politique

l’affaire Strauss-Kahn en jugement

L’un des rares écolos des médias, Hervé Kempf*, fait un parallèle entre la démesure consumériste et l’hubris lubrique de DSK. Mais rien n’est dit sur l’origine de cette avidité inextensible. Quelle est la racine psychologique de cette envie irrepressible d’objets, de pouvoir et de femmes ? Pourquoi ce déni des contraintes écologiques ou morales ? L’explication première est le mécanisme de l’interaction spéculaire, en miroir. Je me réalise en échangeant avec autrui des modèles du monde formés par ces échanges. Je me représente la manière dont les autres se représentent les choses et moi-même. L’hypothèse de l’interaction spéculaire nous permet d’enterrer le vieux débat épistémologique sur l’antériorité de l’individu et de la société. L’un et l’autre se forment mutuellement. L’individu soumis à la société de consommation ne se demande pas s’il veut pratiquer la simplicité volontaire, mais seulement s’il le ferait au cas où un certain nombre d’autres le feraient aussi. L’écologie sociale part de ce constat psychologique.

                Ce qui est frappant dans l’affaire Strauss-Kahn, c’est le discours en miroir des socialistes : un parti ressemble à une meute, à une famille soudée autour de sa complicité. Pierre Moscovici considère DSK comme son frère en politique et bien sûr il faut défendre son frère. Jean-Paul Huchon ne monte pas les marches du festival de Cannes « par solidarité avec Dominique Strauss-Kahn ». Jack Lang s’emporte contre le système judiciaire qui « a envie de se payer un français, un Français puissant ».Plusieurs autres leaders socialistes interviennent pour témoigner leur amitié à DSK… Stupéfiant, indécent ! Une tentative de viol n’est presque rien pour eux, l’amitié avant tout. L’hubris lubrique de l’ex-futur président de la République a bien été soutenu implicitement par les protections de sa famille de gauche. L’hubris, lubrique ou non, peut s’exacerber lorsqu’on acquiert un sentiment d’impunité sous le regard complice de son miroir. Le  chef de famille peut-il se limiter quand il est défendu en toutes circonstances par sa famille ? Comme le dit l’avocate féministe Gisèle Halimi « le respect des femmes » devrait « prévaloir sur l’amitié et l’esprit de clan ». Evoquant « la levée de boucliers des amis » de Dominique Strauss-Kahn, elle se dit « déçue par la gauche ».

                Le sens du devoir envers les autres et la biosphère n’advient que pour les esprits libérés de l’esprit de famille, pour des militants libérés du culte du chef, pour des consommateurs libérés de la publicité, pour des travailleurs libérés des objectifs patronaux, pour des chercheurs libérés de l’obligation de l’application technique, pour des professeurs libérés de leur discipline, pour des élèves libérés de leurs écrans, pour des médias libérés de la pression de l’argent, pour des individus libérés de l’interaction spéculaire. C’est seulement à cette condition que nous pouvons échapper à la démesure actuelle d’un système social artificiellement dopée par l’énergie facile, par l’énergie fossile…

 LeMonde du 18 mai 2011, rubrique Ecologie, « Hubris » lubrique

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le viol de DSK et la société du spectacle

Tentative de viol ! Après l’immédiateté médiatique véhiculée par Internet vient l’amplification par les journaux papiers. Dans LeMonde du 17 mai 2011, l’affaire Dominique Strauss-Kahn  fait l’objet de l’éditorial, de 7 pages supplémentaires journalistiques, d’une page débat. Si on y ajoute la rubrique écran (DSK contre NYPD) et l’analyse de Gérard Courtois, que reste-il à lire du reliquat de l’actualité ? Trois pages pour le Festival de Cannes, des rogatons pour tout le reste. C’est ainsi, c’est la « société du spectacle ». Notre nouvelle organisation technicienne crée en abondance des images et des leurres comme  compensations mensongères à notre aliénation collective. Comme l’exprime Guy Debord  dans Commentaires sur la société du spectacle (1988) :

« La possession d’un « statut médiatique » a pris une importance infiniment plus grande que la valeur de ce que l’on est capable de faire réellement. Ne passent que rarement, et par brèves saccades, les nouvelles véritablement importantes sur ce qui change effectivement. Entre 1967 et 1988, le changement qui a le plus d’importance réside dans la continuité même du spectacle. Mac Luhan parlait de « village planétaire », si instamment accessible à tous sans fatigue. Mais les villages ont toujours été dominés par le  conformisme, l’isolement, les ragots toujours répétés. La pollution des océans et la destruction des forêts équatoriales menacent le renouvellement de l’oxygène de la Terre. Le spectacle conclut seulement que c’est sans importance. »      

                Dans LeMonde du 17 mai 2011, il y a quand même une page Planète qui insiste sur la sécheresse en France. Il  faudra s’adapter au réchauffement climatique, dit notre ministère, c’est-à-dire réduire notre consommation d’eau. Mais pour l’instant, les agriculteurs peuvent continuer à pomper. La sécheresse, c’est sans importance, parlons de DSK !

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plus à gauche et moins à droite, Nicolas Hulot

«  Ni droite, ni gauche » est un slogan qui ne veut rien dire, comme d’ailleurs « ce n’est pas démocratique » ou « Vive la liberté ». Tout dépend de ce qu’on entend par droite, gauche, démocratique et liberté ! Contrairement à ce qu’affirme LeMonde *, il n’y a pas de division au sein des écolos. Ils pensent que capitalisme et socialisme sont deux variantes d’un même modèle, la société de croissance, productiviste et inégalitaire. Les uns donnent un peu plus au capital, les autres disent agir pour les travailleurs, les deux s’entendent pour ignorer complètement le facteur Terre et la richesse du vivant. Constatant ce fait, l’écologie est une nouvelle offre politique qui se situe plus à gauche et moins à droite.

Comme l’exprimait Serge Moscovici en 1978, la gauche et la droite sont des notions relatives : « Nous sommes à la gauche de la gauche. Cela veut dire que nous sommes proches de la gauche sur un certain nombre de points (rémunération, organisation des entreprises, internationalisme, etc.) ; mais sur d’autres points, c’est nous qui représentons la gauche, notamment pour tout ce qui a trait aux rapports à la nature, à l’utilisation des ressources, à l’autonomie des collectivités, au productivisme, à la croissance. Car, bien souvent, les hommes et les partis de gauche se sont éloignés de ce qu’on appelle le socialisme et, ce faisant, ont laissé un vide qu’on nous appelle à combler. »

Aujourd’hui Nicolas Hulot n’est pas un politique qui court après les places, ces Besson et consorts pour qui peu importe l’écurie avec laquelle on court puisqu’il s’agit de gagner. Pour lui, il y a une troisième voie entre la gauche et la droite. Pour lui c’est un peu plus à gauche et un peu moins à droite car l’avenir n’est pas « compatible avec le logiciel de droite ». Pour lui, il y a des principes supérieurs au bloc droite-gauche. Pour lui, la contrainte pétrolière, la perte de biodiversité et le réchauffement climatique conditionnent l’économique et le social. Nicolas voit sa campagne présidentielle comme une immense mission pédagogique, pas comme un endoctrinement.

Beaucoup de pages seraient encore nécessaires pour approfondir ce que veut dire politiquement droite ou gauche quand on y mêle l’écologie. Mais en résumé, il y a ceux qui estiment qu’il n’y a pas de limites à la volonté de puissance de l’homme, et ceux qui ont le sens des limites de la biosphère. Nicolas Hulot est actuellement le seul candidat aux présidentielles qui tienne ce discours.

