finale Federer-Nadal, on s’en fout

Non, nous ne rêvons pas de la finale de Roland Garros. Non, les quarts de finale n’ont rien d’enivrant. Non, entre Söderling et Federer, nous n’avons aucune préférence. Oui, l’article de Bruno Lesprit sur le feuilleton de Roland Garros (« Tout le monde en rêve », leMonde du 2 juin) nous gonfle. A croire que pour ce journaliste, le tennis est une religion : « Des prières s’élèvent », « Apothéose espérée », « Eternel espoir », « Dimanche sublime ». Mais une religion qui a ses élus (Federer et Nadal) et son bouc émissaire (Söderling). D’un côté Nadal, el reconquistador et  Federer l’idole planétaire. De l’autre Söderling, le trouble-fête, son crime de lèse-majesté, un malandrin, sa 13ème défaite à la satisfaction générale, le gueux, une carte de visite miteuse, ses trophées risibles.

Supprimer le sport dans les colonnes du Monde pour ne garder que ce genre d’article ne va pas nous remonter le moral dans une société où le foot sert de faire-valoir aux politiques et le tennis de bouche-trou sur les chaînes publiques.

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Sarko, footeux 1er

La France désignée pour accueillir l’Euro en 2016. Nous n’en éprouvons aucune satisfaction, plutôt un écœurement devant la gestuelle politicienne. Sarko s’est personnellement impliqué dans la campagne de désignation en se rendant à Genève pour serrer la paluche des membres du comité exécutif de l’UEFA. « La présence de Nicolas Sarkozy a fait pencher la balance », s’exclame Michel Platini. Sarko déclare sans rire que « le sport est une réponse à la crise ». Il avoue même que parce qu’« il y a des problèmes, les politiques mobilisent tout un pays vers l’organisation de grands événements »… qui ne sont pas des solutions. Oubliée la crise, oubliée la rigueur, mais pour un moment seulement. La facture totale de l’évènement devrait s’élever à 1,7 milliards d’euros. Pourtant Le Figaro titrait son édito : « Une victoire politique », puisque Sarko avait mouillé le maillot. LeMonde du 1er juin se contente d’un « sur un petit nuage », mais n’exprime aucune critique de ce mélange du foot et de la politique. Même la socialiste Martine Aubry avait simulé « un grand bonheur » à l’annonce de la sélection de la France. On en reste toujours à la formule latine « panem et circens », du pain et des jeux pour divertir la foule et la dominer.

Le foot-spectacle n’est qu’une activité dont l’objectif est la sidération des masses, l’encadrement d’un troupeau dont chacun fait partie et auquel tous sont assujettis. C’est l’infantilisation d’une foule qu’on a rendu hystérique, qu’elle se rassemble dans les stades ou qu’elle reste avachi devant sa télé. Le foot est devenu le plus puissant des opiums du peuple, la collectivisation de toutes les illusions individuelles. Comme l’exprime un philosophe, « La tribalisation du stade se transforme en une communion nationale et procure une jouissance où l’amour nombriliste se fond dans l’amour communautaire. » Et aucun de nos intellectuels médiatiques ne réagit !

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la France 7ème ? Mauvais calcul !

Après le PIB (produit intérieur brut), après l’IDH (indicateur de développement humain), voici venu le temps des indicateurs de bien-être de l’humanité et de la planète ! Nous avons déjà oublié à quoi pouvait bien aboutir la commission Stiglitz nommée par Sarko sur la « mesure de la performance économique et du progrès social ». Le petit dernier vient de sortir, l’indice final de performance environnementale (LeMonde du 30-31 mai). Il paraît que la France est septième, qu’est-ce que ça doit être dans les autres pays ! Il est vrai que la France exporte ses déchets nucléaires en Russie et importe son uranium de l’étranger, utilise huile de palmes et soja grâce aux surfaces gagnées sur les forêts des pays « émergents », sans compter tous les biens de consommation importés de pays où il n’y a pas de protection environnementale : le monde est notre poubelle.

De plus, si on rentre dans les détails de cet « indice final », on ne peut que rester perplexe. En effet, il ne faudrait pas faire comme avec le PIB, compte en positif ce qui est négatif. En quoi la lutte contre les maladies liées à l’environnement serait-il un signe de bonne santé ? En quoi la lutte contre le changement climatique serait-il un signe de sobriété énergétique ? Et ces deux postes font déjà la moitié de la pondération de l’indice. En France, l’idée de taxe carbone a été abandonnée et, pour la vitalité des écosystèmes, nous n’avons pas entendu dire que ce pays était particulièrement au clair avec ses objectifs Natura 2000.

