épuisement des ressources

Poissons et crustacés condamnés à la chaise électrique

Mardi 21 novembre, la Commission des pêches du Parlement européen a donné un feu vert à la pêche électrique. La pêche électrique est une méthode de pêche qui utilise l’électricité pour déloger les poissons du fond des mers et océans, et les faire remonter à la surface. Les filets des chaluts de fond sont équipés d’électrodes qui envoient des décharges électriques dans les sédiments, les poissons se convulsent sous l’effet de la décharge et le courant électrique les ramène vers le filet. Ce sont des décharges égales à celle d’un Taser. Ceux qui sont remontés dans les chaluts sont souvent couverts de brûlures, d’ecchymoses, ou ont subi des déformations du squelette du fait de l’électrocution. Pratique jugée destructrice des ressources marines en Asie au terme d’une dizaine d’années d’utilisation, la pêche électrique a été interdite à Hong Kong en 1999 et en Chine en 2000. Cette méthode de pêche avait été interdite en Europe en 1998, mais en 2007, les Néerlandais avaient obtenu des dérogations au prix d’un lobbying efficace. La réglementation permettait d’équiper en électrodes jusqu’à 5 % de sa flotte de chalutiers à perche (sur lesquels des filets sont fixés à une perche déployée sur le côté).

La pratique de la pêche électrique néerlandaise est très contestée par les pêcheurs français du Nord pour ses conséquences néfastes sur les écosystèmes marins : « Cette pêche tue tous les juvéniles. Les témoignages des bateaux français qui pêchent dans les mêmes eaux que les bateaux néerlandais entre 3 et 20 nautiques nous disent tous la même chose : il n’y a plus de petits poissons dans les eaux de la mer de Nord ». En envoyant des décharges électriques dans les fonds marins, on électrocute forcément des larves ou des femelles pleines, et ça ne peut pas ne pas avoir d’incidences sur la reproduction. C’est un cercle vicieux. Pour maintenir leurs marges, les industriels n’ont pas d’autre choix que de limiter les coûts de production, en réduisant la consommation de carburant, et d’inventer des méthodes de pêche de plus en plus efficaces. Le recours à cette technique électrique est symptomatique d’une ressource halieutique mal gérée au niveau mondial. Et c’est un aveu total de faillite : on est prêt à fermer les yeux sur les risques de destruction des ressources pour conserver un profit à court terme… Grâce à ses capacités de manipulation sémantique, la direction de l’Union Européenne qualifie aujourd’hui la pêche par impulsion électrique de « technique innovante » !

Outre cet épuisement des ressources, la pêche électrique a aussi des conséquences néfastes sur l’artisanat de la pêche, qu’elle concurrence déloyalement, avec des moyens techniques hors de sa portée. Pourtant favoriser l’artisanat, c’est-à-dire des méthodes de pêche plus douces, ce serait mieux pour tout le monde, pour les ressources marines, pour les pêcheurs, pour les citoyens. Selon une tribune dans LE MONDE*, « encore une fois, l’innovation technologique induirait le sacrifice de très nombreux pêcheurs afin de compenser les gains d’efficacité des navires électriques. Les petits pêcheurs sont déjà durement touchés, puisque les chaluts électriques se sont déjà déployés vers les habitats côtiers fragiles, impactant leurs zones de pêche ou de reproduction de nombreuses espèces-clés ».

pour en savoir plus, https://reporterre.net/Le-Parlement-europeen-donne-un-premier-feu-vert-a-la-nefaste-peche-electrique

Il est encore temps de signer cette pétition : https://www.bloomassociation.org/stop-peche-electrique/

* LE MONDE du 16 novembre 2017, « L’Europe doit interdire la pêche électrique »

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Gaz à tous les étages, notre mode de vie dans l’impasse

Avec « eau et gaz à tous les étages » et des WC individuels (on en comptait à l’époque un pour 70 logements), La Ruche offrait un confort inédit pour la classe ouvrière. Le comble du luxe. Construite entre 1893 et 1896 dans La-Plaine-Saint-Denis, La Ruche est le premier ensemble d’habitations à bon marché (HBM) à être encadré par la loi Siegfried de 1894 qui a initié le financement public du logement social en France, l’ancêtre des HLM. Aujourd’hui, c’est la planète entière qui désire l’eau courante avec chasse d’eau incorporée dans chaque WC. Il en est de même pour le gaz, source d’énergie fossile, source d’énergie facile. Quand le président américain Donald Trump fait des civilités à son meilleur ennemi, son homologue chinois Xi Jinping, ils se racontent des histoires de gaz. Ils ont signé jeudi 9 novembre 2017 un accord d’investissement chinois pour l’exploitation d’un gisement en Alaska. Le pétrolier français Total est lui aussi enivré par les vapeurs du gaz. Les autres majors suivent le mouvement.

Le journal LE MONDE* liste les raisons de cette frénésie. La première est géopolitique. Depuis le développement spectaculaire des gaz de schiste aux Etats-Unis, et la décision récente du pays de l’exporter, les sources d’approvisionnement sont plus diversifiées que pour le pétrole et le prix du gaz s’est effondré, le rendant plus compétitif pour des usages comme la production d’électricité. De ce fait, et c’est la deuxième raison, il devient un substitut raisonnable au charbon. Or ce dernier est deux fois plus polluant, autant en matière d’émission de CO2 que de particules et oxydes d’azote ou de soufre. Enfin il apparaît de plus en plus comme le candidat tout désigné de la transition énergétique vers les énergies renouvelables. Plus présentable que le charbon, plus politiquement correct que le nucléaire. Le gaz constitue un relais de croissance puissant face au déclin annoncé du pétrole, qui sera accentué par le basculement progressif des transports vers l’électrique… ou le gaz (pour les camions, bus et bateaux).

Comme d’habitude nos agissements individuels et collectifs veulent ignorer les contraintes biophysiques du long terme. Le gaz naturel est une ressource non renouvelable qui devrait atteindre son pic de production entre 2030 et 2040. Ce qui veut dire qu’il est impossible de conserver au cours des années 2050 le gaz à tous les étages et le confort qui va avec. Dans un contexte prévisible de pénurie énergétique et de contrainte climatique, les habitants des HLM ne pourront plus se chauffer et il n’est même pas certain qu’un réseau électrique défaillant permettra encore l’eau courante pour tous. Le seul moyen d’éviter une explosion des inégalités et de la précarité, ce serait d’instituer un système de rationnement de l’énergie, un quota carbone égal pour tous et échangeable. Entre le règne du chacun pour soi ou le choix collectif de la sobriété partagée, nous ne pouvons pas savoir à l’avance ce qui l’emportera. Mais si on en croit l’expérience de notre passé historique, il y aura la violence des riches et le fatalisme des pauvres…

* LE MONDE éco&entreprises du 10 novembre 2017, Gaz à tous les étages

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Imaginons la France en l’an 2100, rêve ou cauchemar ?

