le viol de DSK et la société du spectacle

Tentative de viol ! Après l’immédiateté médiatique véhiculée par Internet vient l’amplification par les journaux papiers. Dans LeMonde du 17 mai 2011, l’affaire Dominique Strauss-Kahn  fait l’objet de l’éditorial, de 7 pages supplémentaires journalistiques, d’une page débat. Si on y ajoute la rubrique écran (DSK contre NYPD) et l’analyse de Gérard Courtois, que reste-il à lire du reliquat de l’actualité ? Trois pages pour le Festival de Cannes, des rogatons pour tout le reste. C’est ainsi, c’est la « société du spectacle ». Notre nouvelle organisation technicienne crée en abondance des images et des leurres comme  compensations mensongères à notre aliénation collective. Comme l’exprime Guy Debord  dans Commentaires sur la société du spectacle (1988) :

« La possession d’un « statut médiatique » a pris une importance infiniment plus grande que la valeur de ce que l’on est capable de faire réellement. Ne passent que rarement, et par brèves saccades, les nouvelles véritablement importantes sur ce qui change effectivement. Entre 1967 et 1988, le changement qui a le plus d’importance réside dans la continuité même du spectacle. Mac Luhan parlait de « village planétaire », si instamment accessible à tous sans fatigue. Mais les villages ont toujours été dominés par le  conformisme, l’isolement, les ragots toujours répétés. La pollution des océans et la destruction des forêts équatoriales menacent le renouvellement de l’oxygène de la Terre. Le spectacle conclut seulement que c’est sans importance. »      

                Dans LeMonde du 17 mai 2011, il y a quand même une page Planète qui insiste sur la sécheresse en France. Il  faudra s’adapter au réchauffement climatique, dit notre ministère, c’est-à-dire réduire notre consommation d’eau. Mais pour l’instant, les agriculteurs peuvent continuer à pomper. La sécheresse, c’est sans importance, parlons de DSK !

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plus à gauche et moins à droite, Nicolas Hulot

«  Ni droite, ni gauche » est un slogan qui ne veut rien dire, comme d’ailleurs « ce n’est pas démocratique » ou « Vive la liberté ». Tout dépend de ce qu’on entend par droite, gauche, démocratique et liberté ! Contrairement à ce qu’affirme LeMonde *, il n’y a pas de division au sein des écolos. Ils pensent que capitalisme et socialisme sont deux variantes d’un même modèle, la société de croissance, productiviste et inégalitaire. Les uns donnent un peu plus au capital, les autres disent agir pour les travailleurs, les deux s’entendent pour ignorer complètement le facteur Terre et la richesse du vivant. Constatant ce fait, l’écologie est une nouvelle offre politique qui se situe plus à gauche et moins à droite.

Comme l’exprimait Serge Moscovici en 1978, la gauche et la droite sont des notions relatives : « Nous sommes à la gauche de la gauche. Cela veut dire que nous sommes proches de la gauche sur un certain nombre de points (rémunération, organisation des entreprises, internationalisme, etc.) ; mais sur d’autres points, c’est nous qui représentons la gauche, notamment pour tout ce qui a trait aux rapports à la nature, à l’utilisation des ressources, à l’autonomie des collectivités, au productivisme, à la croissance. Car, bien souvent, les hommes et les partis de gauche se sont éloignés de ce qu’on appelle le socialisme et, ce faisant, ont laissé un vide qu’on nous appelle à combler. »

Aujourd’hui Nicolas Hulot n’est pas un politique qui court après les places, ces Besson et consorts pour qui peu importe l’écurie avec laquelle on court puisqu’il s’agit de gagner. Pour lui, il y a une troisième voie entre la gauche et la droite. Pour lui c’est un peu plus à gauche et un peu moins à droite car l’avenir n’est pas « compatible avec le logiciel de droite ». Pour lui, il y a des principes supérieurs au bloc droite-gauche. Pour lui, la contrainte pétrolière, la perte de biodiversité et le réchauffement climatique conditionnent l’économique et le social. Nicolas voit sa campagne présidentielle comme une immense mission pédagogique, pas comme un endoctrinement.

Beaucoup de pages seraient encore nécessaires pour approfondir ce que veut dire politiquement droite ou gauche quand on y mêle l’écologie. Mais en résumé, il y a ceux qui estiment qu’il n’y a pas de limites à la volonté de puissance de l’homme, et ceux qui ont le sens des limites de la biosphère. Nicolas Hulot est actuellement le seul candidat aux présidentielles qui tienne ce discours.

* LeMonde du 15-16 mais 2011, Les écologistes face au vieux démon de la division

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Dominique Strauss-Kahn est-il de droite ou de gauche ?

«  Ni droite, ni gauche » est un slogan qui ne veut rien dire, comme d’ailleurs « elle était consentante ». Tout dépend de ce qu’on entend par droite, gauche, ou consentement ! Et rappelons-nous que Dominique Strauss-Kahn se disait socialiste. LeMonde succombe pourtant à ce travers de la superficialité dans son article* sur la primaire des écolos Hulot/Joly. Il paraît qu’il y a un clivage historique entre le « ni droite, ni gauche », formule à l’origine de la création des Verts, et « l’ancrage à gauche » depuis 1997. C’est oublier que cette évolution relevait seulement d’une stratégie politique et non d’un changement de convictions des écolos. En effet, contrairement à ce qu’affirme Noël Mamère, il y a des arrangements possibles pour savoir avec qui on va se marier. Car il faut déterminer de quelle « gauche » et de quelle  « droite » on parle.

La gauche au pouvoir en 1981 avec Mitterrand n’a laissé aucun souvenir en matière d’écologie. Entre 1997 et 2002, le Premier ministre Jospin, de « gauche », tenait l’écologie pour une bizarrerie anecdotique. Bettina Laville, sa conseillère environnementale, se désespérait chaque jour de ne servir à rien. Dominique Voynet confiait avoir été la seule écolo dans un gouvernement qui ne l’était pas. Rien n’a changé depuis : la motion « pour un parti socialiste résolument écologique », n’a obtenu que 1,6 % des voix lors du dernier Congrès. La gauche qui veut nous gouverner n’est donc pas écolo. Elle continue de sous-traiter les problèmes environnementaux au lieu de les prendre comme condition première de notre genre de vie.

                La droite a donc beau jeu de rappeler que c’est elle qui a porté en France la législation environnementale, qui lui a donné un principe constitutionnel et qui a organisé la première véritable concertation publique sur l’ensemble de ces enjeux : création en 1971 du ministère de l’environnement par Georges Pompidou, loi Barnier en 1995, Charte de l’environnement en 2005 et « Grenelle de l’environnement » lancé en 2007. Nathalie Kosciusko-Morizet,  Ministre actuel de l’Ecologie, du Développement durable, des Transports et du Logement, assume un périmètre assez large d’action. Le contenu de son livre** n’était pas partisan.