De toute façon, un bon état environnemental doit être lié à l’absence de cancers liés à un milieu pollué, à l’absence de réchauffement climatique causé par la combustion d’énergies fossiles, à l’absence d’une perte de biodiversité, à l’absence de pesticides dans les eaux et les sols, etc. La France n’est pas septième en réalité car, comme tous les pays développés, elle exploite au maximum la nature au niveau mondial et détériore chaque jour davantage l’avenir des générations futures.

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Avatar et les Indiens du Pérou

Le film Avatar est une douce plaisanterie : les peuples indigènes ont toujours été expropriés par l’expansionnisme de la société thermo-industrielle, et cela très rapidement quand ils possèdent des ressources naturelles directement utilisables. Violer les droits les plus élémentaires des peuples indigènes a été une constante de la mondialisation. Le fait qu’Alberto Pizango, chef du premier collectif d’Indiens d’Amazonie, ait été poursuivi par la justice péruvienne après une manifestation massive et pacifiste à Bagua, le 5 juin 2009, contre une série de décrets ouvrant leurs territoires aux compagnies étrangères n’était donc pas une surprise : on ne discute pas avec les autochtones, ils doivent suivre la loi du plus fort. Il est bien clair aussi que, contrairement au film de James Cameron, les communautés particulières ne peuvent vaincre par les armes, elles seraient exterminées.

Mais le retour d’exil d’Alberto et sa mise en liberté conditionnelle (leMonde du 29 mai) marque peut-être un tournant. En effet, les deux principes fondamentaux de la convention 169 de l’OIT signée en 1993 par le gouvernement de Lima sont la consultation et la participation des peuples indigènes et tribaux. Alors que beaucoup de participants aux discussions ayant précédé l’adoption de la convention ne pouvaient accepter le contrôle de leurs terres par les peuples indigènes et tribaux, cette partie de la convention prévoit un niveau de participation significatif à la gestion des terres et des ressources, plus élevé même que celui dont jouissent les citoyens de la plupart des pays. Le contrôle sur les terres est bien sûr un élément indispensable à l’obtention de la pleine reconnaissance du droit à l’auto-gouvernement.

Les tribus « indigènes » d’aujourd’hui n’ont sans doute aucun trait commun avec les Na’vi, les autochtones fictifs de la planète Pandora. Elles ont assimilé les principes de base du capitalisme depuis longtemps et savent faire négoce de leur « ethnicité » : il s’agit seulement de savoir comment va se répartir les royalties des ressources minières. Il faudra attendre l’implosion de la société thermo-industrielle, quand elle sera allée au bout de l’exploitation facile de la nature et qu’elle connaîtra des blocages énergétiques et climatiques, pour qu’on s’intéresse enfin à la seule  solution durable aux problèmes contemporains : la constitution mondialisée de communautés territoriales suffisamment indépendantes au niveau énergétique et alimentaire. Cela se fera encore une fois dans l’affrontement, mais cette fois par le rejet du mode de développement occidental. Sur ce point, James Cameron voyait juste, la diversité économique et culturelle peut être un rempart contre les forces du marché.

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Maurice Lévy, le fric et le mensonge

Y’en a qui manquent pas d’air ! Le même jour, 28 mai, nous apprenons que Maurice Lévy s’épanche dans LeMonde pour s’exprimer à la place des nouvelles générations et d’autre part qu’il devrait bientôt quitter ses fonctions de président du directoire de Publicis avec un package de départ de 25 millions d’euros. Maurice croit que les jeunes sont habités par l’idée que les ressources  de la planète sont limitées. C’est tout le contraire, les agences de publicité ont réussi à  rendre les  jeunes cervelles disponibles pour boire du Coca-cola, le plus de coca-cola possible. Maurice croit que la génération montante veut refonder les principes nés avec la révolution industrielle alors qu’elle ne rêve que du dernier Ipad à la mode. Maurice croit que nos enfants sont « révolutionnaires »  alors que sa dépolitisation a été programmée. D’ailleurs Maurice dévoile la supercherie vers la fin de son trop long article : « Nous, publicitaires, devons réinventer le rêve que nous offrons aux consommateurs. » Comment mieux avouer que les jeunes ne sont rien et que la publicité fait tout ; c’est Publicis qui invente le rêve et formate la jeunesse. En prime, Maurice avoue qu’il n’y a pas de changement à attendre, il parie encore et toujours sur une « croissance forte et de solides profits ». Il justifie ainsi son package perso ! Pas un mot de Maurice sur les limites de la planète, il s’en fout Maurice, il va pouvoir la piller avec ses 25 millions d’euros gagnés sur de pauvres jeunes publiphiles qui « devront apprendre à renouer avec ce qui fait la force du capitalisme : la réussite individuelle ».

