simplicité volontaire

La mode se cherche un modèle écologique, en vain

Il paraît que l’industrie du vêtement se cherche un modèle écologique. Le secteur de la mode aurait pris conscience de l’état de la planète, du coût des matières premières, du gâchis écologique. Dans les états-majors des groupes de luxe, voilà qu’on mâtine désormais l’habituel jargon libéral anglo-saxon d’une touche plus verte : on « valorise des innovations dépolluantes et disruptives », on « “circularise” la production », on « stimule la biodiv’», bref, on cherche comment établir « un business model plus écoefficient »*. On nomme dans chaque maison un cadre spécialiste des questions environnementales, on se fixe des objectifs. 70 % du coton devra être bio d’ici à 2025 chez LVMH ; les émissions de gaz à effet de serre devront être réduites de 50 % d’ici à 2025 chez Kering. Gucci a adopté un plan décennal de réduction de son empreinte globale à horizon 2025. Autre tendance : l’upcycling. Ce façonnage d’un vêtement neuf à partir de chutes est adopté par H&M. Même dans les écoles de mode, « tous les étudiants se disent “durables”, ironise un designer. Mais, pour la plupart, quand tu creuses un peu, tu vois que c’est du vent, ils en font un argument purement marketing. » Paraître sustainable (on ne dit plus green, trop 2010 !), c’est aussi paraître cool.*

Nous l’avons déjà écrit sur ce blog, la mode c’est ce qui démode pour faire acheter toujours plus pour le plus grand profit des marques. Peu importe si ce qui est démodé aujourd’hui sera à la mode demain, le cycle des défilés permet de vider les porte-feuilles et de grandir la visibilité du luxe. Nous avions cru un instant en juillet 2008 à la fin des défilés de mode. Ma Ke, une jeune créatrice chinoise, prenait le luxe à contre-pied. Elle habillait 36 mannequins de tous âges de vêtement amples, de pièces intemporelles qui illustrait la fonction première du vêtement, habiller, tout simplement. Ma Ke prenait le contre-pied de la boulimie consommatrice : «  Le luxe qui s’achète n’est pas ce qui nourrit l’homme, c’est la simplicité, la beauté d’un arbre, la lumière, l’échange entre les êtres, le Qing Pin ». Ma Ke détaillait le sens des deux  caractères chinois Qin et Pin : « dépouillement matériel, vie spirituelle la plus riche possible, indifférence totale à l’appel du pouvoir ou de la célébrité ». Pour Ma Ke, l’essentiel résidait dans les initiatives de chacun et non dans la passivité ou toute autre tentative de fuite de la réalité. L’écologie est le contraire du luxe ostentatoire, elle doit nous faire retrouver le sens des limites dans une société en  crise. Pourtant, en 2018, l’industrie du luxe a toujours le vent en poupe ; le pouvoir des riches se renforce encore plus dans les temps moroses. C’est la prolifération de l’inutile, la tyrannie du superficiel, société de consommation et société du spectacle réunis en un même lieu dans les Grands salons parisiens. Et les médias s’en font les porte-parole. Combien de publicités pour les défilés de mode dans LE MONDE ? Une ribambelle ! Nous n’entendons plus parler de Ma Ke, nous baignons dans l’écoblanchiment.

La mode, la mode, la mode ! A l’économie de subsistance et de satisfaction des besoins réels a succédé la tyrannie de l’excédent, la société de consommation, la prolifération du luxe et de l’inutile. Dans les sociétés occidentales, ce n’est pas tant l’utilité des objets qui compte dans l’acte de consommation que leurs valeurs symboliques. Le capitalisme et ses publicités s’appuient sur deux mécanismes qui reposent sur le maintien des inégalités : l’imitation des autres par les classes moyennes, et la capacité d’ostentation de l’élite. Les objecteurs de croissance savent pertinemment qu’il faut éliminer les défilés de mode pour apprendre à réduire les besoins. Sinon, les riches détruisent la planète ! Dans le désert, nous crions : non à la mode, non au luxe, non aux inégalités, oui à la simplicité vestimentaire. Thomas More écrivait en 1516 : « Le seul moyen d’organiser le bonheur public, c’est l’application du principe de l’égalité. En Utopie, les vêtements ont la même forme pour tous les habitants de l’île ; cette forme est invariable. Ces vêtements réunissent l’élégance à la commodité ; ils se prêtent à tous les mouvements du corps, le défendent contre les chaleurs de l’été et le froid de l’hiver. Chaque famille confectionne ses habits. Un seul habit suffit d’ordinaire pendant deux ans ; tandis qu’ailleurs, il faut à chacun quatre ou cinq habits de couleur différente, autant d’habits de soie, et, aux plus élégants, au moins une dizaine. Les Utopiens n’ont aucune raison d’en rechercher un aussi grand nombre ; ils n’en seraient ni plus commodément ni plus élégamment vêtus. » Nous sommes en 2018 et la mode reste à la mode… pour le plus grand malheur de l’écologie des comportements.

* Supplément « mode » du MONDE (27 septembre 2018), L’éveil écologique

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Ecolomaniak chante « en voiture Simone »

Ecolomaniak se réjouit à l’avance du fait de savoir qu’une voiture autonome peut choisir de tuer un vieillard* : l’imbécillité de la civilisation motorisée apparaît de jour en jour plus palpable. En tant que maniaque de l’écologie, je déclare donc ouverte la période du dévoiturage. Bien sûr il y aura toujours des partisans de l’ancien monde, dopés au carburant liquide, pour faire une pétition** contre la hausse des prix à la pompe. Peu m’en chaut. Les automobiliste en colère me comblent de joie. Ils peuvent toujours appeler au blocage des routes, tout embouteillage conséquent me rend euphorique ; plus c’est le bordel, plus on en aura marre de la bagnole. En un an, les prix à la pompe ont grimpé de 23 % pour le diesel et de 14 % pour l’essence. Victoire, enfin le signal-prix va affoler le conducteur. La pétitionnaire Priscilla Ludosky, demande de baisser les taxes, écolomaniak voudrait le litre d’essence à 10 euros… pour commencer. Essence ou diesel, je m’en fous, c’est la même merde du diable issue des entrailles de ma mère Terre, qui tue le vivant et emmerde le climat. La mémère mégère Ségolène Royal déconne comme d’habitude, elle parle pour la taxe carbone de « matraquage fiscal par l’écologie », à l’unisson de la droite viscéralement anti-écolo.

Car qu’on se le dise, « L’automobile nuit gravement à la planète*** ». LE MONDE a du culot avec un tel titre, lui qui fait la promotion des grosses cylindrées. Un journal qui vit de la publicité ne peut s’étonner que les SUV et autres 4×4 ont constitué le tiers des ventes aujourd’hui. La planète des hommes est en délire, plus c’est gros plus ça passe ! Un véhicule est immobilisé à 95 % du temps, vivement qu’il le soit à 100 %. 

Finalement le bon temps, c’est quand les femmes ne conduisaient pas. « En voiture Priscilla, c’est moi qui conduis, c’est toi qui klaxonnes ! ». Il y avait moins de bagnoles sur les routes, même s’il y avait plus d’accident. Le futur temps, c’est quand il y aura égalité des sexes et plus du tout de bagnoles…

NB : si vous voulez nous raconter une histoire d’écolomaniak, envoyez votre pensum à biosphere@ouvaton.org, merci. (environ 2000 caractères)

* LE MONDE du 25 octobre 2018, Les dilemmes moraux de l’humanité à l’épreuve de la voiture autonome

** Le Monde.fr avec AFP | 25/10/2018, Succès d’une pétition

*** LE MONDE du 26 octobre 2018, L’automobile nuit gravement à la planète

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Un univers sans déchets, possible pour zero waste

Béa Johnson, une Française installée près de San Francisco, est devenue la figure du mouvement international « zero waste ». Dans la famille Johnson, chacun a une garde-robe qui tient dans une seule valise. Béa, la maman, possède en tout et pour tout une vingtaine de vêtements. La vie doit être « hypersimple » et les vêtements, « multifonctionnels ». Passionnés du minimalisme, le maître-mot chez les Johnson est « usage multiple ». Leur philosophie tient en cinq principes : « Refuser le superflu ; réduire le nécessaire ; réutiliser ce que l’on achète ; recycler tout ce que l’on n’a pas pu refuser ; composter le reste. » Bea Johnson n’achète plus de bouteilles plastique. Elle nettoie la maison au vinaigre blanc et à l’eau. L’aspirateur a été remplacé par un balai. Quand elle fait ses courses, elle apporte ses contenants. Des bocaux pour les produits humides, la viande, le poisson, l’huile d’olive. Des filets pour le reste. Le seul produit à usage unique, c’est le papier toilette. Les enfants ont grandi à l’école du zéro déchet. « Pour eux, c’est tout à fait normal. »

Avant les Johnson remplissaient une poubelle de 240 litres par semaine. Maintenant, leur poubelle annuelle tient en un bocal d’un quart de litre. Chaque 15 octobre, c’est l’inventaire. Le contenu est photographié et posté sur le site zerowastehome.com. En deux ans, les Johnson ont réussi à éliminer 80 % de leurs affaires. Entre 2010 et 2015, selon les calculs du mari, ils ont économisé 40 % sur leurs dépenses annuelles…*

Zero Waste France est une association citoyenne, créée en 1997, qui milite pour la réduction des déchets. L’ONG propose des solutions pour :

– Faire avancer la réglementation française et européenne en intervenant directement auprès des décideurs politiques.

– Soutenir et accompagner les acteurs de terrain tels que les collectivités, les entrepreneurs, les associations de lutte locale et les citoyens.

– Informer les citoyens et décrypter les enjeux du monde des déchets.