C’est avec sagacité qu’André Gorz avait subsumé l’économie contemporaine capitaliste et socialiste sous un concept plus large, l’industrialisme (le productivisme). C’est donc une certaine droite qui se retrouve avec une certaine gauche pour dénoncer les méfaits d’une société de croissance qui court au désastre. Beaucoup de pages seraient encore nécessaires pour approfondir ce que veut dire politiquement droite ou gauche quand on y mêle l’écologie. Mais en résumé, il y a ceux qui estiment qu’il n’y a pas de limites à la volonté de puissance de l’homme, et ceux qui ont le sens des limites. Où placeriez-vous DSK ?

* LeMonde du 15-16 mai 2011, Les écologistes face au vieux démon de la division

** Tu viens ? (Gallimard 2009)

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la catastrophe, Nicolas Hulot n’en veut pas

Les risques de catastrophes « naturelles » dues, de près ou de loin, à l’industrie humaine sont devenus une menace incomparable de ce temps. La liste de ces catastrophes et de leurs victimes, pour les vingt dernières années, serait longue. Je ne veux pas être un prophète de malheur, mais je crains que dans le futur, si rien n’est fait, l’état de l’environnement, tel que nous l’avons façonné nous-mêmes, n’appelle d’autres graves désillusions. Il conviendrait de regarder enfin en face la situation de notre Terre et celle de la France, pour ne pas arriver toujours, et de plus en plus souvent, trop tard, après les catastrophes.

                Le titre que nous avons choisi pour ce livre est amplement justifié : Combien de catastrophes avant d’agir ? C’est-à-dire avant que les politiques prennent leurs responsabilités et donnent enfin à la politique de l’environnement la place qui doit lui revenir. Et avant que nous-mêmes, citoyens, électeurs et consommateurs, sortions de notre insouciance pour conjurer les périls qui sont déjà en la demeure et qui préparent immanquablement, à nous et à nos descendants, une forte dégradation de nos conditions de vie

                La politique est le lieu des décisions pour l’avenir. Dans la gestion gouvernementale, l’environnement n’a pas encore la place centrale qu’il devrait avoir. Dans les domaines sensibles, où l’urgence devient pourtant extrême (biodiversité, transports – routiers notamment -, océans et littoraux, pollution des sols et de l’eau douce par l’agriculture et l’élevage intensifs), la frilosité et le manque de courage politique sont évidents. Ceux qui sont aux affaires n’osent pas s’opposer aux divers lobbies : ils sont souvent incapables de faire respecter tout simplement la loi. C’est cela qui doit changer durant la présidence et la législature qui vient.

Nicolas Hulot, texte écrit en 2002

(résumé de l’introduction et de la conclusion par Nicolas Hulot du livre élaboré par son Comité de veille écologique, Combien de catastrophes avant d’agir ?)

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la catastrophe, c’est Luc Ferry

Il paraît que Luc Ferry est un type intelligent. Puisqu’il est devenu un jour ministre de droite, les doutes affleurent cependant. Confirmation de son aveuglement, son discours dans philosophie MAGAZINE de mai 2011. Luc Ferry ne fait qu’y réciter les poncifs et les caricatures  accumulés par la droite contre l’écologie. Voici quelques extraits :

« Je vois dans Fukushima trop de passions tristes. Nos écolos, animés par la peur et le ressentiment, ont cette joie mauvaise de ceux qui « vous l’avaient bien dit ». L’heuristique de la peur dont parle Hans Jonas est calamiteuse, comme l’absurde principe de précaution dans la Constitution française. La peur est devenue la passion fondamentale de l’écologie. »

« L’appel aux alternatives au nucléaire dissimule le vieux fantasme d’une autre politique qui réjouit les anciens du gauchisme reconvertit dans l’écologie, comme les fondamentalistes chrétiens, heureux de pouvoir stigmatiser l’hubris de l’homme sans Dieu. Il est facile de plaider pour la décroissance quand, en rentrant chez soi, on allume la lumière, on recharge tranquillement son portable en préparant son dîner sur une plaque électrique. »

« Même sur la question du réchauffement, il faut faire place au doute. Pourquoi tout faire pour cacher le plateau entre 1998 et 2011, comme si le débat était interdit ? Quant aux conséquences, rien ne prouve sérieusement qu’elles soient aussi catastrophiques que le prétend le GIEC, ni que nous soyons dans l’urgence absolue. Même si on table sur une augmentation de 2°C ou 3°C sur un siècle, ce qui n’a rien de certain, nous avons le temps de réagir. »

« Veut-on renoncer au progrès ? Si oui, il faut le dire clairement. Réfléchir sur ce qui menacera l’humanité dans cinquante ans, comme si l’état de la science était immuable, n’a aucun sens. La décroissance est invendable politiquement. Vous ne convaincrez pas les Chinois d’opter pour la décroissance. La solution, c’est l’innovation scientifique. »

« Le capitalisme n’est pas ce qui nous a plongés dans la misère, mais ce qui nous en a sortis. Les inégalités (un milliard soufrant de la faim, cinq milliards se débrouillant avec quelques dollars par jour, et un milliard dans le confort matériel) ne sont pas le fait de l’Europe. »

En résumé :

          N’ayez pas peur braves gens, dormez.

          Les inégalités ne sont pas mon problème.

          L’innovation techno-scientifique peut tout, Fukushima n’est rien.

          Les écolos disent n’importe quoi, c’est le maintien du capitalisme qui importe.

          Les scientifiques du GIEC écrivent n’importe quoi, rien ne presse pour agir contre les gaz à effet de serre.

 

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la catastrophe, c’est Pascal Bruckner

Pascal Bruckner ou le refoulement du désastre ! Bruckner avait dit un jour détester par-dessus tout « le manque de courage intellectuel » ; or ce n’est vraiment pas de cela dont il fait preuve dans une tribune du Monde*. Il est vraiment affligeant que sur la cinquantaine de textes que le quotidien reçoit chaque jour, on retienne pour publication un pamphlet témoignant d’une connaissance aussi grossière de la réalité contemporaine.   

Pascal Bruckner place dans le même panier les scientifiques qui annoncent le dérèglement climatique ET des sectes apocalyptiques : c’est faire un raccourci digne d’un romancier qui a rédigé sa thèse sur le socialisme utopique de Charles Fourier. Car Bruckner veut confondre allègrement deux choses, catastrophes et catastrophisme. Les catastrophes sont des faits, mesurables scientifiquement : tsunami financier, Fukushima, crise de l’endettement, 6ème extinction des espèces, réchauffement climatique, pic pétrolier (descente énergétique), etc. De cela, Bruckner ne dit mot ! Ce qui l’intéresse, c’est une invention littéraire qu’il appelle « catastrophisme ». Si les prêcheurs de l’Apocalypse ont toujours existé, la crise systémique qui nous affecte n’a rien à voir avec les sectes millénaristes du catastrophisme. Mais Bruckner fait semblant de confondre. Pour lui, « les médias et les gouvernements diffusent en continu l’effroi pour la peur que cela inspire ». Pour attester de son propre imaginaire, Bruckner fait dire ce qui n’est pas dit, « La fin des temps est venue », « Dans cinq ans, dans dix ans, la terre sera devenue inhabitable », « Toutes les centrales nucléaires auront explosé », etc. Il paraît que « Le catastrophisme règne dans les pays occidentaux » alors qu’il ne s’agit que de recenser jour après jour les maux auxquels nous sommes de plus en plus confrontés et contre lesquels il nous faudrait réagir.. Quelle est donc l’intention cachée de Bruckner ?