LeMonde a donc offert à Maurice Lévy une tribune truffée de lieux communs (le 11 septembre, l’élection d’Obama, l’éthique du capitalisme…) pour faire le panégyrique de la croissance capitaliste au nom d’une jeunesse imaginaire. Il est vrai que LeMonde dépend aussi des publicitaires. Mais si la jeunesse n’était pas intoxiquée grave par la publicité, elle exigerait la suppression de Publicis et la confiscation immédiate des 25 millions de Maurice…

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ce n’est pas à moi de commencer

Nous sommes foutus ! Nous les pays riches, nous voulons jouer à « ce n’est pas à moi de montrer l’exemple en matière d’action climatique ». L’Allemagne a refusé l’objectif de réduction de 30 % des émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2020 car « cela n’apporte rien à la protection de l’environnement si nous avançons unilatéralement en Europe » ; l’Italie, la Roumanie et la Pologne militent de longue date contre un cavalier seul européen ; la France attend de connaître les offres des autres pays. C’est donc en vain que Connie Hedgaard a essayé d’expliquer les  avantages d’un passage à 30 % pour montrer la voie aux autres. (LeMonde du 27 mai). L’idée d’exemplarité est complètement absente de l’action politique aujourd’hui, l’autolimitation et la sobriété énergétique restent des mots tabous.

Même le CAS (centre d’analyse stratégique) déconne. Il refusait l’adoption par l’UE d’un objectif de réduction de 30 % contre 20 % à ce jour pour des raisons qui n’en sont pas. Le fait que « les ménages auraient à fournir des efforts particulièrement significatifs et à modifier sensiblement leur mode de vie » (LeMonde du 23-24 mai) justifie amplement l’objectif de – 30 % et non son abandon. NKM constatait d’ailleurs sur la page d’accueil du CAS que « Les effets ravageurs des excès de CO2 dans l’atmosphère sont déjà là : pas moins de 250 millions de femmes, d’hommes et d’enfants sont frappés chaque année par des tsunamis, des cyclones ou d’autres formes moins soudaines de catastrophes climatiques ». Il paraît que le CAS « offre aux autorités de l’État la vision de long terme indispensable à la décision publique ». On est pas gâté ! Cet organisme privilégie le court terme, « l’emploi et la compétitivité », non les générations futures.

Comme dit un communiqué de presse du PS, « si le couple franco-allemand renonce à être un moteur de l’Union Européenne sur un sujet aussi exemplaire, celle-ci renonce également à être exemplaire. Cela affaiblit également l’Europe face aux pays émergents. » Observateurs attentifs des plans climat locaux, nous pouvons ajouter que la fixation d’un objectif, – 5 % ou – 30 %, ne veut rien dire quand les participants ne sont pas prêts à donner l’exemple par leur propre sobriété énergétique et une perception aiguë des limites de la planète.

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guerre contre la nature, guerre contre l’homme

Un commentateur nous écrit : « Une fois que la civilisation agro-industrielle eut décidé de s’étendre, elle se trouva en concurrence féroce avec ces volatiles voraces et envahissants » (des pigeons aux USA). Donc autant les éliminer ! Le problème, c’est que cette espèce définitivement éteinte n’est qu’un exemple particulier de l’extinction des espèces qui s’accélère aujourd’hui. Pourquoi ? D’abord, comme le souligne notre commentateur, parce que les humains se  croient en concurrence avec toutes les formes de vie, ayant oublié que l’espèce homo demens n’est qu’une forme de vie parmi d’autres, dépendante des autres.

Ensuite, comme le souligne Hervé Kempf (LeMonde du 26 mai), parce que cette guerre contre la nature est aussi une guerre contre les paysans. Partout, les maîtres des villes font la guerre à la campagne : pour y étendre faubourg et industries, ou pour imposer une agriculture industrielle à bas de machines et de pesticides au prix d’un recul continu de la biodiversité. La biodiversité, ce n’est pas simplement une question d’ours blanc et de pigeons, c’est le conflit meurtrier entre la course au profit maximal et le nécessaire respect de la terre qui nous fait vivre. Mais la raison essentielle de la perte de biodiversité, c’est l’état d’indifférence dans laquelle se trouvent plongés nos concitoyens. Les Nations unies avaient désigné le 22 mai « Journée mondiale de la biodiversité » dès le Sommet de la Terre de 1992. Cette Journée devrait être le moment fort de l’Année 2010 de la biodiversité pour lutter contre la dégradation de la biodiversité. Personne ou presque n’a entendu parlé de cette journée mondiale le 22 mai dernier ! Pourtant en 2004 une Évaluation des écosystèmes pour le millénaire (Millennium Ecosystem Assessment) avait montré que 60 % des écosystèmes (support de la biodiversité) étaient déjà dégradés.

