’Enfant à tout prix »*. Depuis lors, les méthodes technicisées pour avoir un enfant se sont multipliées : stimulation ovarienne, fécondation in vitro, procréation médicalement assistée. Pourquoi donc ce mal de parentalité dans un monde déjà surpeuplé ? D’abord à cause de la pression sociale. Comme on fumait à une époque parce que tout le monde fumait, on veut un enfant parce que les autres en ont. Cela s’appelle l’interaction spéculaire, notre comportement reflète l’image de la norme sociale : en France, tout concourt à appuyer une pratique nataliste, les allocations familiales, les exonérations d’impôt, la multiplication des crèches, les cadeaux de Noël pour les enfants, la peur du vieillissement dans la solitude, l’ignorance du mot nulliparité, le rejet de la stérilité. Dans un tel contexte, certains peuvent vraiment souffrir de ne pas avoir d’enfant. Ensuite à cause de la loi de Gabor : « Tout ce qui est techniquement possible sera nécessairement réalisé ». Il faudrait même préciser « Tout ce qui est techniquement faisable se fera, que sa réalisation soit jugée moralement bonne ou condamnable ».

                Alors que la stérilité pourrait trouver un substitut parfait dans l’adoption, les miracles supposés du progrès technique multiplient les clients. Comme l’écrit Alexis Escudero, « La reproduction artificielle de l’humain ne signifie pas l’égalité des minorités sexuelles dans leur rapport à la procréation, mais la soumission de tous à l’institution médicale et la tyrannie technologique. Elle signe l’intrusion des experts dans la chambre à coucher… » La maternité tardive n’est pas la cause unique d’infertilité. Stérilisés par l’industrie chimique, les êtres humains n’ont plus d’autre choix que de recourir à la technique. La diminution continue de la qualité du sperme, associée au recul de l’âge auquel les femmes décident de faire un enfant, pourrait provoquer à court terme une hausse de près de 80 % d’éligibilité à l’AMP (assistance médicale à la procréation). Mutilés de leur capacité à se reproduire, les humains sont contraints de payer pour avoir des enfants… Mais pourquoi donc ne pas accepter sa stérilité ?

                Geneviève Delaisi de Parseval estime qu’aucune loi ne résistera à « l’irrépressible désir d’enfant de nos contemporains ». Or aucun désir n’est irrépressible, c’est la société consumériste qui nous a fait passer de la satisfaction de nos besoins véritables à une idéologie du désir. Il y a en réalité ceux qui veulent un enfant à tout prix malgré leur stérilité et ceux qui, bien que fécond, n’en veulent pas du tout. Il y a de fortes chances que seuls les seconds sachent ce qu’urgence écologique veut dire. Si les couples stériles posaient vraiment la question du présent et de l’avenir des enfants dans un monde surpeuplé et pollué, ils seraient sans doute convaincants. La pression sociale deviendrait malthusienne.

Pour en savoir plus, vous pouvez lire Corinne Maier, NO KID (40 raisons de ne pas avoir d’enfant) ou la BD « Des salopes et des anges » de Tonino Benacquista et Florence Cestac.

* LE MONDE culture et idées du 20 septembre 2014,  La stérilité sur le divan

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L’explosion démographique ne s’arrêtera pas avant 2100

Les dernières prévisions démographiques mondiales et quelques commentaires perspicaces sur lemonde.fr :

Pierre Barthélémy : L’incroyable explosion démographique que nous connaissons depuis quelques décennies – nous étions 2,5 milliards en 1950, nous sommes 7,2 milliards aujourd’hui – va-t-elle prendre fin bientôt ? Il n’existe que 30 % de chances pour que la population de la planète atteigne un plateau au cours de ce siècle. Selon les chercheurs, il y a 8 chances sur 10 pour qu’elle soit comprise entre 9,6 et 12,3 milliards d’humains en 2100, le milieu de cette fourchette s’approchant des 11 milliards. C‘est l’explosion de la population africaine qui va alimenter la croissance démographique de l’humanité à la fin du siècle. Actuellement d’un milliard d’habitants, elle s’inscrira très probablement (taux de confiance de 95 %) en 2100 dans une fourchette comprise entre 3,1 et 5,7 milliards d’habitants. Longtemps les démographes ont prévu que le taux de fécondité baisserait au même rythme que celui constaté en Asie et en Amérique latine depuis les années 1950, mais ce n’est pas ce qui advient dans la réalité.

Robert : Au moins ça a le mérite de montrer qu’en 2100, si les Asiatiques et les Indiens ont un niveau de vie équivalent à celui des Européens/Américains d’aujourd’hui, ce n’est pas 5°C supplémentaires sur la planète mais 10 ou 15…

John : il est intéressant de voir que l’intégralité de la croissance démographique est censée se produire en Afrique. Je ne vois pas comment l’Afrique peut supporter une population de 4 ou 5 milliards d’êtres humains. Donc il est peu probable qu’on atteindra de tels niveaux. La baisse de la natalité arrivera brutalement ou bien il y aura beaucoup de famines et de morts.

Pierre Barthélémy : Je précise que l’étude tient compte des données épidémiologiques sur la pandémie de sida, notamment en Afrique.

Yogi : Et ça fera combien de personnes à Lampedusa ?

Cdg : C’est vrai que nous sommes dans un dilemme terrible. Soit on doit laisser des humains mourir afin de ralentir l’explosion démographique, soit on les aide et ça nous fait tous basculer dans le précipice. En 1950 d’après le graphique de l’article, l’Afrique était aussi peuplée que l’Europe, en 2100 ça sera 5 fois plus… c est sûr que ça va pas bien se passer.