Bruckner se réfère à l’Armageddon et à Paco Rabanne pour, implicitement, nous demander de ne pas réagir : puisque le catastrophisme règne, alors ne faisons rien contre les catastrophes. Pire, Bruckner dévalorise ceux qui essayent de faire quelque chose : abandonner la voiture et les voyages en avion, faire du vélo, monter les escaliers à pied, consommer local, délaisser la viande, devenir végétarien, recycler ses déchets, planter des arbres, modérer ses désirs, s’appauvrir volontairement. Pour Bruckner, il ne s’agit là que de remèdes dérisoires pratiqués par de gentils boy-scouts qui suivent les conseils dignes de nos grands-mères. Il s’agirait pour les décroissants d’une « illusion d’agir pour la Terre ». Nous consommons trop et Bruckner nous propose de faire comme si de rien n’était : c’est pathétique et profondément irresponsable ! Pour Bruckner, qui n’en est pas à une contradiction près, « on décrète la certitude du désastre car cela permet de se reposer, peinards, dans les douceurs », « on voulait nous alarmer, on nous désarme »..

Alors, que propose de son côté Bruckner pour réagir contre les réels désastres sociaux, économiques et écologiques qui se profilent ? Rien ! Ah, si, mais il ne le dit pas clairement, il n’ose même pas exprimer sa pensée profonde : il faudrait de la croissance ! C’est cela que nous lisons entre ses lignes, « Quant aux Chinois, aux Indiens aux Brésiliens, ils doivent retourner à leur misère, pas question qu’ils se développent ». Il nous propose aussi de faire une confiance aveugle au progrès : «  Les sociétés humaines survivent aux pires calamités et développent une intelligence des périls ». D’ailleurs pour Bruckner, il suffirait de ne jamais construire de centrales nucléaires dans une zone sismique !  A lire Bruckner, on ne peut donc que douter de l’intelligence humaine. Alors, quelle est la justification profonde de ce verbiage qui mêle allègrement une BD d’Hergé, l’Apocalypse chrétienne et le calendrier maya ?

                De révolutionnaire, Bruckner est simplement devenu de plus en plus réactionnaire. Car n’est-ce pas lui qui était invité au Fouquet’s un certain 7 mai ? Tout bonnement  Bruckner se comporte en petit soldat de Sarko pour qui « l’écologie, ça commence à bien faire ». M. Bruckner travaille actuellement à une réflexion sur l’écologie. Nous avions un Claude Allègre pour le climat, nous aurons désormais un Pascal Bruckner pour l’écologie. On comprend mieux, en lisant ses vaines élucubrations, qu’il n’a pas besoin de réfléchir au sujet puisque le catastrophisme est le plus sûr moyen de ne pas parler des catastrophes. Nous avons rédigé cette chronique, nous avons perdu notre temps. Mais 3/4 de pages donné par LeMonde à Pascal Bruckner méritait quand même une réponse.

* tribune LeMonde du 2 mai 2011, La séduction du désastre

(texte déjà parue sous forme Chronique sur lemonde.fr, mais les chroniques des abonnés sont si vite oubliées !)

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la catastrophe, c’est Alain Frachon

LeMonde a publié récemment une tribune* fort contestable de Pascal Bruckner mélangeant de façon éhontée la réalité des catastrophes en cours et le « catastrophisme ». Luc Ferry vitupère dans Philosophie magazine (mai 2011) sur « nos écolos, animés par la peur… La peur est devenue la passion fondamentale de l’écologie ». Et aujourd’hui Alain Frachon**, directeur éditorial du Monde, enfonce le clou en faisant une « critique raisonnée du catastrophisme ambiant ». Il commente l’ouvrage « salutaire » de Bruno Tertrais, dénonçant le catastrophisme dans son livre L’apocalypse n’est pas pour demain. Ce n’est plus de l’information, c’est de la désinformation collectivement assumée. Pourquoi ?

                Tous ces « spécialistes » caressent l’opinion dans le sens du poil : la seule urgence, c’est de ne rien faire puisqu’il n’y a pas de catastrophes prévisibles, il n’y a que du catastrophisme non fondé. Alain Frachon  recopie Bruno Tertrais : « La planète et l’humanité vont beaucoup mieux qu’on ne croit et l’avenir est beaucoup moins sombre qu’on ne le dit. » Alain Frachon conclut que l’état présent du monde ne justifie pas le pessimisme et que faits et chiffres mettent à mal le catastrophisme des prévisions les plus fréquentes. Dormez braves gens est le seul leitmotiv ! Redescendons sur notre planète réelle !

                Non, nous ne sommes pas « plus riches » ; quand on a défalqué de l’indicateur PIB les méfaits de la croissance, on pourrait calculer un rythme de croissance négative. Non, nous ne sommes pas « mieux éduqués » ; nous sommes gavés de connaissances inutiles avec des diplômes en voie de dévalorisation. Non, nous ne sommes pas en « meilleure santé » ; la diminution de l’espérance de vie en bonne santé constatée dans plusieurs pays européens en témoigne. Et puis ces optimistes, comme c’est bizarre, n’attachent aucune importance au tsunami financier qui montrait la fragilité de nos empilements monétaires. Ils minimisent Fukushima comme le réchauffement climatique quand ils en parlent. Un milliard de personne qui ne mangent pas à leur faim est le cadet de leur souci. Ils semblent ignorer le pic pétrolier et ne disent rien de la 6e extinction des espèces. Dormez braves gens est leur seul leitmotiv.

Notre réveil va être douloureux, on ne peut rien contre la réalité des faits en dressant un mur de parole. Politiques, politologues et journalistes doivent absolument dynamiser le sens des responsabilités de nos concitoyens. L’ampleur de la catastrophe à venir ne peut être résorbée qu’à cette condition. Je préfère LeMonde quand il réalise une double page réaliste sur le temps des catastrophes ***.

* La séduction du désastre (2 mai 2011)

** LeMonde du 13 mai 2011, critique raisonnée du catastrophisme ambiant.

*** LeMonde du 26 mars 2011, Vivre et penser le temps des catastrophes.

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Nicolas HULOT, deus ex machina en 2007

En 1990, Nicolas HULOT crée une fondation « pour la nature et l’homme », afin de favoriser l’éducation à l’environnement. Son but était de s’adresser au grand public pour lui faire découvrir et comprendre la nature, et amener par là même à son respect et à sa protection. Début 2000, Nicolas souhaite devenir un acteur du débat public. A la différence de nombre de personnalités publiques qui s’autorisent une opinion tranchée sur ce qu’il convient de faire alors qu’au fond elles ne connaissent rien au sujet, il décide qu’il veut comprendre de quoi il retourne avant de commencer à utiliser son porte-voix. Il crée au sein de sa fondation un organe qui reste à ce jour unique au sein du monde associatif environnemental : le Comité de veille écologique. Ses membres sont tous des experts d’un sujet donné, et souvent chercheurs dans les domaines biodiversité, climat, énergie…

En pratique, tous les deux mois environ, nous nous retrouvions à dix ou quinze avec Nicolas Hulot, sans ordre du jour très précis, chacun étant tout à tour orateur passionné et auditeur attentif. Au bout de quelque temps, l’envie de passer des explications à l’action est née. Divers ouvrages ont donc été rédigés, dont le plus visible en 2002 a été Combien de catastrophes avant d’agir. En 2005 nous est venu l’envie de rééditer ce genre d’exercice, mais avec cette fois une visée opérationnelle : se faire récupérer dans tous les programmes de tous les candidats à l’élection présidentielle de 2007, rien de moins. Cet œcuménisme était une conséquence logique de l’apolitisme – au sens de l’absence de prosélytisme pour un parti particulier – qui a toujours été en vigueur au sein de la Fondation, à tel point que je n’ai aucune idée des préférences partisanes de la plupart de mes collègues (Hulot  compris, qui n’a jamais exprimé la moindre préférence lors des réunions où j’étais présent).

