Michel Sourrouille, auteur en 2017 du livre « On ne naît pas écolo, on le devient », a décidé avant de mourir de partager sa pensée avec tous les Internautes qui fréquentent ce blog biosphere. La parution se fera chaque jour pendant les mois de juillet et août. Il dédie ce livre aux enfants de ses enfants, sans oublier tous les autres enfants… car nous partageons tous la même maison, la Terre, si belle, si fragile…
Futur, il sera à l’image de notre passé !
L’histoire est cyclique, au niveau des civilisations comme au niveau des destinées. Dans ma famille, nous étions tailleur de père en fils depuis des générations, au moins depuis la révolution française. Nous vivions dans un petit village, Beylongue. Des ciseaux, du fil et une aiguille permettaient de fabriquer des vêtements. Et puis l’urbanisation et le tour de France des artisans ont poussé mon grand-père dans une grande ville, Bordeaux, où il s’est installé tailleur sur mesure. Mon père était donc devenu tailleur comme lui, comme mon oncle, au travail à 14 ans. Mais l’industrialisation et le prêt à prêter ont donné un coup d’arrêt à cette stabilité professionnelle intergénérationnelle. J’ai été obligé de devenir un « intellectuel », l’explosion du secteur tertiaire créant l’emploi. Mon frère a passé son CAP d’apiéceur et il s’est tourné vers l’industrie du prêt à porter. Devenu cadre, la fabrication de vêtements s’est délocalisée avec son aide en Tunisie puis au Vietnam. Il y a instauré le travail à la chaîne dans une fabrique textile, une grosse pile de tissus coupée instantanément au laser… L’usine de Besançon où il avait commencé à travailler n’avait plus d’ouvriers. Les emplois disparaissent en France et nos générations présentes sont contemporaines du chômage de masse…
La révolution thermo-industrielle nous a fait aboutir à une impasse. Imaginons une France où il n’y aurait plus que 200 000 chômeurs, où la criminalité serait réduite des quatre cinquièmes, les hospitalisations pour troubles psychiatriques des deux tiers, les suicides de jeunes divisés par deux et où il y aurait une absence quasi totale de cannabis, de cocaïne et d’héroïne : ce serait un merveilleux progrès s’il ne s’était déjà accompli dans le passé. Les chiffres ci-dessus sont en effet propres à la France des années 1960. On croirait que les humains se sont réunis en société non pour assurer leur bonheur, mais pour produire à meilleur marché des voitures de métal, des tissus artificiels… et du chômage. Voici quelques éléments d’un scénario qui préfigure l’avenir et qui a déjà plus de quarante ans.
– L’avènement de l’écosociété s’est déroulé en trois grandes étapes, l’économie de survie (société primitive), l’économie de croissance (société industrielle) et l’économie d’équilibre (société postindustrielle ou écosociété).
– L’économie d’équilibre est une économie régulée, au sens cybernétique du terme. Certains secteurs peuvent passer par des phases de croissance ; d’autres sont maintenus à l’équilibre dynamique ; et d’autres encore à un taux de croissance « négative ».
– A la différence des sociétés industrielles structurées « du haut vers le bas », l’écosociété s’est construite du « bas vers le haut ». A partir de la personne et de sa sphère de responsabilités : par la mise en place de communautés d’utilisateurs.
– La consommation en énergie est maintenue au niveau où elle se trouvait au début des années 1970. Ce n’est pas l’austérité monacale, l’énergie est mieux répartie, mieux économisée, plus efficacement utilisée.
– Alors que la maîtrise de la mégamachine, sécrétée par les sociétés industrielles, exigeait une sur-éducation, l’enseignement de l’écosociété est considérablement réduit. Il est à la fois plus global, plus pratique et plus intégré à la vie.
– Les produits manufacturés sont plus robustes, plus faciles à réparer. Ce qui revitalise toutes sortes d’activités d’entretien et de réparation. L’artisanat renaît vigoureusement.
[Joël de Rosnay, Le macroscope, vers une vision globale (Seuil, 1975)]
L’histoire est cyclique, le passé nous servira d’exemple. Une croissance économique exponentielle se termine toujours par une forte récession économique, une complexité trop grande d’une civilisation prépare son effondrement. D’ici à 2050, la synergie des crises énergétiques, alimentaires, climatiques et démographiques va entraîner une dégradation rapide et brutale du mode de vie à l’occidentale et une (r)évolution du monde du travail. Les générations futures redeviendront artisan ou paysan. Moins de machines, plus d’emploi. Retour aux ciseaux, à l’aiguille et au village. Si on ne naît pas tailleur, on peut le (re)devenir. Notre passé sera notre avenir.
(à suivre… demain sur ce blog biosphere)
Déjà paru :
On ne naît pas écolo, on le devient, introduction
Abécédaire, la façon la plus simple pour s’y retrouver
Abeille, qui ne pique que si on l’embête
Abondance, s’éloigne dès qu’on lui court après
Absolu, un mot à relativiser, un mot indispensable
Acteurs absents, dont on a eu tort d’ignorer l’existence
Adolescence, moment de révolte ou de soumission ?
Alcool, dur pour un écolo de refuser de trinquer !