* LeMonde du 15-16 mais 2011, Les écologistes face au vieux démon de la division

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la catastrophe, Nicolas Hulot n’en veut pas

Les risques de catastrophes « naturelles » dues, de près ou de loin, à l’industrie humaine sont devenus une menace incomparable de ce temps. La liste de ces catastrophes et de leurs victimes, pour les vingt dernières années, serait longue. Je ne veux pas être un prophète de malheur, mais je crains que dans le futur, si rien n’est fait, l’état de l’environnement, tel que nous l’avons façonné nous-mêmes, n’appelle d’autres graves désillusions. Il conviendrait de regarder enfin en face la situation de notre Terre et celle de la France, pour ne pas arriver toujours, et de plus en plus souvent, trop tard, après les catastrophes.

                Le titre que nous avons choisi pour ce livre est amplement justifié : Combien de catastrophes avant d’agir ? C’est-à-dire avant que les politiques prennent leurs responsabilités et donnent enfin à la politique de l’environnement la place qui doit lui revenir. Et avant que nous-mêmes, citoyens, électeurs et consommateurs, sortions de notre insouciance pour conjurer les périls qui sont déjà en la demeure et qui préparent immanquablement, à nous et à nos descendants, une forte dégradation de nos conditions de vie

                La politique est le lieu des décisions pour l’avenir. Dans la gestion gouvernementale, l’environnement n’a pas encore la place centrale qu’il devrait avoir. Dans les domaines sensibles, où l’urgence devient pourtant extrême (biodiversité, transports – routiers notamment -, océans et littoraux, pollution des sols et de l’eau douce par l’agriculture et l’élevage intensifs), la frilosité et le manque de courage politique sont évidents. Ceux qui sont aux affaires n’osent pas s’opposer aux divers lobbies : ils sont souvent incapables de faire respecter tout simplement la loi. C’est cela qui doit changer durant la présidence et la législature qui vient.

Nicolas Hulot, texte écrit en 2002

(résumé de l’introduction et de la conclusion par Nicolas Hulot du livre élaboré par son Comité de veille écologique, Combien de catastrophes avant d’agir ?)

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la catastrophe, c’est Luc Ferry

Il paraît que Luc Ferry est un type intelligent. Puisqu’il est devenu un jour ministre de droite, les doutes affleurent cependant. Confirmation de son aveuglement, son discours dans philosophie MAGAZINE de mai 2011. Luc Ferry ne fait qu’y réciter les poncifs et les caricatures  accumulés par la droite contre l’écologie. Voici quelques extraits :

« Je vois dans Fukushima trop de passions tristes. Nos écolos, animés par la peur et le ressentiment, ont cette joie mauvaise de ceux qui « vous l’avaient bien dit ». L’heuristique de la peur dont parle Hans Jonas est calamiteuse, comme l’absurde principe de précaution dans la Constitution française. La peur est devenue la passion fondamentale de l’écologie. »

« L’appel aux alternatives au nucléaire dissimule le vieux fantasme d’une autre politique qui réjouit les anciens du gauchisme reconvertit dans l’écologie, comme les fondamentalistes chrétiens, heureux de pouvoir stigmatiser l’hubris de l’homme sans Dieu. Il est facile de plaider pour la décroissance quand, en rentrant chez soi, on allume la lumière, on recharge tranquillement son portable en préparant son dîner sur une plaque électrique. »

« Même sur la question du réchauffement, il faut faire place au doute. Pourquoi tout faire pour cacher le plateau entre 1998 et 2011, comme si le débat était interdit ? Quant aux conséquences, rien ne prouve sérieusement qu’elles soient aussi catastrophiques que le prétend le GIEC, ni que nous soyons dans l’urgence absolue. Même si on table sur une augmentation de 2°C ou 3°C sur un siècle, ce qui n’a rien de certain, nous avons le temps de réagir. »

« Veut-on renoncer au progrès ? Si oui, il faut le dire clairement. Réfléchir sur ce qui menacera l’humanité dans cinquante ans, comme si l’état de la science était immuable, n’a aucun sens. La décroissance est invendable politiquement. Vous ne convaincrez pas les Chinois d’opter pour la décroissance. La solution, c’est l’innovation scientifique. »

« Le capitalisme n’est pas ce qui nous a plongés dans la misère, mais ce qui nous en a sortis. Les inégalités (un milliard soufrant de la faim, cinq milliards se débrouillant avec quelques dollars par jour, et un milliard dans le confort matériel) ne sont pas le fait de l’Europe. »

En résumé :

          N’ayez pas peur braves gens, dormez.

          Les inégalités ne sont pas mon problème.

          L’innovation techno-scientifique peut tout, Fukushima n’est rien.

          Les écolos disent n’importe quoi, c’est le maintien du capitalisme qui importe.

          Les scientifiques du GIEC écrivent n’importe quoi, rien ne presse pour agir contre les gaz à effet de serre.

 

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Nicolas HULOT, deus ex machina en 2007

En 1990, Nicolas HULOT crée une fondation « pour la nature et l’homme », afin de favoriser l’éducation à l’environnement. Son but était de s’adresser au grand public pour lui faire découvrir et comprendre la nature, et amener par là même à son respect et à sa protection. Début 2000, Nicolas souhaite devenir un acteur du débat public. A la différence de nombre de personnalités publiques qui s’autorisent une opinion tranchée sur ce qu’il convient de faire alors qu’au fond elles ne connaissent rien au sujet, il décide qu’il veut comprendre de quoi il retourne avant de commencer à utiliser son porte-voix. Il crée au sein de sa fondation un organe qui reste à ce jour unique au sein du monde associatif environnemental : le Comité de veille écologique. Ses membres sont tous des experts d’un sujet donné, et souvent chercheurs dans les domaines biodiversité, climat, énergie…

En pratique, tous les deux mois environ, nous nous retrouvions à dix ou quinze avec Nicolas Hulot, sans ordre du jour très précis, chacun étant tout à tour orateur passionné et auditeur attentif. Au bout de quelque temps, l’envie de passer des explications à l’action est née. Divers ouvrages ont donc été rédigés, dont le plus visible en 2002 a été Combien de catastrophes avant d’agir. En 2005 nous est venu l’envie de rééditer ce genre d’exercice, mais avec cette fois une visée opérationnelle : se faire récupérer dans tous les programmes de tous les candidats à l’élection présidentielle de 2007, rien de moins. Cet œcuménisme était une conséquence logique de l’apolitisme – au sens de l’absence de prosélytisme pour un parti particulier – qui a toujours été en vigueur au sein de la Fondation, à tel point que je n’ai aucune idée des préférences partisanes de la plupart de mes collègues (Hulot  compris, qui n’a jamais exprimé la moindre préférence lors des réunions où j’étais présent).

                Ce qui allait s’appeler le « Pacte écologique » a abouti aux sujets structurants suivants : le climat (taxe carbone), l’agriculture (réorientation de la PAC), la hiérarchie des priorités de l’action gouvernementale (le vice-premier ministre en charge du développement durable) et l’avenir (la recherche et l’enseignement). Mais la suite devait nous réserver une belle leçon de réalisme. Car ce qui a lancé le pacte, et ce qui a motivé les candidats à les reprendre à leur compte, ce n’est pas la patiente construction de l’argumentaire, ou la pertinence soigneusement étudiée des propositions. Non, ce qui a produit cet effet, c’est la valse-hésitation de Nicolas Hulot concernant une éventuelle candidature à la présidentielle. Dès qu’il a expliqué que peut-être il irait, sauf que peut-être il n’irait pas, il n’était plus question pour un candidat de ne pas signer le Pacte écologique : c’était prendre le risque de ne pas pouvoir rallier  sur son nom au second tour tous ceux qui auraient voté pour Hulot au premier. Dès lors tous les candidats sont allés signer le Pacte, et le coup est parti pour de bon.