* LE MONDE du 6 octobre 2017, Béa Johnson : le zéro déchet, radical chic

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Pierre Rabhi croit à l’insurrection des consciences

Pierre Rabhi : « Je suis reconnaissant à Nicolas Hulot de s’engager, mais sa marge de manœuvre en tant que ministre est nulle. Dans une société où les consciences sont au degré zéro de l’évolution écologique, avec des intérêts énormes en jeu, comment voulez-vous faire ? La solution ne passe pas par le politique, elle passe par l’élévation de la conscience. Le jour où le politique dira : il faut une grande part d’écologie dans l’enseignement, avec un jardin pour que les enfants apprennent ce que c’est que la vie, avec un atelier manuel et non pas des écrans, cela commencera peut-être à aller mieux. »*

Commentaire de Biosphere : Pierre Rabhi est un modèle de retour à la terre et en ce sens son histoire vécue nous interpelle. Faire pousser des poireaux dans la terre caillouteuse de l’Ardèche, ce n’est pas une mince affaire. Il partage aussi le même diagnostic que nous, nous avons dépassé les limites de l’acceptation par la planète de notre surconsommation. De gré ou de force, nous devrons faire preuve d’humilité et nous plier aux lois de la Nature. Le fait qu’il ait généralisé son expérience personnelle en montrant que nous pouvons tous être des colibris, adepte de la simplicité volontaire et de la sobriété heureuse, va dans le bon sens. Mais il a une confiance éperdue dans l’élévation de la conscience alors que le conditionnement que nous subissons, obsédé de publicités et gavé de gadgets, empêche toute réflexion de fond. Nos conditions matérielles d’existence, sur une planète qui compte plus de 1 milliard d’automobiles, occulte tout effet de masse pour une insurrection des consciences. Nicolas Hulot est bien plus réaliste quand il constate qu’il faut un tremblement de terre pour que les hommes se précipitent dans les églises. Nicolas sait qu’il y a une complémentarité absolue entre l’engagement politique des écologistes et l’engagement individuel des colibris. Ceux qui fabriquent l’imaginaire écolo du XXIe siècle, que ce soit pas leur comportement personnel et familial, l’action associative ou l’entrisme politique sont actuellement très minoritaires. Mais ces différentes branches de l’action ont un point commun : ce n’est pas l’imagination qui précède l’action, c’est la détérioration de nos ressources vitales qui nous oblige progressivement à changer de mode de vie et de décisions politiques. Aujourd’hui la planète est surexploitée. Nous considérons que le nouveau grand récit en train de se concrétiser résulte de l’allié principal des écologistes, l’état de la planète, notre Terre-mère. Ses paramètres biophysiques sont indispensables au bon fonctionnement du système socio-économique humain, nous ne pouvons passer outre. Il n’est pas anodin que dans le système d’enseignement, ce sont les professeurs de biologie qui font le plus réfléchir, pas ceux qui enseignent les sciences économiques ou sociales ou l’histoire géographie, matières inféodées au système marchand. Et personne n’empêche un instituteur de créer un jardin potager avec ses élèves.

Le fait que Pierre soit un anti-malthusien en parole et en acte montre que sa capacité de raisonnement connaît quelques ratés dans d’autres domaines. Il a eu cinq enfants, il devrait savoir calculer le taux d’accroissement qu’il entraîne si tout le monde faisait comme lui. Aucune généralisation de l’agro-écologie ne pourrait permettre de nourrir une population mondiale qui doublerait en moins de trente années. Nous devons saluer Pierre Rabhi, il est pour les écologistes un modèle de référence, mais nous devons aussi montrer qu’il ne nous donne pas toutes les clés de l’avenir, l’agro-écologie peut s’accompagner du préservatif. Les voies du militantisme écolo sont nombreuses et variées, on peut montrer les erreurs d’aiguillage, mais surtout insister sur la convergence des luttes au niveau individuel ET collectif.

* LE MONDE du 11 juin 2018, Pierre Rabhi : « C’est en lisant les philosophes que j’ai trouvé des réponses »

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Malbouffe, le dico (les dossiers du Canard enchaîné)

Manger sainement est devenu une impossibilité majeure. Voici des extraits du numéro spécial n° 147 (avril 2018) du Canard.

– Plus on consomme d’aliments industriels, plus la probabilité d’avoir un cancer est forte.

– Nutri-Score, c’est son nom, permet au consommateur avant qu’il ne remplisse son chariot de repérer d’un seul coup d’œil, grâce à un système d’étiquetage utilisant cinq couleurs, les aliments désastreux pour sa santé. Le ministère de la santé a enfin adopté cet indicateur cette année, sans toutefois le rendre obligatoire !

– Le plus gros lobby du secteur, l’Association nationale des industries alimentaires (Ania) représente plus de 10 000 entreprises, avec un budget de 3,8 millions d’euros en 2015. De quoi employer des bataillons de juristes et de communicants, et fournir, clés en main, arguments et amendements aux parlementaires. Un des grands combats de l’Ania consiste à torpiller le projet de Nutri-score.

– Le groupe « vigne, vin et œnologie » accueille près d’une centaine d’élus à l’Assemblé nationale, alors que celui consacré à la « lutte contre les addictions » en compte… un seul.

– Longtemps serviteurs loyaux de la sécurité alimentaire, les conservateurs traditionnels (à base de sucre, de vinaigre et d’alcool parcimonieusement dosés) ont été remplacés par des agents synthétiques, imposés par des industriels pressés, à la main de plus en plus lourde. Résultat de cette course de vitesse : des réactions (asthme, diarrhée, urticaire, angiodermite..) parfois immédiates, mais aussi de nombreux doutes sur les effets cancérogènes à long terme sur l’ensemble de la population.

– « Il n’y a pas d’intérêt à produire des tomates de qualité si on n’est pas dans un circuit court, car la qualité est antagoniste du rendement » (Mathilde Causse, unité « génétique et amélioration des fruits et légumes » à l’INRA)

– Danger pour notre santé si l’on abuse des produits de Mac Do et consorts : les substances fluorées ajoutées au papier et au carton pour les rendre imperméables à la graisse. Des composés censés provoquer des troubles du développement, diminuer la fertilité, voire augmenter le risque de cancer.

– La dose de glucides et d’amidons contenus dans les chips est propice à l’augmentation du glucose et de l’insuline dans le sang, et donc du risque d’hypertension artérielle, de maladies coronairenne, d’insuffisance cardiaque, de troubles osseux et de diabète sucré.

– Les barres chocolatées, prototypes du produit ultra-transformé, cochent toutes les cases du « trop » : trop de lipides saturés, trop de sucre, trop de sels ajoutés… et du « trop peu » : trop peu de fibres, trop peu de vitamines… et trop peu de chocolat, la dose de cacao étant parfois à peine mesurable.

– Lorsque les baguettes ne sont pas « de tradition », les additifs sont à la fête : pas moins de 14 sont autorisés ! De l’acide ascorbique pour freiner l’oxydation de la pâte, de la lécithine de soja pour augmenter la durée de conservation, du mono-stéarate de glycérol pour diminuer le cloquage de la croûte, du propionate de calcium pour lutter contre les moisissures…

– Conseil de base : si vous ne savez pas décrypter la nomenclature des additifs qui entrent dans la composition de deux produits alimentaires similaires, achetez celui dont la liste est la plus courte.

– En s’infligeant un régime sans gluten, les « hypersensibles » s’exposent à un enfer : l’orthorexie, l’obsession de manger sainement, laquelle peut nuire gravement à la santé.

– Pourquoi remplacer le sucre par des édulcorants comme l’aspartame, on pourrait tout simplement en consommer moins !

– Le lait pour bébé, c’est de la dynamite commerciale, un marché de 600 millions d’euros par an sur le milliard que génère l’ensemble de la baby food. Mais le lait bio de vache ne contient pas assez de graisses polyinsaturées, de fer et de vitamines pour les besoins d’un enfant en bas âge ; par ailleurs il est trop riche en protéines et en phosphore. Quant aux laits végétaux, ils peuvent être dangereux, risques d’anémies et de déficiences neurologiques. De quoi revigorer ceux qui rêvent d’imposer l’allaitement maternel jusqu’à six mois.

– La châtaigne, qui peut être consommé fraîche ou sèche, sucrée ou salée, en farine ou en soupe, est-elle promise à redevenir un aliment de base en ces temps de végétarisme galopant ? Le châtaigner a longtemps été considéré comme l’arbre à pain, car son fruit est aussi nourrissant que les céréales et moins difficile à cultiver. Aliment sans gluten, libérant des sucres lents, du potassium, du magnésium et du calcium, la châtaigne apporte autant de vitamines C que le citron, ainsi que des acides gras insaturés qui préviennent les maladies cardio-vasculaires. Qui dit mieux ?

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1968-2018, plus de consommations, moins de durabilité

En cinquante ans beaucoup de choses ont changé : plus de consommations, plus de pollutions, moins de bonheur. Analysons les donnés statistiques*.

Les faits : Le parc de logement a augmenté trois fois plus vite (+ 76 % entre 1968 et 2013, selon l’Insee) que la croissance de la population (+ 28 %).

Le point de vue écolo : Quand le logement va, tout va, disait-on autrefois. En réalité c’est une vraie catastrophe, il y a artificialisation accélérée des sols. Le mitage résidentiel est déraisonnable, les logements occupés par une seule personne après divorces ou retraites sont une absurdité, chaque enfant du foyer avec sa propre chambre est une aberration,,. La part des résidences secondaires dans le parc des logements est passée de 6,8 % en 1968 à près 10 %, soit trois millions de logement inoccupés une partie du temps. Nous pouvons vivre autrement, le bâtiment a déjà construit beaucoup trop de logements, il faut dorénavant apprendre à les partager.

Les faits : Chaque Français dispose aujourd’hui en moyenne de 40 m2, contre 23 m2 en 1970. Le nombre de personnes au sein de chaque ménage a diminué.

Le point de vue écolo : Avec mes parents, on habitait dans 35 m², les WC étaient sur le palier – donc- partagés avec les voisins. Mon père avait bricolé un bac à douche dans la cuisine. On n’avait évidemment pas de voiture. Ma mère avait une lessiveuse. La voisine avait le téléphone, on allait parfois chez elle. Dingue, je n’étais même pas malheureuse.