Nous sommes en 2100, imaginez la France telle qu’elle pourrait être. Vos propres prévisions sont les bienvenues dans l’espace commentaire de ce blog. Nous vous demandons seulement de ne pas dépasser 2400 caractères, comme cette première vision (radieuse) d’un journaliste du MONDE, Jérôme Porier :

« Faisons un rêve. Nous sommes en  2100 et, ce matin, le soleil est radieux. Aucune trace de pollution, l’air est aussi pur qu’en montagne. Il faut dire que la production d’énergie à partir d’énergies fossiles est interdite depuis plus de cinquante ans. Quand les centrales nucléaires ont été mises au rancart, il a fallu que chaque village s’équipe de panneaux solaires et d’éoliennes. Prendre ce virage était d’autant plus nécessaire que toutes les voitures (sans pilote) roulaient depuis longtemps à l’électricité. Le monde de la distribution a, lui aussi, beaucoup changé. Le circuit court est devenu la règle, et il ne viendrait à personne l’idée de manger des fraises en hiver. Le rapport de force entre paysans et distributeurs s’est inversé. Ces derniers ont l’obligation de privilégier les productions locales. Bien plus tard, les effets bénéfiques de cette mesure se sont fait pleinement sentir lorsque la prévalence des cas de cancer a diminué, ce qui a permis de sauver la Sécurité sociale. Biocoop, première multinationale du bio, a fini par acheter Carrefour en émettant des « green bonds » (émissions obligataires destinées à financer des projets environnementaux). Il faut dire que les grands groupes n’arrivaient plus à attirer les jeunes diplômés dans leurs open spaces, une organisation du travail datant d’un autre siècle. Depuis cinquante ans, la plupart des entreprises créées en France sont des coopératives. Les jeunes apprécient leur mode de fonctionnement : gouvernance collégiale, élection des dirigeants, écarts de salaire limités, pas d’actionnaires à rémunérer… Ce qui est chouette, c’est que plus personne ne dort dans la rue. Des entreprises d’insertion permettent aux exclus de reprendre pied sur le marché du travail. C’est la solution la moins coûteuse pour la société.

Comment cela a-t-il été possible ? Depuis 2020, tous les distributeurs de produits financiers ont dû en proposer une version solidaire. Des milliards d’euros ont irrigué les canaux de l’économie sociale et solidaire, qui est -devenue le modèle dominant. Chaque hiver, les historiens rappellent que, à une époque pas si lointaine, on laissait encore des gens mourir de froid et d’indifférence. Pour leur rendre hommage, un monument a été élevé à Saint-Denis, cœur du Grand Paris, où réside le gouvernement. Sur une plaque est gravé : En mémoire des victimes d’une époque de grande barbarie. » (LE MONDE argent &placements du 10 novembre 2017, L’économie du futur)

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Les décroissants peuvent-ils prédire l’avenir ?

  1. Anna Bednik : N’en déplaise aux prophètes, la civilisation industrielle n’est pas en train de vivre ses derniers jours. Habile comme un chat qui retombe sur ses pattes, elle se nourrit des crises pour se créer des perspectives nouvelles de mutations et d’extension. Pourquoi ce qu’on désigne par euphémisme de « crises écologiques » ferait-elle exception ? L’urgence climatique, un formidable alibi pour imposer de nouveaux impératifs techno-marchands. Les dégradations écologiques ? Autant de niches dans lesquels les gestionnaires du désastre s’engouffrent à cœur joie. Quant aux ressources naturelles, leur raréfaction annoncée sert tout d’abord à repousser les limites. Les pétroliers sont allés fouiller des gisements non conventionnels, exigeant des technologies coûteuses. Les réserves de cuivre étaient estimées de l’ordre de 280 millions de tonnes en 1970. 480 millions de tonnes ont été extraites depuis. Pourtant, miracle, en 2014 il en restait encore 700 millions ! Il reste suffisamment de trésors convoités pour que leur quête effrénée fasse de la terre un endroit invivable. L’industrialisme détruit systématiquement ce qui entrave son expansion.
  2. Francis Leboutte : Soyons tout de même certains que l’effondrement de la société thermo-industrielle aura lieu avant 2050 et, probablement, bien avant.
  3. Willem Hoogendyk : Le temps n’est pas loin où nous aussi, en France, nous planterons partout des carottes et des haricots dans les quartiers, en ville.

    Extraits du mensuel « La décroissance » de septembre 2017

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La croissance nécessite la destruction de la biosphère

La destruction de l’environnement n’est pas seulement une conséquence fortuite de la croissance économique, mais aussi et surtout l’un de ses carburants. L’érosion des services écosystémiques est, quelle que soit la valeur qui peut leur être attribuée, l’une des conditions déterminantes de l’accroissement du produit intérieur brut. En un mot, la destruction de la nature et de la biodiversité est absolument nécessaire à la croissance. C’est le point de vue que relaye le journaliste Stéphane Foucart dans sa chronique* :

Dans la revue Ecological Economics, Stefano Bartolini et Luigi Bonatti décrivaient ainsi ce phénomène en 2002 : « Nous présentons dans cet article une vision de la croissance différente du paradigme dominant. Nous modélisons la croissance comme un processus dirigé par les réactions de défense des individus face aux externalités négatives générées par le processus de production. » En termes clairs, si des études alarmantes sur la dégradation de la biodiversité ne suscitent aucune réaction adéquate, c’est parce que cette destruction dope la croissance. Plus un écosystème est précieux, plus il peut être rentable, pour maximiser la croissance, de le détruire. La disparition des abeilles n’est pas pour certains économistes une si mauvaise nouvelle, puisqu’elle conduit au développement et à la commercialisation de solutions techniques de pollinisation. Plus globalement, l’activité économique dégrade à la fois l’environnement Et le tissu social. Les services que rendent gratuitement l’environnement social (garder vos enfants, aller vous chercher du pain à la boulangerie, réparer votre système d’exploitation Windows, etc.) ou naturel (polliniser vos cultures, maintenir la fertilité des terres agricoles, etc.) s’érodent. Pour pallier la disparition de ces services gratuits, les agents économiques ont recours à des services marchands. Mais pour y avoir recours, ils doivent disposer de moyens financiers plus importants et doivent donc accroître leur activité économique. Et, ainsi, contribuer à nouveau, un peu plus, à la dégradation du tissu social et environnemental, etc. La boucle est bouclée.

Tant que les responsables politiques seront obnubilés par la quête de la croissance du PIB (produit intérieur brut), il n’y aura pas de solution aux désastres écologiques en cours. C’est ce que nous démontrons sur ce blog depuis onze ans maintenant. C’est ce que révélait déjà en 1972 un rapport scientifique intitulé « Les limites de la croissance », à se procurer toutes affaires cessantes et à poser sur la table de travail des politiques que vous connaissez. La décroissance est notre destin, nous aurions préféré qu’elle soit maîtrisée, ce sera comme d’habitude dans notre système croissanciste une crise qui s’apparentera bientôt à la grande dépression de 1929. Nous avons aussi sur ce blog analysé les mécanismes d’un effondrement économique rapide.

* LE MONDE du 17-18 octobre 2017,« La destruction de l’environnement est-elle une condition de la croissance ? »

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Les dystopies, reflet de nos angoisses contemporaines

Le point commun des dystopies ? Nous décrire un avenir noir, à l’exact opposé d’un monde utopique*. En dix ans, ils ont colonisé les rayonnages de la littérature et conquis le petit et le grand écran. Une décennie au cours de laquelle la survie en temps de catastrophes (nucléaire, bactériologique, climatique) ou de post-apocalypse s’est imposée dans la culture populaire. Les dystopies nous permettent d’imaginer le futur. La technologie s’est partout imposée, et c’est ce qui mène le monde à sa perte. Les jeunes d’aujourd’hui grandissent dans un monde très angoissant quant à leur avenir, à base de chômage, de stages à vie, de terrorisme, un monde dans lequel trouver un boulot, se trouver soi est plus difficile que pour les générations précédentes. La dystopie dépeint un monde sombre et difficile dans lequel un héros va se battre pour s’en sortir. C’est une métaphore du quotidien des jeunes adultes. Et la planète, avec ses dérèglements climatiques et la raréfaction des ressources, ne tourne plus très rond. Pour alarmistes qu’ils soient, les scénarios littéraires des Cassandre paraissent désormais crédibles. Trois personnes sur quatre courront le risque de mourir ­d’hyperthermie d’ici à la fin du XXIe siècle si les émissions de gaz à effet de serre se poursuivent au rythme actuel. Selon les calculs du « jour du dépassement« , nous avions consommé le 2 août, l’ensemble des ressources que la planète peut renouveler en une année. D’autres menaces guettent, ­relayées par les chaînes d’information en continu et les réseaux sociaux. A l’écran, elles sont rendues plus réalistes par les progrès des effets spéciaux : catastrophe ­nucléaire, inégalités croissantes dans le partage mondial des richesses, traçage des individus, montée des extrémismes, ­attentats, surpopulation, pandémies, ­risques sanitaires, transhumanisme, ­robotisation… Ces dérèglements constituent de lents processus dont les histoires d’anticipation peuvent présenter les conséquences à long terme. Dans cette perspective, les écrivains se rapprochent des scientifiques. Les temps sont passionnants, mais hyper-anxiogènes. On cherche des réponses. Et la science-fiction, au sens large, en propose. Elle met en garde. Elle explique. Elle ­dénonce. Et force est de constater que, sur pas mal de sujets, elle ne s’est pas trompée !