Jean-Marc Jancovici (Changer le monde, tout un programme !)

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la peine de mort, de 1981 à 2011

Le socialisme au pouvoir le 10 mai 1981, qu’en reste-t-il aujourd’hui ? Rien ! Le plan de relance économique a débouché en moins de deux ans sur un plan de rigueur. Les nationalisations tout azimut ont débouché sur des privatisations généralisées. Le 12 mai 1981, leMonde faisait le bilan de l’élection de Mitterrand : pas un mot de l’écologie alors que le pays avait déjà connu deux chocs pétroliers (1974 et 1979). Seule une petite mention sur le report massif des « votes verts » montrait que le socialisme sans l’écologie n’avait aucune perspective électorale. Et leMonde ce jour 11 mai 2011 est cinglant vis-à-vis du manque de vision toujours offert par le PS :

– Les socialistes en quête d’une stratégie électorale ;

– La synthèse socialiste, syndrome du non-choix.

                Une seule solution pour le PS, devenir un parti social-écologiste. Ce n’est pas avec leurs candidats déclarés ou prévisibles aux primaires que le miracle s’accomplira… Les socialistes continuent de rêver à la social-démocratie alors qu’il nous faudrait un Jaurès de l’écologie. Les socialistes doivent lire et s’informer, au lieu de pondre à la chaîne des textes conventionnels inutiles. Le dernier livre de Jancovici leur montrerait que l’énergie facile, l’énergie fossile qui va bientôt manquer, va être source d’un terrible blocage de notre société thermo-industrielle : « Un seul pari à notre disposition : organiser l’avenir social et industriel, donc social et politique, autour de la décarbonisation de nos activités. »* Mais aucun présidentiable, à part Nicolas Hulot, ne met son programme sous le signe du réchauffement climatique et du pic pétrolier. A cause  du manque d’énergie, même l’abolition de la peine de mort, une des 110 propositions phares de Mitterrand, risque de tomber aux oubliettes :

                « Entretenir une population en prison, c’est utiliser de la nourriture, des ressources et de l’énergie pour le bénéfice d’improductifs mis au ban de la société. Jusqu’à une époque somme toutes assez récente, on ne s’encombrait pas de ces bouches à nourrir : le sort commun du délinquant était la mort dans des délais assez rapides. Il est évident que, en univers énergétiquement contraint, ces mauvais souvenirs risquent de redevenir d’actualité. »*

Le bilan semble confirmé, il ne reste plus rien de l’héritage de Mitterrand…

* Changer le monde, tout un programme ! de Jean-Marc Jancovici  (Calmann-Lévy, 2011)

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une chance pour l’écologie, Nicolas HULOT

L’annonce, le 13 avril dernier, par Nicolas Hulot de sa candidature à la présidence de la République en 2012 a donné lieu à pas mal de sarcasmes. Et si sa candidature était une chance pour l’environnement, la biodiversité et donc pour l’écologie ?

.               Il y a quelques années, j’ai eu l’occasion d’accompagner Nicolas Hulot en Alaska pour un Ushuaia sur le changement climatique. Le personnage ne me fascinait pas vraiment et comme beaucoup j’avais de lui l’image d’un vagabond médiatique avec ses « séquences émotion » au-dessus d’un grand envol de flamants roses dérangés par le bruit de son ULM… Au fil des 3 semaines que nous avons passées ensemble, j’ai découvert un autre homme, véritablement habité par le combat environnemental et écologique !

.               Je peux modestement témoigner que l’homme a véritablement changé et que son investissement dans ce combat est sincère.. On a également taxé Hulot d’être à droite. Ce n’est pas parce qu’il a côtoyé Jacques Chirac qu’il avait sa carte au RPR ou à l’UMP.

.Il est clair aujourd’hui que la seule voie possible pour sortir du bourbier économique, social et politique dans lequel nous nous trouvons est celle de l’écologie. D’une société où l’écologie, le social et la consommation sobre soient le moteur. Nous devons impérativement passer par cette troisième voie pour éviter une catastrophe environnementale sans précédent pour notre planète mais aussi pour nous.

.               Cette voie écologique n’est ni tout à fait de gauche ni de droite, même si elle réfute évidemment les arguments ultralibéraux et consuméristes de l’oligarchie actuelle qui dirige le monde occidental. Pour pouvoir s’épanouir, cette voie écologique doit en effet largement dépasser le clivage gauche-droite tel que nous le connaissons en France, rallier à elles tous ceux qui pensent qu’elle est nécessaire pour arrêter l’emballement dans lequel s’est fourvoyée notre société.

.               Et Nicolas Hulot est, je crois, l’homme de la situation. Ce n’est pas un tribun aux accents populistes, ni un vieux renard de la politique, pas un politicien non plus, pas plus qu’un adepte de la langue de bois. Encore moins un dogmatique (fait rare chez les écologistes). Sans doute beaucoup de handicaps pour parvenir à la marche suprême de l’Etat. Mais il a, dans le microcosme de l’écologie politique, un atout remarquable : celui d’être aimé, populaire et donc de convaincre des gens, venus de tout bord, que l’écologie est arrivée à une maturation qui la fait entrer de plein pied dans l’arène de l’élection présidentielle.

.Et cette capacité à fédérer au-delà de la politique politicienne, c’est une chance formidable pour la cause que nous défendons tous, naturalistes, environnementalistes, écologistes, scientifiques, et simples citoyens de la planète Terre. Saisissons-là… sans dogmatisme.

Philippe J. Dubois

.Cet article a été publié sur le blog des Biodiversitaires.

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Jean-Paul Besset, coach de Nicolas Hulot

Jean-Paul Besset a été trotskiste ; mais il a finalement compris en 2005* qu’il était devenu inutile de se battre sur les rapports de production sans s’interroger sur les finalités de la production. Aujourd’hui son analyse se concrétise dans son choix de soutenir la candidature de Nicolas Hulot pour la présidentielle 2012. Pour mieux cerner la pensée de Jean-Paul Besset, et donc pour partie celle de Nicolas Hulot, nous vous présentons quelques extraits d’un texte* de 2008 :

« Ce n’est plus de rêves, aussi généreux soient-ils, dont l’humanité a besoin, mais d’une pleine conscience d’un réel catastrophique qui ne saurait s’interpréter comme une situation de rêve. Le réel ébranle et interpelle la totalité de nos systèmes et de nos références. Il présente un ensemble d’aspérités inédites qui préparent l’avènement d’une crise sans précédent dont chaque élément – écologique, énergétique, social, démographique, moral – alimente et accélère une trajectoire d’effondrement. Plus que jamais les faits commandent au politique et appellent une nouvelle stratégie pour l’humanité. A quels besoins prioritaires faut-il répondre alors qu’ils sont de plus en plus contraints, obligeant à penser d’ores et déjà l’organisation économique et sociale en termes de partage de la rareté et non plus de répartition de  l’abondance ?

Il s’agit de descendre plusieurs degrés dans l’échelle de l’alimentation, des déplacements, des productions, des modes de vie. Il ne faut pas seulement toucher au cœur de la machine techno-économique du productivisme et aux comportements consuméristes qu’elle conditionne et qui la nourrissent souvent avec entrain. Car l’action politique sur le réel peut-elle être efficacement menée sans accompagnement émotionnel ? Il faut donc réformer l’imaginaire du désir pour qu’il consente lui aussi à la conscience des limites. Il faut accepter d’être fini, d’être ici et nulle part ailleurs. L’érection d’une digue contre le désir hypertrophié qui se nourrit de lui-même passe sans doute par la promotion d’une certaine humilité, l’aspiration modeste à vivre en paix avec soi, avec les autres, avec la nature, avec la vie elle-même. Les transitions vont être redoutables, les arrachements douloureux. D’autant que, si l’on en croit les observations scientifiques concordantes, nous n’aurons pas le temps de les lisser sur plusieurs générations.