Les faits : En 1968, un logement sur dix était encore dépourvu d’eau courante et plus de la moitié n’avaient pas de salle de bain – des situations qui ont quasi disparu.

Le point de vue écolo : Aujourd’hui, c’est la planète entière qui désire l’eau courante avec chasse d’eau incorporée dans chaque WC. Toute les eaux des nappes phréatiques ne suffiront pas à emplir les chasses d’eau des habitants des pays émergents. Et dire que chez nous il faut maintenant supplier les gens pour qu’ils prennent des douches et non des bains !

Les faits : En cinquante ans, la quasi-totalité des Français se sont dotés d’un réfrigérateur, d’un lave-linge, d’une télévision et d’une voiture.

Le point de vue écolo : Grâce aux biens durables, au moteur à combustion et au libre-échange généralisé, nous avons pu connaître les Trente Glorieuses. Mais ces innovations sont gourmandes en énergie, et c’est le blocage énergétique qui va prochainement faire basculer notre société, de gré ou de force. Vers 2025, nous connaîtrons un pic énergétique général toutes ressources confondues : il faudra repenser entièrement notre équipement en biens durables, par exemple en lavant son linge ou en regardant la télé dans un lieu collectif, comme autrefois !

Les faits : L’alimentation, principale charge des ménages en 1968, est passée de 21 % du budget à seulement 13 % en 2014, en raison de l’industrialisation de l’agriculture et de l’agroalimentaire.

Le point de vue écolo : Au fur et à mesure que le revenu augmente, la part des dépenses alimentaires diminue (loi d’Engel). Historiquement, c’est plutôt l’augmentation du pouvoir d’achat qui permet de consacrer son budget à des dépenses secondaires plutôt que les errements de l’agro-industrie. De plus l’agriculture, le fondement même de notre survie, est paradoxalement subventionnée par l’Union européenne (la PAZ) ; on ne paye pas le vrai prix de notre alimentation. Enfin la pression à la base des prix concédés aux agriculteurs par les grands distributeurs met une partie du monde paysan au bord de la faillite. Dans l’avenir, la crise économique inversera la loi d’Engel et nous reviendrons à une situation plus normale, moins de gadgets et plus d’argent consacré à notre alimentation.

Les faits : Depuis les années 2000, de nouveaux équipements technologiques sont apparus et se sont généralisés : téléphone mobile, ordinateur… Les dépenses de télécommunications, quasi inexistantes en 1968, représentent aujourd’hui plus de 4 % de leur budget.

Le point de vue écolo : les articles se multiplient dénonçant les méfaits de la surexposition des enfants aux écrans. On nous annonce la fin de l’enseignement présentiel, les professeurs  directement face à leur élèves. Plus généralement, les rapports de proximité, même entre parents et enfants, sont occultés par l’intermédiation des télécommunications. Intoxiqués par la société numérisée, nous donnons de l’argent à ce qui nous rend toujours plus esclave.

Les faits : En 1968, le baccalauréat était encore un diplôme rare et précieux : cette année-là, seuls 19 % des jeunes Français l’ont obtenu – et encore, ce chiffre est plus élevé que les années précédentes, car l’examen ne s’est déroulé qu’à l’oral, en raison des grèves de mai 68. Désormais, toutes filières confondues, près de 80 % d’une classe d’âge décrochent le bac.

Le point de vue écolo : La multiplication des bacheliers implique la dévalorisation de ce diplôme. Sans le bac tu n’es rien, avec le bac tu ne vaux pas mieux. Une petite anecdote relatée par Ivan Illich : « Il y a vingt ans, quand j’écrivais les essais réunis dans Une société sans école, j’ai appris avec stupéfaction que la direction sanitaire de la ville de New York excluait les boueux qui n’avaient pas leur baccalauréat ! »

Les faits : Le nombre d’étudiants a quadruplé en dix ans, passant de 227 000 en 1958 à 695 000 à la rentrée 1968, ils étaient plus de 2,5 millions à la rentrée 2017-2018.

Le point de vue écolo : Si le fait de devenir étudiant en masse voulait dire augmentation de l’intelligence collective, ça se saurait. A l’encontre d’une politique d’allongement constant des études, il faudrait opposer l’apprentissage court du savoir être et du savoir faire. Ce n’est pas parce que notre société se vante d’une « abondance » dans tous les domaines qu’il s’agit d’une progression dans le bon sens de l’histoire.

* LE MONDE du 22 mai 2018, 1968-2018 : logement, consommation, études… comment la France a changé en cinquante ans

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publicité pour Nutella = disparition des orang-outan

Géo, le « mensuel de la nature », a réussi l’exploit de publier une pub pour Nutella, symbole de la consommation d’huile de palme, juste avant un reportage photo poignant sur l’orang-outan, « dont l’habitat se réduit sous l’effet de la déforestation, liée à l’exploitation de l’huile de palme ». Un lecteur s’en est ému, le rédac chef de « Géo » lui a répondu : « Comme vous, je suis attaché au respect de la liberté d’expression… Les annonceurs sont libres de présenter leur produits au consommateur… Le consommateur de son côté est libre d’acheter le produit ou pas. » Quant aux journaux incapables de refuser une pub, ils décrochent la palme de la liberté ! (Le Canard enchaîné du 16 mai 2018)

Allons plus loin. Le fondement constitutionnel de la liberté d’expression en France repose sur l’article 11 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen du 26 août 1789  : « La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l’homme ; tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l’abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi ». Le Constituant entendait favoriser un débat d’idées. Il ne visait explicitement que la libre communication « des pensées et des opinions », certainement pas des informations ordinaires et encore moins de la publicité commerciale qui n’existait pas à l’époque. La publicité n’a nullement pour objectif de transmettre des idées mais plutôt de faire vendre des produits. Elle a donc plutôt pour fondement la liberté d’entreprendre ou la liberté du commerce et de l’industrie, des libertés dont la portée est susceptible de limitations dans l’intérêt général. D’une façon générale « la liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas autrui » est-il écrit à l’article 4 de la Déclaration de 1789, laquelle précise, dans son article 5, que la loi peut défendre les « actions nuisibles à la société ». Or, l’affichage publicitaire porte fréquemment atteinte à des droits fondamentaux et en premier lieu à la conception libérale de la liberté d’expression. La liberté d’expression apparaît, en effet, comme la liberté de celui qui s’exprime, qui parle, qui écrit… mais on ne saurait oublier qu’elle doit être totalement conciliée avec la liberté de celui qui est susceptible de recevoir le message. Nul ne peut être contraint, sauf abus, d’entendre, de lire, de voir un message contre son gré. C’est ainsi que l’a d’ailleurs lue le Conseil constitutionnel dans sa très célèbre décision des 10-11 octobre 1984 sur les entreprises de presse. Il estime que « l’objectif de la libre communication des pensées et des opinions est que les lecteurs soient à même d’exercer leur libre choix sans que ni les intérêts privés ni les pouvoirs publics puissent y substituer leurs propres décisions ni qu’on puisse en faire l’objet d’un marché  ». Le juge constitutionnel donne, en cas de conflit, la préférence à la liberté du receveur sur celle de l’émetteur. La liberté d’expression ne saurait en aucun cas se confondre avec une quelconque liberté d’agression. La liberté de recevoir ne peut qu’aller de pair avec une liberté de ne pas recevoir. D’autant plus quand il s’agit d’une publicité qui concourt à la disparition d’un de nos cousins proches tout en favorisant l’obésité.

D’un point de vue économique, il faut rappeler le mécanisme de la filière inversée. Le consommateur de Nutella est pris dans un étau social qui l’oblige à céder aux sirènes du matraquage publicitaire. Dans la théorie libérale du marché, le consommateur est le décideur, votant par ses achats de ce qu’il faut produire et distribuer. En fait il s’agit d’un consommateur manipulé, aliéné, étranger à ce qu’il devrait être. C’est Galbraith qui parlait de filière inversée. Dans un système de publicité de masse, ce n’est plus le consommateur qui dicte ses choix aux entreprises, ce sont les entreprises qui incitent les gens à « aimer » leurs produits. L’entreprises Nutella modèle les désirs des grands et des petits, l’idée du consommateur-roi est un mythe. L’enfant bourré au Nutella n’a aucun droit à la « liberté d’expression » et les parents font généralement ce que l’enfant « décide ». Si tu veux agir contre la publicité, incite tes proches à ne pas manger de Nutella et adhère au R.A.P., résistance à l’agression publicitaire.

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Les principales caractéristiques d’une entreprise écolo

Emmanuel Druon a beau être PDG, le luxe n’est pas son monde. Ce chantre de la sobriété a opté pour le salaire minimum. Il est à la fois Industriel et écolo, patron et « collègue » de ses salariés. Fabricant des enveloppes Pocheco, c’est un oxymore fait homme, guetté par la schizophrénie entrepreneuriale : « D’un côté, il faudrait que l’entreprise ait une croissance continue, se développe sur un continent, puis deux, avale ses concurrents, etc. De l’autre, les ressources s’amenuisent et le réchauffement climatique risque d’entraîner des catastrophes. En tant qu’industriel, on se sent à la fois impuissant et responsable. » Son expérience a obtenu un écho impressionnant grâce à son témoignage dans Demain, de Cyril Dion et Mélanie Laurent. « On peut entreprendre sans détruire », assure-t-il à juste titre. Pour un arbre coupé afin de fabriquer la pâte à papier, dix sont replantés. Tous les éléments toxiques utilisés dans les encres ont été retirés. Une bambouseraie a été installée : « C’est une station d’épuration très efficace », constate Druon. Grâce à sa toiture végétalisée, Pocheco récupère aussi l’eau de pluie et la réutilise pour nettoyer les machines. Ajoutez à cela une dose d’anti-management. Peu de hiérarchie. Pas de dividendes pour le PDG, seul actionnaire. Tous les bénéfices sont réinvestis ou mis de côté. « Nous sommes une équipe soudée parce que nous avons un projet commun, qui est de produire sans laisser de traces, explique Emmanuel Druon. On a ainsi créé une bulle protectrice contre la violence économique. » Mais chaque année, les Français échangent plus d’e-mails et envoient moins de courriers. Il faut donc être le moins cher, « Coup de bol, en simplifiant nos recettes dans un but écologique, on a aussi réduit nos coûts ».