Imaginez un monde où, face à la ­raréfaction des ressources et à la démographie galopante, l’on instaure une politique de l’enfant unique. Dans Seven Sisters, en salles depuis le 30 août, des septuplées sont ­cachées par leur grand-père sous peine d’être cryogénisées. La série brésilienne 3 % dépeint un futur où 3 % de la population mondiale vit dans l’opulence sur « Le Large », une île de l’Atlantique coupée d’un monde plongé dans la misère. Chaque année, tous les jeunes de 20 ans passent des tests pour intégrer l’île. Seuls 3 % réussiront. Jean-Marc Ligny, pour sa trilogie Aqua, a fondé ses dystopies sur les modélisations scientifiques faites par le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC). Même chose pour Kim Stanley Robinson, chef de file aux Etats-Unis de la « Real science-fiction », dont 2312 vient d’être traduit chez Actes Sud.

Sur ce blog, nous donnons la parole a toux ceux qui font de la collapsologie. Les travaux de l’institut Momentum sont une bonne introduction à la catastrophe prévue. Mais la meilleure approche probabiliste de l’effondrement de notre civilisation thermo-industrielle reste le rapport au club de Rome de 1972 sur Les limites de la croissance

* LE MONDE du 10-11 octobre 2017, Séries, films, romans… pourquoi joue-t-on à se faire peur ?

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Sans pétrole, nous nous baladerons dehors et tout nu

Énergie : quand il y a moins d’énergie qui rentre dans un pays, ce n’est pas une bonne occasion pour remplacer des machines qui ne peuvent plus fonctionner par des hommes, car la différence moyenne de productivité entre les deux reste astronomique.

Habitation : si nous devions revenir aux techniques constructives en vigueur à l’époque romaine (pas de béton, pierres extraites à la pelle et à la pioche, transportés par barges, montées par poulies à la force des bras), les logements demanderaient 30 à 1000 fois plus de temps pour être construits, et surtout coûteraient tellement cher qu’il s’en construirait 50 à 100 fois moins dans l’année.

Habillement : des centaines – milliers ? – de machines sont intervenues pour pouvoir enfiler un simple slip ! S’il est en synthétique, alors son histoire a commencé avec un gisement de pétrole. L’affriolante petite culotte rose est un sous-produit de plate-forme pétrolière !

Pouvoir d’achat : puisque la somme à répartir pour l’ensemble des agents économiques deviendra chaque année plus petite, il sera arithmétiquement impossible de donner un peu plus à chacun. Dit de manière plus simple, la baisse du pouvoir d’achat deviendra la règle.

Limites : le défi existe, rendre l’économie durable pour de vrai, c’est-à-dire compatible avec les limites physiques de la planète. Les flux physiques vont se contracter de même que l’emploi tertiaire urbain. Depuis 2006, soit deux ans avant le crash financier, pétrole et gaz ont commencé à se faire moins disponibles dans les pays de l’OCDE.

Travail : désormais il faudra des travailleurs manuels en quantité croissante et des employés de bureau en quantité décroissante, en commençant par ceux qui ont reçu une formation dite littéraire qui sont les plus éloignés de la production physique de terrain.

Etudes : conseil à ceux dont les enfants ne savant pas quoi faire : devenez plombier ou maraîcher, ça sera moins confortable que d’être assis dans un bureau, mais il se peut que cela soit de plus en plus facilement valorisable que quatre ans de psycho !

Mère au foyer : la crèche n’est rien d’autre que l’échange d’une mère permanente contre une mère temporaire (environ un million de personnes travaillent dans la garde d’enfants en France).

Retraite : il y aura encore quelques menus problèmes très concrets à régler, comme par exemple la baisse programmée des retraites tant que l’espérance de vie augmentera (mais dans un monde sans croissance il n’est pas dit qu’elle augmente encore très longtemps).

« Dormez tranquilles jusqu’en 2100 » de Jean-Marc Jancovici (réédition en livre de poche, mars 2017)

à lire, notre résumé de l’édition 2015 sur notre site

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Création monétaire à lier aux possibilités matérielles

Une grande partie de l’histoire monétaire contemporaine, jusqu’à l’abandon en 1971 de l’arrimage du dollar américain aux réserves d’or, a consisté à essayer de libérer la création monétaire de tout ancrage matériel ou ressourciel pour faire d’elle un pur jeu de paris décentralisés sur une variable collective : la croissance de la valeur de la production nationale, voire mondiale. L’émission monétaire moderne par le crédit bancaire fonctionne tout autrement que le simple prêt d’une quantité d’or. Elle constitue une forme d’avance sur le vide adossée à la seule attente de valeur monétaire future des projets financés. C’est précisément grâce à ce mécanisme ingénieux mais potentiellement dangereux de création monétaire par endettement bancaire que les impacts humains sur la biosphère ont pu devenir si massivement repérables même au niveau géologique (anthropocène).

Les banques peuvent créer quasiment autant de crédits, donc de nouveaux dépôts, qu’elles le jugent nécessaires, et les banques centrales leur fournissent ensuite les réserves requises pour qu’elles restent solvables. Le débiteur, pense la banque, saura se débrouiller pour ramener durant la vie du crédit les écritures en compte requises pour que sa dette s’éteigne. Cette création ex nihilo est un pari sur la croissance économique future. Chaque crédit bancaire va se transformer en transactions qui s’accompagnent de flux de matière et d’énergie. L’entièreté de ce système monétaire est consacré à un accroissement de l’empreinte écologique globale. A partir du moment où, à travers la logique du crédit, les dettes deviennent des actifs profitables, il semble inéluctable que la finitude de la biosphère soit secondaire, voire l’objet d’un déni pur et simple. L’overshoot ou dépassement des capacités de la biosphère est étroitement lié aux effets de la création monétaire en termes d’extraction accélérée de ressources non renouvelable et d’insuffisant renouvellement des ressources renouvelables.

Au lieu de supposer un budget écologique ouvert et indéterminé, pourrions-nous échanger à budget écologique fermé ? Cette question est proprement inédite, tant elle rompt avec les réflexes d’une ancienne modernité anti-écologique. Il faudrait d’abord construire un indicateur synthétique capable de prendre le relais du PIB nominal. Ensuite on déduirait de la biocapacité globale du territoire des budgets écologiques nationaux, régionaux, locaux… puis finalement par entreprise et ménage. En fait ce serait instituer un droit de tirage individualisé sur l’empreinte écologique globale maximale autorisées. (ndlr : cela équivaut à un rationnement)

Christian Arnsperger, Repenser la création monétaire pour demeurer dans les limites de la biosphère

in Gouverner la décroissance, collectif, 14 euros pour 234 pages (éditions SciencePo 2017)

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Un événement qui aurait du gâcher vos vacances en août

Depuis le mercredi 2 août, l’humanité a consommé toutes les ressources que la Terre peut produire en une année. En moyenne mondiale, nous utilisons 1,7 planètes. Ce qui veut dire que nous coupons des arbres à un rythme supérieur à celui de leur croissance, nous prélevons plus de poissons dans les mers qu’il en naît chaque année, et nous rejetons davantage de carbone dans l’atmosphère que les forêts et les océans peuvent en absorber*. Avec le train de vie moyen des Français, vous avez besoin de trois planètes. Vos vacances y sont pour quelque chose, surtout si vous vous êtes déplacé au loin et par voie des airs. Jusqu’à la fin 2017, pour continuer à boire, à manger, à vous chauffer ou à vous déplacer, vous allez grandement surexploiter les écosystèmes et compromettre leur capacité de régénération. Qui s’en soucie ? Nicolas Hulot, notre ministre de l’écologie.

