épuisement des ressources

3/4) psychanalyse de la croiiiiiiiiiiiissance hollandiste

La tendance à persévérer dans son idée même quand elle est fausse a été explicitée dès 1947 par le psychologue américain Kurt Lewin, le théoricien de la dynamique de groupe. C’est l’effet de gel : la décision de se comporter de telle ou telle manière étant prise, elle va en quelque sorte geler l’univers des options possibles et conduire quelqu’un à rester sur son opinion première. Une personne comme François Hollande, connu pour faire plaisir au peuple, croit que le choix de la croissance est le bon. Il s’est engagé sur cette voie vis-à-vis de lui-même et de son parti. Malgré les dettes financières et écologiques qui devraient commander l’austérité, il persévère dans l’erreur pour ne pas se renier. Ensuite il rationalise ses contradictions. Enfin il se justifie en voyant que d’autre dirigeants l’accompagnent dans son délire croissanciste. Car cet effet de gel se double du mécanisme de l’interaction spéculaire.

Hollande ne fait que répéter en boucle ce que le parti socialiste répète depuis longtemps : seule la croissance économique sauve le peuple et ses emplois. En termes savants, on dit qu’il y a interactions spéculaire, on agit comme devant un miroir. Toute société dépend des perceptions croisées entre individus : je me représente comment les autres se représentent les choses et moi-même. L’individu soumis à la volonté de croissance ne se demande pas s’il veut pratiquer la frugalité joyeuse puisque la pensée unique se veut croissanciste. La gauche veut de la croissance, la droite aussi, et l’extrême droite, et l’extrême gauche. L’hypothèse de l’interaction spéculaire nous permet d’enterrer le vieux débat épistémologique sur l’antériorité de l’individu et de la société. L’un et l’autre se forment mutuellement. Les politiciens comme François Hollande ne disent pas autrement que la vulgate des économistes et le sens commun des citoyens. L’erreur est partagée, elle est assumée.

Mais la réalité écologique est plus dure que les idées humaine, la planète a ses limites physiques et nous avons déjà franchis plusieurs garde-fous. Alors récession et décroissance, pénuries et hausse des prix vont scander notre condition humaine. Il y aura un peuple écolo quand il y aura effet boule de neige : tu fais des économies d’énergie parce que j’en fais et parce qu’il faut que nous fassions tous de même. Encore une interaction spéculaire, mais à l’opposé du croiiiiiiiiiiiissancisme.

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2/4) croiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiissance, Meadows contre Hollande

Les grandes aventures humaines ont toujours eu pour objectif de dépasser les limites. Les expéditions de Marco Polo, Vasco de Gama, Magellan, Colomb… ont toutes un point commun : aller voir ce qui se passait au-delà de la limite connue. La Lune est à 400 000 kilomètres de la Terre, séparée par le vide. Qu’à cela ne tienne, un peuple entier se mobilise pour parvenir à y faire une promenade. L’ère industrielle a fait de la technique le terrain de jeu favori pour tutoyer la limite. Aujourd’hui, que l’on soit grand sportif, grand drogué, grand patron ou grand artiste, on est « grand » quand on a dépassé une limite.

Dans le livre The limits to Growth – The 30-year update (2004), il est presque uniquement question des limites, non point pour les dépasser, mais au contraire pour s’en accommoder. L’idée de base qui a nourri ce livre est d’une simplicité biblique : pour que les hommes puissent produire, qu’il s’agisse de nourriture ou de la fusée Ariane, il leur faut des ressources naturelles. Tant que nous poursuivons un objectif de croissance économique perpétuelle », nous pouvons être aussi optimistes que nous le voulons sur le stock initial de ressources et la vitesse du progrès technique, le système finira par s’effondrer sur lui-même au cours du XXIe siècle. Par « effondrement », il faut entendre une chute combinée et rapide de la population, des ressources, de la production industrielle et alimentaire par tête. En 1972, The limits to Growth soulignait que la seule manière d’éviter cette issue était de stabiliser le PIB mondial au niveau de 1975 et d’affecter tout progrès technique à venir à « faire plus propre à consommation constante », et non à favoriser une consommation croissante. Ce n’est pas le chemin que nous avons suivi depuis.

Une question lancinante, devenue plus urgente que jamais, n’a toujours pas trouvé d’enceinte où être débattue à son juste niveau : si la croissance doit, à relativement court terme, devenir un simple souvenir, comme organiser un avenir qui soit désirable ?

Préface résumée de Jean-Marc Jancovici au livre Les limites à la croissance (dans un monde fini) de Meadows et Randers(éditions Rue de l’échiquier, 2012, première édition en anglais 2004)

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Les limites de la croissance selon Gerondeau et Meadows

Contre le rapport de 1972, Limits to Growth, Christian Gerondeau s’esclaffe : « Les auteurs ont commis une erreur classique : ils ont simplement prolongé les tendances du passé. Ils n’avaient pas tenu compte de la capacité d’adaptation des hommes et des potentialités du progrès. De nouvelles ressources énergétiques furent découvertes, la démographie mondiale s’effondra, les rendements agricoles firent des progrès insoupçonnés et le développement technique atteignit une ampleur que personne n’avait imaginée. »*

Un des auteurs du rapport de 1972, Dennis Meadows, lui répond indirectement lors d’un entretien récent avec le quotidien LE MONDE : « Tout scientifique comprend qu’il y a des limites physiques à la croissance de la population, de la consommation énergétique, du PIB, etc. Pourtant, l’idée commune est, aujourd’hui encore, qu’il n’y a pas de limites. Pour les économistes, le seul outil est la croissance, tout ressemble donc à un besoin de croissance. Or la croissance va s’arrêter en partie en raison de la dynamique interne du système et en partie en raison de facteurs externes, comme l’énergie. L’énergie a une très grande influence. La production pétrolière a passé son pic et va commencer à décroître. Or il n’y a pas de substitut rapide au pétrole pour les transports, pour l’aviation… La Chine a considérablement détérioré son environnement, en particulier ses ressources en eau, et les impacts négatifs du changement climatique sur ce pays seront énormes. Certains modèles climatiques suggèrent ainsi qu’à l’horizon 2030 il pourrait être à peu près impossible de cultiver quoi que ce soit dans les régions qui fournissent actuellement 65 % des récoltes chinoises…

Les politiciens sont élus pour peu de temps. Leur but est de paraître bons et efficaces pendant leur mandat; ils ne se préoccupent pas de ce qui arrivera ensuite. Supposons que je sois un magicien : la première chose que je ferais serait d’allonger l’horizon de temps des hommes politiques. Pour qu’ils ne se demandent pas quoi faire d’ici à la prochaine élection, mais qu’ils se demandent : « Si je fais cela, quelle en sera la conséquence dans trente ou quarante ans ? » Si vous allongez l’horizon temporel, il est plus probable que les gens commencent à se comporter de la bonne manière. »**

* Christian Gerondeau, Ecologie, la fin (édition du toucan, 2012)

** interview par LE MONDE du 26 mai 2012, La croissance mondiale va s’arrêter

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« Ecologie, la fin » : Christian Gerondeau fait l’idiot

Dans  Ecologie, la fin (2012), Christian Gerondeau redéploie son « paradoxe » déjà énoncé dans CO2 : un mythe planétaire (2009) : vouloir la réduction des émissions de gaz à effet de serre est idiot car l’homme utilisera inexorablement toutes les énergies fossiles, les besoins des pays émergents faisant loi. Il est vrai que Gerondeau est contradictoire, croyant au progrès mais fataliste puisqu’il n’y aurait rien à faire contre nos émissions de gaz à effet de serre. Le problème, c’est qu’un tel discours incite à ne rien faire contre le réchauffement climatique.