Eric Duminil : cette étude est en gros juste une prolongation des tendances passées. Elle oublie juste les 2 plus grands défis à venir : le changement climatique et le peak oil.

Kervennnic : La réalité est pourtant simple, et est analysée en quelques pages lumineuses dans un livre qui n’est pas traduit en français, la bible du néo-malthusien : « Too smart for our own good – the ecological predicament of humankind » de Craig Dillworth : L’évolution humaine n’est qu’un cercle vicieux entre expansion démographique et évolutions techniques pour exploiter de façon de plus en plus destructive notre environnement.

Max 069 : Un peu de bon sens, si on atteint 11 milliards, c’est qu’il y a de la nourriture pour 11 milliards. S’il n’y avait de la nourriture que pour 9 milliards, expliquez-moi comment on peut dépasser 9 milliards.

Gardy : On pourrait decroisser ! Nous occidentaux on consommerait de moins en moins pour permettre aux autres arrivants dans la vie de consommer un peu plus ! Ca s’arrêtera où, à un bol de riz pour chacun ? Croissez et multipliez a dit la bible, j’espère que Jésus reviendra pour assurer la multiplication des pains.

Thôt : Lutter contre le réchauffement, combattre les problèmes environnementaux, assurer un niveau de vie minimum à tout le monde… sans mettre en place de politiques de maîtrise de la démographie relève d’un non-sens absolu.

Pierre Barthélémy : Je me suis concentré sur l’aspect démographique des choses mais l’étude n’élude pas du tout ces aspect-là de la question. Elle dit explicitement ceci : « Une croissance rapide de la population dans les pays à haute fécondité peut créer une série de défis : environnementaux (réduction des ressources naturelles, pollution), économiques (chômage, bas salaires, pauvreté), sanitaires (importante mortalité chez les mères et les enfants), politiques (retards dans les investissements en matière de santé, d’éducation et d’infrastructures) et sociaux (troubles croissants et criminalité). »

Toto : C’est tout l’art de la politique actuelle : ne pas y penser. La dette augmente ? Mieux vaut ne pas y penser. Les ressources naturelles s’épuisent ? Mieux vaut ne pas y penser. L’intégrisme progresse à grands pas ? Mieux vaut ne pas y penser. Des migrants se noient par milliers en Méditerranée ? Mieux vaut ne pas y penser. On laisse se pratiquer la guerre des berceaux en Palestine pour que des centaines d’enfants servent de chair à canons ? Mieux vaut ne pas y penser. Et un beau jour, un solide retour de bâton nous force à y penser, et l’on se demande alors pourquoi on n’y a pas pensé… avant.

Tignous : Il serait temps de créer OMRN, l’Organisation Mondiale de Régulation des Naissances…

Anna : l’aide au développement en Afrique devrait aller en priorité aux programmes de stérilisation, après le deuxième ou troisième enfant par exemple.

Source : http://passeurdesciences.blog.lemonde.fr/2014/09/21/lexplosion-demographique-ne-sarretera-pas-au-cours-de-ce-siecle

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La démographie était enfin aux journées d’été d’EELV

Un atelier sur « la démographie, un enjeu pour l’écologie politique » s’est tenu le 21 août lors des journées d’été d’Europe Ecologie – Les Verts. Son objectif : « Déterminer s’il y a aujourd’hui matière à organiser un groupe de travail EELV sur la démographie alors que depuis la campagne présidentielle de René Dumont en 1974, la question malthusienne n’a pas été sujet à débat. » Voici un compte-rendu de l’intervention de Michel Sourrouille.

« Je suis personnellement écologiste depuis 1974, moment de la candidature de René Dumont aux présidentielles. Je n’ai jamais changé depuis quarante ans, le projet écologiste reste pour moi l’enjeu principal du XXIe siècle. Au début des années 1970, c’est le livre « La bombe P »  de Paul Ehrlich qui m’avait convaincu que la démographie était un problème. J’ai compris qu’écologie et démographie étaient liés, nous sommes en effet nécessairement amenés à analyser les interdépendances entre différents phénomènes ; l’approche écologique est une approche écosystèmique. Je vais d’abord envisager le point de vue de Malthus et ses prolongements pour aborder ensuite l’évolution de l’écologie politique en matière démographique.

Le pasteur anglican Malthus avait écrit en 1798 un essai sur « Le principe de population ». Il estimait que celle-ci, lorsqu’elle n’est arrêtée par aucun obstacle, double tous les vingt-cinq ans, et croît de période en période selon une progression géométrique (évolution exponentielle). Par contre on n’obtient pas avec la même facilité la nourriture nécessaire pour alimenter l’accroissement démographique. Il y a des rendements décroissants en agriculture. Les moyens de subsistance ne peuvent donc augmenter que selon une progression arithmétique (évolution linéaire). Le principe de population, de période en période, l’emporte tellement sur le principe productif des subsistances que, pour que la population existante trouve des aliments qui lui soient proportionnés, il faut qu’à chaque instant une loi supérieure fasse obstacle à ses progrès. En conséquence Malthus se positionne en faveur de la maîtrise volontaire de notre fécondité (à l’époque chasteté et retard de l’âge au mariage). Sinon on connaîtra toutes les espèces de maladies, la guerre, la famine.  De mon point de vue Malthus est un écologiste avant la lettre, mettant les humains en relation avec les possibilités des écosystèmes. Mais les néo-malthusiens qui militaient à la fin du XIXe siècle en faveur de la liberté de contraception et de la libération de la femme ont été bâillonnés par la loi répressive de 1920, interdisant avortement et même contraception. Ce n’est qu’au début des années 1970 que la législation sera assouplie, au moment même où paraissait le rapport au club de Rome intitulé judicieusement « Les limites de la croissance ». Ce modèle mathématique et statistique a ajouté aux variables de Malthus la production industrielle, la pollution et l’état des ressources naturelles. Comme les cinq paramètres évoluent de façon exponentielle (géométrique dirait Malthus) dans un monde fini, on prévoyait un effondrement du système thermo-industriel au cours du XXIe siècle. Aujourd’hui on peut compléter cette analyse par une autre formule, I = PAT :  l’Impact de l’espèce humaine sur un territoire est déterminé, à Technique donnée, par sa Population et par ses Affluences (Activités, niveau de vie). Il faudrait lier décroissance économique et décroissance malthusienne quand on a dépassé la capacité de charge de la planète.