« Le 2 août, c’est comme si notre planète disparaissait sous nos pieds. Lover­shoot day symbolise ce moment à partir duquel nous allons vivre à crédit… Nous ne nous éloignons pas encore du pire… Nous sommes sur le fil du rasoir… MAIS nous avons de profondes raisons d’espérer. Jamais les prix des énergies renouvelables n’ont été aussi bas…, l’offre de véhicules électriques va tripler d’ici à 2020…, l’agriculture biologique décolle…, de nouveaux choix de société sont en train de naître sous nos yeux… Notre pays a toutes les chances de réussir la transition écologique…** » Optimisme de façade, blabla politicien ! Pourquoi les citoyens se sentiraient-ils concernés par le jour du dépassement puisque tous les indicateurs vont virer au vert grâce à «  l’union des forces progressistes » !!! Autrefois on se contentait de prier, aujourd’hui on fait confiance à la prise de conscience spontanée. Prenons un seul exemple de la duplicité du gouvernement actuel, l’agriculture biologique.

Les producteur(rice)s bio de la Fédération Nationale de l’Agriculture Biologique (FNAB) dénoncent un renoncement politique historique. Par décision du ministre de l’Agriculture Stéphane TRAVERT, aucun budget pour les aides à l’agriculture biologique ne sera engagé dans les 3 prochaines années. Aucune nouvelle conversion biologique ne sera donc possible.***Cela témoigne d’un manque criant de courage politique face à l’agro-industrie. Alors que le ministre évoque « un dialogue rénové et responsable [pour construire] les solutions permettant de construire l’évolution des modèles agricoles », il a prêté l’oreille la plus attentive à ceux qui n’ont cessé de conduire l’agriculture française dans l’impasse actuelle, la FNSEA et l’AGPB en tête. Tout porte désormais à croire que les États Généraux de l’Alimentation (EGA) ne seront qu’une mascarade. La « révolution » agricole promise par le candidat MACRON dans son livre-programme n’aura pas lieu. Nicolas Hulot théorise, les choses sérieuses se font dans son dos.

* LE MONDE du 2 août 2017, A compter du 2 août, l’humanité vit à crédit
** LE MONDE du 2 août 2017, Nicolas Hulot : « Pour la planète, préférer le sursaut au sursis »

*** Communiqué de presse de la FNAB, jeudi noir pour l’agriculture biologique (28.07.2017)

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E. Macron peut-il changer les réalités biophysiques ?

Le seul discours qui tienne est qu’on ne peut mathématiquement pas, en matière de ressources naturelles “dépenser plus qu’on ne produit”. Tout le reste est de la pensée magique qui pense que le “progrès technique” peut tout et règle tout ! Or, suites aux délires de la finance où l’on peut créer de la monnaie ex-nihilo et sans aucune contrepartie, trop de monde a pris des habitudes et cru qu’on pouvait le faire pour tout : or c’est TOTALEMENT IMPOSSIBLE dès lors que l’on revient dans le monde PHYSIQUE.

 Tout ce qu’on nous “vend” désormais dans les “pays avancés” c’est un maximum d’économie virtuelle. Il y a  juste là derrière une vaste escroquerie: car cette “économie virtuelle” n’existe que grâce à un énorme support matériel : outre les objets eux-mêmes, il y a les gigantesques fermes de serveurs qui hébergent les données et les programmes, les réseaux très matériels pour effectuer les transferts à un débit de plus en plus haut, le personnel pour entretenir et faire fonctionner tout cela (sans compter par exemple sur les réseaux sociaux les hordes de modérateurs pour éviter que cela ne devienne totalement n’importe quoi). Allez aussi expliquer au paysan français qu’il va devoir vivre avec 500€ par mois pour nourrir des bobos qui se paient 5000€ par mois en vendant des conneries genre applis pour trouver du n’importe quoi sans utilité sur le net, créer des vidéos débiles,etc… Dans la gamme des délires, le robot agricole à 100€ (prix d’achat) pour remplacer les humains dans les exploitations agricoles ! Avec quel prix de matières première s? exploitées par des enfants esclaves ? avec quelle énergie ? combien d’énergie gaspillée pour produire combien d’énergie mangeable ?

Qui est d’accord dans les pays riches  pour dégrader sévèrement son niveau de vie pour partager les biens matériels divers avec plus de personnes ? Et dans les pays pauvres qui soit-disant “polluent moins que les pays riches”, c’est tout simplement faux. Il ne faut pas confondre le peu de pollution des plus pauvres des bidonvilles qui sont contraints à tout recycler pour survivre et qu’ils n’ont juste pas assez de ressources pour gaspiller, et le gaspillage effréné de ceux qui en émergent et des classes dirigeantes qui adoptent instantanément les mêmes comportements gaspilleurs que les nôtres (j’y ai vécu 18 ans, j’ai pu le constater sur le terrain!), avec en plus l’excuse pour la plupart que leurs pays sont vastes et disposent de RICHESSES NATURELLES  qu’ils estiment devoir mettre en production de manière massive, là encore pour faire perdurer une économie de rente…

Ce qui compte c’est l’augmentation du stock de population et ce nombre est fonction de nombreux critères plus importants que le nombre final d’enfants par femme. Ce qui compte aussi c’est le mode de vie et pour l’instant la plupart des pays “en développement” qui s’enrichissent construisent des autoroutes ou achètent des 4×4 pour utiliser leurs pistes mêmes quand ils ont des fleuves ou plutôt que de se déplacer en train. Rien de très écolo donc ! Le Brésil par exemple est sans doute l’un des pays les plus anti-écolos du monde. Comment lutter contre les religions croissantistes (christianisme et islam avant tout) ? Contre le statut social ? Combien de décennies encore à attendre que “changent les mentalités “ ? Combien y-a-t-il de filles vraiment “éduquées” et capables d’imposer leurs volontés aux mecs ? Il faut cesser les discours lénifiants : la situation n’est pas grave, elle est catastrophique et ce ne sont pas des mesurettes et encore moins la politique macronésienne qui va nous sortir de l’ornière. Dans ce domaine la présidentielle fut une catastrophe.

Jean-Marc TAGLIAFERRI

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Les présidentiables ne vous ont pas expliqué l’essentiel

Désolé de vous le dire en ce jour du premier tour de la présidentielle 2017, aucun(e) candidat(e) ne vous a dit l’essentiel, la décroissance économique est devant nous. Encore aurait-il fallu pour que ce ne soit pas un effondrement que les présidentiables nous expliquent la situation réelle et les moyens d’y faire face.