L’utopie, c’est la société de croissance, une illusion prédatrice qui aura bientôt fini d’épuiser la terre et de ruiner le monde humain. La décroissance n’est pas une utopie, mais une reconquête de la réalité et d’un monde humain ordonné à cette réalité, c’est-à-dire la Biosphère. Si la Biosphère est bien le foyer de la réalité, vivre en symbiose ave la nature terrestre, c’est, à proprement parler, vivre réellement. Les hommes, descendus des lieux communs qui les éloignent de la nature terrestre, doivent entreprendre de localiser leurs productions et leurs échanges, c’est-à-dire d’ancrer leur existence dans la sphère de la réalité. »

* Jean-Paul Besset, Comment ne plus être progressiste sans devenir réactionnaire (2005)

** Jean-Paul Besset, in revue Entropia n° 4, printemps 2008, Pour en finir avec l’utopie

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Nicolas Hulot, droite ou gauche?

La question piège ! Rappelons que les Verts ont commencé leur aventure devant les électeurs sous l’étiquette « ni droite, ni gauche ». Uniquement pour avoir plus d’élus, un concubinage avec le Parti socialiste a été mis en place. Mais dans la pratique gouvernementale, Jospin n’a donné que des clopinettes à la cause écologique, sauf peut-être l’arrêt de Superphénix. Comme Nicolas Hulot se veut un candidat aux primaires vertes, il est bien obligé de s’accrocher à cet attelage bancal qui se veut à gauche. Même si l’ouverture vers la société civile avec Europe-Ecologie fait de EELV un conglomérat de l’extrême gauche au centre droit. En conséquence Nicolas Hulot ruse. Dans sa déclaration de Sevran, il estime que « son projet politique est incompatible avec les politiques que le pouvoir en place développe en France ». Cela ne veut pas dire que Nicolas ne soutiendrait pas un autre gouvernement de droite ! Il en rajoute : « Cela ne vaut pas pour autant blanc-seing pour ceux qui, à gauche ou au centre, se proposent de diriger le pays. » Pour Nicolas Hulot, il n’y aura donc aucun soutien automatique à qui que ce soit. Ni droite, ni gauche. Au fond, Nicolas veut rassembler « tous ceux qui ne se résignent pas au déclin conjoint de l’humanité et de la nature », ce qui en d’autres termes concerne tout le monde.

Nicolas Hulot suit le raisonnement de beaucoup de déçus du socialisme, en particulier son partenaire Jean-Paul Besset. Jean-Paul, issu de la ligue communiste révolutionnaire, a fini par « rompre le cordon :

          Tu n’es donc plus de gauche ?

          Non.

          Tu ne te sens pas un peu à droite ?

          Pas plus. De toute façon, aujourd’hui, c’est à peu près pareil.

          Quand même…

          Si, si, franchement. La carrosserie change un peu mais le moteur reste le même.

Le capitalisme et le socialisme participent de la même valeur productiviste, et si le second avait triomphé plutôt que le premier, nous serions probablement arrivés à un résultat indique. La lutte contre l’exploitation des uns et l’arrimage aux privilèges des autres ne peuvent être confondus, mais un même corpus idéologique lie  les deux mouvements. Ce qui les rassemble demeure plus fort que ce qui les oppose. Pour basculer vers la société durable, nous n’avons besoin ni de la droite, ni de la gauche. D’un même mouvement, elles se refusent à prononcer les mots qui fâchent – limites, décroissance, sobriété, modération, écotaxes – et elles n’envisagent de changements qu’à l’étalon des mots usés – modernité, développement, progrès. »*

* Comment ne plus être progressiste…sans devenir réactionnaire de Jean-Paul Besset (Fayard, 2005)

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Nicolas Hulot, compatible avec le Front National ?

Marine Le Pen a jugé le projet de l’écologiste Nicolas Hulot compatible avec celui de son propre parti : « On a relu avec mes conseillers le projet qu’il avait fait en 2007, son projet de programme : il y a énormément de choses qui sont tout à fait compatibles avec le projet du Front national ». Nous avons relu le Discours environnementaliste de papa Le Pen en février 2007. On voit certes une certaine concordance dans le préambule : « Le matérialisme effréné qui inspire depuis des décennies la politique gouvernementale a détruit l’harmonie entre la nature et l’activité humaine. C’est le résultat d’une idéologie qui considère le monde comme une immense usine, dans laquelle l’homme est uniquement un producteur et un consommateur interchangeable, sans patrie, sans famille, sans racine, sans terroir. » Mais dès qu’on rentre dans le programme, tout est différent.

Jean-Marie Le Pen croit de façon très théorique  que « l’homme est au cœur de la nature dont il doit respecter les lois », mais c’est pour faire place à l’homme : il approuve le défrichement de millions d’hectares de forêts et le drainage des marais. Jean-Marie Le Pen invente une « religion de la Terre appelée Gaïa » pour laquelle « La nature est bonne, l’homme est mauvais ». Quelle imagination ! Nicolas Hulot constate qu’en réalité l’homme n’est pas le Tout, il est la fraction d’un Tout ; il doit donc se sentir lié avec le vivant. Quand il fait eau commune avec des baleines, Nicolas Hulot n’a pas une étrangère en face de lui. Il pense avec la science que nous sommes issus avec l’ensemble du vivant d’une même histoire, d’une même matrice. Il pense que nous avons des obligations vis-à-vis de la nature.

Jean-Marie Le Pen se range carrément du côté des climatosceptiques : « Aujourd’hui, un nouveau péril nous guetterait, dont les hommes seraient les responsables : la température moyenne du climat augmenterait à cause des gaz carboniques à effet de serre émis par les activités humaines depuis 1750. Faut-il, sur la base de données discutables, nous engager dans un processus remettant en cause notre économie et notre indépendance ? » Nicolas Hulot juge avec le GIEC que l’émission de gaz à effet de serre est une menace : « Quand nous construisons une troisième plate-forme aéroportuaire sur Paris, cela va accentuer le changement climatique. Or les océans ont une capacité de stockage du CO2 qui diminue lorsque la température de l’eau augmente et le permafrost, qui repasse régulièrement à des températures positives, reprend sa fermentation et libère du méthane, un gaz à effet de serre beaucoup plus efficace que le CO2 »

Jean-Marie Le Pen est pour la poursuite du confort motorisé : « La liberté de millions de Français est déjà entravée par des règlements et des politiques inspirées par les Verts. Leur autophobie révèle un esprit totalitaire. La voiture constitue en effet pour les Français un moyen d’évasion, réservé jusque dans les années 50 aux plus fortunés. L’écologie ainsi dévoyée peut conduire à l’établissement d’un système totalitaire mondial, rationnant nos activités et nos dépenses et imposant des normes sociales contre-nature ». Nicolas Hulot estime que des leviers existent pour engager d’autres manières de se déplacer, pour économiser l’énergie et les ressources naturelles. Il veut changer de cap, libérer la société et les esprits des diktats d’un mode production et de consommation contaminé par l’illusion de la croissance quantitative. Mais l’écolofascisme ne sera pas le fait de Nicolas Hulot.