Malgré ces efforts, Pocheco demeure sur la corde raide, à la merci du moindre accroc. Des dotations aux investissements insuffisantes en 2016-2017, et revoici l’entreprise dans le rouge… Mais les technologies numériques sont si destructrices… y compris de nos libertés individuelles ! Les actions de la PME pour réduire son empreinte sur l’environnement sont en train de lui ouvrir de nouvelles perspectives, Pocheco joue désormais les centres de formation sur ce type de sujets. Le PDG fait le calcul : « En trois ans, on a créé 25 postes, qui s’ajoutent aux 110 personnes en production. » Soudain, le « Pierre Rabhi de l’enveloppe » soulève ses lunettes et se met à rêver à l’essor que pourrait prendre l’« écolonomie », cette alliance d’écologie et d’économie. Son thé a refroidi. Sobre jusqu’au bout, Emmanuel Druon n’a pas touché au fondant aux amandes. Il range son carnet dans sa sacoche, entre deux livres. Ah, les livres ! Réconcilier le « nous » et le « je », une tâche peut-être encore plus ardue que de conjuguer écologie et économie dans ce monde si âpre, glisse l’auteur du ­Syndrome du poisson-lune. Un manifeste d’anti-management (Actes Sud/Colibris, 2015) et d’Ecolonomie. Entreprendre sans détruire (Actes Sud, 2016).

Les principales caractéristiques d’une entreprise écolo semblent donc être la sobriété généralisée, la réduction égalitaire des salaires, l’économie circulaire et le refus d’un certain progrès technique qui remplace le bon vieux courrier postal par les voies électroniques déshumanisées. Cet article que nous avons résumé est dans le supplément « l’époque » du MONDE* et non dans « éco&entreprises » du même jour. Tout un symbole : une entreprise à tendance écolo ne peut pas être une véritable entreprise pour ce quotidien.

* LE MONDE du 13-14 mai 2018, Un apéro avec Emmanuel Druon

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Autonome grâce à son potager, c’est possible

A l’heure de la mondialisation de la production alimentaire, produire une partie de sa propre nourriture est un acte fort pour retrouver une partie de son autonomie. Il s’agit d’une démarche individuelle relativement simple et rapide à mettre en place. Il vous suffit de suivre les conseils prodigués par Blaise Leclerc dans son livre « Produire tous ses légumes, toute l’année ».  Il vous y donne des exemples de surfaces à cultiver et de quantités à semer ou planter selon la taille de votre famille. Un répertoire des légumes de A à Z, incluant calendrier de production et rendements, vous permettront de tendre vers une autonomie alimentaire toute l’année !

Pour Via Campesina, mouvement mondial de petits paysans, la souveraineté alimentaire est définie comme « le droit de chaque nation de maintenir et d’élaborer sa propre capacité à produire son alimentation de base dans le respect de la diversité culturelle et productive ». Les collapsologues, ceux qui prévoient un effondrement probable de la société thermo-industrielle, s’entendent sur l’idée que l’agriculture va devoir reprendre une place plus importante dans nos vies.

Cette transition écologique commence dans notre propre jardin. Chacun de nous peut devenir autonome en légumes grâce au livre de Blaise Leclerc. Nous souhaitons un avenir où l’œuf sera pondu dans le poulailler familial, le lait produit dans une économie domestique, les légumes à l’aise dans son potager, le verger empli de fruits et le miel récolté dans le respect de la nature.

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Noël, une chiotte ignoble, Père Noël un camelot immonde

« Le Père Noël est un des pires flics de la terre et de l’au-delà, le Père Noël est le camelot immonde des marchands les plus fétides de ce monde. Tous ces marchands de rêve et d’illusion, véritables pirates des aspirations enfantines, colporteurs mercantiles de l’idéologie du flic, du fric, du flingue… Face à la grisaille géométrique des cités-clapiers, bidonvilles de la croissance, face aux arbres rachitiques, aux peuples lessivés, essorés, contraints, s’étale la merde plaquée or-synthétique, la chimie vicieuse des monceaux de jouets, un dégueulis de panoplies criardes, avec, derrière la porte capitonnée le ricanement malin des marchands.

Noël est une chiotte ignoble et on va plonger nos gosses là-dedans ? Mais faut bien faire plaisir au gamin ! Rubrique « Filles » du catalogue des Nouvelles Galeries : 28 pages sur 30 exclusivement consacrées aux poupées, aux dînettes, avec trousses de toilette et fers à repasser miniatures. Les deux pages restantes sont consacrés au tissage, à la couture, à des panoplies de danseuse…et de majorette ! Si avec ça votre fifille n’a pas pigé quel est son rôle futur. Côté « les Garçons » : sur 40 pages, 32 seulement consacrées aux bagnoles, avions, panoplies de cow-boys et carabines à plomb ! Doivent retarder, aux Nouvelles Galeries, j’ai pas trouvé de panoplies de CRS ou de para. Par ailleurs ces jeux sollicitent de plus en plus de consommation électrique. Allez, tenez, on va fantasmer un peu : bientôt pour construire des centrales nucléaires, l’EDF s’adressera à nos gosses et leur proclamera la nécessité de l’atome pour fournir de l’électricité à leurs jouets !

Mais quelles sont les tendances d’enfants élevés dans un milieu naturel et n’ayant pas à souffrir du poids des divers modes d’intoxication ? Ils courent, ils jouent dans les flaques, se roulent dans la boue, ou tentent de percer les mystères de « papa-maman ». Ils vivent, pensent, créent. Refouler ces pulsions naturelles est donc le but criminel de notre société. Sauter à la corde ou jouer au ballon devient un exploit quasi contestataire sur des abords d’immeubles transformés en parking. Le système des marchands au pouvoir a dit : J’achète le Père Noël. Les marchands tuent l’enfant, tuent les parents, tuent le jouet. » (in la Gueule ouverte de janvier 1973… Un texte qui reste toujours d’actualité en 2017 !)

Devant la clarté du propos, je n’ai rien à ajouter. Si ! Quand un jour quelconque d’une année passée, car il n’y a pas de journée spécifique pour faire plaisir en éduquant, j’ai offert un puzzle à ma petite-fille de 2 ans et quelques mois. Ce qui a le plus intéressé Zoé n’était pas les cubes du puzzle, mais la ficelle autour du paquet. Alors nous avons joué ensemble avec la ficelle, car l’essentiel n’est pas dans la valeur du jouet, mais dans le fait de jouer avec les enfants, adultes-jeunes réunis autour de la manipulation d’un objet qui n’a de valeur que celle qu’on lui accorde plus ou moins consciemment.

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La chasse au gluten, au risque de l’orthorexie

Les injonctions incitant à manger sain se multiplient. Les orthorexiques passent des heures à penser à leur alimentation, croient que certains produits sont des « poisons »… Parfois, le contenu de son assiette tourne à l’obsession ; les spécialistes parlent alors d' »orthorexie », du grec orthos, « correct », et orexis, « appétit ». Ce concept a été inventé en 1997 par le docteur américain Steve Bratman*. Le seul problème se trouve dans l’excès, l’obsession de manger sainement : certaines personnes finissent par adopter des régimes très restrictifs, sans gluten, puis toutes les dérives alimentaires sont possibles. Faisons le point. La maladie cœliaque (intolérance au gluten) est une maladie auto-immune : les patients développent des anticorps qui agissent contre leur propre intestin grêle, plus précisément contre les villosités qui recouvrent sa paroi. Celui-ci s’atrophie, il devient plus lisse et il absorbe moins bien les éléments nutritifs (minéraux, vitamines, etc.). La maladie est favorisée par des prédispositions génétiques. En France et dans le monde, on estime que de 0,5 % à 2 % seulement de la population générale est concernée. Le régime sasn gluten est actuellement à la mode. Mais aucun bénéfice clair n’a été démontré pour lutter contre d’autres maladies que la maladie cœliaque, pas même pour les sportifs, malgré la tendance lancée par le champion de tennis Novak Djokovic**. Le nombre de commentaires sur lemonde.fr montre que le gluten fait parler. En voici une synthèse :

aissache (05/10/2017) : Plus un aliment est transformé plus la concentration en gluten augmente. Les farines blanches modernes en contiennent donc plus d’où des effets moindres avec les pains ou féculent à base de farine complète.

KD : Une étude avait montré que lorsqu’une personne arrête le gluten, elle se mettait à lire les étiquettes et à faire attention à ses achats (il devient compliqué d’acheter des produits transformés et donc il faut cuisiner). C’est cette deuxième partie qui à l’origine d’un meilleur état de forme, faire attention à son alimentation. Le tout forme un signal donnant à penser que l’absence de gluten est à l’origine de ce meilleur état alors que c’est le changement de comportement.

accro pol : Bénéfices liés aux régime sans gluten : énormes pour les industries agro alimentaires qui s’engouffrent dans chaque faiblesse du consommateur. Pour 0.5 ou 1% de la population qui rencontre un vrai problème, ils veulent vendre a 5, 10, ou 20% de gogos leur soupe sans gluten mais bien assaisonnée en Euros. Attristant de lire dans les réactions les amalgames, les vegan qui soutiennent les sans gluten, …

Grabotte : Le régime sans gluten comme autres trucs du même genre (véganisme) participe à l’industrialisation de la nourriture, tendance de fond qui nous dépossède tous de notre capacité à nous nourrir simplement. Sans compter que tous les plats industriels sont nutritionnellement moins intéressants que des produits bruts cuisinés maison.

OTTO VON SCHWELLUNGMEISTER : Reste que beaucoup de personnes ont connu une vraie amélioration de leur état en stoppant le gluten.

shackleton : Si on dit à une personne qu’en mangeant des oranges vertes à chaque nouvelle lune, elle va se sentir mieux, l’effet placebo va jouer à plein. Et elle ira effectivement mieux.