                Ce qui allait s’appeler le « Pacte écologique » a abouti aux sujets structurants suivants : le climat (taxe carbone), l’agriculture (réorientation de la PAC), la hiérarchie des priorités de l’action gouvernementale (le vice-premier ministre en charge du développement durable) et l’avenir (la recherche et l’enseignement). Mais la suite devait nous réserver une belle leçon de réalisme. Car ce qui a lancé le pacte, et ce qui a motivé les candidats à les reprendre à leur compte, ce n’est pas la patiente construction de l’argumentaire, ou la pertinence soigneusement étudiée des propositions. Non, ce qui a produit cet effet, c’est la valse-hésitation de Nicolas Hulot concernant une éventuelle candidature à la présidentielle. Dès qu’il a expliqué que peut-être il irait, sauf que peut-être il n’irait pas, il n’était plus question pour un candidat de ne pas signer le Pacte écologique : c’était prendre le risque de ne pas pouvoir rallier  sur son nom au second tour tous ceux qui auraient voté pour Hulot au premier. Dès lors tous les candidats sont allés signer le Pacte, et le coup est parti pour de bon.

Jean-Marc Jancovici (Changer le monde, tout un programme !)

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la peine de mort, de 1981 à 2011

Le socialisme au pouvoir le 10 mai 1981, qu’en reste-t-il aujourd’hui ? Rien ! Le plan de relance économique a débouché en moins de deux ans sur un plan de rigueur. Les nationalisations tout azimut ont débouché sur des privatisations généralisées. Le 12 mai 1981, leMonde faisait le bilan de l’élection de Mitterrand : pas un mot de l’écologie alors que le pays avait déjà connu deux chocs pétroliers (1974 et 1979). Seule une petite mention sur le report massif des « votes verts » montrait que le socialisme sans l’écologie n’avait aucune perspective électorale. Et leMonde ce jour 11 mai 2011 est cinglant vis-à-vis du manque de vision toujours offert par le PS :

– Les socialistes en quête d’une stratégie électorale ;

– La synthèse socialiste, syndrome du non-choix.

                Une seule solution pour le PS, devenir un parti social-écologiste. Ce n’est pas avec leurs candidats déclarés ou prévisibles aux primaires que le miracle s’accomplira… Les socialistes continuent de rêver à la social-démocratie alors qu’il nous faudrait un Jaurès de l’écologie. Les socialistes doivent lire et s’informer, au lieu de pondre à la chaîne des textes conventionnels inutiles. Le dernier livre de Jancovici leur montrerait que l’énergie facile, l’énergie fossile qui va bientôt manquer, va être source d’un terrible blocage de notre société thermo-industrielle : « Un seul pari à notre disposition : organiser l’avenir social et industriel, donc social et politique, autour de la décarbonisation de nos activités. »* Mais aucun présidentiable, à part Nicolas Hulot, ne met son programme sous le signe du réchauffement climatique et du pic pétrolier. A cause  du manque d’énergie, même l’abolition de la peine de mort, une des 110 propositions phares de Mitterrand, risque de tomber aux oubliettes :

                « Entretenir une population en prison, c’est utiliser de la nourriture, des ressources et de l’énergie pour le bénéfice d’improductifs mis au ban de la société. Jusqu’à une époque somme toutes assez récente, on ne s’encombrait pas de ces bouches à nourrir : le sort commun du délinquant était la mort dans des délais assez rapides. Il est évident que, en univers énergétiquement contraint, ces mauvais souvenirs risquent de redevenir d’actualité. »*

Le bilan semble confirmé, il ne reste plus rien de l’héritage de Mitterrand…

* Changer le monde, tout un programme ! de Jean-Marc Jancovici  (Calmann-Lévy, 2011)

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le devoir des économistes, disparaître

L’économie est un système normatif qui gouverne les individus et les nations. Ce n’est pas une science, c’est ce qu’on appelait autrefois plus judicieusement l’économie politique. C’est une manière d’instaurer des relations de production et de répartition des biens et services. C’est une discipline orgueilleuse qui a phagocyté toutes les autres branches de la connaissance, la sociologie, la politique, la culture. C’est une aventure dangereuse qui nous mène de plus en plus vite dans le mur. Car la crise financière et écologique est une crise de la « science » économique elle-même. Un marché très myope, une mondialisation destructrice, la déconsidération du politique, un social dépendant d’une division extrême du travail, tout cela ne pouvait que se terminer très mal : le tsunami financier un jour, le choc pétrolier un autre jour, et Fukushima entre-temps.

Un colloque* a eu lieu sur le « devoir critique » de l’économie, il ne comportait que des économistes ! Ces gens-là commencent bien à se douter qu’il y a un problème bancaire, un blocage énergétique, une indétermination absolue sur le pourcentage admissible de prélèvements obligatoires, une spoliation croissante des générations future … Mais Philippe Askenazy a le culot de prétendre encore : « Nous les économistes, nous sommes à la fois dangereux et capables d’ apporter parfois des solutions. » Je trouve cette particule, « parfois », sublime. Car quand les économistes trouvent-ils la bonne solution ? Quand ils désirent une politique de croissance ou quand ils exigent une politique de refroidissement ? Quand ils veulent mettre en place une politique de relance ou quand ils proclament le combat contre l’inflation ?

                Les économistes ne se sont pas encore rendus compte qu’ils sont surdéterminés par les contraintes de la biosphère, ce que certains appellent les lois de la nature. Ils ont par leurs directives (trés théoriques) transgressé plusieurs de ces lois, par exemple la nécessité du recyclage ; c’est pourquoi nous allons être confrontés au réchauffement climatique et à la stérilisation des sols. Ils ont complètement oublié la complète dépendance de notre croissance envers l’énergie fossile. Le pic pétrolier et gazier n’existe pas pour eux alors que chaque augmentation du prix du baril entraîne la crise. En fait l’économie ne devrait être qu’une toute petite partie du social, et le social qu’une composante de l’ensemble des formes du vivant. Mais l’anthropocentrisme des économistes est une composante essentielle de leur aveuglement.