Faute d’un changement immédiat et de grande ampleur des comportements, la perte croissante des écosystèmes naturels (purification de l’air, de l’eau, équilibre des climats…) va entraîner des modifications irréversibles. Que nous devenions possesseurs et maître de la fusion nucléaire ne ferait qu’accélérer la fin de notre civilisation thermo-industrielle, asphyxiée dans un monde de la démesure, sur une planète de moins en moins vivante, recouverte de bétons et  de terres stérilisées.

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la sixième extinction

Comment combattre la perte de biodiversité, 6ème extinction des espèces, quand on ne connaît pas la signification du mot biodiversité ? Selon un sondage récent, 79 % des Français déclarent avoir « entendu parler » de biodiversité, mais seuls 23 % en connaissent la signification (LeMonde du 25 mai). En cette année mondiale de la biodiversité, y’a un manque ! Voici quelques données pour s’y retrouver.

Nous pouvons considérer que c’est à partir du XVIIe siècle que la biodiversité commence vraiment à pâtir de l’action de l’homme. Le cas du pigeon voyageur en Amérique du Nord mérite d’être relaté. Une estimation d’un vol de migration, faite en 1810, fait état de plus de deux milliards d’individus. Vers les années 1880, l’espèce n’était plus présente qu’autour des grands lacs. En 1899, on observait le dernier oiseau sauvage en liberté et le dernier spécimen mourrait en 1914 au zoo de Cincinnati. Aujourd’hui, le rythme des extinctions semble s’être emballé  puisque les chercheurs estiment à présent qu’entre 1 % et 10 % de la biodiversité disparaissent tous les dix ans. Cette biodiversité ou diversité biologique peut être définie comme la variabilité des organismes vivants de toute origine ; cela comprend la diversité au sein des espèces et entre espèces ainsi que celle des écosystèmes. La convention sur la diversité biologique a été adoptée lors du Sommet de la Terre de Rio en 1992. Les signataires de la convention se disent (dans son préambule) conscients de « la valeur intrinsèque de la diversité biologique et de la valeur de la diversité de ses éléments constitutifs sur les plans environnemental, génétique, social, économique, scientifique, éducatif culturel, récréatif et esthétique ». Cette convention devait comporter un volet financier. Elle en a été privée sous la pression des Etats-Unis. Plus de dix ans après Rio, la conférence de La Haye sur la biodiversité a réaffirmé la nécessité de se doter d’un mécanisme financier. Avec un peu de chance, il sera adopté dans vingt ou trente ans… Les humains ne se contentent pas de s’entretuer, il éliminent aussi des espèces entières. Cela n’est pas durable.

Parce qu’elle est la condition nécessaire à la vie sur Terre, la valeur de la biodiversité est infinie. On ne peut éluder aussi la dimension éthique justifiant la conservation de la biodiversité. En vertu de quelle autorité notre espèce pourrait-elle s’arroger le droit de procéder au cours du présent siècle à l’ultime génocide, sans précédent dans l’histoire de l’humanité, qui tiendrait à l’anéantissement de plusieurs millions d’espèces vivantes ?

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DSK, Stiglitz, les dévots de la croissance

La volonté de croissance économique a ceci de funeste qu’elle est devenue une véritable religion pratiquée par nos élites qui pensent. Alors que le culte du PIB est à l’origine ancré dans l’idéologie de droite (l’accumulation du capital est corrélée avec le profit et l’expansion), la gauche a enfourché le même credo. Quand le socialiste Dominique Strauss-Kahn estime que « si l’Europe va mal, c’est surtout parce que la croissance économique y est trop faible », il ne parle pas en tant que directeur général du FMI, mais en tant que socio-démocrate. Joseph Stiglitz, Prix Nobel d’économie, ex-conseiller de Bill Clinton et ex-chef économiste de la Banque mondiale croit critiquer la pensée unique monétariste, mais c’est pour émettre un acte de foi croissanciste : « Aujourd’hui, l’UE veut un plan coordonné d’austérité. Si elle continue dans cette voie-là, elle court au désastre. Nous savons, depuis la Grande Dépression des années 1930, que ce n’est pas ce qu’il faut faire. L’Espagne ne s’en sortira que si la croissance européenne revient. C’est pour cela qu’il faut soutenir l’économie en investissant et non en la bridant par des plans de rigueur. » (
LeMonde 23-24 mai)

Voici, sur lemonde.fr, quelques commentaires intelligents sur l’article de Stiglitz :

– Le désastre de l’endettement irraisonnable mène à l’austérité.

– On peut faire de la rigueur intelligemment.