Untel : C’est comme pour l’homéopathie. Des tas de personnes peuvent jurer qu’elles ont eu une amélioration de leur état. Toutefois ces témoignages ne changent pas la réalité scientifique. La science ne retient pas une efficacité des produits homéopathiques

Complexité : Il y a non pas LE gluten mais des glutens selon les variétés : traditionnelles ou nanifiées dont le génome a été doublé et puis des panifications à la levure ou aux levains et puis des gens qui ont les intestins malmenés par médocs, antibio, stressés par la société…

Fool : On est vraiment bombardé de pseudo-sciences et la confusion crée toute sorte de marchés. C’est triste pour la science et les consommateurs.

C’est très net : Depuis que j’ai arrêté le gluten je marche sur l’eau (et je cours le marathon en 1h50).

* LE MONDE du 22 février 2012, L’obsession du manger sain

** LE MONDE du 5 octobre 2017, Régime sans gluten : « Aucun bénéfice clair n’a été démontré »

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Déconsommation rime avec Décroissance et Écologie

Nous sommes sur ce blog adeptes des Dé, Démondialisation, Démilitarisation, Dépollution, Dépopulation, Désurbanisation, Dévoiturage, Décroissance, Débond. Il n’était que temps d’adopter aussi l’expression « Déconsommation » puisque LE MONDE nous a pris de vitesse dans son numéro du 17-18 septembre 2017, « Déconsommation, j’écris ton nom » : Aujourd’hui, sur les réseaux sociaux, ce n’est pas en remplissant mais en vidant ses placards que l’on fait sensation… Petit à petit se dénouent les liens qui enchaînent à la ronde des promos et à l’obsolescence programmée des tendances (de la mode)… La blogueuse Laetitia Birbes vit avec deux tenues, trois culottes et une paire de chaussettes qu’elle rapièce … Loin d’être un cas isolé, elle fait partie de ces Français qui empruntent la voie de la déconsommation… On note au premier semestre 2017 une baisse de 0,3 % de la ­consommation en volume… Le consommateur ne remplit plus son chariot avec l’entrain sifflotant d’un zombie accumulateur… Alors que la commercialisation des produits d’entretien industriels s’effondre, le vinaigre blanc comme nettoyant multisurface connaît un succès sans précédent… Chez de nombreux déconsommateurs s’impose l’idée qu’il faut réévaluer le coût réel de nos achats, en y intégrant aussi bien les maladies de civilisation que les dégâts environnementaux… Certains nomment « éconologie » cette vision émergente qui ­imbrique intimement économie et écologie… »

La déconsommation est un phénomène vraiment nouveau dans son expression médiatique officielle. Après la crise mondiale des surprimes en 2008, on n’avait pas assisté à un phénomène massif de « déconsommation », l’expression entre guillemets utilisée à l’époque par LE MONDE. Mais les militants de la décroissance pratiquent depuis longtemps la déconsommation qu’ils nomment simplicité volontaire, sobriété partagée, limitation des besoins, austérité ou même ascétisme. Richard B.Gregg nous donne en 1936 une des meilleures synthèses sur la question dans The value of Voluntary Simplicity, traduit et édité en français par les éditions « Le pas de côté » seulement en 2012. Extraits :

«  Dans la mesure où les désirs de l’humanité sont illimités, quelles limites devons-nous nous fixer ? C’est à chacun de déterminer le degré de simplification à atteindre. Mais il est facile de voir que nos existences individuelles et notre vie collective seraient grandement changées si tout le monde simplifiait ses desseins. Les actions comptent plus que les mots. La simplicité volontaire affecte en premier lieu la consommation. Elle instaure une limite d’achats. La consommation est le secteur dans lequel chaque individu peut influencer la vie économique de la communauté. Le consommateur a donc le devoir de réfléchir et de se conformer à un niveau de consommation pour lui-même et sa famille. Doit-il posséder trois ou un seul chapeau ? Sa maison doit-elle comporter une salle à manger séparée ? L’exploitation des êtres humains est un mal ancestral, plus vieux que le capitalisme. Le plus grand fossé est celui qui sépare les riches et les pauvres. Le premier pas que je peux faire pour réduire ma participation à l’exploitation, c’est de vivre dans la simplicité. Tout superflu demande un travail inutile. La production et la consommation de produits de luxe détournent le travail et le capital de tâches plus bénéfiques socialement ; elle empêche souvent une utilisation plus judicieuse des terres ; et elle gaspille les matières premières qui pourraient être employées à meilleur escient. En conséquence, cela tend donc à augmenter le prix des biens de première nécessité et renforce la misère des plus démunis. Je n’ai pas le droit de dénoncer le mal sans commencer d’abord par le déloger de ma propre vie.  L’exemple est plus puissant que l’exhortation et le modèle donné par une personne, inlassablement répété, s’étendent à tous ceux qui reçoivent ce stimulus. Par son ascétisme, le dirigeant prouve son désintéressement et sa sincérité. En partageant les conditions d’existence des gens, le gouvernement garde en tête leurs problèmes et reste en rapport [en français dans le texte] avec eux. Si un groupe entier de dirigeants ou d’intellectuels adoptait pour toujours la simplicité, l’unité morale de toute la nation en serait renforcée. »

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Fragments de vie, fragment de Terre (histoire à suivre)

Je recopie quelques citations du dictionnaire du diable en mars 1970 : « Air : substance nutritive fournie par une généreuse providence pour engraisser les pauvres ; Cadavre : produit fini dont nous sommes la matière brute. La tâche la plus stupide que puisse prendre un être humain est, sans aucun doute, l’édification d’un tombeau à son usage. La solennité du moyen en accentue la futilité du but connu à l’avance ; Charrue : instrument qui réclame à grands cris des mains habituées au porte-plume ; Commerce : transaction dans laquelle A vole à B les marchandises de C ; etc. » Une lecture que je recommande pour se décrasser le cerveau. Il faut se méfier des stéréotypes qui sont dans nos têtes, c’est la mise à distance qui nous libère. Je note : « Nous avons tendance à coller des étiquettes sur ce que nous ne connaissons qu’imparfaitement ou pas du tout. Pour les étudiants de Princeton, les Allemands ont l’esprit scientifique, les Italiens sont impulsifs, les Noirs paresseux, les Chinois superstitieux alors que les Américains sont intelligents et ambitieux. Ce que nous voyons est déterminé à l’avance par ce que nous nous attendons à voir. Le tort des gens, c’est quand on leur apporte quelque chose de nouveau, de ne pas y croire. De ne pas avoir un esprit ouvert. » Je cultive mon ouverture.

Je proclame l’utopie : « Je ne suis pas un anarchiste, ni nihiliste ni cynique, je ne suis ni communiste ou trotskiste, maoïste ou castriste. Je suis quelque chose en constante formation ouvert à autre chose. Quelque chose de mouvant comme la pensée, quelque chose d’universel comme la non-violence, quelque chose d’immuable comme nos actes. Je suis. Je suis pour une humanité meilleure. Cela suffit. » Je lis aussi bien l’Idiot International, Hara-Kiri ou Politique aujourd’hui. Je me forme moi-même. On ne reste intelligent que tant qu’on élimine de la mémoire ce qui est contredit par un fait nouveau. Mais la bêtise élimine du fait nouveau ce qui pourrait contredire la mémoire ! Pour progresser mentalement, il faut accepter une certaine dislocation mentale, abandonner ses a priori pour retrouver le sens de l’intérêt commun. Je recopie le testament d’un mort vivant, écrit pas un certain Gérard Robin : « Je suis né en 1939, mort en 1969. Ma vie n’a été qu’un grand rêve, vivre. Je lègue à l’Etat ma vieille bicyclette, témoin de mes vagabondages. Je demande que ma bibliothèque personnelle soit enfouie dans la terre et qu’à son emplacement on plante un grand sapin. Comme je n’ai rien écrit, il suffira de regarder vivre et d’écouter les vivants… »

Ma révolte contre l’autoritarisme socio-familial prenait des contours plus précis, plus engagés, plus apparents pour tout dire. Barbe et cheveux longs, très longs. Toujours le même anorak noir sur le dos, toujours ou presque le même pantalon. Mon père me disait bien que je changerai, car « quand j’aurai moi aussi femme, enfants et beaucoup d’emmerdements, je n’aurais plus le temps de penser ». Je n’attache pas d’importance à la voiture et à la retraite, je me suis appris à ne pas fumer, à ne pas boire, à ne pas regarder la télé. Je peux me passer de musique et de voiture. Le préfet Grimaud disait que la voiture individuelle est incompatible avec la vie urbaine contemporaine, Cartier déclarait qu’interdire à l’homme d’utiliser son véhicule personnel était une atteinte à la vie moderne et à la liberté… Déjà les contradictions de la vie moderne. Dans ces années 1970 se profilait les débats des années 2000, j’avais choisi mon camp. (à suivre)

NB : pour lire la version complète de cette autobiographie, ICI

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Une société sans voitures à essence est-elle possible ?