* LeMonde du 10 mai 2011, Devoir critique (dans le supplément économique)

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Malthus à la mode écolo

Ils sont du côté des patrons, du côté des machos, aux côtés des nationalistes, pour le pillage de la planète. Ils veulent la baisse des salaires, les corps usés par les grossesses, de la chair à canon, la perte de biodiversité. Qui sont-ils ?

Ce sont les natalistes, les repopulateurs, en bref les anti-malthusiens ! Malheureusement ils se disent aussi souvent socialistes. Pour eux, il suffirait de faire une société plus juste et tout le monde mangerait à sa faim. Le parti socialiste français veut encore une natalité vigoureuse pour la grandeur de la France et le paiement des retraites. Il oublie que c’est le nationalisme (et non l’internationalisme) qui accompagne la volonté de puissance. Il oublie que le problème actuel des retraites résulte du baby-boom d’après-guerre et qu’une fécondité forte aujourd’hui reporte encore plus de charges sur les générations futures. La droite et les capitalistes se frottent les mains, la gauche est du côté des traditions religieuses et de ses propres conceptions démographiques. Les malthusiens se retrouvent bien seuls ! Comme l’exprime Georges Minois*, « Face à cette coalition hétéroclite des populationnistes de tout bord, regroupant toutes les autorités morales, religieuses et politiques, détenant tous les leviers de la propagande et de la législation, la voix des néomalthusiens a bien du mal à se faire entendre ».

Mais la biosphère va donner raison aux malthusiens. La maîtrise de la fécondité devrait être valorisée à l’heure des grandes interrogations écologiques. Le raisonnement fondateur de Malthus sur la course entre croissance géométrique de la population (si rien ne l’arrête) et croissance seulement arithmétique des ressources alimentaires (à cause des rendements décroissants de l’agriculture) redevient d’actualité. L’agriculture intensive, basée sur l’énergie fossile et les méthodes mécanisées de l’industrie, n’est pas durable. De plus, nous comprenons mieux la nécessité de vivre en équilibre avec un écosystème, nous savons le poids des crises systémiques que forment le réchauffement climatique, le pic pétrolier, la sixième extinction des espèces, etc.

L’écologie donne raison à Malthus. Si le parti socialiste a complètement écarté la question démographique de ses interrogations actuelles c’est bien qu’il n’est pas encore écolo…

* Le poids du nombre de Georges Minois  (éditions Perrin, 2011)

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bientôt 10 milliards d’êtres humains

Notre planète, qui devrait passer le cap des 7 milliards de personnes le 31 octobre 2011, comptera 9,3 milliards d’individus en 2050 et 10,1 milliards en 2100.

La question de la démographie galopante interroge bien évidemment sur notre capacité à partager les terres, ressources et richesses, tout en limitant le changement climatique d’origine anthropique. Selon le Fonds des Nations unies pour la population, le réchauffement planétaire ne peut être endigué que par une réduction massive de la population mondiale.

éco(lo)

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La Décroissance en mai 2011

Quelques moments forts du dernier numéro du mensuel La Décroissance pour en décrypter les principaux errements. En résumé, ce journal est anti-Hulot, anti-malthusien, anti-écolos.

1. L’éditorialiste Bruno Clémentin alimente encore une fois la campagne anti-Hulot, caractéristique principale de ce journal : « Nicolas Hulot est venu pour rencontrer la rédaction de La Décroissance. Comme il n’y a pas d’héliport au centre de Lyon, ils ont fait l’aller-retour en train, à grande vitesse tout de même. Eh bien, ce type n’est pas plus sincère que vous et moi. On ne sait pas ce qu’il se croit, ce Hulot là, ni s’il est content de lui. On découvre simplement qu’il sait compter, parler pour ne rien dire et conjuguer les verbes à la première personne du singulier. Il va donc pouvoir faire illusion quelque temps. Suffisamment pour achever la lente agonie des verts. »

                Sur ces affirmations péremptoires, le journal soutient un anti-Hulot primaire, Stéphane Lhomme, celui qui a été viré du réseau « sortir du nucléaire » et qui répond ainsi à une interview d’une page entière  dans un journal dont il est aussi rédacteur :

La Décroissance : Qu’est-ce qui vous a poussé à vous lancer dans la primaire EELV ? Y aviez-vous songé avant la candidature de Nicolas Hulot ?

Stéphane Lhomme : Non, c’est effectivement la candidature de Nicolas Hulot qui m’a motivé. Si j’étais élu président, ma première mesure serait de signer un décret abrogeant Nicolas Hulot et Yann Arthus-Bertrand. Comme on abroge une mauvaise loi, il faut abroger ces personnages.

2. Fabrice Flipo, digne représentant d’un journal antimalthusien, pose sous sa rubrique la question qui tue : Les écologistes et autres luddites doivent sortir de l’ambiguïté : « sont-ils avec Malthus ou contre Malthus ? Pensent-ils que certains sont de trop et, si oui, qui ? »

Un lecteur, Michel Chauvet, lui répond clairement dans le même numéro : «  Il y a comme un problème dans mon rapport avec votre journal. Je suis un de ces « monstrueux », à vos yeux néomalthusiens (antinatalistes) ; ce qui semble vous rendre hystériques et haineux. Pour moi, le paramètre du nombre aggrave tous les autres problèmes, voire les crée. Je ne vois pas comment la planète supportera 9 milliards d’humains. Evidemment, je ne veux absolument pas tuer qui que ce soit, mais la contraception existe : pas de chair à travail, pas de chair à canon. »

3. Finissons par le Ras le bol d’Esther Schmid Fatio en courrier des lecteurs : «  C’est décidé, je ne vous achète plus ! A part la page simplicité volontaire, je ne vois pas où est la joie de vivre dans votre journal. Vous insultez les personnalités avec lesquelles vous n’êtes pas d’accord, vous êtes contre tout… en un mot, vous me déprimez. »

                Le directeur de la publication et rédacteur en chef Vincent Cheynet confirme par ses propres écrits ce diagnostic en s’attaquant à Fabrice Nicolino, déclaré « écotartuffe du mois » :

« Fabrice Nicolino partage avec nous les thèses sur la complicité de Greenpeace, du WWF, de Nicolas Hulot et de France nature environnement dans l’opération de vampirisation de Nicolas Sarkozy, le Grenelle, mais ce journaliste parisien ne sait pas qu’il y a des choses qui se font et d’autres pas. Nicolino a balancé sur Internet des courriels privés, déversés un torrent d’injures ordurières à mon égard. Il me menace d’un procès. Martelant « haïr la gauche », le même faisait l’année dernière une véritable déclaration d’amour à Chantal Jouanno. Si notre monde est malade d’une chose, c’est bien de ces gros mâles dominants qui se dressent sur leurs pattes de derrière pour aboyer. J’ai toujours eu en horreur ces gros gars qui gueulent pour imposer leur vue et pratiquent le terrorisme intellectuel, tout en se réclamant bien sûr de la non-violence. »

                Cette diatribe est étonnante ! Vincent Cheynet, le pilier de La Décroissance, ne se rend même pas compte que lui et son équipe appartiennent à la catégorie qu’il vient si brillamment de décrire.