– La Suède a mené une politique d’austérité qui l’a sauvée et qui ne l’a menée à aucun désastre.

– Si votre ménage est endetté de manière énorme, peut-on continuer à se dire :  » Je consomme encore, c’est bon pour la croissance  » ?

– C’est la croissance pour la croissance qui nous a emmenés au déficit. Les arbres ne montent pas au ciel.

– L’Espagne a construit à tour de bras et pas forcément à bon escient. Et les Amish, ils ont traversé la crise comment ?

– Tant qu’on ne nous propose pas un modèle où tout le monde arrive à s’en sortir convenablement SANS croissance, c’est pas sérieux.

– Mettons en place un modèle qui pourra durer à long terme, pas une chaîne de Ponzi de l’économie mondiale (aujourd’hui, il nous faut de la croissance pour un fonctionnement « normal »).

– Il faut cesser de se crucifier au nom de la croissance et de la paix des marchés.

http://abonnes.lemonde.fr/economie/article/2010/05/22/joseph-stiglitz-l-austerite-mene-au-desastre_1361520_3234.html

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Allègre, politicien et scientiste

Bruno Latour : « On comprend bien la capacité de nuisance des climato-sceptiques : si l’origine du bouleversement climatique est incertaine, on se gardera de toute action ! Science et politique sont maintenant coextensives. Les séparer n’a pas plus de sens que de diviser la mer avec une épée. Nous avons parfaitement le droit de décider politiquement d’établir un lien de causalité entre les bouleversements climatiques et l’action humaine parce que nous avons reconnu collectivement que c’était le moyen le plus sûr de nous garantir contre des dangers encore incertains. Les climato-sceptiques sont donc des adversaires politiques. » (LeMonde du 22 mai)

Claude Allègre : « Un des termes du débat est politique. Le climat variant peut-être de 2 ou 3 °C dans un siècle est-il la première priorité de la planète ? Faut-il mobiliser tous les chefs d’Etat sur ce sujet ? Ne faut-il pas se préoccuper d’abord du problème de l’eau et de la faim dans le monde ? Où sont les urgences ? Ne faut-il pas capturer et séquestrer le carbone, promouvoir le nucléaire de quatrième génération, les organismes  génétiquement modifiés, etc. Le combat essentiel, fondé sur une science ouverte, n’a pas besoin de validation politique ! » (LeMonde du 22 mai)

Politis : « M.Allègre est l’exemple parfait de ce que nous appelons un « scientiste », un positiviste échappé des premières années du XXe siècle, un productiviste dévot du progrès, un homme qui est passé intellectuellement à côté des enseignements de notre XXIe siècle. Il est devenu l’homme qui dit en substance à ses contemporains : « Surtout ne changez rien a vos habitudes, la science finira par vous sauver ! » (n°1103, 20 mai 2010).

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Claude Allègre en procès

Encore une pleine page dans un quotidien pour écouter discourir Claude Allègre. Trop, c’est trop, Allègre n’a rien à dire, il est d’ailleurs d’accord avec le GIEC : « Nous ne nions nullement que les teneurs en CO2 dans l’atmosphère augmentent et que les activités humaines en sont responsables. Nous ne croyons pas non plus que les émissions anthropiques excessives de CO2 soient souhaitables. Elles ont de multiples inconvénients et signifient qu’on gaspille les combustibles fossiles. Réduisons leurs débits et leurs usages ! »

Mais après cette mise au point en un seul paragraphe, et comme la contradiction ne lui fait pas peur, Allègre enfume le lecteur sur cinq colonnes pour rabâcher les mêmes choses et faire en fin de compte douter du réchauffement climatique. Allègre termine : « Laissons les débats se poursuivre sans invectives et sans ostracisme. » C’est un peu gonflé de la part de quelqu’un qui finit par dire dans un premier temps qu’il n’y a pas débat sur le réchauffement climatique. C’est beaucoup gonflé de la part de quelqu’un qui vient d’intituler son dernier livre « l’imposture climatique ». C’est trop gonflé de la part de quelqu’un qui avait multiplié invectives et ostracismes et intente maintenant un procès à Politis.

Récemment Politis décrit ainsi Allègre: « Aujourd’hui le scepticisme ne peut pas s’appliquer aux conclusions des climatologues du monde entier (le GIEC) qu’à la rotondité de la Terre. Ce que M.Allègre appelle improprement scepticisme, c’est l’exploitation de l’incrédulité par quelqu’un qui sait. » (n° 1103, 20 mai 2010).