Nicolas Hulot a présenté le 6 juillet 2017 un plan climat : « Ce n’est pas un sujet qui spontanément passe toujours au premier plan dans l’écran radar. Notre responsabilité, c’est de faire que ce sujet prime sur tous les autres. » Il annonce la fin de la commercialisation des voitures roulant à l’essence ou au gazole en France d’ici 2040*. Un gouvernement adepte du dévoiturage, je demande à voir ! En fait il s’agit d’abord de relancer la machine à fabriquer encore plus d’automobiles. Une « prime de transition » sera proposée pour remplacer les voitures à essence d’avant 1997 ou à diesel d’avant 2001. Ensuite ce sera sans aucun doute un plan pour passer aux véhicules électriques. Notons que le Président de Volvo Cars (dont le propriétaire est chinois) vient d’annoncer que toutes ses nouvelles voitures seront avec un moteur électrique (100 % ou hybride) à partir de 2019. Or la production d’électricité va se contracter puisque Hulot annonce aussi une réduction de la part du nucléaire dans la production d’électricité à 50 % en 2025. La seule annonce crédible, mais insuffisante, est de « donner un prix à la pollution » en renforçant le prix de la tonne carbone. Mais ce prix n’est pas encore fixé et « dépendra de la future loi de finance ». L’objectif est qu’il dépasse 100 euros en 2030. A titre de comparaison, Nicolas Hulot écrivait dans le pacte écologique de 2006 : « Il faut introduire une taxe progressive et continue sur toutes les sources d’énergie à base de carbone. Faire baisser nos émissions annuelles de 3 % par an d’ici 2050, c’est possible. A titre d’illustration, et à partir d’un niveau initial de 40 euros pas tonnes de CO2 en 2010, l’augmentation serait de 80 euros par tonne de CO2 tous les dix ans dans le secteur des transports ». Soit un objectif de 200 euros par tonne en 2030 et non 100 euros comme dit aujourd’hui. Le montant en 2017 est de 30,50 euros la tonne de CO2 émise.

Les ONG environnementales en restent sur leur faim. « Pour l’essentiel, le plan climat se contente d’identifier les chantiers prioritaires et renvoie les mesures concrètes à adopter à des concertations ultérieures », déplore le Réseau action climat. LE MONDE** est aussi incisif par rapport à ce projet gouvernemental: « annonces radicales… sans détailler les moyens d’y parvenir. Les automobilistes iront-ils s’équiper dans les pays voisins ? Ces derniers au contraire suivront-ils le mouvement lancé par Paris ? M. Hulot va maintenant devoir faire la preuve de sa capacité à obtenir des arbitrages donnant corps à la simple « colonne vertébrale » de son plan.» Voici quelques commentaires pertinents sur lemonde.fr :

L’oracle : La fin du diesel et de l’essence pour 2040…Je me souviens que plusieurs fameuses structures de prospectives avaient annoncés la disparition du cancer pour les années 80, du fait de la découverte de traitements radicaux……On connaît la suite.

Pénélope : C’est bien d’avoir un cap,une vision de l’avenir,mais en attendant qu’est ce qu’on fait? Rien de concret pour aujourd’hui ni même pour demain. Et dans vingt ou trente ans Hulot comme ses collègues ne seront plus aux affaires donc faire des promesses pour après-demain,ça ne mange pas de pain !

Enfinlademocratie : Le problème est qu’avec notre système majoritaire et en l’absence de référendum, on ne peut pas engager la nation sur un chemin de 20 ans. Si aux prochaines élections, un parti peu enthousiaste sur l’écologie gagne (Trump après Obama), cette politique sera totalement abandonnée.

Untel : +1 L’exemple de l’alternance Obama-Trump devrait nous éclairer. Ou à un plus modeste niveau, la journée de carence des fonctionnaires instaurée par Sarko, supprimée par Hollande, réinstaurée par Macron. Il n’y a pas de politique ambitieuse qui soit durable, à long terme. Ce sont les politiques consensuelles, modérées, progressives, les politiques des petits pas qui peuvent survivre aux alternances.

Fouilla : Très bien tout ça sauf que – coté transport, on ne parle que des « voitures », quid des poids lourds? La France est un des pays de l’OCDE qui transporte le plus de marchandises par la route (beaucoup plus que l’Allemagne et les USA), quid des autocars, notamment « Macron »? –

FRANÇOIS GSELL : le plan de Nicolas Hulot comporte des pistes intéressantes mais présente des omissions significatives : – où sont les mesures pour promouvoir les infrastructures de recharge des voitures électriques…? – pourquoi négliger la production et la mise en circulation de véhicules à hydrogène…? – comment faire évoluer le mix énergétique…?

* Le Monde.fr avec AFP | 6 juillet 2017 Nicolas Hulot : « Nous visons la fin de la vente des voitures à essence et diesel d’ici à 2040 »

* * LE MONDE du 8 juillet 2017, Climat : le plan de Hulot vers la neutralité carbone

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Adieux à l’automobile, le dé-voiturage en marche

Rare sont les auteurs qui envisagent la fin de l’automobile individuelle, mais ils existent. Serge Mongeau* va jusqu’au bout de sa recherche de la simplicité volontaire. Mais il articule de façon superficielle actions individuelles et décision collective. Nicolas Hulot** posait la question d’une politique publique de façon précise. Michel Sourrouille*** va encore plus loin et envisage un gouvernement écolo.

Serge Mongeau : « Une fois encore, nos gouvernements font preuve de manque de vision ; on répare les infrastructures routières qui se détériorent, on cherche les moyens de diminuer les bouchons de circulation, on encourage le remplacement des moteurs à combustion par des moteurs électriques… Bien évidemment, avec la fin du pétrole bon marché, l’ère de l’automobile s’achève et il faut dès maintenant repenser notre civilisation sur un autre modèle. Il ne s’agit plus de sauver l’automobile, il faut passer aux actes pour se donner une société où celle-ci n’a plus sa place. Le changement ne sera pas facile, pour beaucoup de gens la vie ne peut plus se concevoir sans automobile. L’automobile est entrée dans nos mœurs, elle a conquis une partie importante de notre imaginaire. Comment en être autrement avec cette publicité agressive qui joue sur tous les tableaux et trouve le moyen de faire vibrer, sexualité, puissance, liberté… On oublie que cette liberté se paie par de longues heures de travail (pour acheter son véhicule et le faire bouger). Il faut intervenir dans l’aménagement du territoire, s’organiser pour diminuer les besoins de déplacement, rapprocher les gens de leur travail (ou le travail des gens), multiplier les services de proximité et les lieux de convivialité, rendre les villes plus agréables à vivre pour qu’on n’ait pas à en sortir pour se retrouver près de la nature, etc. En d’autres termes, il faut que les déplacements indispensables soient plus courts, plus agréables à faire à pied ou en bicyclette. C’est dans cette perspective que nous devrions envisager tout investissement dans nos infrastructures routières, scolaires, industrielles, etc. Évidemment toutes ces décisions relèvent des pouvoirs publics. Mais cette évolution ne se réalisera pas sans une importante mobilisation populaire… qui ne pourra se mener sans implication de militants convaincus et convaincants. Des gens cohérentes, qui ont déjà eux-mêmes choisis de faire le passage à une société sans auto. »

Nicolas Hulot : « Moteur du dynamisme économique et de la mobilité individuelle, le trafic routier se présente en même temps comme une des causes principales du fameux effet de double ciseau : raréfaction de la ressource pétrolière d’une part et aggravation de l’effet de serre d’autre part. Il n’y a pas de mystère, c’est à la déconstruction de ce monopole routier qu’il faut travaille. Il faut diminuer la puissance des automobiles mises en vente pour les rendre conformes aux limitations de vitesse (qui sont aussi des exigences de sécurité). Comme la réglementation technique des automobiles relève de la législation européenne, c’est au niveau de l’Union européenne que la décision doit être prise. A l’évidence, tous les États européens sont soumis aux mêmes impératifs de changements climatiques et de raréfaction des ressources pétrolières. Cette mesure pourrait s’accompagner d’une réduction de la vitesse maximal autorisée, la France faisant partie des pays européens où elle est la plus élevée. La vérité des prix doit aussi s’appliquer à l’automobiliste avec la restauration de la vignette, impôt écologique par excellence. Depuis sa suppression incohérente, de timides initiatives ont été prises dans ce sens. Mais leur aspect dissuasif reste dérisoire. On peut offrir aux communes la possibilité légale d’instaurer un péage urbain. On doit aussi mettre en place un péage kilométrique pour les poids lourds, comme en Allemagne et en Autriche. »

Michel Sourrouille propose d’instaurer un ministre de la relocalisation et de la mobilité : « Il y a urgence de sortir du tout routier, ce qu’on pourrait appeler dévoiturage, le covoiturage n’étant qu’un intermédiaire particulier pour arriver bientôt à une société post-carbone. Il est bien évident que les quads, jet ski et autres gadgets motorisés seront interdits de circulation un jour ou l’autre. L’abandon de la voiture individuelle se fera dans la douleur, mais c’est nécessaire. La construction en chaîne des Ford T dans les années 1910 a été la plus grande catastrophe du XXe siècle. La construction automobile nécessite l’aliénation par le travail à la chaîne et repose sur la productivité qui crée le chômage, cela facilite l’urbanisation sauvage, la stérilisation des terres par un réseau routier sans limites, la multiplication des déplacements par la distance que l’automobile a mis entre domiciles et lieux de travail, entre zones de production et centres commerciaux, entre espaces de vie et destinations du tourisme. Cela implique aussi l’épuisement du pétrole, ressource non renouvelable, et l’augmentation de l’effet de serre, donc un changement climatique. Le paradigme fordiste, c’est-à-dire cet équilibre entre la production de masse grâce au travail à la chaîne et la consommation de masse autorisée par l’augmentation des salaires, repose sur l’hypothèse absurde d’une humanité hors sol, disposant de ressources naturelles illimitées et gratuites. Le fordisme n’aura été qu’une parenthèse historique, il faudra expliquer cela à la population. »

* « S’indigner, oui, mais agir » de Serge Mongeau (écosociété 2014)

** « Le pacte écologique » de Nicolas Hulot (calmann-lévy 2006)

*** « L’écologie à l’épreuve du pouvoir » de Michel Sourrouille (Sang de la terre 2016)

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Le peuple n’existe pas, c’est une abstraction construite

Extrême droite et ultragauche se rejoignent. « Contre la droite du fric, la gauche du fric, je suis la candidate de la France du peuple », affirmait Marine Le Pen lors du lancement de sa campagne présidentielle. L’affiche électorale de Jean-Luc Mélenchon est du même tonneau : un portrait de lui-même surmonté du slogan « La force du peuple ». C’est le règne du populisme. Les présidentiables 2017 pratiquent presque tous cette référence illusoire au « peuple ». Ils disent qu’ils sont à l’écoute du peuple, ils vont le faire parler par l’intermédiaire d’un référendum ou de la démocratie participative, ils en reviennent toujours à leur point de départ, la voix du peuple s’expriment par leur propre bouche. Illusion, illusionnistes. La population est en réalité un ensemble hétérogène de voix dissemblable et dissonante, qui peut dire oui un jour et non le lendemain, qui cherche surtout à voter selon son propre intérêt, qui cherche le plus souvent à satisfaire ses avantages catégoriels et non à promouvoir le bien commun. D’où l’avalanche de promesses diverses de la part des présidentiables à une multiplicité de groupes. Il existe pourtant des peuples particuliers, rendus homogènes par une culture spécifique, le peuple rom ou le peuple catho, la mentalité de gauche ou le conservatisme de droite. Mais ils se caractérisent par leur différence, pas par des traits communs. Personne ne peut s’arroger le droit de parler au nom de tous, au nom du « peuple ». Et la physionomie des peuples évoluent. Contre le pouvoir du capital, le peuple communiste avait ses mots d’ordre et son catéchisme marxiste : exploitation de l’homme par l’homme, lutte de classes, syndicat courroie de transmission, dictature du prolétariat, etc. Le peuple communiste avait sa solidarité de classe, dans l’atelier, dans les banlieues rouges, dans les mutuelles, dans le syndicat. Le peuple communiste existait, il n’existe presque plus. Le peuple écolo n’existe pas encore, il existera un jour.

