Paléoclimatologue
et coprésidente du Groupe intergouvernemental d’experts sur le
climat (GIEC), Valérie Masson-Delmotte mérite d’être mieux connue.
Quelques indications sur notre blog biosphere :
1er avril 2010 :
Nous, scientifiques du climat, attachés au devoir de rigueur
scientifique, interpellons les structures référentes de la
recherche scientifique française, face aux accusations mensongères
lancées à l’encontre de notre communauté. Depuis plusieurs mois,
des scientifiques dénigrent les sciences du climat et l’organisation
de l’expertise internationale, criant à l’imposture scientifique
– comme le fait Claude Allègre dans L’Imposture climatique
ou la fausse écologie, pointant les prétendues «erreurs du GIEC»,
comme le fait Vincent
Courtillot dans Nouveau voyage au centre de la Terre.
Liste des premiers
signataires: Valérie Masson-Delmotte (LSCE)…
(Lire
la suite,
contre-attaque
des climatologues)
11 août 2011 :
Moi, Valérie Masson-Delmotte, 39 ans, chercheuse au laboratoire des
sciences du climat de l’environnement (CNRS, CEA, Université de
Versailles). Mon cursus ? Classe préparatoire
scientifique, réussite au concours d’entrée de l’Ecole centrale
de Paris en physique des fluides et transferts. Ma thèse de doctorat
portait sur la « Simulation du climat de l’Holocène moyen à
l’aide de modèles de circulation générale de l’atmosphère ;
impacts des paramétrisations ». Ma spécialité est donc la
paléoclimatologie. Le fait que l’on puisse quantifier, comprendre
et modéliser la longue évolution passée du climat grâce à
l’étude des glaces de l’Antarctique (qui permettent de remonter
le temps de 800 000 ans) est essentiel pour la confiance que l’on
peut accorder aux modèles de climat. A ce jour, j’observe que ces
modèles représentent correctement les grands traits des changements
passés, avec une tendance à sous-estimer à la fois l’amplitude
et la vitesse de ces changements. Moi non plus, je n’aime pas la
vision fataliste de l’avenir qui est parfois associée au
réchauffement. C’est ma formation d’ingénieur : la science
et la technologie seront cruciales pour relever le défi. Mais
faut-il mettre plutôt l’accent sur la réduction des gaz à effet
de serre ou plutôt sur des mesures d’adaptation ? Cette
question n’a quasiment pas été publiquement débattue. Les débats
scientifiques n’ont rien à voir avec ce que les médias
choisissent de mettre en avant. Je suis sélectionnée pour
participer au prochain rapport du Groupe d’experts
intergouvernemental sur l’évolution du climat, mais je me
reconnais aussi dans l’idée de la sobriété heureuse. (Lire
la suite, une
scientifique contre le climatoscepticisme)
24 juillet 2019 : La Suédoise de 16 ans Greta Thunberg a prononcé devant les députés le 23 juillet 2019 un discours sur l’inaction climatique aux côtés d’une climatologue. Le président des députés LR, Christian Jacob : « J’aurais préféré que l’on mette en avant les scientifiques du GIEC, l’Assemblée nationale a vocation à prendre en compte l’avis d’experts. » La climatologue et membre éminent du GIEC Valérie Masson-Delmotte répond a cette contre-vérité : « Jusqu’ici, je n’avais pas été invitée à l’Assemblée. Ce sera le cas mardi, et j’en suis très reconnaissante au mouvement des jeunes pour le climat : grâce à eux, le message des scientifiques retient davantage l’attention. Or le moindre demi-degré compte. Chaque année où l’on n’agit pas implique un changement climatique plus important à l’avenir. »
5 mars 2019 :
Les
contradicteurs de Valérie Masson-Delmotte, coprésidente du
Groupe intergouvernemental d’experts sur le climat (GIEC),
réagissent à un discours qui nous semblait pourtant inattaquable :
– Pour contenir la
hausse des températures à 2 °C, voire 1,5 °C, « il
faut absolument diminuer de moitié les émissions de dioxyde de
carbone d’ici à 2030 et atteindre “le net zéro” en 2050
».