                Ce message politique était explicite dans le programme de René Dumont en 1974 : « Il faut réagir contre la surpopulation. En Inde surpeuplée certes, mais surtout chez les riches : 500 fois plus d’énergie consommée par tête à New York que chez le paysan indien. Ce qui remet en cause toutes les formes d’encouragement à la natalité, chez nous en France. » Mais depuis, à de rares exceptions près comme Yves Cochet, ce message n’a été repris ni par les Verts ni par EELV aujourd’hui. Seul texte significatif, la motion « Sortir de la politique nataliste » qui n’a pas été soumise au vote du CNIR en mai 2009 faute de signatures suffisantes. Elle réclamait une mesure de simple équité : la totale neutralité de l’État sur la question de la natalité, c’est-à-dire l’abrogation de toutes les mesures qui visent à maximiser le nombre de Français.

                Entre la perspicacité des études sur les liens entre démographie et épuisement de la planète d’une part et l’inertie actuelle d’EELV sur cette question d’autre part, il me semble nécessaire d’instituer au sein de notre parti un groupe de travail « DEMOGRAPHIE ». Une liste d’inscription circule dans la salle (elle obtiendra 20 signatures). Je laisse maintenant la parole à Cyrille Chatelain… »

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Le péril noir menace aux portes de l’Europe

La population africaine, qui compte actuellement 1,2 milliard d’habitants, doublera d’ici 2050 et atteindra 4,2 milliards d’ici 2100. Cette croissance démographique entraînera une surpopulation encore plus forte. L’Unicef enjoint aux gouvernements d’investir davantage en faveur des enfants.*

Tout est dit, une explosion démographique incontrôlée, une surpopulaiton exacerbée, et l’impuissance des organisations internationales. Que veut dire en effet « investir en faveur des enfants » alors qu’il s’agirait de faire beaucoup beaucoup moins d’enfants ! La croissance démographique handicape les politiques d’éducation, de santé et de lutte contre le chômage. Chaque année, entre 10 et 15 millions de jeunes arrivent sur le marché de l’emploi africain, ce qui est gigantesque… et ingérable. Plus il y a de jeunes et moins il y a de développement possible, c’est le cercle vicieux de la pauvreté qui s’intalle. Dans un monde dont on a dépassé les limites, il n’y a plus de « dividendes démographiques » possibles. Le slogan « il n’y a force ni richesse que d’hommes » se transforme en chômage de masse et conflits en tout genre. En Afrique, il faut donc plutôt parler de « poids démographique ». Au Niger par exemple, on recense 7 enfants par femme et la population gonflera de 15 à 40 millions d’habitants au milieu d’un désert qui ne cesse de progresser**.

L’Agence française de développement (AFD) ne participe pas à des programmes de contrôle des naissances, seulement à des mesures de protection maternelle et infantile. C’est un tort. L’association « Démographie responsable » a demandé qu’un quart du budget actuel de l’Aide au Développement de l’UE soit affecté à la Planification Familiale. Cela nous semble la voie de la sagesse… car les migrations internationales ne peuvent plus servir d’exutoire dans un monde clos et saturé d’humains. Pour en savoir plus, lire le livre « Moins nombreux, plus heureux » aux éditions Sang de la Terre…

* Le Monde.fr avec AFP du 12 août 2014, En 2050, un quart de la population mondiale sera africaine

** Le Monde.fr du 2 avril 2014, « En Afrique, la maîtrise de la démographie n’est plus un tabou »

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Questions démographiques que tout le monde se pose

Voici une liste non exhaustive des questions démographiques sur lesquelles chaque citoyen devrait se pencher. Nous attendons vos réponses-commentaires avec impatience…

Questions générales

Population et politique démographique : que penser de la politique nataliste de la France (allocations familiales privilégiant les familles nombreuses, quotient familial, etc.)

Population et écologie : peut-on définir la capacité de charge de la planète, un niveau maximum de population soutenable, un optimum de population, un minimum de population viable ?

Population humaine et biodiversité : quel équilibre durable trouver pour le partage des écosystèmes entre l’espèce homo sapiens et les autres espèces ?

Population des animaux sauvages et élevage : quelle part donner aux espèces sauvages par rapport aux espèces domestiques ? (le loup ou l’ours n’étant qu’une petite partie de cette problématique)

Population et alimentation : la relation malthusienne selon laquelle la population croit tendanciellement plus vite que les ressources alimentaires est-elle vérifiée ?

Population et régime alimentaire : quelle option alimentaire soutenir politiquement, omnivore, végétarien, végétalien, une journée sans viande par semaine, le lundi végétarien, jeûne pour le climat le premier jour de chaque mois…

Population et énergie : la relation de Chefurka selon laquelle les énergies fossiles ont permis la croissance exponentielle de la population humaine est-elle vérifiée ? La descente énergétique prévisible va-t-elle s’accompagner d’une décroissance démographique ?