Jean-Marie Le Pen attaque ardemment les objecteurs de croissance : « Une autre idéologie, née en 1972 avec les thèses du Club de Rome, préconise pour sauver la planète de la surpopulation et de la surproduction, l’arrêt de la croissance. Elle considère que l’humanité constituant une espèce dangereuse pour l’environnement, il faut en réduire les activités et la population… Les plus modérés suggèrent juste un ralentissement de la croissance, les plus radicaux militent pour un retour à un âge d’or. Cette idéologie, d’apparence bucolique, est en réalité plus criminelle que celles qui ont ensanglanté le siècle dernier… Ce n’est pas en freinant la croissance économique de nos nations que nous protègerons notre environnement ». Pour Nicolas Hulot, des moyens existent pour faire décroître l’empreinte écologique, des solutions existent pour améliorer l’emploi, mieux redistribuer les richesses, installer une croissance qualitative et sélective. Il en appelle à celles et à ceux qui refusent de s’abandonner à la fuite en avant productiviste.

Jean-Marie Le Pen croit posséder LA solution finale, le nationalisme : « Dans le domaine économique et social, le bon sens nous amène à penser qu’une nation dotée de frontières constitue le modèle politique le plus performant. Il en est de même dans l’ordre écologique. Les frontières, bien sûr, ne protègent pas de toutes les pollutions, notamment climatiques. Des frontières nous permettraient d’imposer des droits de douane spécifiques sur les marchandises produites dans les pays ne respectant pas les normes environnementales. Le rétablissement de nos frontières nous permettrait enfin de lutter contre la pollution automobile en imposant, comme le fait déjà la Suisse et comme veut le faire la Belgique, un droit de passage aux véhicules immatriculés à l’étranger ». La candidature de Nicolas Hulot se situe à l’opposé des choix qui exacerbent les peurs et les tensions entre les peuples, les cultures et les religions. Pour lui l’espace européen est devenu notre biotope commun. Pour lui, la fragmentation et les divisions pour nous cataloguer dans des espèces, des races, des nationalités, ne sont que produits abstraits de la pensée. Pour lui, le meilleur atout pour réussir le changement, c’est la diversité. Aux peurs et aux pulsions identitaires qui désagrègent les liens du vivre ensemble, Nicolas Hulot oppose un autre projet de société.

Laisser croire que le Front National et Nicolas Hulot peuvent marcher main dans la main n’était donc qu’imposture de la part de Marion Anne Perrine Le Pen, dite Marine parce que ça fait plus national.

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Genèse de la candidature Hulot

Nicolas Hulot est naît le 30 avril 1955 à Lille. Il a vécu à 14 ans la mort de son père du cancer et trouvé à 18 ans le corps suicidé à 23 ans de son frère atteint de la maladie de la Tourette avec ce mot : « La vie ne vaut pas la peine d’être vécue ». Toute l’existence de Nicolas Hulot est sans doute une tentative de faire mentir son frère.

Le « bac + 3 mois «  Nicolas est d’abord un autodidacte. Choses vues, volumineux ensemble de textes non publiés de Victor Hugo, reste une des sources de sa pensée. Mais il vire écolo. Sur l’épaule de Nicolas, le tatouage d’une queue de rorqual raconte son amour des baleines. Ces films et téléfilms montrent sa passion pour la nature et son inquiétude devant les destructions causées par l’activisme humain. Nicolas ne part pas en voyage sans un livre de Théodore Monod et fait régulièrement la route de l’Ardèche pour rendre visite à Pierre Rabhi, chantre de la sobriété joyeuse. Avec sa Fondation, Nicolas Hulot a rassemblé autour de lui un Comité de veille écologique, des botanistes, des biologistes, des spécialistes de l’énergie, du climat de la faune, des philosophes qui vont faire son éducation : Dominique Bourg, Patrick Criqui, Philippe Desbrosses, Christian Dubois, Marc Dufumier, Alain Grandjean, Jean-Marc Jancovici, Thierry Libaert… Au point d’être capable d’intervenir devant un parterre de scientifiques sans avoir à rougir.

Nicolas a déjà changé le cours du politique. À force d’entretiens en tête-à-tête avec le chef de l’État, de coups de fil et de notes alarmistes, Nicolas a été l’inspirateur du virage vert de Jacques Chirac en mai 2001 : « La maison brûle et nous regardons ailleurs ». Si Nicolas juge le bilan chiraquien « largement insuffisant», il lui sait gré du vote de la charte de l’environnement. On l’a vu à la convention de l’UMP consacrée à l’écologie, puis à la fin de l’été au PS, à l’UDF, à l’université des Verts et de Cap 21. A force de travail et de conférences « sans caméras » dans des universités, des lycées, des congrégations religieuses, à l’Assemblée nationale, à l’Ecole de la magistrature, il a acquis une légitimité. Avant la dernière présidentielle, en 2007, l’animateur avait réussi à faire signer son Pacte écologique à tous les candidats sauf au président du Front national, Jean-Marie Le Pen. Sans le Pacte écologique, jamais la France ne se serait mise en mouvement, jamais il n’y aurait eu Europe Ecologie. Mais Nicolas s’est rendu compte des limites de son influence sur la classe politique, il y a eu l’échec du Grenelle de l’environnement, il veut désormais aller plus loin. Nicolas évoque comme ultime déclencheur à sa candidature sa rencontre avec Raoni, le chef d’une tribu amazonienne, et la montée de Marine Le Pen dans les sondages.

Depuis quelques mois, Nicolas Hulot se prépare donc avec sa garde rapprochée, en particulier l’eurodéputé Jean-Paul Besset, artisan du mouvement Europe Ecologie-Les Verts. Loin des appareils politiques, il est en train de faire aujourd’hui avec l’économie ce qu’il a fait hier avec l’écologie. Les experts en mouvements de capitaux ont rejoint les spécialistes de la flore subsaharienne. Michel Rocard n’hésite pas à passer 4 heures à le briefer, histoire de lui faire comprendre pourquoi les 35 heures n’ont pas créé les emplois qu’on en attendait. Comme tout candidat, l’ex-animateur télé prépare son programme, tourné à 100 % vers le social, précise son équipe. Nicolas a décidé de se faire le porte-parole de ceux qui tirent la sonnette d’alarme sans écho médiatique : l’écologie scientifique, les ONG environnementalistes, les militants désolés de ne contempler dans ces pré-primaires pré-présidentielles qu’une guerre des chefs tournés vers le passé, les écologistes inquiets de la désagrégation de la biosphère.

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le candidat Hulot, graine de possibles

Nicolas Hulot est le mieux placé comme candidat écolo. Pourquoi ? Parce que nos procédures politiques relèvent de la société du spectacle. Jamais dans une société véritablement démocratique un acteur de cinéma comme Ronald Reagan n’aurait pu accéder à la présidence des USA. Cela n’a été possible que parce que les médias – presse, télévision et cinéma -, formatent la perception des citoyens. Le bon candidat politique, c’est celui qui obtient le meilleur audimat. Ségolène Royal n’était rien avant les présidentielles de 2007 ; mais les médias l’ont intronisée contre Fabius et Strauss-Kahn. Il en est de même des candidatures écolos, les militants choisissent celui ou celle qui passera le mieux sur les écrans. Mélenchon est aussi écolo que Sarko : un jour il n’y connaît rien, le lendemain, c’est le premier des écolos. Mais il fait le buzz aujourd’hui, les médias adorent ses petites phrases et ses attaques contre les médias ; des écolos le rejoignent et le parti communiste devrait se plier à ses foucades pour continuer d’exister.