Dominique Bourg : Un effondrement de civilisation résultant de notre immobilisme n’est pas impensable. Je le répète depuis l’an 2000, la consommation de ressources croit plus vite que le PIB ; les effets du changement climatique commencent à se faire sentir ; entre 1970 et 2010, environ la moité de la faune sauvage a disparu ; même le sable abrasif commence à manquer et il faut aller chercher les métaux parfois jusqu’à 800 mètres à un coût énergétique croissant. Ces dégradation ne donnent lieu qu’à des effets différés, ce qui nous conduit à détériorer davantage sans recevoir de signal fort à temps. Par « effondrement », on entend une chute des effectifs démographiques et de la complexité des sociétés sur une surface étendu et sur un temps long. Nous connaîtrons de plus en plus des États en faillites, des classes moyennes qui s’appauvrissent, un système de démocratie représentative qui ne fonctionne pas, un désordre géopolitique mondial, l’expression la plus stupide et violente d’une religion qui trouve des adeptes un peu partout, des dégradations systémiques de la Terre. Nous vivons désormais dans un monde qui suit une pente dangereuse.*

Corinne Lepage : Je n’ai rien à ajouter à ce constat si ce n’est la dimension morale de perte de vision de l’avenir, qui est un réalité du monde occidental. L’effondrement est déjà dans cette perte d’horizon. Aux limites des ressources de la planète, nos contemporains n’ont trouvé à y opposer qu’un sentiment de fatalité.*

Maurizio Pallante : Pour réduire la crise écologique, il ne suffit pas d’abandonner la foi dans la croissance, il faut promouvoir concrètement la décroissance. Les ressources que la biosphère régénère au cours d’une année sont consommées par l’humanité avant la moité du mois d’août, on dilapide le capital naturel. Si l’économie s’arrête de croître, ces ressources seraient toujours autant consommées, à un niveau déjà insupportable. Le dioxyde de carbone s’accumule dans l’atmosphère, faisant monter la température de la Terre. Pour réduire les concentrations, il faut que les émissions de gaz à effet de serre diminuent. En revanche il y a des biens qui ne font pas croître le PIB parce qu’ils ne sont pas achetés : les biens autoproduits ou échangés sous formes de dons réciproques dans le cadre des rapports communautaires. Et il y a des biens qu’on en peut pas acheter mais qui donnent du sens à la vie, les biens relationnels. Si la production et la consommation des marchandises qui n’ont aucune utilité réelle se réduit parce que l’auto-production augmente, si le temps de travail se réduit parce qu’on consacre plus de temps aux liens humains, le PIB diminue mais on ne se prive pas de ce qui est utile et plaisant. La décroissance du PIB est donc la route à emprunter au plus vite, mais non le but à atteindre.

* Le choix du pire de Corinne Lepage et Dominique Bourg (puf 2017)

** mensuel La Décroissance n° 138, avril 2017, p.14 et 15

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#AvantLeVote, les réponses aux défis environnementaux !

Perturbateurs endocriniens, organismes génétiquement modifiés ou encore diesel…, les réponses* des présidentiables ne sont pas à la hauteur de l’urgence écologique. Depuis 1972, le rapport sur les limites de la croissance avertissait que sans changement radical de cap, nous allions à la catastrophe. Nous avons au contraire pris tous les moyens pour maintenir la croissance à un niveau insupportable pour les possibilités de la planète. Si le monde entier avait le niveau de consommation du Français moyen, nous aurions besoin de 3 ou 4 planètes, ce qui veut dire que dans un contexte d’égalisation des conditions, il faudrait diviser notre niveau de vie en France par 3 ou 4. Autant dire que l’écologisme des présidentiables 2017 n’effleure même pas le sujet. La pire expression vient de Nathalie Arthaud, pour un « refus de la décroissance » ! Comme si la pénurie des matières premières, la surexploitation des eaux, des sols et de l’air n’allait pas nous obliger à maîtriser la décroissance du PIB ou de nous battre sauvagement entre nous. Rester bloquer à l’époque de la lutte de classes n’aide pas à la compréhension du monde contemporain. Marine Le Pen fait toujours du populisme mortifère, promettant la baisse de 5 % des tarifs du gaz et de l’électricité ou en refusant la hausse de la fiscalisation du diesel alors que la transition énergétique nécessiterait de programmer une hausse constante du prix de l’énergie pour apprendre aux personnes à l’économiser. Elle préfère un moratoire sur les éoliennes, qu’elle qualifie « d’immondes ». François Fillon est si peu convaincu des réalités biophysiques de la planète qu’il veut supprimer le principe de précaution pourtant constitutionnalisé sous Jacques Chirac. Jacques Cheminade croit aux miracles technologiques en croyant à un avenir de la fusion thermo-nucléaire contrôlée alors qu’on sait que c’est l’abondance de l’énergie fossile qui nous a mené au désastre actuel : nous ne savons pas faire bon usage des moyens technologiques quand ils sont disproportionnés par rapport à notre faible penchant pour des relations conviviales. Nicolas Dupont-Aignan est sur la même ligne, il veut abandonner l’objectif de réduction du nucléaire. Comme quoi la droite et le trotskisme sectaire se rejoignent dans leur ignorance de l’impératif écologique même si leurs programmes font diverses ouvertures vers la protection de l’environnement.

Quant à la gauche, elle se situe un peu mieux dans la bonne direction. La « règle verte » de Jean-Luc Mélenchon est la meilleure, il s’agit de ne pas prendre à la nature davantage que ce qu’elle peut donner. Mais comme par ailleurs il veut favoriser le pouvoir d’achat, il ne se rend même pas compte de ses contradictions internes : le consumérisme va de pair avec la consumation de la planète. Benoît Hamon présente quelques mesures ponctuelles pour l’environnement, mais il veut aussi faire plaisir aux revendications catégorielles comme le fait traditionnellement un bon socialiste. Pour le candidat de l’écologie politique, nous n’avons pas trouvé trace de son programme si ce n’est dilué dans celui de Benoît Hamon. Philippe Poutou est le seul à s’attaquer à notre niveau de consommation en voulant interdire la publicité énergivore et aussi réduire la place de la voiture dans les déplacements. De son côté Emmanuel Macron est loin de prôner le dé-voiturage, il veut offrir une prime de 1000 euros pour acheter un véhicule moins polluant. Comme toujours il ménage la chèvre et le chou en proposant d’interdire les perturbateurs endocriniens… à condition qu’il existe des « solutions moins toxiques ». Nous n’avons trouvé chez aucun présidentiable trace d’une vision structurelle de l’avenir de l’humanité. Le sort des générations futures est laissé aux générations futures alors que nous profitons aujourd’hui en France de l’immense accumulation de capital produite par les générations précédentes.

En conclusion, chacun fera ce qu’il veut dans le secret de l’isoloir, mais de toute façon les présidentiables n’auront rien fait de sérieux en 2017 pour enrayer la course au désastre socio-écologique. Il aurait été nécessaire d’affirmer haut et fort comme Nicolas Hulot que l’écologie ne devrait plus être un vulgaire enjeu partisan, elle est un enjeu politique au sens le plus noble. Ce n’est un sujet ni de gauche, ni de droite, ni du centre, c’est un sujet supérieur. C’est simplement l’avenir et la sauvegarde de la famille humaine et de son écosystème, la planète. Puisque nous avons fait la guerre à la planète, Il s’agit d’instaurer une logique d’état d’urgence, équivalente à celle des Américains après Pearl Harbor qui ont même cessé de construire des véhicules et autres productions inutiles. Il s’agit de mener une politique de réduction massive de notre empreinte écologique. Le parti « Europe Ecologie Les Verts » serait-il prêt à mener ce combat dans les prochaines années ? Car qui d’autre ?

* LE MONDE du 18 avril 2017, #AvantLeVote, les réponses aux défis environnementaux

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Nos dirigeants déconnent pendant que la planète brûle

Nos dirigeants déconnent

Climat : Donald Trump engage une contre-révolution énergétique (LE MONDE du 30 mars 2017) : Donald Trump a donné une impulsion décisive à sa contre-révolution énergétique . Il a signé un décret remettant en cause l’essentiel de la réglementation mise en place par son prédécesseur pour lutter contre le réchauffement climatique. Il a annoncé « la fin de la guerre contre le charbon ». Les mesures prises s’ajoutent au renoncement à une meilleure efficacité énergétique pour l’industrie automobile et à la suppression de contraintes au niveau fédéral pour l’exploitation d’énergies fossiles.

Le Medef avance quarante propositions pour « simplifier » le droit de l’environnement (LE MONDE du 1er avril 2017) : Le Livre blanc de l’organisation patronale entend revenir sur une décennie de réglementations environnementales, du Grenelle de l’environnement de 2007 aux conférences environnementales convoquées depuis 2012. « Il existe une réelle complexité des règles qui n’est pas de nature à rassurer les maîtres d’ouvrage, les procédures sont trop longues, trop risquées », plaide le président du comité Droit de l’environnement du Medef. .