Alors, pourquoi laisser à cet homme sa capacité médiatique de nuire ? Une page entière écrite par Allègre (LeMonde du 22 mai 2010), dès fois je ne comprends pas mon quotidien de référence… Il ne suffit pas d’opposer aux propos d’Allègre une autre page avec d’autres intervenants (voir ci-dessous, 1er commentaire) pour nous permettre d’accéder à une meilleure compréhension des choses.

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pour un lundi végétarien

Généraliser le lundi végétarien ? Certains y pensent déjà. Quelques députés droite-gauche confondue dénoncent autour d’un buffet goûteux la surconsommation de viande (« faire maigre », LeMonde du 21 mai) et défendent le principe d’une journée végétarienne par semaine. Bien d’autres voix disent de même :

– Rajendra Pachauri, président du GIEC : « Un des premiers gros efforts que devra réaliser la société humaine pour lutter contre le changement climatique est de réduire sa consommation de viande. Le cycle de production de la viande est très intensif, il nécessite beaucoup d’énergie, d’eau et d’aliments pour le bétail et génère d’importante émission de gaz à effet de serre. Changer les habitudes de nourriture nécessite un vrai changement de valeurs et une vraie information des populations pour leur expliquer l’association qui existe entre la consommation de viande et l’effet de serre.

(source : Sciences et avenir hors série janvier-février 2010)

– Hervé Le Bras (démographe, directeur d’études à l’INED) : « Le problème le plus important n’est plus le nombre total des hommes, mais la structure de leur consommation, celle d’hydrocarbures, et de plus en plus celle de nourriture animale. Si la planète entière adoptait le régime alimentaire des Français, elle ne pourrait nourrir que 3,4 milliards de personnes, soit la moitié de la population actuelle. En outre les ruminants émettent du méthane, puissant gaz à effet de serre »)

(Source : propos recueillis par Thierry Paquot, trois questions à Hervé le Bras (Entropia n° 8, printemps 2010)

– André Méry (président de l’association végétarienne de France)  : «  Il faut tout de même avoir en tête que la France importe 5 millions de tonnes de tourteaux de sojas par an du Brésil ! Admettons que l’on crée une journée par semaine sans viande, cela permettra de réduire la déforestation, idem pour la pollution atmosphérique, pour le gaspillage d’eau, etc. »

(source : Dossier du mensuel terraeco de février 2010)

Alors, si tu œuvres dans une association, nous te conseillons de faire adhérer à la campagne « Nous sommes d’accord avec le lundi végétarien  ».

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le FMI, le peuple et la nature

Qui faut-il défendre ? La nature ? Le peuple ? Les banques ? La réponse est difficile car tout est lié, c’est l’idée générale de ce blog. Comme les banques exploitent le peuple qui exploite la nature, nous nous mettons bien sûr du côté du plus exploité, la nature. Car la nature donne au peuple les moyens de vivre et le peuple demande aux banques les moyens de consommer la nature. Et si la nature est surexploitée, elle ne pourra pas donner à manger au peuple qui ne pourra pas engraisser les banques. Cqfd.

Prenons un exemple, le FMI, cette banque de refinancement. Sans le FMI qui donne des liquidités aux Etats en difficulté de paiement, le commerce international risque d’en souffrir. Donc si le FMI n’existait pas, le peuple devrait se contenter des ressources qui sont dans son propre pays, il ne pourrait plus mettre à sa disposition les ressources de la Terre tout entière, il serait obligé de  sauvegarder durablement la richesse de son territoire. Le FMI est lié au libre-échange qui est lié à la surexploitation de la nature. Il faut donc supprimer le FMI, mettre au chômage DSK, et tout ira mieux pour le peuple. Si nous changeons de mode de vie !

Les politiques de rigueur appliquées aujourd’hui dans les pays développés ne sont pas nouvelles. Le FMI avait déjà imposé des purges (appelées plans d’« ajustement structurel ») dans les années 1980 aux pays du tiers-monde surendettés à cause d’un commerce mondial déséquilibré, d’une consommation à crédit, d’un Etat dispendieux. Pourtant cela fait plus de trente ans que Paris se permet de ne pas présenter un budget de l’Etat à l’équilibre ! Le FMI craint alors que la crise de l’euro se mue en une crise mondiale des dettes publiques. Les économistes ont peur que ce qui se passe dans l’UE ne soit que la pointe d’un iceberg de dettes et de déficits publics dont ni le Royaume-Uni, ni les Etats-Unis, ni le Japon ne sont exclu. Alors on tape sur le petit peuple, comme d’habitude. Le FMI impose au gouvernement roumain de diminuer les salaires dans la fonction publique de 25 % et les retraites de 15 % (LeMonde du 20 mai). Supprimons donc le FMI pour venir en aide aux Roumains, mais alors supprimons ce qui rend le FMI nécessaire, un commerce mondial déséquilibré, une consommation à crédit, un Etat dispendieux.