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le litre d’essence à 1,55 euros… le début de la fin

Lire LeMonde* en diagonale nous en apprend beaucoup. D’abord en page 2, le super 95 vient de dépasser son record de 2008 avec un prix au litre de 1,547 euros. Ensuite en page 15, les Américains n’ont aucune notion de la réalité des prix à la pompe. N’étant pas soumis à TIPP et autres TVA, ils trouvent insupportables toute augmentation du baril car cela se répercute directement sur le porte-monnaie. Face à cet aveuglement, les républicains inféodés aux pétroliers, premier contributeur financier de ce parti, veulent lever les moratoires sur les forages en haute mer ; Obama de son côté veut financer la recherche dans les énergies renouvelable et « propres ». Pour les deux camps, aucun mention de la nécessité de réduire la consommation d’énergie ; il s’agit toujours de politiques de l’offre. En France, c’est la même optique : une page entière (p.5) pour faire de la publicité sur l’extraction de pétrole dans le bassin parisien. Il faut aller en Amazonie page 4 pour s’apercevoir que les Indiens veulent au contraire une politique de restriction de la demande d’énergie en mettant fin aux grands travaux d’infrastructure routière qui, en plus, « détruisent la biodiversité de nos terres ». En France aussi avec le Grenelle de l’environnement, on voulait geler les dépenses d’infrastructure : vœu pieux.

                Pourtant l’ASPO (Association d’étude du pic pétrolier) nous avait avertis : c’est la fin du pétrole bon marché. Ces experts et transfuges de l’industrie pétrolière ont fondé l’ASPO en 2000 et organisé leur première conférence mondiale en 2002. Fin avril dernier, c’était donc leur 9ème conférence. Leur diagnostic est imparable : tous les gisements, en dehors du Moyen-Orient, ont passé leur pic. Même l’Agence internationale de l’énergie (World Energy Outlook de 2010) représente la production de brut conventionnel atteignant son maximum en 2006. Les courbes qui en résultent devraient terroriser nos élites, elles montrent l’écart sidérant entre une offre qui se tasse et une demande croissante de brut au cours des 40 prochaines années. Mais les économistes et la gent politique vivent encore dans un monde de rêve où la demande qui ne peut pas être satisfaite permet quand même l’élaboration d’une courbe croissante ! Comme le prix du pétrole va augmenter de façon irrémédiable, cette courbe imaginaire sera bien obligée de s’effondrer dans la réalité pour rester égale à l’offre de brut. Etrangement, les économistes n’ont pas encore pris la mesure de la connexion entre la crise et un prix du baril à trois chiffres Or toutes les récessions économiques depuis les années 1970 ont été liées au prix du pétrole. Il est maintenant certain qu’une crise énergétique systémique et une inflation galopante vont entraîner toutes les économies dans la tourmente, et déclencher un processus de démondialisation. Le temps du pétrole bon marché est fini, notre mode de vie va changer, reconnaît Pierre Mauriaud, géologue de Total. Nous vivrons dans les prochaines années la descente énergétique mais aucune institution responsable ne nous l’annonce… même pas un journal de référence comme LeMonde !

Il n’y a pourtant pas d’autre solution que d’apprendre à vivre avec moins de pétrole. Votez aux prochaines présidentielles pour celui qui vous dira enfin la vérité… s’il existe !

* LeMonde du 4 mai 2011

pour en savoir plus, Il n’y a pas d’autre solution que d’apprendre à vivre avec moins de pétrole

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une chance pour l’écologie, Nicolas HULOT

L’annonce, le 13 avril dernier, par Nicolas Hulot de sa candidature à la présidence de la République en 2012 a donné lieu à pas mal de sarcasmes. Et si sa candidature était une chance pour l’environnement, la biodiversité et donc pour l’écologie ?

.               Il y a quelques années, j’ai eu l’occasion d’accompagner Nicolas Hulot en Alaska pour un Ushuaia sur le changement climatique. Le personnage ne me fascinait pas vraiment et comme beaucoup j’avais de lui l’image d’un vagabond médiatique avec ses « séquences émotion » au-dessus d’un grand envol de flamants roses dérangés par le bruit de son ULM… Au fil des 3 semaines que nous avons passées ensemble, j’ai découvert un autre homme, véritablement habité par le combat environnemental et écologique !

.               Je peux modestement témoigner que l’homme a véritablement changé et que son investissement dans ce combat est sincère.. On a également taxé Hulot d’être à droite. Ce n’est pas parce qu’il a côtoyé Jacques Chirac qu’il avait sa carte au RPR ou à l’UMP.

.Il est clair aujourd’hui que la seule voie possible pour sortir du bourbier économique, social et politique dans lequel nous nous trouvons est celle de l’écologie. D’une société où l’écologie, le social et la consommation sobre soient le moteur. Nous devons impérativement passer par cette troisième voie pour éviter une catastrophe environnementale sans précédent pour notre planète mais aussi pour nous.

.               Cette voie écologique n’est ni tout à fait de gauche ni de droite, même si elle réfute évidemment les arguments ultralibéraux et consuméristes de l’oligarchie actuelle qui dirige le monde occidental. Pour pouvoir s’épanouir, cette voie écologique doit en effet largement dépasser le clivage gauche-droite tel que nous le connaissons en France, rallier à elles tous ceux qui pensent qu’elle est nécessaire pour arrêter l’emballement dans lequel s’est fourvoyée notre société.

.               Et Nicolas Hulot est, je crois, l’homme de la situation. Ce n’est pas un tribun aux accents populistes, ni un vieux renard de la politique, pas un politicien non plus, pas plus qu’un adepte de la langue de bois. Encore moins un dogmatique (fait rare chez les écologistes). Sans doute beaucoup de handicaps pour parvenir à la marche suprême de l’Etat. Mais il a, dans le microcosme de l’écologie politique, un atout remarquable : celui d’être aimé, populaire et donc de convaincre des gens, venus de tout bord, que l’écologie est arrivée à une maturation qui la fait entrer de plein pied dans l’arène de l’élection présidentielle.

.Et cette capacité à fédérer au-delà de la politique politicienne, c’est une chance formidable pour la cause que nous défendons tous, naturalistes, environnementalistes, écologistes, scientifiques, et simples citoyens de la planète Terre. Saisissons-là… sans dogmatisme.

Philippe J. Dubois

.Cet article a été publié sur le blog des Biodiversitaires.

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Montebourg, de la démondialisation à la décroissance

Arnaud Montebourg vient de s’exprimer devant des salariés de General Motors : la démondialisation sera l’axe fort de son programme économique. Mais, si on ne s’abuse, la fin des excès du libre-échange ne peut que mettre au chômage les salariés de General Motors ! Donc Arnaud ne va pas assez loin dans ses raisonnements. Comme l’exprime Bernard Perret*, l’utopie socialiste d’une promesse de prospérité partagée est derrière nous car il existe une contradiction fondamentale entre l’écologie et l’économie. Dans un contexte de pénurie globale des ressources naturelles, l’avenir n’est plus dans l’expansion, mais dans son inverse. La démesure de l’économie occidentalisée n’entraîne que surconsommation, surproduction, surgaspillage, surpollution, surpopulation, etc. A la mondialisation doit donc succéder la démondialisation, à la voiture pour tous le dévoiturage, à la repopulation la dépopulation, à l’urbanisation la désurbanisation, à l’effet rebond l’effet débond, à la croissance économique la décroissance conviviale.