Le patron de l’Agence de l’environnement américaine doute de l’impact du CO2 sur le réchauffement climatique (Le Monde.fr avec AFP du 09.03.2017) : Le nouveau patron de l’Agence de l’environnement américaine (EPA), le climatosceptique Scott Pruitt, a pris le contre-pied du consensus scientifique mondial en estimant que les émissions de dioxyde de carbone (CO2) n’étaient pas un facteur déterminant dans le changement climatique. « Je pense que mesurer avec précision [l’impact de] l’activité humaine sur le climat est quelque chose de très difficile et il existe un immense désaccord sur le degré de cet impact. Donc non, je ne serais pas d’accord pour dire qu’il s’agit d’un contributeur important au réchauffement climatique », a-t-il déclaré dans une interview sur la chaîne CNBC. Proche de l’industrie des énergies fossiles, Scott Pruitt a longtemps été un détracteur farouche de cette agence dont il a désormais la charge. les coupes budgétaires envisagées par M. Pruitt entraîneraient une réduction de 20 % du personnel de l’EPA et élimineraient des dizaines de programmes de protection de l’environnement.

pendant que la planète brûle

Au Somaliland, une sécheresse mortelle (LE MONDE du 31 mars 2017)

Notre consommation alimentaire mondiale épuise les eaux souterraines (LE MONDE du 30 mars 2017)

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Les présidentiables à la recherche de la croissance

« La croissance, j’irai la chercher avec les dents », s’exclamait Nicolas Sarkozy lors de sa campagne présidentielle en 2007. Son successeur François Hollande a psalmodié pendant tout son mandat « croissance, croissance » en espérant inverser la courbe du chômage. Nous sommes en 2017 et les présidentiables courent encore après la croissance. Pour la frontiste Marine Le Pen, « la priorité pour 2017-2022 sera de retrouver la croissance ». Elle prévoit 2,5 % de croissance à la fin du quinquennat mais reste elliptique sur les moyens d’y parvenir. François Fillon veut essayer ce qui marche pour éviter la « croissance molle ». Pour ce candidat de la droite catholique, « libérer la croissance » est un impératif afin d’atteindre le plein-emploi. Emmanuel Macron veut « accélérer l’émergence d’un modèle de croissance réconciliant transition écologique, industrie du futur et agriculture de demain. » Vaste programme, bien flou, bâti sur un plan d’investissement de 50 milliards d’euros. Jean-Luc Mélenchon attribue la situation de croissance « atone » à la politique d’austérité menée depuis 2007. Son plan de relance comprend 100 milliards d’investissement financés par l’emprunt. Quand on aime, on ne compte pas. Seul Benoît Hamon se démarque légèrement : « Je ne crois plus au mythe de la croissance ». Son diagnostic s’appuie sur le constat d’une raréfaction du travail allant de pair avec la robotisation de l’industrie. Mais il veut relancer l’économie par un « revenu universel » et un plan d’investissement de 1000 milliards. Il n’y a pas de limites dans les promesses verbales.

Aucun des présidentiables n’a de conscience des dégâts que fait l’augmentation du PIB ni des limites biophysiques qui vont entraver l’ensemble des secteurs d’activité : raréfaction des ressources, gestion impossible des déchets. N’oublions pas les conséquences des chocs pétrolier de 1973 et 1979 sur le PIB, n’oublions pas que la crise des surprimes de 2008 a été causée par la hausse constante du baril qui a douché les promesses de l’endettement immobilier à risque. Le contre-choc pétrolier actuel est une véritable menace d’un nouveau choc dans les prochaines années. Il peut surgir à tout moment, les marchés et le contexte géopolitique étant connus pour leur instabilité. Et il faut ajouter aux périls le réchauffement climatique et ses conséquences agro-industrielles, la surpopulation humaine, un monde de bidonvilles et d’Etats en faillite, etc. La France ne peut pas être une sphère autonome quand les migrants pour causes socio-politiques s’entassent à ses portes et que la quasi-totalité de sa consommation d’énergie fossile est importée.

LE MONDE* titre dans ses pages éco « Candidats cherchent croissance désespérément » mais veut ignorer que la future croissance économique est obligatoirement sous contrainte écologique. L’informatisation de nos activités a beaucoup moins d’effets réels que la croissance qui brûle du charbon, du pétrole ou du gaz. Le journal s’interroge cependant sur une « stagnation séculaire », mais avec des raisonnements bateaux : le vieillissement la population, la moindre productivité, les emplois de services à bas prix. Alors il s’agirait de viser directement l’emploi plutôt que de chercher à réanimer la croissance. « Post-croissance ne veut pas dire décroissance », s’exclame Dominique Méda, conseillère de Benoît Hamon. L’effondrement de la civilisation thermo-industrielle n’est pas au programme, l’écologie ne doit pas être punitive mais adapté au système consumériste tel qu’il existe actuellement. Il faut donc attendre le prochain choc pétrolier pour que les analyses des spécialistes du présent deviennent enfin plus réalistes…

* LE MONDE du 26-27 mars 2017

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Écologie, de la prise de conscience au passage à l’acte

Les Français se disent de plus en plus sensibles à l’impératif écologique mais ne modifient pas leur comportement pour autant. Ou pas assez.  Les individus sont au courant de l’impact qu’ils peuvent avoir sur l’environnement, mais l’essence est si bon marché et les grandes surfaces si bien approvisionnées ! Ils sont des réalistes du court terme, convaincu du réchauffement climatique par la mise en scène de la fonte des glaces et la disparition de l’ours polaire, mais insensible à la montée trop progressive des eaux. Il faudrait donc user de la carotte et du bâton, mais les politiques ne veulent pas d’une écologie punitive. L’écotaxe a été abandonnée par Ségolène Royal, la taxe carbone n’avance qu’à pas de loup. On préfère tuer les loups, c’est plus facile de s’en prendre aux autres. Le sens de la culpabilité, ça fait ringard, religieux, sans intérêt. Si certaines personnes sont épouvantées en pensant au triste futur de leurs enfants, d’autres ne considèrent que leurs fins de mois difficiles ; impossible de faire des campagnes de sensibilisation à destination d’une population entière. Et dans un monde de publicité qui cultive les désirs immédiats et les envies tout azimut, le sens des responsabilités et des choix raisonnés est au rayon des invendus.

Alors ce sont les marchands qui prennent en main le recyclage. C’est EcoDDS, organisme chargé du traitement des déchets ménagers toxique, qui fait un Livre blanc « Comment faire changer les comportements des Français face à la nécessité des gestes citoyens » et meuble plusieurs pages du MONDE*. Comme on n’accepte plus de leçon de morale, on envisage même de donner une petite récompense, une place de cinéma par exemple, à ceux qui trient le mieux. On tombe si bas dans la considération de l‘engagement civique des citoyens que c’est à pleurer. Les habitudes de la société de consommation ont produits des automatismes, le cerveau humain préfère la routine aux changements de pratique, c’est plus sécurisant.

Le social ne peut qu’être écologique, mais on inverse aujourd’hui la causalité ; c’est le social (et l’emploi) qui prime sur les réalités biophysiques. Pourtant notre niveau de vie actuel est directement gagé sur les richesses naturelles. Sans pétrole, nos dépenses de consommation et nos rejets de déchets seraient totalement différentes de ce qui se passe actuellement. Mais envisager une société post-carbone à l’heure d’un contre-choc pétrolier (le prix du baril est encore très bas actuellement) paraît impossible. Nous rappelons le livre de J.A.Grégoire, « Vivre sans pétrole », écrit en 1979 : « L’observateur ne peut manquer d’être angoissé par le contraste entre l’insouciance de l’homme et la gravité des épreuves qui le guette. Comme le gouvernement crie au feu d’une voix rassurante et qu’on n’aperçoit pas d’incendie, personne n’y croit. Jusqu’au jour où la baraque flambera. Comment l’automobiliste pourrait-il admettre la pénurie lorsqu’il voit l’essence couler à flot dans les pompes et lorsqu’il s’agglutine à chaque congé dans des encombrements imbéciles ? Cette situation me paraît beaucoup plus inquiétante encore que celle des Français en 1938. Ceux qui acceptaient de regarder les choses en face apercevaient au-delà des frontières la lueur des torches illuminant les manifestations wagnériennes, ils entendaient les bruits de bottes rythmant les hurlements hystériques du Führer. Tous les autres refusaient de voir et d’entendre. On se souvient de notre réveil en 1940 ! »

* LE MONDE du 14 mars 2017, Ecologie : aux armes citoyens !