Population et éthique : quelles politiques publiques en matière de démographie sont-elles compatibles avec le respect du principe de liberté du choix de fécondité par les individus ou les couples ?

Population et parti écologiste : Quelles sont les positions historiques des Verts sur la question démographique ?

Questions liées à l’accroissement naturel

Population et niveau de vie : quelle part respective accorder à la décroissance malthusienne (limitation des naissances) et à la décroissance économique (limitation de la consommation) ?

Population et contraception : doit-on demander une aide plus conséquente de l’UE au planning familial comme aide au développement, revendiquer la contraception gratuite au niveau mondial, soutenir telle ou telle méthode de contraception…

Population et procréation : dans quelle mesure les écologistes sont-ils favorables à la PMA (procréation médicalement assistée) et à la GPA (gestation pour autrui) ?

Population et développement : la stabilisation de la population mondiale prédite par le mécanisme de la transition démographique (baisse de natalité grâce au développement) est-elle une croyance ou une réalité ?

Population et vieillissement : comment faire face au vieillissement de la population ? Par une hausse de la natalité et/ou par d’autres moyens ?

Population et mortalité : quelle peut être la position d’un parti écologiste sur l’eugénisme démocratique (par exemple l’avortement thérapeutique du mongolisme et le diagnostic préimplantatoire)  ou la problématique de l’euthanasie active (ou passive) ?

Questions liées aux mouvements migratoires

Population et immigration : peut-on déterminer par la loi des limites au flux d’immigration ? Lesquelles ?

Population et migrations environnementales : Quelle politique internationale mettre en place sur cette question ?

Population et urbanisation : entre villes et campagnes, y a-t-il une répartition territoriale optimale ?

Population et loisirs : le tourisme mondialisé a-t-il un avenir ?

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Nous serons seulement 1,8 milliards d’humains en 2100

Selon la thèse de Paul Chefurka, la population planétaire ne serait plus que de 1,8 milliards (les survivants !) en 2100 après avoir été de 7,5 milliards en 2025… Ci-dessous un extrait de cette thèse méconnue :

« Le modèle de population est essentiellement basé sur les effets cumulés de l’approvisionnement de l’énergie à long terme. Les mécanismes de la baisse projetée dans la population ne sont pas déterminés. Cependant, il est plausible qu’il s’agira de déficits régionaux massifs dans la nourriture, de la propagation de maladies (en raison du démantèlement de services médicaux et sanitaires dans les villes) et une mortalité accrue causée par le froid et la chaleur. Dans le modèle l’interaction la plus importante se trouve entre la quantité d’énergie disponible au cours du temps et une estimation de la moyenne de consommation par habitant. La consommation actuelle se situe aux alentours de 1,7 TEP par personne par an et dans le modèle cela baisse uniformément vers 1,0 TEP par personne par an en 2100. A titre de comparaison, en 1965 la moyenne mondiale était de 1,2 TEP, donc le modèle ne prédit pas une diminution énorme en dessous de ce niveau. Une augmentation des différences entre pays riches et pauvres est également probable, mais n’est pas exprimée dans cette approche. Dans ces conditions la population mondiale augmenterait jusqu’à 7,5 milliards en 2025, avant de diminuer inexorablement vers 1,8 milliards en 2100.

Toute la recherche que j’ai effectuée pour cette étude m’a convaincu que la race humaine est à court de temps. Nous voyons paraître des limites dures dans nos activités et nos nombres, imposées par des limitations d’énergie et des dommages écologiques. Il n’y a plus assez de temps pour adoucir la situation, et plus de manière pour nous en soustraire. C’est comme ça et ni la Mère Nature, ni les lois de la Physique ne sont disposées à négocier.Nous avons atteint ce point si subitement, que la plupart d’entre nous n’en ont pas encore conscience. Et tandis que cela peut prendre encore vingt ans, avant que les effets se montrent complètement, les premiers effets de l’épuisement du pétrole (la crise d’exportation nette) seront palpables en moins de cinq ans. Vu le volume de notre civilisation et le degré auquel nous sommes dépendants d’énergie jusque dans les moindres détails, ces cinq années sont une période beaucoup trop courte pour compléter quelque solution ou réforme que ce soit, qui pourrait nous tenir éloignés du bord du ravin. Au point où nous en sommes nous serons obligés d’aller par-dessus ce bord et d’atterrir dans une diminution de population sévère.

Cependant cela ne veut pas dire, qu’il faut adopter un comportement fataliste et qu’il ne faut rien faire. Rien ne serait moins vrai. La nécessité d’agir est plus grande que jamais. L’humanité ne va pas s’éteindre. Il y aura de plus en plus de gens en péril dans un avenir proche. Nous devons commencer maintenant à mettre sur pied des systèmes, structures et règles de comportement, qui pourraient les aider à gérer ces difficultés, trouver du bonheur là où il existe et d’avancer au mieux. Nous devons trouver de nouvelles façons pour s’entendre avec la terre, et les uns avec les autres. Nous devons trouver de nouvelles valeurs et éthique. Nous devons faire cela avec le but de diminuer la misère pendant ce long traumatisme et d’en voir sortir le plus de gens possibles qui sont en bonne santé et heureux, et qui ont la capacité et les connaissances pour construire la génération suivante de la civilisation humaine. »

Paul Chefurka, octobre 2007

Traduit par Rudo de Ruijter, www.CourtFool.info
Texte original: http://www.paulchefurka.ca/WEAP/WEAP.html

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Les pathogènes s’attaquent à la surpopulation humaine