Le discours de la classe politique est comme à son habitude en complet décalage avec ce qu’il faudrait vraiment, combattre âprement les inégalités intra et internationales tout en prêchant ardemment la sobriété et le rationnement, particulièrement dans les sociétés riches. Arnaud semble montrer la voie, maintenant il  nous faut tous marcher le long de ce chemin. Dans une société écologique, les salariés de la machinerie automobile doivent prendre conscience de leur obsolescence programmée : un jour il n’y aura plus de voiture individuelle, donc plus de General Motors,  ni de Renault, de Toyota ou de Peugeot… Le plus tôt sera le mieux, encore faudrait-il nous y préparer. Mais il semble que les politiques ne se rendront compte des réalités que quand l’industrie automobile s’effondrera, et tout le reste avec. Ne votons pas pour des imbéciles…

LeMonde du 3 mai 2011, le livre de Bernard Perret, « Pour une raison écologique »

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Jean-Paul Besset, coach de Nicolas Hulot

Jean-Paul Besset a été trotskiste ; mais il a finalement compris en 2005* qu’il était devenu inutile de se battre sur les rapports de production sans s’interroger sur les finalités de la production. Aujourd’hui son analyse se concrétise dans son choix de soutenir la candidature de Nicolas Hulot pour la présidentielle 2012. Pour mieux cerner la pensée de Jean-Paul Besset, et donc pour partie celle de Nicolas Hulot, nous vous présentons quelques extraits d’un texte* de 2008 :

« Ce n’est plus de rêves, aussi généreux soient-ils, dont l’humanité a besoin, mais d’une pleine conscience d’un réel catastrophique qui ne saurait s’interpréter comme une situation de rêve. Le réel ébranle et interpelle la totalité de nos systèmes et de nos références. Il présente un ensemble d’aspérités inédites qui préparent l’avènement d’une crise sans précédent dont chaque élément – écologique, énergétique, social, démographique, moral – alimente et accélère une trajectoire d’effondrement. Plus que jamais les faits commandent au politique et appellent une nouvelle stratégie pour l’humanité. A quels besoins prioritaires faut-il répondre alors qu’ils sont de plus en plus contraints, obligeant à penser d’ores et déjà l’organisation économique et sociale en termes de partage de la rareté et non plus de répartition de  l’abondance ?

Il s’agit de descendre plusieurs degrés dans l’échelle de l’alimentation, des déplacements, des productions, des modes de vie. Il ne faut pas seulement toucher au cœur de la machine techno-économique du productivisme et aux comportements consuméristes qu’elle conditionne et qui la nourrissent souvent avec entrain. Car l’action politique sur le réel peut-elle être efficacement menée sans accompagnement émotionnel ? Il faut donc réformer l’imaginaire du désir pour qu’il consente lui aussi à la conscience des limites. Il faut accepter d’être fini, d’être ici et nulle part ailleurs. L’érection d’une digue contre le désir hypertrophié qui se nourrit de lui-même passe sans doute par la promotion d’une certaine humilité, l’aspiration modeste à vivre en paix avec soi, avec les autres, avec la nature, avec la vie elle-même. Les transitions vont être redoutables, les arrachements douloureux. D’autant que, si l’on en croit les observations scientifiques concordantes, nous n’aurons pas le temps de les lisser sur plusieurs générations.

L’utopie, c’est la société de croissance, une illusion prédatrice qui aura bientôt fini d’épuiser la terre et de ruiner le monde humain. La décroissance n’est pas une utopie, mais une reconquête de la réalité et d’un monde humain ordonné à cette réalité, c’est-à-dire la Biosphère. Si la Biosphère est bien le foyer de la réalité, vivre en symbiose ave la nature terrestre, c’est, à proprement parler, vivre réellement. Les hommes, descendus des lieux communs qui les éloignent de la nature terrestre, doivent entreprendre de localiser leurs productions et leurs échanges, c’est-à-dire d’ancrer leur existence dans la sphère de la réalité. »

* Jean-Paul Besset, Comment ne plus être progressiste sans devenir réactionnaire (2005)

** Jean-Paul Besset, in revue Entropia n° 4, printemps 2008, Pour en finir avec l’utopie

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laissons le pétrole sous terre

Le texte suivant a été écrit par Alain Hervé en décembre 1973, au moment du premier choc pétrolier marqué par un quadruplement du prix du baril. Il aurait pu aussi bien être écrit aujourd’hui, nous commençons à vivre le choc pétrolier ultime. Car il est vrai que les pays de l’OPEP vont garder de plus en plus leur pétrole pour leurs générations futures et pour leurs propres besoins. Les conséquences socio-économiques du pic pétrolier (nous avons  dépassé le maximum possible de quantité extraite du sous-sol) seront accentuées et d’autant plus terribles pour les pays importateurs de pétrole, la France en particulier. Ceux qui estiment ne pas pouvoir se passer de leurs voitures vont particulièrement souffrir, aucun politique cathodique ne leur ayant encore expliqué que vivre dans une banlieue non desservie par les transports en commun s’apparentait à un suicide :

« Le commerce pétrolier consiste à échanger une matière première qui devient rare contre du papier-monnaie. De ce papier, les principaux producteurs ont assez ; si les Bédouins du désert laissaient le pétrole en terre, il risque de doubler de valeur en un an. Pourquoi n’ont-ils pas coupé le robinet plus tôt ? Parce que les circonstances politiques ne s’y prêtaient pas et parce qu’ils ont eu le rapport du Club de Rome entre les mains. Ils ont eu l’occasion d’y lire que d’ici trente ans environ leur seul capital leur aurait été totalement extorqué et qu’il leur resterait le sable pour se consoler. Ils ont aussi compris à quel point les Occidentaux et leur fragile civilisation étaient devenus dépendants du pétrole. Gérants intelligents, ils ont donc décidé de vendre de moins en moins et de plus en plus cher. Logique, non ? Curieusement cette logique surprend tellement les occidentaux qu’ils refusent encore d’y croire. Le pétrole était entré dans les mœurs. On savait qu’un jour il se ferait rare, mais on ne voulait pas le savoir. On misait toutes les chances de l’industrie aéronautique française sur le supersonique Concorde. On savait qu’une flotte de 200 de ces avions aurait épuisé en cinq ans l’équivalent de la totalité du gisement de Prudoe Bay en Alaska, et cependant on construisait le Concorde.