– Ce n’est pas
gagné à en croire la climatologue qui raconte « un moment très
désagréable » passé récemment au Sénat. « Ce sont des
gens qui ont commencé leur carrière en politique quand j’étais
encore au lycée. Et ils me demandaient pourquoi il y a urgence
maintenant. Mais il y avait déjà urgence à l’époque. C’était
dans les rapports du GIEC mais ils ont choisi de l’ignorer !
»
– La scientifique
embraye sur les programmes scolaires : « L’influence de
l’homme sur le climat n’est plus enseignée au collège et il n’y
a quasiment plus rien sur le changement climatique au lycée. »
– Elle pointe
aussi l’évolution démographique et même les allocations
familiales. « Avant, il était important d’avoir plus
d’enfants, et donc plus de soldats, pour assurer la puissance de la
France. Mais aujourd’hui, on peut se poser la question de leur
utilité. »
– Elle enjoint la
jeunesse à ne pas baisser les bras : « C’est quelque chose
qui peut être vibrant. Ça peut aussi être difficile dans vos
familles parce que vous voulez faire différemment. ? Le problème
c’est qu’entre aujourd’hui et le moment où les jeunes seront
aux manettes, on sera déjà en 2030… »
30 mars 2019
: « Le temps consacré à l’enseignement en relation
avec les deux enjeux vitaux à l’échelle planétaire,
l’effondrement de la biodiversité et le changement climatique,
apparaît très insuffisant au collège comme au lycée. »
(Valérie
Masson-Delmotte)
familles parce
que vous voulez faire différemment. ? Le problème c’est qu’entre
aujourd’hui et le moment où les jeunes seront aux manettes, on
sera déjà en 2030… »
20
septembre 2019 : La paléoclimatologue Valérie
Masson-Delmotte revient sur la naissance de sa vocation, à une
époque où les enjeux climatiques étaient peu visibles. « J’ai
grandi en Lorraine avec un jardin, la liberté de faire des cabanes
et de jouer dehors. Le week-end, nous faisions des promenades dans
les forêts. J’ai passé toutes mes vacances dans les Vosges, et
l’été dans les Côtes-d’Armor. Le fait de connaître chaque
rocher à marée haute et à marée basse, de voir les modifications
du littoral, des bancs de sable, l’arrivée des algues vertes, a
joué un rôle important dans la manière dont je me suis structurée.
A la grande loterie des concours, j’ai été admise à l’école
Centrale. Je suis partie de ma Lorraine natale à la rentrée
suivante pour m’installer sur le campus de Centrale, dans la
banlieue sud de Paris. Un choc. L’une des premières choses qui m’a
frappée en région parisienne, c’est la densité urbaine, et le
fait de n’avoir jamais une vue dégagée. Partout où l’on
regarde, l’espace est occupé. La lecture d’un numéro spécial
d’une revue a marqué un tournant dans ma vie. De nombreux
chercheurs, comme Robert Kandel, Hervé Le Treut, Jean Jouzel y
partageaient leurs connaissances toutes récentes sur le bilan
d’énergie de la Terre. Ils parlaient de la perturbation
extraordinaire de la composition atmosphérique dévoilée par les
carottes de glace de Vostok, dans lesquelles sont enregistrés
400 000 ans de climat. Pour moi, ça a été une
révélation. En thèse, j’ai travaillé sur la période où le
Sahara était vert et où les moussons étaient plus intenses, il y a
environ 6 000 ans. J’ai éprouvé le sentiment de
solastalgie
[anxiété liée au réchauffement climatique].
Mais la
jeune génération n’a pas envie d’attendre la « fin du
monde ». Elle est le témoin de la dissonance de nos sociétés,
où l’on agit à l’opposé de ce qu’on dit. » (LE MONDE
campus, Valérie Masson-Delmotte : « A Centrale, avec ma
timidité, j’avais le sentiment de venir d’un autre monde »)