Soyons clairs, ses livres ne sont pas crédibles, ses propos sont dangereux. Une ministre française de l’Environnement s’adressait ainsi à Christian Gerondeau après une émission télévisée : « Vous n’êtes pas dans le rôle du méchant, vous êtes le méchant. » Une autre ministre, de l’autre bord politique, a demandé à Gerondeau au cours d’une émission radiophonique s’il aimait ses petits-enfants pour oser affirmer que nous ne pouvions rien à l’accroissement des émissions planétaires de CO2. Mais Gerondeau nous apparaît imperméable à toute remise en cause. Il est vrai que son âge (il est né le 23 mars 1938) et ses diplômes (Polytechnique et Pont et Chaussées) ne le préparent pas à un questionnement sur les limites de la société thermo-industrielle. Il a été même président de la Fédération française des automobiles clubs, donc intoxiqué par la voiture et la nécessité du pétrole.

Il appartient à la secte climatosceptique qui pratique la religion du progrès et de ses illusions. Il n’a aucun sens des limites de la planète, aucune conscience de l’épuisement des ressources du sol et du sous-sol. Il croit que son dernier livre marquera la fin de l’écologie alors que l’écologisme sera la grande nécessité du XXIe siècle. Comme les autres écolosceptiques, il attaque dans « Ecologie, la fin » aussi bien Rachel Carson que le Club de Rome, les malthusiens, les éoliennes et surtout le GIEC. Gerondeau est un marchand de doute au service du capitalisme libéral, pro-nucléaire bien entendu et baignant dans un positivisme sans faille contre ceux qui ont une « vision négative » de l’avenir de la planète. En fait il veut nous mener au désastre puisque son discours peut se résumer ainsi : « Dormez, braves gens, dormez, il n’y a rien à faire contre le réchauffement climatique, nous avons beaucoup de gaz de schiste et de sables bitumineux, c’est l’abondance pour un siècle ». Gerondeau n’est pas capable de se projeter plus loin dans le temps, après lui le déluge !

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le peak oil tend à devenir le peak all

Quarante ans après sa publication, le fameux rapport Meadows du Club de Rome est réédité aux éditions Rue de l’Echiquier, sous le titre « Les limites à la croissance (dans un monde fini) ». A l’occasion de cette réédition, Agir pour l’Environnement a pu poser trois questions à Dennis Meadows.

 Question n° 1 – Le « peak oil » tend à devenir un « peak all ». Selon vous, aurons-nous encore le temps de choisir la sobriété ou va-t-elle s’imposer à nous ?

 Réponse de Dennis Meadows – Bien sur, notre étude sur « les limites à la croissance » ne mentionnait pas le pic pétrolier en tant que tel. En effet, dans notre modèle, le secteur des ressources non-renouvelables ne se distinguait pas des ressources fossiles. J’ai commencé à m’intéresser au pic pétrolier seulement au cours de ces dernières années en tant qu’exemple de ce qui pourrait être une limite à la croissance. Dans cette configuration, le pic pétrolier produit les mêmes effets que le changement climatique, l’érosion des terres agricoles ou la pollution des eaux souterraines. Ce « peak all » a été popularisé par Richard Heinberg dans son livre « Peak Everything ». Il y indique que la production de nombreuses ressources commencera à décliner à la même période que le « peak oil ».

La plupart des gens qui vivent sur notre planète souffrent déjà de privation extrême.

Je ne décèle encore aucun signe me permettant de constater que les riches seraient prêts à adopter, de façon proactive, des mesures visant à éviter ces problèmes de privation.

 Question n° 2 – Qu’attendez-vous du sommet de Rio+20 ? Que faut-il entendre par la notion de « croissance verte » ?

Réponse de Dennis Meadows – D’après le site Internet de la conférence de Rio+20, « Les dirigeants mondiaux ainsi que des milliers de participants issus des gouvernements, du secteur privé, des ONGs ainsi que d’autres groupes, vont se rassembler afin de prendre des décisions en vue de réduire la pauvreté, augmenter l’équité sociale et assurer la protection environnementale sur une planète toujours plus peuplée afin de pouvoir choisir le futur que nous voulons. »

D’un côté, cette conférence est une farce, et cela pour deux raisons :

– le Sommet ne va pas s’attarder sur le problème de la croissance de la population, problème suffisamment vaste pour occuper à lui-seul les trois jours de Sommet. Si je peux me permettre cette image, cette conférence semble vouloir débattre du choix de la meilleure aspirine à administrer en cas de mal de tête causé par un cancer. La croissance de la population est dans ce cas un cancer. Faute de diagnostique adéquat, le choix du médicament ne fera pas de grande différence sur le résultat.

– le but affiché dans le cadre de la préparation de ce Sommet indique clairement que la solution à la pauvreté repose sur une croissance économique soutenable partagée par toutes les nations. Or, les principaux bénéficiaires de cette croissance sont et seront une fois encore les pays riches. Le Sommet de Rio+20 va adopter des solutions qui, faute de ruptures avec le cadre idéologique et politique dominant, va proroger les problèmes actuels. Une fois encore, le fait d’appuyer sur l’accélérateur ne vous conduira pas dans un nouvel endroit mais va vous amener plus vite à franchir le mur écologique.

 D’un autre côté, ce Sommet sera utile. Car l’important ne se situe pas nécessairement à l’intérieur de ce vaste cirque mais à l’extérieur, en dehors des réunions officielles et des déclarations. Bien sûr, les représentants des gouvernements officiels viennent principalement pour s’assurer que leurs positions, quelles qu’elles soient, sont soutenues ou du moins, pas contredites par les résultats du Sommet. Mais plusieurs milliers de personnes sont présentes et la conférence est une très bonne opportunité pour eux de rencontrer d’autres personnes de différentes cultures, de se faire de nouveaux amis et collègues, d’échanger et développer de nouvelles idées pour des actions communes dans le futur. Ainsi, la conférence de Rio+20 sera un autre petit pas dans l’évolution de la conscience globale.

Je m’attends à ce que des résolutions creuses soient adoptées durant ce Sommet. Pire, je crains que ces résolutions ne soient pas suivies d’effets. Peut être qu’un certain type d’institution sera proposé pour une coordination mondiale. Cependant, tant que les problèmes sous-jacents à la croissance économique sur une planète dont les ressources ne sont pas illimitées, ne sont pas reconnus et abordés, les Sommets de ce type ne peuvent pas avoir d’influence majeure sur le futur de notre espèce.