Pour les présidentielles d’avril 2002, les militants des Verts ont voté une première fois pour l’obscur Serge Lipietz, mais il n’a pas percé le mur médiatique. Alors il a été obligé de rendre son tablier pour laisser la place à l’ancien présentateur télé Noël Mamère : un type connu, et il assure plus de 5 % des voix ! Pour la présidentielle de 2007, le vote n’avait pu départager au deuxième tour « à deux voix près » les candidatures vertes de Dominique Voynet et Yves Cochet. Un second deuxième tour avait dont été improvisé avec résultat le 18 juillet 2006 : Dominique l’emportait alors par 57 voix. Les militants écologistes ont choisi la plus présentable médiatiquement. D’un côté Yves, apôtre de la pétroapocalypse et tenant d’une identité plus forte des Verts. De l’autre Dominique, « Il faut que notre projet soit plus populaire en s’adressant aux jeunes et aux pauvres ». Il n’y avait qu’un vote pour ramener les Verts dans leurs fondamentaux, Yves Cochet. Mais les militants préfèrent les alliances et le culte de Sainte-Sofres… Il n’est plus question de parler des générations futures et du saccage de la planète.

Pour 2012, le candidat maintenant déclaré Hulot a déjà l’atout de la médiatisation, mais aussi le handicap d’un discours alarmiste sur les limites de la biosphère. Pour les primaires EELV,  rien n’est donc encore joué. Sans surprise, Yves Cochet s’est déjà rangé derrière Nicolas. L’autre candidate Eva Joly, assez malmenée par les médias, ne devrait pas faire le poids. La secrétaire nationale du parti écologiste Cécile Duflot commence à lâcher Eva Joly : « Nicolas Hulot est pragmatique et je lui fais confiance ». Mais comme d’habitude, c’est l’évolution de l’audimat qui va conditionner le vote des militants. La démocratie est la victime d’une dictature des écrans.

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le culot de Nicolas Hulot

Président de la République ? Il en faut du culot pour se jeter dans l’arène politique comme vient de le faire ce 13 avril Nicolas Hulot. Car le domaine politique est un marigot où se vautrent de vieux crocodiles affamés de pouvoir qui dévorent tous les nouveaux arrivants. Même les décroissants de la revue du même nom n’arrêtent pas de taper sur ce vendu à TF1, Bouygues, EDF… Ce candidat des multinationales ne serait écolo qu’au petit écran, d’où un « pacte contre Hulot » de la part d’une gauche extrême.

Pourtant il y a actuellement peu de modèle de citoyens qui soient des exemples de ce qu’il faut faire quand on veut défendre la Biosphère. Si Nicolas n’est pas né écolo, il l’est devenu, intensément, durablement. Pour lui, la planète est beaucoup plus petite qu’on ne l’imagine, et c’est une réalité intimement vécue puisqu’il l’a parcourue en long et en large pour son émission Ushuaia, puis Opération Okavanga. Où qu’il aille, il rencontre l’empreinte des humains et les saloperies qu’ils laissent derrière eux. Il écrit donc seul ou avec d’autres des livres (Le syndrome du Titanic, Crise écologique-crise des valeurs …) et fonde en 1990, la Fondation Ushuaïa, rebaptisée en 1995 « Fondation Nicolas-Hulot pour la nature et l’homme ». Nicolas s’entoure de chercheurs et de scientifiques (Dominique Bourg, Patrick Criqui, Philippe Desbrosses, Christian Dubois, Marc Dufumier, Alain Grandjean, Jean-Marc Jancovici, Thierry Libaert…), ce que n’arrive même pas à faire le parti socialiste ! Nicolas a su faire pression sur les politiques, à commencer par le Président de la République Jacques Chirac dont il inspire le célèbre discours au sommet de la Terre à Johannesburg : « La maison brûle et nous regardons ailleurs ». Nicolas est donc indispensable à l’écologie politique.

Mais la présidentielle est-elle le bon endroit pour faire entendre sa voix ? Oui, car ce n’est que le résultat du mépris dans lequel ont été tenus depuis des décennies les contraintes écologiques. A chaque élection, des écologistes en colère vont trouver les candidats des divers partis politiques. Ils sont reçus avec…une certaine condescendance. En juin 1972, le ministre des finances Giscard d’Estaing organise un colloque sur les conclusions fort alarmantes du Club de Rome : en mai 1974, le candidat Giscard d’Estaing ne leur accorde plus la moindre considération, ne parle que de croissance ! Mitterrand avait mis les écolos Brice Lalonde et Philippe Saint Marc en contact avec Edith Cresson… Rien n’a suivi. Jospin en 1989 a mis au pilon un petit livre, Merci la Terre, qui devait être distribué dans les écoles ! Quant à Sarkozy, on se rappelle encore son avis : « L’écologie, ça commence à bien faire… » Nicolas Hulot en appelle aujourd’hui à celles et ceux qui savent qu’on ne peut plus s’exonérer de toute limite, notamment des limites physiques de la planète.

Dans Le syndrome du Titanic, Nicolas confiait en 2004 avec force : « De toute façon, si nous ne mettons pas en place des mécanismes de régulation, la Nature le fera d’elle-même, indépendamment de nous. Je dis souvent que le monde de demain sera radicalement différent de celui d’aujourd’hui, il le sera de gré ou de force. S’il l’est de gré, le tribut sera beaucoup moins lourd et terrible que s’il l’est de force. » Nicolas Hulot, c’est sans doute la dernière chance de la Terre

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supprimons les inégalités de salaires (suite)

Sur lemonde.fr, la richesse des commentaires à propos du plafonnement des salaires inscrit dans le projet socialiste mérite d’être soulignée. C’est pourquoi nous reproduisons ici les plus significatifs :

1) sur la « compétence »

– Les bonnes places dans ces entreprises se répartissent selon des règles monarchiques ! Les heureux « élus » ne sont pas plus compétents que d’autres, issus d’une clique qui se coopte à la sortie des grandes écoles ou dans des dîners politiques.

– Parce que vous croyez que, dans une boîte, le n° 2 ne fera pas aussi bien que le n° 1 pour moins cher ? A d’autres !

– M Ghosn fera-t-il 4 fois moins bien son travail si son salaire est divisé par 4 ? Et par 5, 6, 7, 8… ? A partir de quand M Ghosn fait grève ? Et aussi, peut-on trouver mieux que M Ghosn pour 10 fois moins cher ? 20 fois, 30… ? A partir de combien on ne peut plus trouver personne ? Ce serait le vrai prix de M Ghosn, en logique libérale.

– Il n’existe pas réellement de marché du Dirigeant. Puisqu’ils veulent jouer le marché, jouons-le ! Ouvrons la concurrence et faisons des économies : des grands patrons potentiels, la république en produit des milliers chaque année, des centaines de docteurs de l’université, des dizaines de promotions de l’ENA, ENS, X, CENTRALE… Pour un salaire de 1 à 10, des milliers se battraient pour avoir la place.

– Les entrepreneurs étaient-ils mauvais même avec un salaire seulement égal à 20 fois le salaire de base jusque dans les années 70 ? A coup sûr l’histoire économique dit non

– Il y a patron et patron. Certains, comme Bill Gates savent transmettre une grande partie de leurs gains, acquis grâce à leur génie, à des fondations caritatives. Malgré leur savoir-gagner de l’argent, ils ont encore des sentiments humains. D’autres, manifestent plutôt un amour pathologique de l’argent. Ils ramassent et amassent. Ceux-là, n’aiment pas donner aux hommes, ils aiment accaparer les gains. A ce jeu, ils ne récoltent que le mépris de tous. Ils s’en foutent !

– Et la liste des patrons « catastropheurs » quel que soit d’ailleurs le statut juridique de l’entreprise: CREDIT LYONNAIS/Haberer ; VIVENDI/Messier ; GMF/Pétriat ; en SUISSE/ADECCO ; aux USA/ENRON ; en ITALIE:/PARMALAT ; en GB/ROVER. Stop! Les centaines de milliards d’euros, de sterlings et de dollars perdus par leur faute tournent la tête. Nos omniscients ne le sont pas tant que ça et pire certains sont des escrocs comme MADOFF.