Le fondateur du front national, Jean-Marie Le Pen désignait « Monseigneur Ebola » comme solution à la question de la surpopulation africaine. Il est vrai que le virus Ebola provoque une mortalité de presque 60 % (672 décès pour 1 201 cas recensés depuis fin mars 2014). Après la Guinée, le Liberia, la Sierra Leone, le premier cas de décès d’un malade vient d’être enregistré au Nigeria à Lagos*, 20 millions d’habitants. La concentration humaine accentue les risques de contamination. Cette configuration a été bien analysée par Alain Gras dans le livre « Moins nombreux, plus heureux » :

«  L’épidémie de peste noire éclata en 1347, on vit disparaître les deux tiers de la population européenne. La cause était toute trouvée, ce sont les rats qui ont transporté le bacille de Yersinia pestis. Mais en y regardant de plus près on s’aperçoit que dans les deux siècles qui précédent l’épidémie, une expansion fantastique des villes avait eu lieu, sans que soient préservées les nécessités hygiéniques minimales dans un espace au peuplement dense. Le bacille de la peste trouva ainsi un terrain favorable dans une situation de saturation urbaine. L’événement « rats » fut l’effet de seuil qui déclencha la catastrophe. Or l’on se réjouit de nos jours, d’une population urbaine qui atteindra bientôt plus de 80% sur l’ensemble de la planète, avec des mégalopoles de plus de 20 millions d’habitants. Pourtant, ne peut-on penser que nous sommes, au niveau mondial, dans une situation assez proche de celle du XIVe siècle en Europe ? »

                En fait ce risque est presque mineur par rapport aux attaques des pathogènes contre nos ressources alimentaires. C’est ce que dénonce un livre d’Alan Weisman sur les risques associés à la surpopulation, « Compte à rebours (Jusqu’où pourrons-nous être trop nombreux sur terre ?) » : « Dans l’histoire de la biologie, toutes les espèces qui ont surexploité les ressources de leur environnement ont subi un effondrement de leur population, parfois fatal pour l’espèce entière. Sur cette Terre au bout du rouleau, nous ne vivons plus dans une étendue sauvage et illimitée : nous sommes dans un parc. Nous adapter à cette réalité est aujourd’hui la condition de notre survie. Sans quoi la nature fera le travail à notre place. Par exemple la nature nous privera de nourriture. Le risque qu’une épidémie de fièvre Ebola ravage nos populations est en effet bien moins élevé que celui de voir des pathogènes soufflés aux quatre coins du monde faire s’effondrer notre production alimentaire centrée sur quelques monocultures. »

                Pourtant les malthusiens, qui voudraient mettre en place une démographie responsable, sont régulièrement attaqués quand ils ne sont pas purement et simplement ignorés par les médias.

* LE MONDE du 29 juillet 2014, L’épidémie d’Ebola progresse et atteint le Nigéria

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No kid, ces femmes qui ne veulent pas avoir d’enfant

Il y a des articles assez dégueulasses sur les nullipares, ainsi cet article du Nl Obs sur les croisés de la dénatalité : « Les forcenés de la grève de l’utérus… Pas d’enfants de la vie, un rêve pour ces angoissés de l’hyperfertilité… Ces pythies de la non-reproduction… ». Et puis paradoxalement, dans le dernier Figaro-Madame*, un article perspicace sur le « No-kid par militantisme » : « Pour certains, ne pas avoir de fils ou de fille, est un service rendu à l’humanité… On est déjà beaucoup trop sur terre… Il faut réguler la démographie… Une population moins nombreuse faciliterait l’organisation sociale, le partage de l’espace et donc l’émergence possible de relations apaisées entre humains et avec la nature. »

                La journaliste aurait aussi pu citer George Minois qui s’exprime ainsi dans « Le poids du nombre » : « Face au vieillissement de la population, la pire des solutions est d’encourager la natalité. Les enfants que l’on fait naître aujourd’hui auront la charge d’entretenir les effectifs pléthoriques de leurs parents, grands-parents, et même une bonne partie de leurs arrière-grands-parents, étant donné l’allongement de la longévité. Et cela dans un monde aux ressources raréfiées et à l’environnement saccagé. C’est cela qui est suicidaire… Il existe des mouvements militants faisant campagne dans les pays développés pour une réduction des naissances, tels que l’Optimum Population Trust, le Worldwatch Intitute, l’Association for Voluntary Sterilization, ou encore le mouvement No Kids. » Une BD est même sortie en 2011 sur « celle qui ne voulait pas d’enfant ». Cette BD était intitulée « Et toi, quand est-ce que tu t’y mets ? ». La réponse sur 52 page est toujours la même, « jamais ». L’auteure, Véronique Cazot remerciait bien sûr le Dr Gregory Pincus pour l’invention de la pilule en 1956. L’autre auteure, Madeleine Martin, dédicaçait cet album à celles qui ne veulent pas  d’enfant, celles qui en veulent mais qui en ont marre qu’on leur demande tout le temps « Et toi, quand est-ce que tu t’y mets ? », celles qui ne peuvent pas en avoir, celles dont le mec hésite, celle que ça angoisse et toutes les autres. On pourrait aussi ajouter « No Kid (40 raisons de ne pas avoir d’enfants) » de Corinne Maier.

                Laissons pour conclure la parole à Corinne Maier qui s’exprime ainsi récemment dans le livre « Moins nombreux, plus heureux  (l’urgence écologique de repenser la démographie ) » : « Les childfree (le mot n’existe pas en français) sont taxés d’égoïsme, sont soupçonnés d’être de mauvais citoyens… (Pourtant) non seulement notre « boom démographique » français ne sert pas la condition des femmes, mais il n’apporte aucun sang neuf à un pays ossifié, qui ne sait que faire de ses jeunes. Il est temps de se demander si le contribuable veut payer pour une politique familiale qui n’apporte pas de bénéfice à la collectivité. Il semble évident que, dans un pays démocratique, la liberté de devenir parent doit être respectée ; mais, si les gens veulent des enfants, qu’ils en assument donc entièrement la charge. A bon enfanteur, salut !»