                Quant à l’économie verte, je crois que quand quelqu’un s’en préoccupe, il est plutôt intéressé par « l’économie » que par le « vert ». Tout comme les termes « soutenabilité » et  « développement durable », le terme d’ « économie verte » n’a pas vraiment de sens. Je suis sûr que certaines personnes qui utilisent cette expression sont très peu concernées par les problèmes globaux. Cependant, la plupart du temps, l’expression est utilisée pour justifier une action qu’ils voulaient de toute façon mettre en place pour d’autres raisons. Je ne connais pas une seule agence gouvernementale ou une seule entreprise qui mettrait en place une action très coûteuse au profit de « l’économie verte » qu’ils ne voudraient pas mettre en place pour d’autres raisons.

 Question n° 3 – La première édition de votre livre date de 1972 et il est toujours d’une brûlante actualité. Rien n’a donc changé en 40 ans ?

Réponse de Dennis Meadows – Certains secteurs technologiques se sont améliorés et nous disposons de données plus précises nous permettant de mieux comprendre certains sujets comme celui du changement climatique par exemple. Dans les pays riches, des progrès politiques ont été réalisés en faveur des biens communs. Une action locale peut maintenant engendrer des effets bénéfiques localement, notamment sur la pollution de l’eau, le bruit en zone urbaine et la lutte contre l’érosion de la terre. Des progrès modestes ont été réalisés également au niveau global. 

Dans d’autres domaines importants, nous avons cependant régressé. Aujourd’hui, il n’y a plus une seule ressource naturelle qui ne soit gérée de manière soutenable au niveau d’un continent. Quand nous avons publié notre premier rapport en 1972, la société utilisait environ 85 % de l’énergie et de ressources qui pouvaient être produites de manière soutenable sur Terre. Désormais, notre taux d’utilisation est de 150 %.

Interview réalisée par Agir pour l’Environnement et diffusée le 15 mai 2012

http://www.agirpourlenvironnement.org/blog/trois-questions-dennis-meadows-auteur-du-livre-les-limites-la-croissance-d-3441

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Pic du poisson, lié au pic du pétrole

Par analogie au peak oil, le peak fish ou pic de production des pêcheries, est dépassé. En 1995, la capture de poissons a atteint son tonnage maximum avec 95 millions de tonnes. Depuis, la pêche mondiale plafonne autour de 90 millions de tonnes*. Les ressources halieutiques sont  renouvelables, mais la surpêche a détérioré les chaînes trophiques grâce au pétrole à bas prix. Pour Reg Watson, l’humanité est au maximum de l’exploitation des ressources mondiales de pêche : « Nous pourrions avoir atteint un pic pour les poissons au même moment où nous pourrions connaître la même situation avec les réserves de pétrole … Il semble que nous consacrons de plus en plus d’énergie et de ressources pour saisir le même tonnage de poissons voire moins. »** Il est vrai que pétrole et pêche ont partie liée. On consomme en moyenne 1 litre de gazole pour pêcher un kilo de poisson. En 2006, il a fallu utiliser 1,7 milliard de watts d’énergie (environ 22,6 millions de chevaux) pour l’ensemble de l’industrie de la pêche mondiale.

Cette évolution néfaste est renforcée par la bêtise des Etats : les énormes aides publiques consenties dans l’Union européenne (4,3 milliards d’euros entre 2007 et 2013, notamment des exemptions de taxes sur le carburant) favorisent la surexploitation des ressources halieutiques : « Les subventions ont alimenté la surpêche en réduisant artificiellement les coûts d’exploitation, tout en augmentant la capacité des captures des flottes » ***. Les bateaux européens travaillent au large des côtes ouest-africaines, moyennant une redevance payée à 90 % par l’Union européenne ! Des opérateurs impliqués dans des activités de pêche illégale continuent de toucher des aides publiques malgré leurs condamnations !! On subventionne le désastre environnemental à la fois avec les aides à la pêche et les subventions aux énergies fossiles.

Le poisson compte aujourd’hui pour 12 % des calories consommées per capita dans le monde comparé à environ 20 % pour la viande. Le désastre alimentaire se profile avec la baisse des prises liées à l’inéluctable descente énergétique : le peak oil du pétrole conventionnel a eu lieu en 2006. La solution ? Des chalutiers plus petits, sortant moins souvent, laissant aux stocks de poissons le temps de se régénérer. Vivement le retour à la marine à voile… et au régime tendance végétarienne !

* Plus un poisson d’ici 30 ans ? (surpêche et désertification des océans) de Stephan Beaucher

** Source AFP : intervention de Reg Watson en février 2011 lors de la conférence annuelle l’Association américaine pour la promotion de la science (AAAS), chapitre « Des terres et des océans » (Land and Oceans)

*** LE MONDE, 13-14 mai 2012 Les aides publiques européennes encouragent la surpêche

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Peak all, pénurie de tout, énergie et minerais

Un excellent dossier de Science & Vie, « Alerte à la pénurie »* dont voici un résumé :

« Depuis deux siècles, cornucopiens et malthusiens s’affrontent. D’un côté les éternels optimistes de la corne d’abondance qui pensent que sous l’effet de l’économie de marché, de la technologie et du génie humain le spectre du manque sera toujours repoussé. Mais cuivre, phosphore, uranium, or…, des éléments toujours plus nombreux connaissent des signes annonciateurs de pénurie. Nous entrons dans une nouvelle ère, celle des malthusiens. Le pétrole, qui a connu son pic de production en 2006, n’est que la première d’une longue liste de matières premières appelées à nous manquer. L’humanité ne pourra plus pomper longtemps la croûte terrestre au rythme exponentiel de sa consommation sans se heurter aux limites de la géologie.

Premier signe annonciateur, la maigre liste des gisements nouvellement découverts. Ensuite, l’épuisement des grands gisements. Troisième indice, la flambée des prix ; l’explosion de la demande concentre les inquiétudes. Enfin, le dernier symptôme malthusien se cache dans l’énergie qu’il faut désormais déployer pour récupérer une même quantité de matière. L’industrie minière dévore déjà entre 4 et 10 % de la production d’énergie primaire mondiale. La fin du pétrole bon marché mettra hors d’atteinte nombre de minerais. Voici le nombre d’années de réserves compte tenu des stocks connus et du rythme de production : Antimoine (11 ans) ; Indium (17 ans) ; Zinc (20 ans) ; Or (20 ans) ; Hélium (23 ans) ; Cuivre (38 ans) ; Uranium (46 ans) ; Rhénium (50 ans) ; Rhodium (100 ans) ; Phosphore (340 ans).