– Les patrons si chers payés n’ont rien vu venir de la crise financière.

– « La compétence des grands patrons », un mythe ! Toutes décisions d’une SA sont collégiales et issues d’expertise. Le Grand Patron n’est que le médiateur d’idées émises par d’autres.

– Ce ne sont pas les compétences des chefs d’entreprise qui leur donnent leur statut envié, respecté, et surpayé ; c’est à l’inverse leur position de chef d’entreprise qui les fait respecter et surpayer par les nigauds que nous sommes. Nous vivons dans une société tellement hiérarchisée, tellement confucéenne (au plus mauvais sens du terme) que nous idolâtrons nos exploiteurs. Honte à nous !

– Mme Bettencourt doit rigoler en vous voyant parler d’effort et de prise de risques. Le mec qui fait du marteau-piqueur prend davantage de risques et fournit davantage d’efforts que les Proglio et autre Lauvergeon tout en étant payé à coups de pompes dans le c*.

2) sur les contre-propositions

– Le FRONT de GAUCHE propose un salaire maximum à 20X le SMIC. Et ceux qui ne peuvent se « contenter » de 27 300 EUR par MOIS…et bien : QU’ILS S’EN AILLENT TOUS !

– Que ces patrons courant après le fric aillent à l’étranger, c’est justement un des buts. Ne resteront que des patrons tout aussi compétents mais bien moins cupides qui n’ont pas pour objectif l’enrichissement maximal.

– Pourquoi plafonner le salaire des patrons et pas ceux des sportifs (footeux par ex) dont les salaires sont largement subventionnés par les collectivités territoriales et donc les impôts?

– Est-ce qu’on plafonnerait aussi les salaires des footballeurs par rapport au salaire des employés du club ? Tout ce qu’il est possible de faire, c’est de décider que les rémunérations dépassant le plafond ne seront plus déductibles et de les soumettre, par exemple, à une cotisation supplémentaire de solidarité, et augmenter le taux maximum de l’impôt sur le revenu. Pourquoi pas jusqu’à 100 % !

– La mesure évoquée par le PS ne concerne qu’une minorité, pas les PME ! Souvent le patron ne gagne pas plus que le mieux payé de ses employés (par nécessité, il est même parfois obligé de se sucrer son salaire).

– Un patron qui ne gagnerait que 20 fois le Smic devrait pouvoir survivre, non ?

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1981-2011, le projet socialiste patine

Chaque jour davantage le Parti Socialiste nous donne des raisons de désespérer. La dernière mouture du « projet socialiste » n’a rien de nouveau. Sur les 30 priorités pour 2012, la dernière promet le « droit de vote des étrangers aux élections locales » Mais en avril 1981, sur les 110 propositions de Mitterrand, figurait déjà le « droit de vote aux élections municipales après cinq ans de présence des travailleurs immigrés sur le territoire français ». Trente ans après, le PS n’a toujours pas respecté sa parole ! En 1981, « 60 000 emplois d’utilité collective seront mis à la disposition des associations et des collectivités locales ». En 2011, « Création de 300 000 emplois d’avenir pour les jeunes ». Les emplois au rabais sont restés une spécialité du PS. En 1981, la proposition 39 portait sur « un vaste programme d’investissement destiné à économiser l’énergie ». Rien n’a été fait depuis, aussi on renouvelle aujourd’hui l’espoir d’un « développement massif des économies d’énergies » (priorité 10).

Le projet de Martine Aubry n’est pas un projet collectif, c’est le bégaiement de l’histoire, c’est un saupoudrage pour ne fâcher personne ; il intègre l’essentiel des désirs des différents candidats aux primaires. Ce n’est même pas une synthèse à plusieurs voix, c’est surtout la plume de Guillaume Bachelay. Ce secrétaire national du PS à la politique industrielle se pique de « social-écologie en actes » ! La social-écologie constituerait le cœur du socialisme post-libéral qu’il voudrait porter aujourd’hui. On ne s’en rend vraiment pas compte après lecture de ses 30 propositions (validées par Martine).

Pourtant dans la Revue socialiste (4e trimestre 2010), Guillaume Bachelay posait le fond du problème des socialistes : « Il est paradoxal que notre critique féroce du capitalisme ait longtemps négligé l’incompatibilité entre les forces de l’argent et celles de la nature. Dans la dialectique production/redistribution, nous avions omis une donnée désormais vitale : les ressources de la planète ne sont ni infinies ni éternelles. Dans l’affrontement capital/travail, nous avions oublié l’environnement. Menacé par l’activité humaine, il est venu chambouler nos axiomes ». La problématique du XXIe siècle est posée, mais le PS se tourne encore et toujours en 2011 vers son passé productiviste.

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Montebourg ou Strauss-Kahn ?

Montebourg ou Strauss-Kahn ? Le combat semble gagné d’avance, un gros bœuf charolais contre un minuscule souriceau ! Mais qui a raison, au fond ? En février 2009, Dominique Strauss-Kahn, s’alarmait : « Le protectionnisme peut revenir par la porte de derrière ». Il est vrai que le directeur général du Fonds monétaire international (FMI) ne peut jurer que par la mondialisation libérale, hier et demain. De son côté Arnaud Montebourg* se veut l’apôtre d’une démondialisation.

Sur cette question et bien d’autres, entre la droite et DSK, il n’y a même pas l’épaisseur d’un cheveu : le libre-échange resterait notre maître. Le FMI, l’OMC et les transnationales continueraient de marcher main dans la main. Pour quel résultat ? Comme l’exprime Arnaud dans son livre**, « le bilan de la dernière décennie de mondialisation est un désastre » : délocalisation en série, destruction d’emplois et d’outils de travail, diminution des revenus du travail par la pression à la baisse. Si l’on voulait résumer les quinze années écoulées, il ne serait pas excessif de dire que la mondialisation a fabriqué des chômeurs au Nord et augmenté le nombre de quasi-esclaves au Sud. Cette ouverture aux marchandises et aux capitaux est l’ennemi déclaré de l’économie locale, y compris au niveau alimentaire.

Le PS se situe à mi-chemin de DSK et Arnaud, pour le « juste échange », c’est-à-dire » un système commercial régulé, loyal et équitable, respectueux des hommes et de l’environnement.». Blabla et langue de bois, la dernière mouture du programme socialiste ne jure que par la relance économique et la compétitivité internationale. Heureusement que le candidat socialiste aux primaires pourra n’en faire qu’à sa tête quant aux idées posées par Martine Aubry ! Arnaud ne veut plus être un des infirmiers de la mondialisation, le cogérant d’un système moribond qui s’écroule. Arnaud Montebourg sera peut-être le futur Jaurès de l’écologie, de toute façon DSK et les autres charolais du PS ne représentent plus que notre passé. Arnaud propose un concept dont The Economist lui attribue la paternité, la démondialisation. Une démondialisation concertée est le seul espoir de bâtir des communautés de résilience pour surmonter choc pétrolier, réchauffement climatique, etc. Cette relocalisation paisible sera notre avenir, sinon les guerres ordinaires prolongeront les guerres commerciales… comme cela s’est toujours fait !

* LeMonde du 3-4 avril 2011, La primaire socialiste ne peut pas se réduire à un concours de bœufs charolais.

** Des idées et des rêves d’Arnaud Montebourg (Flammarion, 2010)

PS : Attention, comme nous l’a fait remarquer un commentateur, The Economist a attribué la paternité du terme « démondialisation » à Walden Bello et non à Arnaud Montebourg.