* Figaro-Madame du 15 juillet 2014

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Le déni démographique virulent de certains décroissants

Nous trouvons dommageable pour la cause écologique qu’une revue d’objecteurs de croissance entretienne un ostracisme permanent envers la décroissance malthusienne, c’est-à-dire la maîtrise de notre fécondité. Le mensuel « La décroissance » fait par exemple un numéro spécial juillet-août 2014 sur « Les précurseurs de la décroissance ». Pour 28 auteurs, une seule mention sur la décroissance démographique, ce jugement sans appel d’Aurélien Bernier  : « Barry Commoner s’oppose à l’écologie conservatrice et anti-pauvres des dénatalistes, dont le pire spécimen s’appelle Paul Ehrlich, un biologiste issu de la bourgeoisie. » Le débat Commoner/Ehrlich mérite mieux que ces accusations sans preuves, voici une présentation plus sereine :

Les premiers écologistes essayèrent d’attirer l’attention sur un éventail de problèmes allant des pesticides au contrôle démographique sans toujours les définir par ordre d’importance. Un des signes avant-coureurs d’une hiérarchie apparut lorsque Paul Ehrlich et Barry Commoner débattirent de l’importance relative de la maîtrise de la fécondité. Ehrlich avait publié en 1968 The Population Bomb, qui plaçait l’expansion de la population comme la menace écologique prioritaire : « Trop de voitures, trop d’usines, trop de pesticides. Pas assez d’eau, trop de dioxyde de carbone, tout peut être attribué à une cause unique : trop de personnes sur Terre. » Commoner lui répondit  en 1971 dans L’encerclement que « la dégradation écologique n’est pas la simple conséquence d’un processus unique qui va en s’amplifiant – croissance démographique, augmentation de la demande – mais également des changements importants dans les techniques de production, changements qui eux-mêmes dépendent de facteurs économiques et politiques importants. »

Ce débat entre Commoner et Ehrlich a rapidement dépassé le désaccord scientifique pour fonder deux stratégies radicalement différentes. L’écologie qu’on peut appeler profonde préconise le contrôle de la croissance globale (économique et démographique) parce qu’il ne peut pas exister véritablement d’alternative techno-industrielle écologiquement compatible avec un avenir durable. En effet notre nombre d’habitants multiplié par notre niveau de vie dépasse déjà largement la capacité d’accueil de la Terre. Commoner relève au contraire d’une écologie qui reste superficielle. Il s’appuie sur un pari très optimiste qui croit possible un saut technologique bénéfique. Commoner propose en effet de transformer la technologie moderne « pour satisfaire aux exigences indéniables de l’écosystème ». Cela ne peut que nous faire penser à la croissance verte technologisée que dénonce constamment le rédacteur en chef de la décroissance Vincent Cheynet : « Chaque observation de la Technoscience salvatrice pourrait être contredite… Le livre La reproduction artificielle de l’humain est une arme essentielle face à la barbarie technoscientiste… Le pathético-affligeo-consternant ouvrage technolâtre de Michel Serres, Petite poucette » S’il n’y a pas, comme Cheynet le pense, de solutions technoscientifiques à la crise, il nous faut agir nécessairement à la fois sur la limitation de nos besoins et de notre fécondité. Des analystes perspicaces comme Dennis Meadows l’ont bien démontré :

« La croissance de la population ou la croissance économique, c’est la même chose. Et il n’y a que deux manières de réduire la population humaine : réduction du taux de natalité ou accroissement du taux de mortalité. Laquelle préféreriez-vous ? … Faites le calcul, prenez la nourriture par personne depuis les années 90. La production de nourriture augmente, mais la population croît plus rapidement. Et derrière chaque calorie de nourriture qui arrive dans les assiettes, dix calories de carburants fossiles ou de pétrole sont utilisés pour la production, le transport, le stockage, la préparation et le traitement des déchets. Plus les réserves de pétrole et de carburants fossiles vont diminuer, plus le prix de la nourriture augmentera… Si nous partagions équitablement, personne n’aurait faim. Mais le fait est qu’il faut des carburants fossiles comme le pétrole, le gaz ou le charbon pour produire de la nourriture. Et ces ressources diminuent… »*

* sur le site Le Noeud Gordien

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Hauts et bas du planning familial… en Iran

La population iranienne comptait 13 millions en 1933 et 55 millions en 1988. La révolution islamique de 1979 avait mis fin aux essais précédents de planning familial en prônant le mariage précoce et la famille nombreuse. L’âge légal du mariage est abaissé à 9 ans pour les filles et à 12 ans pour les garçons ! L’Ayatollah Khomeiny voulait renflouer les rangs des « soldats de l’Islam » pendant la guerre avec l’Irak (1980-1988) ; il fallait une« armée de 20 millions de personnes ». La population a donc augmenté de plus de 3 % en moyenne annuelle et les estimations montraient que la population de l’Iran atteindrait 108 millions en 2006. En réalité, on ne compta cette année-là qu’environ 70 millions d’habitants.