On ne peut pas fabriquer du cuivre. Et la croyance en une substitution perpétuelle est naïve, la Terre a été explorée de long en large. De plus la dissémination des métaux dans différents produits marchands rend difficile leur récupération. Le choc promet d’être rude : il en va ni plus ni moins du maintien de notre mode de vie. Bienvenue dans l’ère de la rareté, du manque et des carences… »

* Science & Vie n° 1136, mai 2012, Cuivre, or, uranium, phosphore… Alerte à la pénurie

article complémentaire, demain le peak all :

« Les énergies renouvelables, en particulier l’éolien et le solaire, sont très dépendantes de métaux rares dont l’accès pourrait devenir de plus en plus incertain, a fortiori si ces formes d’énergie doivent être massivement développées. Exemple : le dysprosium et le néodyme, deux terres rares produites presque exclusivement par la Chine, laquelle a d’ores et déjà fait savoir que ses gisements actuels étaient en déclin. Une voiture hybride contient un kilogramme de néodyme, une éolienne presque une tonne ! »

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Croissance verte, l’oxymore de la Banque mondiale

Jusqu’à présent on disait « la croissance d’abord l’environnement plus tard », maintenant il y a la croissance verte des riches et la croissance verte des pauvres. Comme le dit un document du 10 mai 2012 de la Banque mondiale, il faut « la croissance verte pour tous » (Inclusive Green Growth : The Pathway to Sustainable Development). Examinons ce qu’en dit Stéphane Hallegatte*, qui a participé à la rédaction de ce rapport :

SH : « Les pays émergents, confrontés à des problèmes environnementaux (surexploitation des ressources, pénurie d’eau, pollution, déchets, épuisement des sols..), réalisent qu’ils doivent les prendre en compte pour assurer une croissance durable. »

Biosphere : les coûts de la dégradation de l’environnement sont estimés à près de 10 % du PIB en Chine, ce qui veut dire qu’une croissance économique de 10 %, score chinois, ne fait pas avancer la richesse réelle du pays. Mais que la Chine « réalise » l’idiotie de son « développement »  ne veut pas dire que son gouvernement va renoncer à sa politique de puissance commerciale. Stéphane Hallegatte n’est pas un économiste, c’est un doux rêveur.

– « Pour les plus pauvres, la sauvegarde des tigres n’est peut-être pas une priorité. En revanche, le traitement des déchets qui s’accumulent ou de la pollution de l’eau sont cruciaux. »

Biosphere : L’humanité ne semble exister qu’à partir du moment où elle réduit toute autre forme de vie. Stéphane Hallegatte ne peut éluder la dimension holistique justifiant la conservation de la biodiversité. La protection des espèces « inutiles » apparaît comme un impératif catégorique. Sinon les humains, sans tigres ni ours polaires, se dévoreront entre eux, au milieu des déchets et des eaux usées.

– « Plus de 60 % de la population africaine n’est pas connectée à un réseau d’électricité. En développant les réseaux électriques, vous développez une politique sociale. »

Biosphere : Il est vrai que les centrales thermiques ont besoin des 1 à 2 milliards de personnes sur la planète qui sont encore privées d’électricité mais il est aussi vrai que le besoin d’électricité n’est pas une nécessité vitale. C’est donc pour les sociétés thermo-industrielles une façon détournée d’exporter leur modèle de consommation. La banque mondiale n’a-t-elle pas déjà créé dans les pays « en développement » des éléphants blancs, des infrastructures disproportionnés et sans avenir !

– « On a calculé que la fourniture d’électricité au 1,4 milliard de personnes qui en sont privées dans le monde conduirait à une hausse des émissions de CO2 en raison du recours accru aux énergies fossiles aujourd’hui prédominantes. Mais elle serait compensée par la seule mise aux normes européennes du parc automobile américain ! »

Biosphere : Cette phrase de Stéphane Hallegatte montre clairement que toute production d’électricité a son côté néfaste. Et laisser croire que les Américains vont dépenser moins d’essence pour permettre la hausse du niveau de vie dans d’autres pays est une véritable imposture.

– « Il existe aussi un levier qui n’est pas économique : celui des comportements. Consommer plus d’énergie, avoir plusieurs voitures, une maison individuelle… c’est afficher un statut social. Jouer sur les normes sociales est parfois plus efficace pour faire basculer les pratiques. »

Biosphere : entièrement d’accord avec ce constat. Mais nous aurions aimé que Stéphane Hallegatte aille au cœur de la solution, supprimer les inégalités de revenus, que ce soit entre pays riches et pays pauvres ou à l’intérieur de chaque pays. Que chacun approche d’un idéal de frugalité, et la biosphère commencera enfin à respirer… La croissance  verte est un oxymore, réunion de deux termes non compatibles puisque toute croissance entraîne un épuisement des ressources et un gonflement des déchets.

* LE MONDE du 11 mai 2012, la croissance verte n’est pas un luxe, c’est une opportunité de développement

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François Hollande face aux présupposés du croissancisme

Le candidat à la présidence François Hollande n’avait qu’un mot à la bouche, croissance, croissance, croissance. Mais récemment, juste avant d’être élu*, son discours était plus nuancé : « Quant à l’opposition croissance/ décroissance, nous savons que la tendance pour les dix prochaines années est au mieux de retrouver 2 ou 2,5 points de croissance, c’est-à-dire la moitié de ce que nous avons connu pendant les « trente glorieuses ». D’où l’importance de donner à cette croissance un contenu en emplois, en écologie surtout. Il y a aussi des secteurs qui doivent décroître parce qu’ils sont source de gaspillage. » Hollande partisan de la décroissance sélective, c’est une bonne nouvelle. Puisse François ne pas suivre les présupposés d’Arthur Lewis (1915-1991), prix Nobel d’économie 1979 pour ses travaux en économie du développement. Arthur Lewis a cherché dans son livre The Theory of Economic Growth à invalider les objections écologiques que ses thèses croissancistes pouvaient soulever :

«  On avance parfois que l’objectif visant à élever continuellement le niveau de vie de toutes les nations du monde doit être illusoire, dès lors qu’il aurait pour conséquence d’épuiser rapidement les stocks mondiaux de minéraux et de combustibles. Cet argument repose cependant sur deux conjectures non démontrées. Premièrement, il présuppose que l’inventivité humaine sera à terme incapable de trouver de nouveaux substituts à ce qu’il aura été épuisé, alors même que cette hypothèse paraît aujourd’hui de plus en plus douteuse au regard de ce que nous découvrons sur la nature de l’atome et la transformation des éléments. Et secondement, il présuppose que les générations futures ont une droit égal aux ressources mondiales. Mais pourquoi devrions-nous rester pauvres au motif de prolonger la vie humaine sur terre ? Ne serait-il pas tout aussi justifié d’affirmer que les générations futures ont un droit égal d’utiliser pleinement les ressources qu’elles peuvent trouver et de laisser à leurs descendants dans les siècles à venir le soin de s’occuper d’eux mêmes ? »**

Pour les tenants de la durabilité (ou soutenabilité) faible comme Arthur Lewis, le capital naturel peut toujours être remplacé par des éléments fabriqués, donc par du travail et de capital technique. Les économistes considèrent donc une croissance économique sans se soucier des générations futures ni du reste de la Biosphère puisque selon leurs croyances on trouvera « sans doute » une solution technique à tous les problèmes que la technique a créé. Au contraire une durabilité forte nécessite que le patrimoine naturel reste constant puisqu’il est jugé absolument complémentaire de l’activité humaine. L’équilibre de la Biosphère doit être préservé et ses ressources utilisées uniquement si elles restent renouvelables dans le temps. Dans son premier discours de président élu, François Hollande a consacré tout un passage à la jeunesse… il aurait mieux fait de parler des générations futures.