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Présidentiables 2017, tous des nuls au niveau écologique

Nous savons. Nous savons depuis le début des années 1970. Nous le savons officiellement. « Nous savons que la Terre et tous ses habitants sont mal-en-point et que nos problèmes se multiplieront si nous négligeons de les résoudre. Nous vivons en système clos, totalement dépendants de la Terre, et pour notre vie et pour la vie des générations à venir. » Ce message (dit de Menton) a été remis à U Thant, alors Secrétaire général des Nations unies, le 11 mai 1971 ; il était signé par 2 200 hommes de science de 23 pays. Il était adressé aux « trois milliards et demi d’habitants de la planète Terre ». Nous sommes deux fois plus nombreux aujourd’hui, nos problèmes présents et à venir sont innombrables, et les politiques se regardent le nombril.

En 1972, le remède était clairement posé dans le rapport au club de Rome sur les limites de la croissance : « Dès qu’une société reconnaît qu’elle ne peut pas tout donner à tout le monde, elle doit commencer à procéder à des choix. Doit-il y avoir davantage de naissances ou un revenu individuel plus élevé, davantage de sites préservés ou davantage d’automobiles, davantage de nourriture pour les pauvres ou encore plus de services pour les riches ? L’essence même de la politique consiste à ordonner les réponses à ces questions et à traduire ces réponses en un certain nombre d’orientations. » Quarante-cinq ans après, pour la présidentielle de 2017, aucune des limites écologiques de notre croissance, aucun des risques majeurs que vont traverser notre société thermo-industrielle ne sont envisagées par nos présidentiables de droite comme de gauche. Les politiques n’apprennent rien de notre passé, les cris d’alarme des années 1970 restent inaudibles. Ils vivent le moment présent d’une période électorale.. particulièrement troublée en 2017. Notre époque est à la lutte contre le terrorisme, l’endiguement du chômage, le contrôle des flux migratoires, la montée de l’extrême droite… et les mises en examen. L’écologie politique est au plus bas.

Pourtant une présidentielle devrait aller à l’essentiel, elle va rythmer la vie de la France pendant plusieurs années et donner une orientation générale à la politique de la France. C’est le rendez-vous crucial du débat d’idées sur l’avenir souhaitable. Nos sociétés font la guerre à la planète, celle-ci se révolte en rendant notre habitat terrestre de moins en moins accueillant. Comme la planète ne négocie pas, il faut des hommes d’État forts qui puissent préparer leurs concitoyens à une société d’après-croissance, une société post-carbone, post-nucléaire, ce qui exige de bousculer l’ensemble de notre mode de vie actuel qui détériore la planète. L’impératif écologique nécessiterait une présidence légitimée, pouvant décider de ruptures qui peuvent être désagréables par rapport à notre quotidien actuel. Nous n’avons que des nuls !

Aucun des présidentiables 2017 n’est à la hauteur de l‘urgence écologique. Il faudrait refonder les politiques à l’intérieur des limites écologiques, on s’abîme dans des démêlés avec la justice et l’État de droit. Il s’agissait de chercher un front commun pour l’écologie politique, les « plus à gauche » partent en ordre dispersé. Le petit jeune, Macron, est tout sauf un passionné de la problématique écologique... Nous attendions un discours de vérité de la part de nos présidentiables. Nous n’avons que confusion et querelles intestines et la vie politique se dissout dans le microcosme médiatique. Au secours, René Dumont, les politiques sont devenus fous !

Michel Sourrouille

NB : ce texte peut être diffusé librement… comme tous les autres articles de ce blog

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Code minier : une réforme au goût amer votée à l’AN

Les députés viennent d’adopter le 25 janvier 2017 la proposition de loi visant à adapter le code minier au droit de l’environnement. Cette réforme, attendue et annoncée depuis plus de cinq ans, laisse aujourd’hui un goût amer. En effet, si certaines améliorations ont pu être adoptées – bien souvent malgré l’opposition du gouvernement et du rapporteur –, cette réforme arrive bien tard et risque de ne pas aboutir, la session parlementaire se terminant dans un mois.* Encore une fois nous constatons l’optique anti-écolo du gouvernement socialiste actuel. Mais encore plus significatifs sont les éructations sur le monde.fr de commentateurs qui n’ont aucun souci de préserver le milieu de vie de générations futures :

Anita : Dieu nous préserve des Verts

Dieu : J’ai réussi à les faire baisser à 2% mais je ne peux pas plus.

Guy Fauzate : L’intransigeance des écologistes va-t-elle nous faire sacrifier les richesses de notre sous-sol à l’idéologie et renforcer notre dépendance en énergie et en minerais envers des pays non démocratiques ? Espérons que l’eurodéputée Michèle Rivasi (EELV) ne finira pas par s’étrangler pour de bon, ses élucubrations nous manqueraient.

Enkidou : Oui, c’est vrai, il faudrait interdire toute production de combustibles fossiles en France. Et aussi toute production nucléaire, tant qu’on y est. Et ne plus produire que du chômage, non polluant. Et couvrir notre beau territoire de ces monuments de beauté, d’élégance, de discrétion, que sont les éoliennes, fabriquées de préférence en Chine. Et, comme il en manquerait encore 95%, importer massivement de l’énergie du monde entier, qui se ferait un plaisir de la produire pour nous.

Pierre Yves Morvan : « Laisser sous terre un tiers des réserves de pétrole connues, la moitié de celles de gaz et plus de 80 % de celles de charbon. » – C’est le conte de fées d’un monde d’énergies renouvelables coûteuses, pendant que dormiraient sous les pieds des énergies fossiles peu coûteuses inexploitées. – Les nouvelles énergies renouvelables ne fournissent que 1% de l’énergie consommée sur la planète. –

Mont Thabor : Interdire le gaz de schiste qui procure une énergie bon marché et donc de la croissance et des emplois est une ineptie criminelle quand on a un chomâge endémique.

* http://www.amisdelaterre.org/Code-minier-une-reforme-au-gout-amer-votee-a-l-Assemblee-nationale.html

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La jeunesse a-t-elle un avenir durable ? J’en doute !

La nature est vue comme un zoo, où l’on emmène les enfants pour qu’ils s’amusent devant les singes et subissent la négation même de l’idée d’écosystème.  On assiste en fait à une véritable duperie de la jeunesse par la classe adulte dominante, qui octroie apparemment aux premiers la liberté (la licence individuelle), l’égalité (l’accès de tous à tout), la démocratie (ils ont le droit de vote), les jeux du crique les loisirs frelatés, la dévaluation de l’image et du son), la pseudo-fraternité (le nivellement par la base). A l’accélération technique , à celle des rythmes de vie, il faut ajouter une accélération sociale. aujourd’hui aucune situation n’est assurée, la transmission n’est pas garantie, la précarité règne.  Il est symptomatique de constater que les parents ne croient plus que leurs enfant auront des vies meilleures que les leurs. Il se contentent d’espérer qu’elles ne seront pas pires.