Il faut dire que sans pétrole, adieu l’agriculture industrielle, adieu les loisirs, adieu la garantie de l’emploi, adieu la vie en ville… toute l’organisation économique, sociale et politique est remise en cause. Le château de cartes vacille. Et si ce n’est pas pour cette fois-ci, ce sera dans deux ans, dans cinq ans. Restriction, pénurie, disette, les machines ralentissent, s’arrêtent. La dernière explosion dans le dernier cylindre nous laisse apeurés, paralysés… libérés. En effet la société conviviale, désirée par Ivan Illich, peut naître, c’est-à-dire une société dans laquelle l’homme contrôle l’outil. » (source : mensuel Le Sauvage)

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supprimons l’automobile (suite)

Depuis le septennat de M.Pompidou, le culte de l’automobile est devenu en France la religion d’Etat, la seule d’ailleurs à laquelle croient la plupart des dirigeants. Tous les ans, le pèlerinage national ne se rend pas à Lourdes, mais aux vingt-quatre heures du Mans. Telle une grande messe pontificale, le Salon de l’auto déroule sa liturgie fastueuse au cours de laquelle l’automobile nouvelle, bénite par les plus hautes autorités officielles, est comme une relique révélée à la ferveur populaire. En cas d’impiété, répression policière : matraquage de manifestations sacrilèges en faveur de la bicyclette ou des piétons. Et la nouvelle religion a déjà son clergé, puissant et sectaire : les ingénieurs des Ponts et Chaussées.

                Cependant, cette adoration obligatoire dissimule mal la réalité : l’automobile est devenue le cancer de notre civilisation. Elle la ronge par sa prolifération effarante, anarchique et  dominatrice. Elle détruit l’homme et dégrade l’espace. Elle mutile, intoxique et tue. Elle casse les villes et dilapide la nature. Elle gaspille une énergie sans cesse plus rare et plus coûteuse. Présentée à tort comme le symbole de la prospérité, elle appauvrit l’homme dramatiquement, dans son environnement social et physique. Elle brise son cadre de vie collectif pour l’enfermer dans une petite carapace d’acier qui l’isole et exalte son agressivité en la cuirassant. Elle le ruine dans les biens immatériels essentiels : la santé, la sécurité, les joies de la nature, la beauté des paysages, le sentiment de la communauté. Nous allons vers l’« auto-destruction » rapide de notre civilisation si nous ne changeons par fondamentalement notre attitude à l’égard de l’automobile, si nous ne cessons pas de la vénérer comme une idole et ne la soumettons pas aux impératifs de la défense de l’environnement… et de l’homme.

                En transformant l’automobile en une idole intouchable, le pouvoir se fourvoie dans une impasse pour la politique des transports, de l’urbanisme et de l’environnement. « Il faut adapter Paris à l’automobile . » Cette affirmation spectaculaire de M.Pompidou abouti en fait à sacrifier Paris à l’automobile.  Elle est devenue la grande compensation des vices du système actuel. Opium du peuple, l’automobile est la drogue officielle recommandée par la société de consommation à tous les insatisfaits. Aux espaces verts urbains disparus, elle substitue l’évasion vers la campagne ; à ceux que lasse la dépersonnalisation de la vie, elle offre la puissance et l’ivresse de la vitesse. La consommation mondiale de pétrole est passée de 500 millions de tonnes en 1950 à 1 milliard en 1960, 2 milliards en 1969, 2.5 milliard en 1972. Folie de cette croissance exponentielle : les réserves connues correspondent seulement à quelques décennies en tenant compte de son taux d’accroissement. L’expansion délirante de l’automobile est sans doute l’un des moteurs de la croissance , mais c’est un moteur à explosion.

Philippe Saint-Marc dans le mensuel le Sauvage n° 6 (septembre-octobre 1973).

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supprimons la voiture, en Chine et ailleurs

Par sa conception comme par sa destination originale, la bagnole est un bien de luxe. Et le luxe, par essence, cela ne se démocratise pas. La chose est communément admise s’agissant des villas de la côte ; démocratiser le droit aux  vacances, ce n’est pas « une villa avec plage privée pour chaque famille française ». Mais dans la société de l’automobile, le privilège de l’élite est mis à votre portée. L’automobilisme de masse matérialise le triomphe absolu de l’idéologie bourgeoise, il entretient en chacun la croyance illusoire que chaque individu peut prévaloir aux dépens de tous.

Paradoxalement l’autonomie apparente a aussi pour envers une dépendance radicale : à la différence du cavalier ou du cycliste, l’automobiliste dépendait dorénavant pour son alimentation en énergie, comme d’ailleurs pour la réparation de la moindre avarie, des spécialistes de la carburation, de la lubrification, de l’allumage.  L’automobiliste a un rapport d’usager-consommateur et non plus de possesseur et maître d’un véhicule dont, formellement, il est propriétaire. Le peuple tout entier allait devenir client des pétroliers, la situation dont rêve tout capitaliste se réalisait, la dépendance de tous envers un monopole. L’Etat capitaliste a laissé se dégrader, puis a supprimé les liaisons ferroviaires entre les villes, leurs banlieues et leur couronne de verdure. Seules ont trouvé grâce à ses yeux les liaisons interurbaines à grande vitesse qui disputent aux transports  aériens leur clientèle bourgeoise. La généralisation de l’automobilisme individuel a évincé les transports collectifs, modifié l’urbanisme et l’habitat et transféré sur la bagnole des fonctions que sa propre diffusion a rendues nécessaires. Pour faire place à la bagnole, on a multiplié les distances : on habite loin du lieu de travail, loin de l’école, loin du supermarché.

Si la voiture doit prévaloir, il reste une seule solution : supprimer les villes, c’est-à-dire les étaler sur des centaines de kilomètres, le long de banlieues autoroutières. C’est ce qu’on a fait aux Etats-Unis. Ivan Illich (in Energie et équité) en résume le résultat : « L’américain type consacre plus de 1500 heures par an à sa voiture : cela comprend les heures qu’il passe derrière le volant, en marche ou à l’arrêt ; les heures de travail nécessaires pour la payer et pour payer l’essence, les pneus, les péages, l’assurance, les contraventions et impôts. Bilan : les gens travaillent une bonne partie de la journée pour payer les déplacements nécessaires pour se rendre au travail. La voiture en fin de compte fait perdre plus de temps qu’elle n’en économise. Comme cet Américain fait 10 000 kilomètres dans l’année, il fait donc du 6 km par heure. Dans les pays privés d’industrie des transports, les gens se déplacent exactement à cette même vitesse en allant à pied, avec l’avantage supplémentaire qu’ils peuvent aller n’importe où et pas seulement le long des routes asphaltées. »

Les usagers, écrit aussi Illich, briseront les chaînes du transport surpuissant lorsqu’ils se remettront à aimer leur îlot de circulation, et à redouter de s’en éloigner trop souvent. On peut imaginer des fédérations de communes (ou quartiers), entourées de ceintures vertes où citadins et écoliers passeront plusieurs heures par semaine à faire pousser les produits frais nécessaires à leur subsistance. La bagnole aura cessé d’être besoin. Que faire pour en arriver là ? Avant tout, ne jamais poser le problème du transport isolément, toujours le lier au problème de la ville, de la division sociale du travail et de la compartimentation que celle-ci a introduite entre les diverses dimensions de l’existence : un endroit pour travailler, une autre pour habiter, un troisième pour s’approvisionner, un quatrième pour s’instruire, un cinquième pour se divertir. L’agencement de l’espace continue la désintégration de l’homme commencée par la division du travail à l’usine. Travail, culture, communication, plaisir, satisfaction des besoins et vie personnelle peuvent et doivent être une seule et même chose : l’unité d’une vie, soutenue par le tissu social de la commune.

Michel Bosquet

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