* LE MONDE du 5 mai 2012, Du progrès au pacte social, les pistes pour sortir de la crise de civilisation

** éditeur Allen & Unwin, 1955, p. 424 – traduction Yohann Ariffin

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Chronique d’un effondrement annoncé, de Tainter à Greer

Dans un article de janvier 2011, The Onset of Catabolic Collapse (traduction française), John Michael Greer  fait le résumé de sa théorie centrale, l’effondrement catabolique, dont voici quelques extraits qui complètent l’analyse de Joseph Tainter :

Au fur et à mesure que les sociétés grandissent et commencent à dépendre d’infrastructures complexes pour satisfaire les activités quotidiennes de leur population, les besoins en maintenance des infrastructures augmentent progressivement jusqu’à ce qu’ils atteignent un niveau où ils ne peuvent plus être couverts par les ressources à portée de main. Le seul moyen fiable pour résoudre une crise qui est causée par des coûts de maintenance en hausse est de réduire ces coûts, et le moyen le plus efficace est d’envoyer une partie de ces choses qui devraient être entretenues dans la poubelle la plus proche. Ainsi, le rythme normal de l’histoire des sociétés complexes oscille entre la construction, l’anabolisme, et la dégradation, le catabolisme*.

Il est possible de fournir une date assez précise pour le début de l’effondrement catabolique aux Etats-Unis d’Amérique, c’est 1974, l’année où le cœur industriel des Etats-Unis a commencé sa brutale transformation en rust belt « la ceinture de rouille » lors du premier choc pétrolier. Les USA ont catabolisé la plupart de leurs industries lourdes, la plupart de leurs exploitations agricoles familiales et une bonne moitié de leur classe ouvrière. Notons que cette crise américaine correspond non seulement à l’action de l’OPEP, mais surtout au passage du pic pétrolier aux USA atteint en 1971-1972.

Nous sommes depuis les années 2000 dans les premières phases d’un second et probablement plus sévère round de catabolisme, ici en Amérique mais aussi dans toute l’Europe. Ce qui est arrivé à la classe ouvrière industrielle dans les années 1970 est en train d’arriver à une grande part de la classe moyenne, au fur et à mesure que les jobs disparaissent, que les services publics sont réduits et qu’une demi-douzaine d’Etats est en train de glisser sur une pente qui fera d’eux les équivalents de la « ceinture de rouille » au XXIème siècle.

Il est difficile de dire ce qui va se passer les prochaines années, tant le processus de catabolisation d’une société aussi opulente que la nôtre peut s’exprimer de manières différentes. A l’échelle du pays il faudra se battre pour sauvegarder ce qui est vraiment nécessaire, privilégier l’intérêt du plus grand nombre. A l’échelle personnelle, il faudra peut-être apprendre à planter des choux avec les mains.

* catabolisme : utilisation imagée d’une expression biochimique ; ensemble des dégradations de substances organiques qui aboutissent à la formation de déchets (par opposition à anabolisme)

Source d’inspiration : http://imago.hautetfort.com/archive/2011/01/26/le-debut-de-la-fin.html

 

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The world is on track for disaster…

Le Smithsonian Institution a rendu public une version actualisée pour 2012 du rapport Club de Rome de 1972*.  Il s’agit, en fait d’un second rapport, utilisant la même méthodologie que le premier, avec les mêmes acteurs, le Club de Rome commanditaire et le MIT exécutant. Les instruments d’analyse ont cependant été modernisés, pour tenir compte des importants progrès accomplis dans les méthodes d’observation et de prévision. Le point essentiel, que tous les gouvernements, que toutes les entreprises, tout les média auraient du noter, est que le rapport de 2012 confirme celui de 1972. Celui-ci donnait soixante ans au système économique mondial pour s’effondrer, confronté à la diminution des ressources et à la dégradation de l’environnement.

La situation est confirmée par la formule du Smithsonian Magazine, « The world is on track for disaster…», autrement dit, « tout se déroule comme prévu pour que survienne le désastre ». Ce désastre, comme le résume le physicien australien Graham Turner, qui a succédé à Dennis Meadows comme rédacteur coordonnateur, découlera du fait que, si l’humanité continue à consommer plus que la nature ne peut produire, un effondrement économique se traduisant pas une baisse massive de la population se produira aux alentours de 2030. Le désastre n’est donc plus loin de nous, mais tout proche. 2020 est d’ailleurs considéré par certains experts comme une date plus probable. L’effondrement pourrait se produire bien avant 2030. Autrement dit tous les projets envisagés pour le moyen terme de 10 ans seraient impactés, voire rendus inopérants. Les rapporteurs font cependant preuve d’optimisme, en écrivant que si des mesures radicales étaient prises pour réformer le Système, la date buttoir pourrait être repoussée.

Mais nous devons pour notre part considérer, y compris en ce qui concerne nos propres projets, collectifs ou individuels, qu’aucune de ces mesures radicales ne seront prises. Le système économico-politique, selon nous, ne peut se réformer. Une preuve peut en être fournie par le fait que pratiquement aucune publicité n’a été donnée de cette seconde version du Rapport par les gouvernements, les entreprises et les médias. Il suffit de voir comment, lors des élections françaises de cette année, la question a été évacuée des enjeux politiques. Insistons sur le fait que ce n’est pas seulement le réchauffement global qui est incriminé par les rapporteurs, mais plus généralement l’épuisement des ressources et, au-delà, d’une façon plus générale, le saccage catastrophique de l’environnement sous toutes ses formes, autrement dit « la destruction du monde ». Pour l’empêcher, il ne faudrait pas seulement réduire notre production de gaz à effets de serre, mais s’imposer une décroissance radicale, à commencer par celle qui devrait être mise en oeuvre dans les pays riches, qui sont les plus consommateurs et les plus destructeurs.

(résumé de l’article de Jean-Paul Baquiast publié par blogs.mediapart.fr)

* Note : Le Club de Rome vient de célébrer le quarantième anniversaire de son célèbre rapport sur les limites de la croissance, dit aussi Rapport Meadows, du nom de son principal rédacteur. Ce rapport avait été présenté au public le 1er mars 1972, à partir d’une commande faite par le même Club de Rome (créé en 1968) au Massachusetts Institute of Technology (MIT) en 1970. Cette célébration a donné lieu à un symposium le 1er mars 2012, dont les conclusions sont présentées sur le site du Club de Rome.