Amour, une construction sociale trop orientée
Animal, une facette de notre humanité trop ignorée
Austérité, mot qui fait peur et pourtant source de bonheur
Barbe, un attribut des hommes qu’on voulait faire disparaître
Cannabis, une dépénalisation qui créerait l’usage
Chasse, activité dénaturée par des chasseurs motorisés
Compétition, système inhumain au service d’une société inhumaine
Croissance, l’objectif économique le plus débile que je connaisse
Démographie, le problème central qui est systématiquement ignoré
Devoir, la contre-partie nécessaire de nos droits
Doryphore, symbole d’une agriculture post-moderne
École obligatoire et gratuite, une entreprise de déculturation
Écologiste en devenir, notre avenir commun
Électricité, les inconvénients d’un avantage
Ethnologie, la leçon primordiale des aborigènes
Eugénisme, engendrer de bonne façon est-il condamnable ?
Euthanasie, mourir de belle manière comme heureuse conclusion
Que les métiers de tailleur, de maréchal ferrant et de constructeur de chariotes soient des métiers d’avenir, je veux bien le croire. Je peux très bien imaginer qu’en 2100 les chevaux seront aussi nombreux qu’ils l’étaient en 1900.
Pour autant cela ne veut pas dire que cette «écosociété», qui fait tant rêver certains écolos, sera enfin devenue durable etc. Qu’enfin l’humanité aura pris le Bon Chemin. Que l’Homme sera enfin devenu raisonnable etc. enfin digne de s’appeler de Sapiens.
Non, je pense que cette métamorphose, si elle doit se produire, se fera sur une échelle de temps bien plus longue. Et je pense que c’est cet objectif, si on peut appeler ça comme ça, qui échappe à notre réflexion. Même là, nous avons tendance à ne pas voir plus loin que le bout de notre nez. Qu’est-ce que c’est que cent ans, mille ans… à l’échelle d’une montagne, d’une espèce ? Et à l’échelle de l’univers n’en parlons même pas.
On dit que l’histoire est cyclique… D’autres disent qu’elle est linéaire. On dit la même chose du temps. D’autres comparent ça au mouvement du balancier d’une pendule. Mais on sait bien que le mouvement perpétuel ça n’existe pas, si ce n’est dans la tête de quelques farfelus, si de temps en temps on ne remonte pas la pendule alors elle finit par s’arrêter. De tourner et de balancer. C’est quoi le temps ? Comment le voyait-on avant l’invention du cercle ? Disons de la roue et de la pendule. De toutes façons le cercle, comme la droite, et le point idem, ne sont que des vues de l’esprit. Nous savons que dans la réalité ils n’existent pas. Et c’est pareil pour des tas de choses. Bien de nos problèmes, par exemple, n’existent que dans nos têtes.
Plus terre à terre… la Terre par exemple, tourne sur elle même, autour du soleil et en même temps… à moins que ce ne soit le contraire… ( à suivre)
Quoi qu’il en soit elle ne revient jamais au même endroit.
Pour moi, si l’histoire est cyclique, alors elle suit le mouvement d’une hélice.
En plus de tourner, elle se déplace dans un certain sens.
Vers où ? Alors là … that is THE Question !!!
Retour vers le passé, comme Retour vers le futur, ça c’est au cinéma. Les voyages dans le temps c’est juste de la fiction. Nous ne reviendrons jamais en arrière, comme on dit.
C’est à dire dans le passé, en 1960 ou en l’An Mil, voire au temps des cavernes.
Notre passé ne sera donc pas notre avenir. Par contre notre futur sera, comme toujours, imprégné de notre passé. Et comment pourrait-il ne pas l’être ?
Qu’on appelle ça histoire, expérience, connaissance, intelligence, évolution ou je ne sais quoi, notre passé est gravé dans nos «gènes».
L’article parle d’un retour au passé concernant le mode de vie, et non pas un retour au passé pour y changer l’histoire afin de modifier le présent et le futur à terme. OUI sans énergie fossile, notre mode de vie redeviendra ce qu’il était avant l’ère industrielle, du moins il y sera très comparable ! Dans une certaine mesure oui on reviendra au passé concernant le mode de vie, de train de vie, de technologie disponible, etc
– « le passé nous servira d’exemple. » (Michel Sourrouille)
D’une manière ou d’une autre, on peut le dire. C’est d’ailleurs ce que j’ai dit précédemment. La roue, le cercle, et des tas de choses ne disparaîtront pas. Nous n’aurons pas besoin de les réinventer. En attendant, essayons de voir quelles leçons nous tirons du passé, de l’Histoire. Avouons déjà que bien souvent nous n’en tirons aucune. Que nous avons tendance à résonner comme des tambours, et comme les Shadocks : Plus ça rate et plus on a de chances de réussir. Quoi qu’il en soit, le futur sera ce qu’il sera. Ce qui est sûr, c’est que sans fusil les chasseurs devront se débrouiller avec un arc et/ou une lance. Pas que les chasseurs, hélas.
Seulement la Roue tourne … et en plus elle avance. Vers où ? Alors là … 🙂
Pour ceux qui souhaiteraient approfondir la question :
– Quelles leçons tirons-nous de l’Histoire ? ( grandpalais.fr )
– Peut-on Tirer Des Leçons De L’histoire ? ( ladissertation.com )
– Peut-on tirer des leçons du passé ? ( philomag.com )