Nous sommes saisis d’effroi, et ça ne va pas s’arranger
Le rapport Planète Vivante souligne la dégradation croissante et à vitesse accélérée de presque tous les écosystèmes. Pour dire les choses de manière plus directe, ils décrivent et prédisent la mort à très brève échéance de la quasi-totalité des grands animaux vertébrés avec qui nous partageons, ou devrions partager, la planète. En 42 ans, de 1970 à 2012, le nombre d’animaux vertébrés sauvages marins et terrestres a chuté de 58 %. Serions-nous bientôt seuls sur la Terre !
Nous sommes saisis d’effroi parce que 42 ans c’est un battement de cil. Nous sommes saisis d’effroi par l’ampleur de notre faute parce qu’il ne s’agit pas seulement d’une catastrophe, mais aussi d’un crime, nous tuons le monde. Nous sommes saisis d’effroi parce l’on peut encore ouvrir les médias et les voir parler d’autre chose, se déchirer pour savoir si le PIB l’an prochain progressera de 0,5 ou de 0,8 % ou si les sondages pour l’un ou l’autre des candidats au pouvoir ici ou là sont un peu meilleurs que ceux de la semaine dernière. Nous sommes saisis d’effroi par l’ampleur de notre aveuglement, les rapports « Planète Vivante » passant quasiment sous silence la cause essentielle de cet effondrement, à savoir l’explosion du nombre des hommes.
Les introductions de Johan Rockstöm et de Marco Lambertini (2) qui se terminent d’ailleurs par des propos d’un optimisme en contradiction absolue avec le contenu du rapport, n’y font pas allusion, le sujet n’est que très rarement abordé dans l’ensemble du texte qui donne une priorité presque totale à la question du mode de vie. Le graphique p 78 et 79 : « Cartographie de l’empreinte écologique de la consommation » donne par exemple l’impression que le Canada ou la Russie sont catastrophiques pour la planète à cause de leur consommation, alors qu’au contraire, grâce à leur faible densité démographique se sont presque désormais les seules surfaces d’importance (avec quelques régions d’Afrique et d’Amazonie, justement peu peuplées) où subsiste une grande faune sauvage digne de ce nom. On voit bien d’ailleurs (p. 52) que globalement les sols les moins dégradés sont les sols des pays peu densément peuplés, c’est assez logique, le béton faisant mauvais ménage avec l’humus. Cette sous-estimation du facteur population, devrait d’ailleurs logiquement conduire à une conclusion sans doute non voulue par les auteurs, qui est que nous devrions maintenir une forte proportion de la population mondiale dans la pauvreté. Ne serait-il pas plus humain de laisser les gens les plus pauvres consommer un peu plus tout en faisant un effort de réduction de la fécondité ? Page 108, le graphique général : « Les meilleurs choix pour une seule planète » ne fait aucune allusion au problème alors que tout ce qui y est listé en dépend. Ces rapports qui acceptent et popularisent le terme d’anthropocène, font eux-mêmes preuve d’un anthropocentrisme inquiétant en insistant sur les services rendus par la nature à l’Homme, comme si c’était cela qui devait seul nous motiver. Cet utilitarisme doit être dénoncé, il laisse entendre que si la nature ne nous était pas utile nous aurions le droit de la massacrer, il laisse le respect de côté. Devrions-nous raser l’Amazonie si par hasard il était démontré que les nombreuses espèces végétales et animales qui la peuplent ne devaient nous être d’aucune utilité pour développer notre pharmacopée ?
Source : http://economiedurable.over-blog.com/2016/11/planete-vivante.html
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