 

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Demain c’est le foutoir, même l’OCDE le dit

L’OCDE ou Club des pays riches s’inquiète : « La dégradation du capital naturel de la planète risque de mettre en péril les acquis de deux siècles d’amélioration des niveaux de vie… Au-delà de certains seuils, les transformations subies par le climat ou la biodiversité ou encore la dégradation des sols deviennent irréversibles. » Il faut, dit le rapport, « trouver de nouvelles voies », mais le commentaire du MONDE* insiste toujours sur la croissance qui, même « verte », entraîne la dégradation du capital naturel :

« Les ministres mettent en avant leurs difficultés à garantir la croissance… Le représentant de l’Organisation mondiale du commerce ou celui des pays émergents ont insisté pour que le développement durable ne soit pas un « alibi » pour des mesures protectionnistes qui brideraient la croissance… Le porte-parole du Brésil précise « Pour être efficace, la croissance verte doit contribuer à développer l’emploi »… Angel Gurria, secrétaire général de l’OCDE résume : « La croissance verte n’est pas une manière parmi d’autres d’avancer, c’est la seule croissance possible ». » Le journaliste Rémi Barroux a une façon très croissanciste de faire un article !

Pourtant le « scénario de référence pour 2050 »** de l’OCDE ouvrait beaucoup de pistes, pas très révolutionnaires, mais au moins non centrées sur la croissance économique : prix mondial du carbone, écotaxes et systèmes d’échange de permis d’émission, tarification de l’eau, réglementations et normes efficaces, innovation verte. Nous trouvons surtout  essentiel la demande de suppression des subventions préjudiciables à l’environnement alors que dans les pays de l’OCDE la production et l’utilisation de combustibles fossiles ont bénéficié ces dernières années de 45 à 75 milliards USD par an de subventions. Même les économies émergentes ont accordé en 2010 plus de 400 milliards USD de subventions à la consommation de combustibles fossiles. Bientôt nous allons manquer de pétrole et de gaz, mais les gouvernants poussent à consommer encore plus ! Qu’en disent les présidentiables français ! Rien, si ce n’est demander encore plus de croissance… qui entraîne la dégradation du capital naturel

* LE MONDE du 1-2 avril 2012, Pour l’OCDE, il est urgent de « verdir » l’économie

** http://www.oecd.org/dataoecd/54/8/49884240.pdf

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fin programmée de l’exploitation du sous-sol

Le président panaméen Ricardo Martinelli a promulgué une loi qui interdit l’exploitation minière sur les territoires indigènes (©AFP / 26 mars 2012). Selon cette loi, l’attribution de concessions pour l’exploration, l’exploitation et l’extraction minières est interdite dans la région de Ngöbe Buglé.

Si une telle mesure était prise par les pays de l’OPEP pour le pétrole, ce serait l’effondrement de la civilisation thermo-industrielle. Mais de cela les Américains n’ont qu’une très vague idée. La réalité du chiffre « 4 dollars le gallon » semble incompréhensible à l’automobiliste. Ce prix qui lui semble exorbitant découlerait  de considérations conjoncturelles : incurie du gouvernement, avidité des compagnies pétrolières, spéculation, problème iranien… jamais de l’épuisement des nappes de pétrole. De leur côté les candidats républicains ont une recette bien à eux, « Drill baby drill » (forons, forons). Il suffirait d’investir suffisamment et le pétrole va à nouveau couler d’abondance. Erreur ! Les économistes s’imaginent que l’augmentation du prix du pétrole se traduit par une proportionnelle des réserves : ont-ils seulement réalisé que les augmentations de prix seront incapables de créer le moindre gisement de pétrole dans le sous-sol ? Pourtant les géologues pétroliers ont donné l’alerte dès la fin des années 1980, quand il est apparu de façon indiscutable que les quantités de pétrole nouvellement découvertes déclinaient sans cesse et étaient devenues, en année moyenne, durablement inférieures aux quantités consommées. La prochaine bulle spéculative, après celle de l’immobilier américain, sera celle du pétrole, et les effets en seront bien plus graves ! Cette situation va entraîner une compétition croissante pour l’approvisionnement en énergie.*

De tout cela, la journaliste du MONDE, Claire Gatinois**, n’a semble-t-il aucune connaissance. Claire pense que nous prêtons une attention disproportionnée au prix de l’essence qui ne serait au fond pour les ménages qu’un prix parmi d’autres. Elle ne connaît pas l’analyse de Jean-Marc Jancovici : « Si demain nous n’avions plus de pétrole, ni gaz, ni charbon, ce n’est pas 4 % du PIB que nous perdrions (la place de l’énergie dans le PIB), mais près de 99 %. »  Claire pense que les Etats-Unis pourraient même supporter un baril à 140 dollars sans trop souffrir*. Elle n’a aucune conscience de l’avenir prévisible, un baril à 200 dollars, 300 dollars, 400 dollars… la rareté croissante du pétrole faisant exploser les prix.

* La crise pétrolière de Bernard Durand

** LE MONDE du 28 mars 2012, Pétrole : un prix pas comme les autres

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Les limites de la croissance (1972-2012), quarante ans de perdus

Hervé Kempf dans sa chronique* nous rappelle à juste titre les quarante ans du rapport du club de Rome. (The Limits to Growth, Universe Books, 1972). Complétons son analyse, les politiques ont été allergiques aux limites de la planète, en 1972 comme en 2012 !

En 1972, la croissance reste pour Georges Pompidou le critère de la réussite politique : « Si la croissance s’arrêtait, l’opinion se retournerait. Les gens sont pour ce qu’ils n’ont pas. » Son ministre des finances Giscard d’Estaing organise en juin 1972 un colloque sur les conclusions fort alarmantes du Club de Rome… en mai 1974, le candidat aux présidentielles Giscard d’Estaing ne leur accorde plus la moindre considération : il ne parle que de croissance ! Au second tour des élections présidentielles 2007, Ségolène Royal et Nicolas Sarkozy proposaient à leurs électeurs le même objectif : intensifier la croissance des productions, des consommations et des déplacements sans s’interroger sur leur contenu. Nicolas Sarkozy a instauré une commission pour « libérer la croissance » dont il disait à l’avance qu’il respecterait toutes les indications. Aujourd’hui le challenger François Hollande se polarise toujours sur l’idée de « croissance à long terme ».