Aux humains de savoir quoi faire de leurs élites corrompues ou inconscientes, nous ne pouvons pas décider à la place des peuples. Mais si le peuple tout entier se met à la diète, il n’aura plus besoin des banques et la nature pourra respirer.

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Zapetero, Papandréou, la fin du national-socialisme

C’est un virage à 180 degrés pour des partis socialistes qui ont toujours conspué la rigueur ; les Premiers ministres Papandréou et Zapatero ont prévu une cure d’austérité sans précédent. Après la Grèce, l’Espagne a diminué le salaire des fonctionnaires et geler les  retraites (LeMonde du 19 mai). Encore récemment le 5 mai, Zapatero soutenait que « ce n’est pas une bonne chose d’accélérer la réduction du déficit ». Une semaine plus tard, il déclare le contraire devant les parlementaires : « En cohérence avec l’évolution de la réalité, le gouvernement a pris l’engagement d’accélérer la réduction du déficit ». Ce discours réaliste est une bonne chose, il rompt avec la logique nationale-socialiste de pillage des ressources mise en place par les partis socialisants (populistes ou populaires).

Le philosophe Hans-Dieter Klein avait avancé l’idée en 1989 que la politique mondiale contemporaine possède une structure profondément « nationale-socialiste ». Ce qu’il y a de terrifiant dans cette association, c’est évidemment le spectre du national-socialisme allemand ainsi que la suggestion pleinement assumée indiquant qu’il ne s’agit pas d’un égarement anormal de ce siècle infâme, mais bien de la manifestation parfaitement logique de son épouvantable essence. Lorsque les besoins de sa population s’accroissent de façon anarchique, l’Etat national-socialiste doit effectivement tenter de prélever les éléments nécessaires à l’assouvissement de ces besoins là où la résistance est la plus faible. Dans cette optique, deux options majeures sont à la disposition de ces Etats : d’une part la nature, d’autre part les nations encore régies par des rapports de type féodal (les peuples du tiers-monde). Parallèlement, on affirme que, puisqu’elles n’existent pas encore, les générations à venir ne peuvent prétendre à aucun droit. La contradiction fondamentale repose sur le fait que ces pilleurs bafouent à l’échelon international des principes moraux qu’ils appliquent à l’échelon national (l’égalité).

Il ne fait aucun doute que la structure nationale-socialiste de l’économie mondiale actuelle implique que la pacification sociale à l’intérieur de l’Etat s’accomplissait grâce à une exploitation conjointe de la nature et du tiers-monde, et se traduisait ainsi par une aggravation de la crise écologique. Il fallait changer cette politique, les politiques de rigueur sont donc un bon signe. Qu’en pense le parti socialiste français ?

Pour en savoir plus, lire Vittorio Hösle, Philosophie de la crise écologique (1991)

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Findus et le MSC

Greenwashing, c’est habiller en vert écolo ce qui n’a rien à voir avec la protection de l’environnement. Ce terme fait référence au double langage des firmes multinationales qui parlent de protection de l’environnement et l’inscrivent même dans leurs objectifs alors que leurs activités consistent à augmenter la charge que fait peser l’humanité sur la planète. Mais d’un autre côté, le changement ne pourra découler que d’une modification du comportement des grandes entreprises. C’est la tactique de WWF (Fonds mondial pour la nature) qui s’était même associé en 1997 avec Unilever pour définir le label écolo MSC (Marine Stewardship Council) pour une pêche durable.

Aujourd’hui le patron de Findus France, leader du surgelé, vise une production de 100 % de poisson labellisé « responsable » et sans huile de palme pour les fritures (LeMonde économie du 18 mai). Ce groupe n’achète donc plus de cabillaud de la mer baltique ou de la mer du Nord, n’utilise ni la lotte, ni les espèces de grand fond et veut faire passer les saumons d ’élevage à l’alimentation végétale. Bel effort. Généralisable et durable ? Comme dit la jeune économiste Patricia Crifo, « La question des années 2010 est de savoir si une croissance soutenable peut naître de la combinaison entre technologies de l’environnement, gouvernance des entreprises  et gestion du capital humain ». Pour nous, l’expression « croissance soutenable » porte en elle la réponse. Il ne peut pas y avoir de croissance durable dans un monde fini, c’est un oxymore, l’union impossible (sauf en poésie) des contraires. Findus a connu une croissance de 45 % entre 2006 et 2009, il n’y aura pas pérennité des ressources halieutiques, pérennité de l’entreprise.