Il existe un peuple écolo qui est encore en germe, mais il a vocation d‘être rassemblé par un culture commune au XXIe siècle. Comme le pensait Marx, ce sont les circonstances matérielles qui déterminent les consciences et non l’inverse. Notre existence sociale est conditionnée par une réalité qui nous dépasse : les rapports de production chez les communistes, la géologie des richesses minières et l’état des écosystèmes pour un écologiste. Les réalités biophysiques s’imposent à nous tous, nous sommes tous mortels, nous vivons tous des emprunts à la biosphère, nous rejetons tous dans la nature des déchets plus ou moins recyclables. L’impératif écologique nous impose à tous un comportement commun basé sur le sens des limites et la considération du long terme. Mais nous sommes tous à des moments différents de la conscience écologique, car jusqu’où peut aller par exemple la simplicité volontaire ? Jusqu’à imiter Diogène et habiter dans un tonneau ou habiter un endroit basse consommation énergétique ? Aucun présidentiable ne peut se faire le porte-parole de ce peuple écolo, il peut juste essayer de concrétiser par des politiques publiques les éléments qui permettent le changement de comportement. Par exemple taxer fortement les consommations de carbone incite aux économies d’énergie et permet de remplacer le slogan « plus vite, plus loin, plus souvent »  par son contraire. En fait il faut apprendre individuellement et collectivement la complexité, loin des discours simplistes du Front National et simplificateurs de la gauche ou de la droite. L’écologie politique relaye le constat de l’écologie scientifique, la planète est exsangue, l’austérité est notre destin commun.

Les richesses naturelles étant en quantité limitées et rapidement décroissantes pour les non renouvelables, la seule solution pour vivre en paix est le partage équitable de la pénurie. Il y aura un peuple écolo quand la majorité des citoyens refusera le voyage en avion, la voiture individuelle et les trois heures de télé par jour. Le peuple écolo préférera jouer au ballon plutôt que regarder un match de foot, il préférera une partie de belote plutôt qu’une séance télé. La simplicité volontaire des uns se conjuguera avec la décroissance conviviale des autres.Il y aura un peuple écolo quand il y aura effet boule de neige : tu fais parce que je fais parce que nous voulons tous faire de même. Cela commence par des petits gestes, économiser l’énergie, prendre l’escalier plutôt que l’escalator ou l’ascenseur, boire bio, c’est-à-dire boire de l’eau. L’écolo utilise des techniques douces et rejette les techniques sophistiquées. Il sait que marcher à pied vaut mieux que de prendre un vélo, mais le vélo est bien préférable à l’autobus ou au train. L’écolo fait plutôt du covoiturage et rapproche son domicile de son lieu de travail, il isole sa maison et baisse la température dans ses pièces. Il choisit de vivre à l’étroit plutôt qu’augmenter son emprise sur les sols arables, il fait ce qu’il doit et le bonheur lui est donné de surcroît. Un parti politique définit le sens de l’histoire. Un présidentiable propose un projet de société. Mais quand on demande aux autres de changer de comportement, la logique impose de changer soi-même pour que les autres changent. Un parti politique digne de ce nom est composé de militants qui vivent ce qu’ils prêchent. Il y aura un peuple écolo convaincu par la politique quand les militants d’EELV (Europe Ecologie Les Verts) commencement à donner l’exemple de la sobriété énergétique et de la simplicité volontaire.

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étonnant, une vache peut même brouter de l’herbe !

Il faut un hectare d’herbes pour qu’une vache puisse brouter sur l’année. Mais les élevages en batterie ont oublié les préceptes d’antan en faisant croire à une meilleure productivité. Encore faut-il s’entendre sur le sens de productivité en matière agricole. Monique et Martial Le Meur font le point dans un courrier des lecteurs : « Jusqu’aux années 1970, tout était valorisé dans les fermes, il n’y avait pas de gaspillage, on fagotait le menu bois, on ne jetait jamais le colostrum des vaches fraîchement vêlées, il allait à la nourriture des volailles, les herbes dites mauvaises alimentaient les lapins. Une vache de race locale ne produisait que 3 à 4000 litres de lait par an, mais cela pendant douze ans, voire plus alors qu’une prim’Holstein actuelle en produit pas loin de 10000 mais seulement pendant 2,4 lactations, moyenne nationale avec une augmentation des frais de vétérinaires engendrés par ce type de choix. En faisant un calcul simple, on constate qu’une pis noire bretonne produit en fait beaucoup plus dans la durée qu’une Holstein, et un lait de qualité supérieure : il faut environ 16 à 18 litres de lait de Bretonne pour fabriquer un kilo de beurre alors qu’il en faut 24 à 26 pour une Holstein. »*

La famille Le Meur est un couple de paysans adeptes de la simplicité volontaire. Ils décrivent ainsi l’agriculture qu’ils appellent de leurs vœux et celle qu’ils condamnent: « L’élevage a d’abord été pratiquée pour le fumier. Les traités d’agronomie de 1600-1700 conseillaient déjà d’enrichir le sol par les fumures. La viande était presque un sous-produit. Les fermes fonctionnaient en polyculture-élevage, la production était diversifiée. La paysannerie, c’était un mode de vie, il y avait de l’activité locale, les gens se connaissaient tous… Il faut redéfinir le terme « intensif ». Nous, sur notre ferme, on est intensif. Un maraîcher bio est très productif : il n’y a rien de perdu, les déchets sont utilisés pour le compost, les rendements sont très élevés pour des petites surfaces… Eux, dans l’agriculture industrielle, ils ne sont pas en intensif. Ils ont besoin d’intrants, d’engrais, de pesticides. Les bêtes d’élevage sont nourris avec du maïs, du soja OGM importé d’Argentine ou de Brésil. Ils utilisent une énorme surface de terres, de l’énergie, des ressources, de l’eau aussi… » Monique et Martial sont les seuls vanniers professionnels en Loire-Atlantique, ils ont un gros potager, des poulets, des lapins, des veaux, des bovins et ils troquent avec leurs voisins**. Que fera la multitude d’urbains quand il n’y aura plus de pétrole ? Quand il n’y aura plus d’agriculture productiviste et qu’il faudra retourner à la terre ?

Notre civilisation thermo-industrielle nous a mené dans une impasse en pratiquant « le sacrifice des paysans » (L’échappée, 2016). Les auteurs de ce livre reviennent sur cette catastrophe sociale qui ne cesse de s’aggraver à l’heure des fermes-usines et de l’automatisation du travail agricole : « Comme l’a montré l’ethnologue Pierre Clastres, la société industrielle est la plus formidable machine à produire, et pour cela même la plus formidable machine à détruire. Sociétés, nature, mers, forêts, sous-sol, tout doit être utilisé, tout doit être productif, d’une productivité poussée à son maximum. Au début des années 1970, la France rurale et paysanne conservait encore une grande diversité de langues, d’élevages, de paysages, d’outillages ou de techniques favorisant différentes formes de production, de coopération et d’échange entre paysans. Le profond remodelage qu’elle a connu s’est apparenté à un ethnocide si l’on entend par là la dévalorisation et l’empêchement systématique de la plupart des pratiques de leurs habitants. La politique industrialisation forcée de l’agriculture prit appui sur l’abandon du système de polyculture-élevage qui assurait aux paysans autonomie et diversification de leurs sources de revenus. Dorénavant tout ce qu’ils produisaient dans leur fermes se trouva éparpillé dans des exploitations spécialisées et mécanisées, nécessitant de nombreux achats à l’extérieur… La formule « trois petites fermes valent mieux qu’une grande » caractérise bien l’esprit de la Confédération paysanne aujourd’hui... »***

* mensuel La Décroissance n° 138, avril 2017

** mensuel La Décroissance n° 121, juillet-août 2015

*** mensuel La Décroissance n° 136, mars 2017

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Mettre le marché du rasoir en capilotade, le pied

Dans une société imbécile, tu es obligé de porter la barbe pour montrer ta soumission à dieu et à ses interprètes. Dans d’autres sociétés imbéciles, il faut être glabre, rasé de près, avec le dernier modèle jetable ou à trois lames. LE MONDE s’intéresse à la mode récente de « la barbe qui bouscule le marché du rasoir »*. Dans les sociétés dites modernes, il était en effet très idiot de céder aux sirènes publicitaires du rasoir jetable à petits prix, l’« innovation » faite en 1975 par le baron Marcel Bich. Aujourd’hui la marque Bic devient un peu moins amoureuse des déchets, elle lance deux nouveaux modèles de rasoirs  « rechargeables ». Mais il ne faudrait pas se raser quand on est écolo. Comme l’exprime Georgescu-Roegen** : « Il faut nous guérir du circumdrome du rasoir électrique, qui consiste à se raser plus vite afin d’avoir plus de temps pour travailler à un appareil qui rase plus vite encore, et ainsi de suite à l’infini… Il est important que les consommateurs se rééduquent eux-mêmes dans le mépris de la mode. »  Autour de nous, toute chose s’oxyde, se casse se disperse, etc. N’en rajoutons pas inutilement avec des lames jetables ou rechargeables. Laissons la barbe pousser…