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écologie et risque fasciste

La démocratie sera la première victime de l’altération des conditions universelles d’existence que nous sommes en train de programmer. Les catastrophes écologiques qui se préparent à l’échelle mondiale dans un contexte de croissance démographique, les inégalités dues à la rareté locale de l’eau, la fin de l’énergie bon marché, la raréfaction de nombre de minéraux, la dégradation de la biodiversité, l’érosion et la dégradation des sols, les événements climatiques extrêmes… produiront les pires inégalités entre ceux qui auront les moyens de s’en protéger, pour un temps, et ceux qui les subiront. Elles ébranleront les équilibres géopolitiques et seront sources de conflits. Parce que nos démocraties n’auront pas été capables de se prémunir de leurs propres excès, elles risquent de basculer dans l’état d’exception et de céder aux dérives totalitaristes.

Lorsque l’effondrement de l’espèce apparaîtra comme une possibilité envisageable, l’urgence n’aura que faire de nos processus, lents et complexes, de délibération. Pris de panique, l’Occident transgressera ses valeurs de liberté et de justice. Pour s’être heurtées aux limites physiques, les sociétés seront livrées à la violence des hommes. Nul ne peut contester a priori le risque que les démocraties cèdent sous de telles menaces.

Les enjeux, tant pour la gouvernance internationale et nationale que pour l’avenir macroéconomique, sont de nous libérer du culte de la compétitivité, de la croissance qui nous ronge et de la civilisation de la pauvreté dans le gaspillage. Si nous n’agissons pas promptement, c’est à la barbarie que nous sommes certains de nous exposer. Pour cette raison, répondre à la crise écologique est un devoir moral absolu. Les ennemis de la démocratie sont ceux qui remettent à plus tard les réponses aux enjeux et défis de l’écologie.

[Résumé d’un texte de Michel Rocard, Dominique Bourg et Floran Augagneur (Le Monde du 3-4 avril 2011, Le  genre humain, menacé)]

NB : nous sommes heureux de voir que LeMonde-papier se fait l’écho des thèses que nous défendons sur ce blog, par exemple

Démocratie et risque d’écofascisme

L’écologie est un antitotalitarisme

Capitalisme vert-de-gris

Eloge de la dictature ?

 

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LeMonde s’enlise en Libye

Nous avons enfin compris les deux éditoriaux* bellicistes du Monde. Alain Frachon, directeur éditorial, critique ce jour** Rony Brauman qui s’oppose à l’intervention sarkozienne en Libye : « Des interventions destinées à prévenir des massacres, j’en ai vu d’autres. Elles ont gelé la situation, et les massacres qui se sont produits ultérieurement ont été pires. » Brauman, ancien de médecin sans frontières, sait pourtant de quoi il s’agit en matière d’humanitaire. Par contre Frachon  croit que deux ou trois bombardiers qui restent en l’air vont « mettre fin à quarante-deux ans d’une dictature folle et cruelle ». C’est désolant de voir un journaliste du Monde si naïf. Car demain en Libye ou ailleurs sera semblable à hier, guerre, massacre, abus de pouvoir, non-respect du droit des hommes, du droit des femmes, du droit des animaux, etc. Or, si tout le monde agissait comme Gandhi, mettant en harmonie la fin et les moyens, il n’y aurait plus de violence. Où se situe le blocage ?

L’amour du prochain et la paix civile ne se décrète pas, il découle de tout un apprentissage social. Un couple parental qui disjoncte, un milieu de travail stressant, des médias qui valorisent la violence, la crainte de Dieu qui dresse contre les autres croyances, un anthropocentrisme qui incite à piller la Nature… ne peuvent préparer une société pacifique. C’est donc tout le conditionnement social qui est à revoir. Il faut aussi bien supprimer les jeux vidéos qui banalisent la guerre et le massacre que condamner l’intervention armée en Libye et tous les autres conflits armés… Cette bataille pour une socialisation conviviale est loin d’être gagnée, mais elle mérite d’être menée. Car c’est la seule bataille qui compte.

                La France n’a pas à exporter des armes, et il est paradoxal que des Rafales français attaquent des Mirages français acquis  par Kadhafi. La France n’a pas à exporter la démocratie, elle doit montrer que sa démocratie fonctionne bien, ce qui est loin d’être le cas. Notre comportement est soumis à l’interaction spéculaire ; j’agis ainsi parce que je vois les autres agir ainsi. Il est donc important de montrer l’exemple, c’est ainsi qu’on peut convaincre ses voisins et les autres peuples. Supprimons notre armée pour la remplacer par un entraînement à la défense civique non violente ; si nous avions fait cela sur notre territoire depuis toujours, il n’y aurait même plus de nations européennes ou arabes, il n’y aurait que la fraternité humaine. Cela n’a pas été fait, rien n’empêche de commencer…

* voir 21 mars et 24 mars

** LeMonde du 25 mars 2011, La Libye, on fait quoi demain et après-demain ?

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LeMonde, une guerre « juste » en Libye ?

L’éditorial engage le journal tout entier et l’humanitaire a bon dos ! Pour la deuxième fois en quelques jours, LeMonde* prend fait et cause pour la guerre de Sarkozy. Cette fois, ce n’est pas pour fouler aux pieds la neutralité de l’Allemagne, c’est pour se retrancher derrière la « doctrine d’intervention humanitaire » de 2005. Ah le droit d’ingérence ! Comme dit l’ex-diplomate Jean-Christophe Rufin**, où s’arrête la guerre « humanitaire » ? D’ailleurs, où commence ce droit qui ne peut être utilisé que par les puissants pour attaquer qui ils souhaitent ? Nous, sur ce blog, nous ne pouvons croire à la guerre « juste ».

                L’idée qu’il y a des guerres injustes mais aussi des guerres justes est inoffensive : elle ne menace en rien les fortunes établies et les pouvoirs en place. Il n’y a pas que l’ONU en 2005, l’Eglise catholique a depuis longtemps développé une doctrine sur les guerres justes et les guerres injustes : massacrer pour la « bonne cause » a été l’une des maladies de toutes les époques. Soyons clair : les guerres sont intrinsèquement mauvaises pour être jamais justes. Les tentatives d’humaniser la guerre en 1932 inquiétèrent au plus haut point Albert Einstein : « Il ne faut pas banaliser la guerre en y fixant des règles. La guerre ne peut pas être humanisée, elle ne peut qu’être abolie. » La conférence de Genève se poursuivit néanmoins et l’on s’y obstina à définir des règles censées rendre les guerres plus « humaines ». Règles qui seront systématiquement violées au cours de la guerre mondiale suivante. On sait même que Churchill commanda des milliers de bombes à anthrax. Tout animal ayant inhalé pendant une minute les spores de l’anthrax a toutes les chances d’en mourir brusquement et sans douleurs la semaine suivante. Ce sont les délais de production qui empêchèrent la réalisation de ce projet.

                Il n’existe pas de guerre juste, l’exemple de la Seconde Guerre mondiale est le test suprême. Les nazis étaient des assassins pathologiques. Nous devions les arrêter et seule la force pouvait y arriver. Mais la Grande-Bretagne et les Etats-Unis ne s’opposaient au fascisme que parce qu’il menaçait leur propre domination sur certaines ressources naturelles et sur certaines populations. Et les ingrédients du fascisme (le militarisme, le racisme, l’impérialisme, la dictature et le nationalisme exacerbé) survécurent sans problème à la guerre. Nous conseillons aux éditorialistes du  Monde de lire  Désobéissance civile et démocratie d’Howard Zinn.

* LeMonde du 24 mars 2011, Le mandat de l’ONU, ni plus ni moins (éditorial)

** LeMonde du 24 mars 2011, La France s’est placée totalement en dehors de sa propre doctrine militaire

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