Dans la lutte écologique à venir, les Juniors encaisseront un choc matériel auquel ils ne sont pas préparés par leur éducation, bien au contraire. Un chargement de mentalité humaine prend au minimum une génération, il est rare qu’un individu change radicalement d’état d’esprit en plein âge adulte. L’enfant gardera en mémoire, comme une madeleine de Proust, le vrombissement de la voiture paternelle aux temps glorieux du pétrole abondant. Psychologiquement, il sera bien difficile aux jeunes générations qui auront connu le superflu, de consentir les sacrifices que certains de leurs aînés faisaient sur leur nécessaire. Comment réagira la jeunesse actuelle aux restrictions et pénuries à venir ? Elle a été élevée dans l’idéologie de la croissance avec, circonstance aggravante, le superflu considéré comme nécessaire, l’artificiel préféré au naturel, le virtuel identifié au réel.

Henri Laborit (en 1982) : Si des rats considéraient notre espèce comme nous observons la leur dans les cages de nos laboratoires, ils comprendraient immédiatement nos problèmes actuels et à venir : entassement démographique, épuisement des ressources, accumulation des déchets, agressivité et lutte pour la survie individuelle : le tout au détriment de l’espèce et du milieu ambiant.

Philippe Lebreton sous son pseudo «professeur Mollo-Mollo» : Pourquoi ne chante-t-on plus dans les rues ? Parce que les gens sont moins heureux ou parce que la musique d’aujourd’hui ne leur permet plus de chanter ?

Philippe Lebreton, Le futur a-t-il un avenir (Sang de la Terre 2012)

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longévité, intelligence…. tout commence à décroître

Après des décennies d’amélioration des caractéristiques humaines (longévité, taille…), de nombreuses données suggèrent que des limites sont en train d’être atteintes dans tous les domaines, y compris les performances physiques et intellectuelles. Les records des sportifs professionnels sont trompeurs, biaisés par les innovations technologiques ou pharmacologiques. Dans soixante-dix disciplines de l’athlétisme et de la natation, la même stagnation des performances apparaît. James Flynn avait démontré qu’au cours du XXe siècle le quotient intellectuel moyen de la population avait enregistré une croissance continue. Mais en trente ans, le paysage a radicalement changé. En étudiant les tests psychométriques des jeunes conscrits norvégiens, des psychologues ont constaté une baisse « significative » de 0,38 point de leur quotient intellectuel (QI) entre 1996 et 2002. ­Depuis, ces résultats ont été confirmés dans sept pays dont la France. Le cerveau humain avait déjà atteint son apogée il y a plusieurs milliers d’années, il subit dorénavant des mutations délétères. Pour la biologiste Barbara ­Demeneix, l’essentiel résulte de notre activité industrielle : « Entre 1970 et 2010, la production chimique a été multipliée par 300. Nous avons montré comment ces molécules bouleversent la fonction thyroïdienne des grenouilles, qui n’avait pas changé depuis 450 millions d’années. Et, depuis l’an passé, nous savons qu’une perturbation de la fonction thyroïdienne de la mère enceinte a des effets directs sur le QI de l’enfant. » Pour la chercheuse, l’affaire est préoccupante. Car, insiste-t-elle, les dérèglements thyroïdiens subis in utero et aux premiers âges de la vie affectent aussi la peau, le squelette, les muscles, le métabolisme ou le système cardio-vasculaire de l’enfant. Autrement dit, au-delà du QI, l’espérance de vie serait, elle aussi, sérieusement affectée par les polluants chimiques que nous absorbons. Quant à la taille, elle est conditionnée par l’âge de la puberté…*

La devise olympique « citius, altius, fortius » (plus vite, plus haut, plus fort) correspondait à l’expansion de la révolution industrielle et au goût de la bourgeoisie pour la concurrence et le record : vive le règne des plus forts ! Cette parenthèse croissanciste se termine, même le PIB tend vers le taux zéro. Notre civilisation thermo-industrielle a atteint, si ce n’est dépassé, toutes les limites matérielles qui permettraient de vivre de façon durable et équilibrée. La devise des écologistes, « moins vite, moins loin, moins souvent » pourrait devenir un mot d’ordre politique dans les décennies qui vont suivre. Joël de Rosnay définissait déjà un tel programme** il y a plus de 40 ans :

L’économie d’équilibre est une économie régulée, au sens cybernétique du terme. Certains secteurs peuvent passer par des phases de croissance ; d’autres sont maintenus à l’équilibre dynamique ; et d’autres encore à un taux de croissance « négative ».

Le taux de naissance est maintenu au taux de renouvellement de la population ; laquelle se maintient à l’état stationnaire.

L’assistance médicale mutuelle est réalisée à grande échelle. On consomme moins de médicaments, on fait moins appel aux médecins. On cherche plus à stimuler les défenses naturelles de l’organisme, qu’à agir de « l’extérieur » à coups de substances chimiques.

La création de filières de récupération a permis de reconnecter les cycles correspondants au métabolisme de l’organisme social avec les cycles naturels de l’écosystème.

Les produits manufacturés sont plus robustes, plus faciles à réparer. Ce qui revitalise toutes sortes d’activités d’entretien et de réparation. L’artisanat renaît vigoureusement.

Des programmes de mise en route de nouvelles centrales nucléaires ont été abandonnés. La décentralisation des moyens de transformation de l’énergie a conduit à l’exploration de nouvelles sources. Mais ce sont surtout les économies d’énergie et la lutte généralisée contre le gaspillage qui ont permis de stabiliser la consommation en énergie.

La consommation en énergie est maintenue au niveau où elle se trouvait au début des années 1980. Ce n’est pas l’austérité monacale, l’énergie est mieux répartie, mieux économisée, plus efficacement utilisée.

Une bioéthique renforce la nouvelle morale de l’écosociété.

Ecosocialisme, écosociété, écocitoyen, écoparlement… Le préfixe « éco » symbolise la relation étroite entre l’économie et l’écologie.

L’avènement de l’écosociété s’est déroulé en trois grandes étapes, l’économie de survie (société primitive), l’économie de croissance (société industrielle) et l’économie d’équilibre (société postindustrielle ou écosociété).

* LE MONDE du 3 janvier 2017, L’être humain a-t-il atteint ses limites ?

** cité par le livre de Michel Sourrouille « L’écologie à l’épreuve du pouvoir » (Sang de la Terre, 2016)

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Regard sur le futur proche, un jour de réveillon en 2050

En ce jour de réveillon de 2050, Léa confectionne un repas 100 % local, ce qui réduit considérablement la variété des mets possibles. Elle se souvient comme d’un rêve des papayes que ses parents lui achetaient à la fin du XXe siècle, sans se soucier du fait qu’il avait fallu dépenser pour cela plusieurs litres de pétrole. De toute façon elle est bien seule, il ne lui reste plus qu’un dernier descendant. Ses deux autres petits-enfants sont décédés il y a trois ans, ils ont succombé à l’une de ces nouvelles maladies à côté desquelles l’épidémie de grippe aviaire, qui avait frappé la France en 2010, n’avait été qu’une discrète entrée en matière. Ils avaient été victimes d’un virus apparu en Sibérie du Nord, là où le permafrost a cédé la place à des marais à partir de l’année 2025. Maintenant des millions de personnes sont au chômage. Le gouvernement français vient d’interdire toute manifestation et même les rassemblements de protestation. Le ministre de l’Intérieur vient de prendre un de ces décrets maudits, c’est l’armée qui réprimera d’éventuels troubles de l’ordre public.

Léa a renoncé depuis longtemps à l’idée d’acheter une automobile ; en 2035, l’Union européenne avait réservé l’usage des biocarburants aux véhicules utilitaires. Même l’utilisation du charbon liquéfié a été proscrite car les sols et surtout les océans qui séquestraient le carbone depuis toujours, ne jouaient plus leur rôle, renforçant ainsi très brutalement l’effet de serre anthropique et les dérèglements du climat. Cet été, Léa avait appris par une amie que le thermomètre était monté jusqu’à 45°C à Caen.

La Biosphère vous souhaite un bon réveillon 2016, coloré de sobriété joyeuse.

NB : pour en savoir plus sur l’histoire de Léa, lire « Le développement durable, maintenant ou jamais » de D.Bourg et G.Rayssac

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