Pourtant en 2004 l’équipe Meadows a repris ses travaux sur les limites de la croissance avec des bases de données réactualisées (the Limits to Growth,  the 30-Year Update). Les conclusions n’ont pas changé : « La croissance exponentielle ne peut que conduire à un sommet de pollutions, de dégradations et à un effondrement de la population. Enfin, il sera très difficile d’éviter d’ici à la fin du siècle une augmentation de la température moyenne de plus de 3 °C,  avec une montée générale des mers qui pourrait aller jusqu’à deux mètres. » En 2008, Graham Turner, chercheur au CSIRO**, a publié un article où il reprenait les trois scénarios les plus caractéristiques du rapport Meadows de 1972 (scénarios « business as usual », « monde super-technologique » et « monde stabilisé »), qu’il confrontait à des données mondiales pour la période 1970–2000 : population, natalité/mortalité, production de nourriture, production industrielle, pollution et consommation de ressources non renouvelables. Il constatait que, sur la période 1970-2000, ces données numériques étaient étonnamment proches des valeurs que le rapport Meadows présentait pour le scénario « business as usual ». Il terminait son analyse en disant que « la comparaison de données présentée ici vient corroborer la conclusion de Halte à la croissance ? selon laquelle le système mondial suit une trajectoire qui n’est pas durable, sauf s’il se met à réduire, rapidement et de manière substantielle, son comportement consomptif tout en accélérant ses progrès technologiques. »

Jacques Grinevald, qui a introduit en France la notion de décroissance, est fondamentalement réaliste : « Au lendemain du tollé qui accueillit le premier rapport au Club de Rome sur les limites de la croissance (1972), on n’avait pas encore compris l’accélération de la dynamique d’un système aussi complexe que la Biosphère, altérée par l’activité humaine, et on ne croyait pas sérieusement à l’imminence d’une double menace comme celle du changement  climatique et de la déplétion mondiale du pétrole brut ! On a oublié que ce rapport scientifique illustrait déjà le problème des courbes exponentielles de notre croissance. On nous parle beaucoup des impératifs économiques de la mondialisation, mais il est grand temps de réfléchir aux impératifs de la mondialisation écologique, parce que le monde vivant auquel nous appartenons est un phénomène à l’échelle de la Terre. Dans cette perspective planétaire, tous nos problèmes prennent un autre sens, y compris nos problèmes métaphysiques et religieux. Redonner au vivant une place centrale dans notre théorie de la Terre n’est pas encore une évidence pour tout le monde. »***

Redonner une place centrale au vivant est  le cadet des soucis de nos présidentiables 2012.

* LE MONDE du 18-19 mars 2012, Bon anniversaire ?

** CSIRO, Commonwealth Scientific and Industrial Research Organisation  : organisme gouvernemental australien pour la recherche scientifique. Le rapport de Graham Turner, Confronter « Halte à la croissance ? » à 30 ans de réalité, août 2008.

*** La Biosphère de l’Anthropocène de Jacques Grinevald  (Georg, 2007)

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Définitions de la dette écologique

La dette économique est une somme d’argent due à un créancier. En termes simples, le créancier, c’est celui qui prête le capital emprunté. Pour le  capital naturel, le créancier est donc la Terre, ou la biosphère ou la nature, peu importe le nom. D’où une dette écologique des humains envers la Terre. Le fait par exemple de pêcher une espèce de poisson plus que ce qui permet son renouvellement est bien un découvert vis-à-vis des richesses de la mer. Ce découvert, on est normalement obligé de l’acquitter, par exemple en fixant un moratoire sur la pêche, sinon nos contemporains et successeurs seront appauvris. C’est comme si on avait brûlé notre maison… plus d’héritage possible !

On peut toujours refuser de rendre l’argent à l’oligarchie financière qui vit « au détriment des peuples ». Il n’en est pas de même avec la dette écologique : les richesses non renouvelables prêtées par la biosphère ont été définitivement dilapidées par les peuples qui vivent à l’occidentale. En effet l’humanité ne peut rendre les barils de pétrole, les tonnes de charbon ou les possibilités de recyclage naturel du CO2 qui permettent le niveau de vie actuel des « honnêtes gens ». C’est pourquoi la cure d’austérité que va traverser l’espèce humaine sera bien plus terrible que lors d’un tsunami financier où on peut refinancer l’économie en faisant tourner la planche à billet (nouveaux crédits).

Chaque année, la New Economics Foundation calcule la date à laquelle la consommation de ressources par l’humanité dépasse la capacité de renouvellement de la planète. au-delà de cette date, on est en situation d’épuisement des réserves. Cette date anniversaire a été baptisée « Jour de la dette écologique » ou Jour du dépassement (« Overshoot day« ). En 1987, l’humanité était passée dans le rouge le 19 décembre. En 1995, cette date était intervenue le 21 novembre. Pendant l’année 2008, l’humanité a basculé du côté obscur le 9 octobre, et le 27 septembre en 2011. Cette date intervient chaque année de plus en plus tôt, ce qui signifie que les ressources disponibles pour une année sont consommées de plus en plus vite. Nous vivons en ce moment écologiquement « à découvert ». En vivant au-delà de nos moyens environnementaux, nous privons des millions de personnes dans le monde de la possibilité de satisfaire durablement leurs besoins.

Historiquement, le concept de dette écologique a été conçu dans les années 1980 comme contre-partie à la dette financière des pays latino-américains : nous vous devons des dollars mais vous, pays riches, vous nous devez le trou de la couche d’ozone. Plus récemment, on a estimé qu’il faudrait comptabiliser dans les négociations internationales sur le climat toutes les émissions de gaz à effet de serre déjà effectuées par les pays développés pour rétablir plus de justice dans les émissions futures. Mais, lors de la Convention-cadre des Nations unies sur le changement climatique à Rio en 1992, on a pris l’année 1990 comme « année zéro » : cela signifiait que l’on ne ferait aucune reconstitution du patrimoine des réserves mondiales de combustibles fossiles pillées auparavant. D’un trait de plume, on effaçait ainsi la dette écologique des pays riches. De toute façon, c’est impossible de rembourser cette dette en permettant aux pays pauvres d’émettre beaucoup plus de CO2 dans l’avenir. Les pays sous-développés ne peuvent reproduire la même erreur que l’Occident puisqu’il y aurait alors certitude d’un emballement climatique.

Concluons. La dette écologique, ce n’est pas des bouts de papier qu’on pourrait rembourser avec d’autres bouts de papier. La dette écologique est différente d’une dette financière, c’est concret, c’est l’affaiblissement de notre capital naturel. Cette perte est irrémédiable quand il s’agit de ressources non renouvelables comme le pétrole, le gaz, ou l’uranium. Elle sera très douloureuse à rembourser quand le système climatique sera déréglé. Il n’y a là rien de réjouissant, mais tant que les dirigeants feront croire aux peuples que « demain ça ira mieux », avec un peu plus de croissance économique, la situation ne pourra qu’empirer. S’il n’y a pas décroissance voulue et partagée, il y aura dépression économique subie par les exclus.

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Contradictions du discours croissanciste dans LE MONDE

Prenons le quotidien du 16 mars 2012, l’idée de croissance est bien présente. Le chef du SPD allemand veut un « pacte pour la croissance », mais il n’a à proposer comme politique de relance rien d’autre que le soutien à l’énergie solaire. Un débat en France  est relaté sur « les moyens de renouer avec la croissance »: il suffirait d’être compétitif, mais comme tous les pays désirent la même chose, les efforts de chacun s’annulent. Alors, soyons clair, les effets négatifs de la croissance l’emportent largement.