En effet le gouvernement iranien changea radicalement son orientation démographique en décembre 1989. Face à l’explosion démographique, les écoles étaient obligées d’instaurer des roulements, une partie des élèves venaient à l’école le matin et l’autre l’après-midi. Le planning familial fut institué ; l’Iran était devenu le seul pays du monde où l’on exigeait que les hommes et les femmes suivent un enseignement sur la contraception avant de pouvoir obtenir un certificat de mariage. Le taux de croissance de la population est donc passé de 3,2 % en 1986 à 1,2 % en 2001, rejoignant la moyenne mondiale.

Les concepteurs du mensuel La Décroissance n’auraient rien à dire sur la politique de Khomeiny ; ils se trouvent sur une position nataliste, jugeant que s’il y a trop d’automobiles, le nombre de personnes n’a aucun intérêt. Le livre malthusien « Moins nombreux, plus heureux (l’urgence écologique de repenser la démographie) », n’avait reçu que ce méchant commentaire : « Misanthropie ». C’est pourquoi, dans leur numéro de juillet-août 2014, cette observation sur l’Iran apparaît extraordinaire : « Le gouvernemnt iranien est-il devenu le dernier avatar d’un occident judéo-chrétien dont la croisssance démographique viendrait d’un verset de la Bible (croissez et multipliez) ? C’est ce que véhicule une campagne visant rien moins que de doubler la population du pays pour atteindre 150 millions d’habitants d’ici 2050. Les aides et centres de planning familial ainsi que les subventions aux moyens de contraception sont supprimés ! Cette campagne cherche à faire oublier un des slogans précédents du régime, – moins d’enfants, meilleure vie – »

recoupement des données : Le guide suprême de la révolution iranienne, l’ayatollah Ali Khamenei, a signé un décret incitant les Iraniennes à avoir des enfants afin de « renforcer l’identité nationale » et de combattre « les aspects néfastes du style de vie occidental ». « Compte tenu de l’importance de la population pour la souveraineté et le progrès économique d’un pays (…), il faut prendre rapidement des mesures fortes et efficaces pour contrer la forte chute du taux de natalité constatée ces dernières années« , précise le décret diffusé sur le site internet du guide suprême. La relance de la natalité était prônée depuis plusieurs années par les milieux conservateurs, notamment par l’ancien président Mahmoud Ahmadinejad qui rêvait d’un Iran de 120 millions d’habitants, contre 76 millions aujourd’hui.

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51 millions d’errants, des frontières qui se ferment

Les chiffres du MONDE* : 51,2 millions de personnes déplacées contre leur gré fin 2013. En Syrie par exemple, sur 22 millions d’habitants 9 millions ont été déracinés par la guerre civile. François Hollande s’est engagé à ce que la France accueille 500 réfugiés syriens envoyés par le HCR (haut-commissaire aux réfugiés). 500 seulement ? L’Union européenne considère que l’accueil des réfugiés est le problème du pays d’entrée, pas de celui de l’Union. Avec 2,8 milliards d’euros alloués fin 2013, l’Europe est le plus gros donateur pour la Syrie… à condition que les errants restent en dehors de l’UE. Il n’est guère de pays exemplaire pour l’accueil des personnes déplacées ! Et les puissances (USA ou Russie) cherchent plus à accroître les conflits armés qu’à les neutraliser, en Syrie ou ailleurs.

A ces déplacés pour faits de guerre s’ajoutent les réfugiés environnementaux : entre 17 et 42 millions de personnes entre 2008 et 2012 pour ce qui est des migrations suite à des catastrophes naturelles, une cinquantaine de millions de migrants environnementaux (du fait de dégradations lentes de l’environnement) en 2010, et entre 150 et 300 millions attendus pour 2050. Un livre vient d’en parler, « Les migrations environnementales » (Christel Cournil et Benoît Mayer). Il s’attache à la responsabilité des pays industriels dans les bouleversements climatiques déclencheurs de migrations. Mais une rhétorique de défense-sécurité face à une « invasion » pourrait déboucher sur un repli défensif encore plus marqué des États par rapport aux migrations. La protection des migrants environnementaux a du mal à s’inscrire dans les textes internationaux.

Puisque nous ne nous attaquons pas aux causes des migrations, il n’y aura comme résultante que rejets et massacres. En résumé les migrations, puisque source de problèmes insolubles, poussent à la volonté d’immobilité territoriale, contrainte et forcée. Il n’y a pas de morale à mettre là-dedans : on ne peut vivre durablement que sur un territoire restreint dont on maîtrise collectivement les paramètres : potentiel alimentaire et énergétique, rapports humains de proximité et culture particulière. Les Inuits ne pensaient pas à émigrer, leur terre recouverte de son manteau neigeux huit mois sur douze leur paraissait trop précieuse. Maintenant les Inuits boivent et se suicident pour oublier la mondialisation… et les glaciers fondent. Une population humaine est semblable aux autres espèces, elle ne peut croître au-delà des possibilités que lui offre son écosystème**.

* LE MONDE du 24 juin 2014, 51 millions d’errants

** cf. le livre Moins nombreux, plus heureux (l’urgence écologique de repenser la démographie)

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Le Japon devient nataliste, il est pourtant surpeuplé

Interpellation d’une élue à l’assemblée métropolitaine de Tokyo : « Est-ce que tu est au moins capable de faire des enfants ? » Un député du parti majoritaire : « Le sujet le plus difficile pour nous est la décroissance de la population. C’est un problème crucial qui conduit au rétrécissement du marché du travail. »* La première interjection n’est pas simplement sexiste, elle est aussi nataliste ; en effet au Japon on n’a pas d’enfant hors mariage. La position politique officielle veut l’égalité homme/femme dans le monde du travail, mais reste aussi nataliste. Or le Japon montrait la voie à suivre mondialement, la décroissance malthusienne sur une planète close et saturée d’humains. Le Japon va passer de 126 millions de personnes aujourd’hui à 100 millions avant 2048 et 86 millions en 2060, Biosphère est soulagée. Comme l’immigration reste un sujet tabou dans le pays, il n’y aura pas d’accroissement de ce côté là ; chacun dans son écosystème, c’est mieux pour tous. Mais le vieillissement fait peur, il ne devrait pas. Yves Cochet dans la préface du livre « Moins nombreux, plus heureux », fait le tour de la question :