Malheureusement LE MONDE ne s’intéresse pas à l’écologie du quotidien. L’article fait d’abord un long panégyrique des différents modes de commercialisation… des rasoirs. Pour aborder seulement en deuxième partie l’effet de mode, le nouveau look, la barbe (naissante) qui s’impose pour « Jeunes ou vieux, de droite comme de gauche ». « Même George Clooney », constate une responsable marketing de Remington. Affolement du marché, la clientèle de Gillette, Wilkinson et autres Bic se rétracte. En France, le rasoir jetable plonge de 5,5 %. Mais rien dans LE MONDE sur le refus des écologistes de tout jetable et de l’obsolescence programmée. C’est la baisse du chiffre d’affaires des marchands de lames qui importe et les moyens de réagir : «  Procter & Gamble, propriétaire de la marque Gillette depuis  2005, a vu ses ventes de produits dits de grooming (toilettage, en anglais) tomber à 6,8 milliards de dollars en 2016, après une chute de 8 %. Son PDG vient d’annoncer qu’il taillera de 20 % dans les prix des rasoirs… »… « La marque américaine Remington a inventé un réservoir qui aspire les poils coupés, puis un modèle à écran tactile… » « Le néerlandais Philips a investi le Net pour vendre aux jeunes geeks… » L’explication du choix de la barbe est succincte ; il paraîtrait que cette évolution serait une sorte de contre-tendance virile au « féminisme dominant » ou une « éloge de la paresse » chez les « urbains qui renouent avec leur côté sauvage ». Pourtant le fait de se raser n’indiquait pas une convergence des sexes ou l’éloignement de l’homme de son origine animale. Il s’agissait uniquement d’une instrumentalisation des hommes, le poil était devenu le cœur d’une nouvelle cible à des fins mercantiles. Au XIXe siècle, c’est la barbe qui était à la mode.

Personnellement je suis barbu, comme tout écolo qui se respecte. C’est le témoignage d’un retour à la nature contre la civilisation du rasoir jetable, contre le consumérisme qui envahit tous les domaines. Mon apparence pileuse n’est signe ni d’une symbolique du pouvoir (les pharaons portaient des barbes postiches), ni d’un caractère masculin patriarcal et dominant. Elle correspond à la mentalité hippie des années 1960, réaction contre l’ordre établi et l’impérialisme du rasoir électrique. Mais attention, ma barbe n’a pas de connotation religieuse, il y a barbu et barbu. D’aillerus ceux qui se tournent vers l’islam radical ne comprennent rien à l’écologie…

* LE MONDE du 6 avril 2017, La mode de la barbe bouscule le marché du rasoir

** La décroissance (entropie, écologie, économie) de Nicholas Georgescu-Roegen (1979, Sang de la terre 1995)

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Qu’est-ce que l’alimentation préventive ?

Antony Fardet : « Je propose de définir les trois Règles d’Or d’une alimentation durable et saine.

1) privilégier les produits végétaux sur les produits animaux dans un ratio calorique d’environ 85 % / 15 %. La viande devrait devenir un accompagnement et les produits végétaux le plat principal, et non l’inverse comme c’est le cas aujourd’hui avec 60 % des protéines d’origine animale. L’association céréales-légumineuses dépend des régions, maïs-haricot en Amérique du sud, riz-soja en, Asie, blé dur-pois chiche en Afrique du nord. Rappelons que les légumineuses n’ont pas besoin d’engrais azotés pour pousser.

2) au sein des produits végétaux et animaux, privilégier les aliments pas ou peu transformés. On ne peut plus retrouver l’origine naturelle aux aliments ultra-transformés, le plus souvent très riches en calories et pauvres en micronutriments protecteurs ; les scientifiques parlent alors de « calories vides ». Pour reconnaître ce genre d’aliment, rien de plus simple : s’il y a plus de 5 ingrédients sur l’emballage, vous avez de grandes chances d’être en face d’un aliment ultra-transformé. Une pomme entière est pas/peu transformée selon les conditions de stockage, une compote de pomme est normalement transformée (pommes et sucre), un jus de pommes reconstitué à partir d’une poudre réhydratée avec des additifs divers est ultra-transformé.

3) diversifiez en privilégiant les aliments bio, de saison et locaux dans la mesure du possible. Vous avez plus de chances de consommer une plus grande diversité de micronutriments protecteurs (vitamines, minéraux, oligoéléments…) Le concept de régime régionalisé implique de développer des régimes alimentaires en adéquation avec toutes les dimensions de la durabilité, bien-être animal, traditions culinaires, conditions climatiques, etc.

Si j’achète un aliment ultra-transformé contenant des ingrédients issus des quatre coins de la planète je contribue souvent à l’appauvrissement de pays en voie de développement, à la maltraitance animale et à la déforestation de certaines parties du globe. A nous de choisir notre alimentation, nous sommes responsables.

Source : L’Ecologiste n° 48, décembre 2016-février 2017

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Un dimanche à la campagne, journée d’un militant

Je dédie cette journée à ceux qui me trouvent trop théorique, trop obsédé par le long terme et l’effondrement en cours de notre civilisation thermo-industrielle, pas assez distributeur de tracts pour Hamon. Ce dimanche 2 avril 2017, après un petit déjeuner eau/chicorée, pain de campagne et confiture maison, vient le temps de la plantation, des graines de maïs doux tous les 40 centimètres, maturation en août, juste au bon moment, quand mes petites filles viendront voir leur grand-père à la campagne. J’en ai profité pour semer à la volée quelque futurs radis rouges. C’est ce jour ma contribution à l’écologie en acte. Ce n’est pas grand-chose, mais qui s’ajoute aux quarante arbres fruitiers que j’ai planté au fil des années. Au travail de la terre succède ce matin la brouette à remplir pour alimenter le poêle à bois. C’est quand on fend le bois au coin et à la masse qu’on mesure ce qu’il faut d’efforts pour se chauffer. « La meilleure définition de ce qu’est un écologiste ne s’écrit pas au stylo mais à la cognée », écrivait Aldo Leopold. Qu’est-ce en effet que l’empreinte écologique, sinon la signature humaine sur cette terre ? A ce titre, si chacun de nous mesurait le poids de son emprise terrestre et s’efforçait de la diminuer, nous serions tous des écologistes. Trop facile aujourd’hui de manipuler les boutons du chauffage électrique, le sens de la réalité matérielle nous échappe. Pour finir ma matinée, séance de broyage. Les restes de la taille des arbres fruitiers, de la haie d’althea et autres branchages deviennent BRF, bois raméal fragmenté. Une fois étendu sur la couche supérieure du sol, je crée ainsi un sol riche, aéré, riche en micro-organismes comme on en trouve en forêt. Autrefois je brûlais tout ce bois, quel gaspillage, qui relâche du carbone dans l’air. J’apprends chaque jour, on ne naît pas écolo, on le devient.

L’après-midi, départ en randonnée. Nous sommes une trentaine dans un cycle de découverte des saveurs du terroir. Janvier, c’était la truffière d’un membre du groupe, février une fabrique locale de bière, mars une distillerie de cognac… La Charente est riche d’initiatives diverses et goûteuses. Après 11 kilomètres de marche dans la nature , c’est en ce mois d’avril la visite d’une production de fraises sous serres non chauffées. Les gariguettes ne sont pas encore à point, mais l’exposé de l’agriculteur est instructif : haro sur le bio « qui vient des pays étrangers où on ne respecte aucun cahier des charges ». Comme l’eau de pluie ne fait pas pas pousser des fraises suspendus à 80 centimètres du sol dans leur petits paniers, on alimente au goutte à goutte enrichi aux engrais. Les plants sont hauts, on attend 250 grammes de fraises par pied. Pour les espèces remontantes, il y aura même le double de poids. Il n’y a pas que les animaux qui sont élevés en batterie. Le paysan bio de notre groupe de randonneurs ne dit rien mais n’en pense pas moins. Il me dit après la rencontre que le formatage de ces agriculteurs est tel qu’il n’y a même plus de dialogue possible. Moi-même j’ai bien posé quelques questions pernicieuses, entre autres sur l’utilisation de désherbants, mais difficile d’en faire plus alors qu’on ait reçu avec amabilité.

De retour au bercail le soir, ouverture de ma boîte mail, le réflexe du militant accro aux listes EELV. Mon texte de la veille sur l’autonomie idéologique de l’écologie politique (par rapport à la droite et la gauche) était soumis à remarques. Comme d’habitude pas d’approfondissements, les internautes sont déjà passés à d’autres sujets : le court-termisme médiatisé envahit notre espace et les militants glosent à perdre haleine sur les votes comparés Hamon/Macron/Mélenchon. C’est sûr qu’en comparaison on a l’impression de ne pas perdre son temps à cultiver son jardin. J’ouvre ensuite le site du MONDE, pas grand chose, mais je suis obligé de passer par là pour accéder à mon blog biosphere. Aujourd’hui en ligne, mon 3486ème article pour 797 visites ce jour : nos dirigeants déconnent pendant que la planète brûle. J’ai une quinzaine d’articles d’avance, à parution programmée, ce qui m’a permis de faire autre chose ce WE. Avant d’aller dormir pour penser à des articles futurs, je fais un peu de piano. Je travaille « Jésus, que ma joie demeure » de Bach. Une fantastique mélodie à une époque où on sacralisait Dieu pour garder le moral. Aujourd’hui il faudrait sacraliser la Terre, mais les écolos préfèrent s’empoigner entre eux plutôt que se comporter comme il faudrait. Alors il nous reste à cultiver notre jardin et planter du maïs.

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