Dans le même numéro abondent en effet les informations qui montrent que les conséquences de la croissance économique sont néfastes : le malaise en Malaisie à propos des terres rares, des mineurs en grève tués par la police au Pérou, le problème de l’indigénisation des ressources minières au Zimbabwe, une sécheresse exceptionnelle qui frappe l’Europe (le réchauffement climatique ?), encore l’exposition des travailleurs aux fibres d’amiante, un emprunt à 100 ans de la GB (même les pays riches sont endettés), un cadre de Goldman Sachs qui dénonce un environnement toxique et destructeur (mépris des clients), le suicide d’un cadre de la poste (victime  des éternelles restructurations), un spécial MONDE des livres sur Fukushima.

Résumons. La croissance économique résulte principalement de deux choses, l’exploitation minière de la terre et l’exploitation des travailleurs. Aucun des thuriféraires de la croissance ne peut s’enorgueillir d’un tel processus. Comme les ressources du sous-sol s’épuisent et comme les travailleurs sont épuisés, il faut trouver un moyen de perpétuer quand même la croissance. Il a fallu avoir recours au mécanisme d’endettement, à la croissance à crédit. D’où les méfaits de Goldman Sachs (produits dérivés) et l’endettement de 1000 milliards de livres de la GB. Nous allons bientôt découvrir, après la dette financière, la profondeur de la dette écologique. Alors nous nous apercevrons que ceux qui ont prôné la croissance économique étaient des fous dangereux.

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4/4) Serge Latouche, l’Europe de Charlemagne va éclater

Tous les discours médiatisés ont un point commun : la croissance va revenir, on va s’en tirer, le cours ordinaire des choses reprendra à terme. C’est là l’illusion qui expose au danger. Car si rien ne change, nous savons que nous allons à la catastrophe.

Le modèle systémique World 3 (Limits to Growth, The 30-year Update – 2004), testé sur plus d’un siècle est un bon outil pour prévoir les tendances lourdes. Selon que l’on prenne des mesures palliatives plus ou moins sérieuses, l’effondrement – le collapse – se situe en 2030 et 2070 : 2030, en raison de la crise des énergies non renouvelables (pétrole, gaz, charbon, uranium, terres rares, autres minéraux) ; 2070, en raison des pollutions, des dérèglements climatiques, de la désertification  dans un monde qui compterait entre neuf et dix milliards d’habitants.

Les études des historiens nous apprennent que la vie perdure, tant bien que mal. En raison de la logique routinière, les grands projets programmés se poursuivent : autoroutes, aqueducs, aéroports, tunnels, centrales nucléaires et autres projets insoutenables comme le Grand Paris – alors que très probablement, il n’y aura bientôt plus de pétrole pour les faire fonctionner. Les avions repartent jusqu’à ce que, de blocages des dépôts de pétrole en faillites de compagnies aériennes, de plus en plus de destinations ne soient plus assurées. Et puis un beau jour plus un seul avion ne vole dans le ciel. Mais à ce moment-là, cela ne dérange plus personne. Les supermarchés ont fermé leurs portes, mais les Villes en transition s’efforcent de résoudre les problèmes d’intendance, y réussissant tant bien que mal.

Les mouvements antisystèmiques se développent, dans les villes en transition, les cités postcarbone, au sein des AMAP, par le biais d’échanges effectués avec des monnaies locales… Tout cela va dans un sens favorable au renforcement des organisations résilientes, autonomes et conviviales, constituant des oasis qui peuvent féconder le désert ou, au contraire être étouffées par lui. Outre le jardin familial et le bricolage qui résistent en toutes circonstances, deux institutions témoignent depuis le Néolithique d’une extraordinaire résilience : la petite exploitation paysanne et l’atelier artisanal. Ces deux institutions expliquent pourquoi et comment les Russes ont survécu à la décomposition de l’Union soviétique. Le message final est simple : le bonheur, la félicité se trouve dans la capacité à savoir limiter ses besoins.

in Où va le monde ? Une décennie (2012-2022) au devant des catastrophes

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3/4) Où va le monde ? Dans le mur si nous laissons faire

Tous les discours médiatisés ont un point commun : la croissance va revenir, on va s’en tirer, le cours ordinaire des choses reprendra à terme. C’est là l’illusion qui expose au danger. Car si rien ne change, nous savons que nous allons à la catastrophe.

Nous aurons dépensé 14 000 milliards de dollars en Occident pour sauver les banques et remettre le système financier en place depuis le début de la crise financière en septembre 2008. Un audit de la Réserve fédérale, en juillet 2011, révélait des prêts et garanties d’urgence de 16 000 milliards de dollars aux banques américaines et étrangères. Un chercheur indépendant arrive au total ahurissant de 29 000 milliards. On a convaincu les banques qu’on allait les sauver quoi qu’elles fassent, elles ont donc tout encouragement pour prendre à nouveau des risques inconsidérés. L’économie de casino est repartie de plus belle. Je prévois donc dans les dix ans qui viennent une autre crise financière qui sera plus dévastatrice encore.

Avec la finance, il est cependant possible de dire : « On s’est trompé et il faut se réorganiser du tout au tout. » Avec le climat, ce n’est pas possible. Je pense que la conscience qu’ont les gens de la gravité de la situation augmente, de façon probablement exponentielle. Nous voyons des initiatives absolument partout. Il faut en quelque sorte reconnaître la planète comme la « loi suprême ».

Susan George in Où va le monde ? Une décennie (2012-2022) au devant des catastrophes

 

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1/4) Yves Cochet devant la catastrophe

Tous les discours médiatisés ont un point commun : la croissance va revenir, on va s’en tirer, le cours ordinaire des choses reprendra à terme. C’est là l’illusion qui expose au danger. Car si rien ne change, nous savons que nous allons à la catastrophe.

Il y a des domaines qui dépendent d’un accord entre humains, d’autres des ressources naturelles. Or la nature ne négocie pas avec les humains. A cet égard, le projet de loi sur les retraites, adopté en octobre 2010, est non seulement injuste lorsqu’on examine ses fondements socioéconomiques, mais il est surtout irréaliste dans sa conception même, fondé sur un rapport du Conseil d’orientation des retraites publié en avril 2010. Celui-ci fondait ses calculs les plus pessimistes sur une croissance annuelle moyenne de 1,5 % jusqu’en 2050, soit une augmentation du PIB de 100 % à cet horizon. Comment peut-on sérieusement supputer cela aujourd’hui ? Aucun de ces auteurs ne partage le point de vue écologiste de la singularité absolue de la situation actuelle. Je suis du côté des objecteurs de croissance. J’estime que la récession probable – voire la dépression – sera un passage fatal vers toute société de décroissance.

En effet, à la manière de Marx, je crois que ce sont les circonstances matérielles qui déterminent les consciences et non l’inverse. Notre existence  sociale n’est pas déterminée par notre conscience, mais dépend plutôt d’une réalité qui nous dépasse : les rapports de production chez Marx, la géologie chez moi.

Ce sont ceux qui nient la proximité de la catastrophe, ceux qui croient à la continuité, ceux qui s’enivrent de l’illusion de la croissance, qui sont catastrophistes sans le savoir, par aveuglement.

Yves Cochet in Où va le monde ? Une décennie (2012-2022) au devant des catastrophes

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