« La solution à un vieillissement de la population ne peut pas être l’augmentation de la proportion de jeunes, car ces derniers seraient vieux à leur tour un jour et réclameraient donc encore plus de jeunes : c’est la fuite en avant, la situation ne ferait que s’aggraver. Nous croyons, au contraire, que la peur occidentale du vieillissement de la population doit être affrontée aujourd’hui, et que, d’ailleurs, nous ne devons craindre une population âgée. Une société âgée possède des qualités économiques, sociales et écologiques comparables, voire meilleures, qu’une société plus jeune. Même à la retraite, les personnes âgées contribuent de façon appréciable à la prospérité de la société, par tout le travail bénévole qu’elles assument, auquel il faut ajouter les contributions intellectuelles de la sagesse de l’âge. Les grands-parents européens assurent les deux-tiers des services de garde informels des enfants. La grande majorité des personnes âgées sont auto-suffisantes, elles ne sont pas un fardeau financier pour leurs enfants. C’est plutôt elles qui, bien souvent, soutiennent les jeunes générations, notamment les chômeurs. Tout compte fait, les jeunes sont plus coûteux pour l’économie, en temps et en argent pour leur entretien et leur éducation, que les vieux pour leurs pensions. Plus de retraites à payer est compensé par moins d’investissements scolaires. De même, dans le secteur de l’habitat et des infrastructures en général, une population stagnante ou déclinante est évidemment moins coûteuse qu’une population croissante. »

* LE MONDE du 1er juillet 2014, Au Japon, la remarque sexiste de trop

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Sanctions pour non respect du permis de procréer ?

Théophile de Giraud s’insurge : « Comment se fait-il qu’il n’existe à ce jour aucun permis de procréer ? Et pourtant, quel foisonnement, dans nos sociétés, de permis en tout genre : permis de conduire, de chasse, de pêche, de construire, de travail, de séjour, d’inhumer, etc. Sans oublier les permis de pratiquer une profession : les omniprésents diplômes. Tout le monde jugera indispensable qu’un médecin, ou un ingénieur ou un soudeur ou une puéricultrice n’obtienne guère licence d’exercer sans avoir démontré au préalable ses compétences, mais tout le monde juge naturel que le premier nabot venu puisse s’autoproclamer spécialiste en éducation en mettant simplement un enfant au monde ! » Alors, permis de conduire à égalité avec le permis de procréer ? Un commentateur de ce blog pointe la difficulté : « Instituer un permis de procréer sans prévoir de sanction pour les contrevenants serait pure démagogie, bref, du vent. Quelles sanctions pour les mauvais citoyens-parents ? Et que faire des rejetons? Retirer ces enfants à leurs parents indignes ? » Essayons de répondre.

 Quand l’enfant est en danger, la société peut soustraire l’enfant à son milieu familial. Le Code civil français déclare (article 378-1) : « Peuvent se voir retirer totalement l’autorité parentale, en dehors de toute condamnation pénale, les père et mère qui, soit par de mauvais traitements, soit par une consommation habituelle et excessive de boissons alcooliques ou un usage de stupéfiants, soit par une inconduite notoire ou des comportement délictueux, soit par un défaut de soins ou un manque de direction, mettent manifestement en danger la sécurité, la santé ou la moralité de l’enfant. » Si des parents n’ont pas obtenus leur « permis de procréer », il y avait de fortes chances qu’ils appartiennent à l’une ou l’autre de ces catégories. Quant aux parents indignes qui ont quand même fait un enfant alors qu’il n’étaient manifestement pas capables de l’élever, une société démocratique peut mettre en place un système de stérilisation. Cela a existé dans le passé. De 1935 à 1975, au moins 60 000 personnes ont été stérilisées de force en Suède au nom d’une législation visant à préserver la « pureté de la race ». Une première loi portait sur les personnes souffrant de maladies héréditaires, la loi de 1941 a élargi les cas de stérilisation sous contrainte aux personnes menant un mode de vie asocial : on pensait qu’il fallait en passer par là pour réduire le nombre de personnes passives, entretenues par le système de bien-être social.  Pour édifier une société meilleure, il convenait de réduire les dépenses sociales en faveur de ceux dont on pensait qu’ils ne pourraient subvenir seuls aux besoins de leurs enfants. Il y a eu des stérilisations de femmes qui avaient des problèmes de santé, des difficultés à l’école ou des mœurs « dissolues ». Alors que la loi de 1976 exigeait l’assentiment des intéressés, 166 000 suédois ont encore été opérés jusqu’en 2001.

Le nouveau-né n’est que potentialité à la naissance, il ne devient véritablement humain que grâce aux adultes qui accompagnent son épanouissement socioculturel dans un contexte d’équilibre écologique durable. Aucune personne n’a de droit absolu à procréer quand on sait que cet enfant va souffrir socialement et/ou que la collectivité sera mis en demeure de le prendre en charge. Dire cela, est-ce glisser sur une très mauvaise pente qui conduirait directement vers un éco-fascisme ? Nous pensons au contraire que la montée du totalitarisme dans nos sociétés résulte du fait de ne pas aborder de front nos problèmes, à commencer par ceux de nos enfants en perdition.

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