Une stratégie verte des entreprise est possible, mais à condition de cesser la concurrence entre elles pour seulement distribuer ce qu’il faut et où il faut, à condition d’éduquer les consommateurs à redevenir végétariens plutôt qu’à multiplier les plats de poissons et de viande, à condition de ne plus penser en terme de profit à court terme mais de bonheur des peuples. Ce n’est pas gagné !

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l’extrême droite progresse. Inéluctablement ?

Le fascisme est en train de progresser dans les mentalités et les actes. Il suffit de feuilleter le Monde du 16-17 mai pour s’en apercevoir. On critique à Montreuil l’accueil de familles roms, estimées trop nombreuses. En France, des apéros géants sont interdits, la rétention de sûreté prévoit l’enfermement continu (sans limite de durée) de détenus pourtant libérables, de nouvelles lois durcissent sans cesse les peines. En Espagne, on suspend un juge parce qu’il ouvre une procédure pénale sur les crimes du franquisme. En Hongrie, l’extrême droite arbore au nouveau parlement l’écusson des milices pronazies de l’entre-deux-guerres.

Il suffit aussi d’interroger nos proches pour comprendre que la burqa est considéré comme une atteinte absolue à l’intégrité de la France et des femmes. Le venin de l’insécurité fait ses effets alors que jamais la présence policière et militaire un peu partout n’a été aussi manifeste. Il est vrai que les médias font leurs ventes et leurs gros titres sur des sujets prétendus sensibles dans un contexte où jamais le PIB mondial n’a été aussi élevé ; la richesse monétaire ne fait pas le bonheur et la convivialité. Nous sommes donc pessimistes parce que tout nouveau choc économique ou écologique ne pourra que renforcer les instruments de coercition et les mouvements fascistes. Comme l’exprime par exemple Harald Welzer, « L’ère des Lumières pourrait s’achever avec les guerres du climat au XXIe siècle. Les trois régulations de l’action humaine, l’Humanisme, la Raison et le Droit, ont historiquement succombé à chaque attaque, dès qu’elle fut un peu  rude. Il se pourrait qu’un jour le modèle tout entier de la société occidentale, avec toutes ses conquêtes en matière de démocratie, de libertés, de tolérance, de créations artistiques, apparaisse aux yeux d’un historien du XXIIe siècle comme un vestige incongru. Si du moins il y a encore des historiens au XXIIe siècle. »

Il y a des articles qu’on écrit dans l’espoir de se tromper.

Pour en savoir plus, Harald Welzer, Les guerres du climat (Gallimard)

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OGM, l’infestation de punaises

Le temps est révolu où l’Eglise dictait sa loi à la société. Or le temps est advenu où la Techno-science dicte sa loi à la société ; même en Chine, où 96 % du coton est déjà transgénique ! Ce coton Bt est efficace pour détruire une noctuelle, permettant ainsi à une niche écologique de se libérer. Comme la nature à horreur du vide, les miridés (ou punaises) deviennent une infection. On ne sait pas encore si les bénéfices sur l’exploitation du coton n’ont pas été effacés par les dégâts occasionnés sur les autres cultures (LeMonde du 15 mai). L’évaluation d’une technologie de masse ne peut donc relever que d’un contrat social, au terme d’un large débat. Pourtant, ce sont les firmes semencières qui font la loi.

Lorsqu’en 1990 l’Union Européenne adopte une directive encadrant les essais de plantes transgéniques, les experts font tout pour limiter les effets de cette directive en France. Alors que la Directive 90/220 (Art. 7) prévoyait une information et une consultation du public avant un essai en plein champ et que l’assemblée nationale avait adopté en première lecture une transposition de la directive comprenant une telle consultation du public, Axel Kahn, alors président de la Commission du Génie Biomoléculaire (CGB) écrit dans LeMonde 27 mai 1992 : « Certaines des procédures envisagées dans les amendements semblent assimiler la construction d’un laboratoire de recherche à celle d’une centrale nucléaire. La conséquence inéluctable d’une telle crispation maniaque serait (…) le départ de notre pays des entreprises déterminées à relever un défi économique » Quelques semaines plus tard, le 13 juillet 1992, l’Assemblée Nationale adopte en seconde lecture une loi sur la dissémination des OGM qui est expurgée de toute consultation du public pour les essais au champ…

Loin d’être un simple problème de stratégie technico-économique entre les agricultures intensives européennes, américaines et chinoises, les plantes transgéniques posent toute une série de questions, qui sont d’ordre agronomique (gestion de filières séparées pour éviter le totalitarisme d’une technologie, etc.), environnemental (effets sur les écosystèmes et la biodiversité, etc.), sanitaire (bien que très incertains, les effets sur la santé ne sont pas sérieusement évalués) et surtout socio-économique (mise en dépendance des paysans, etc.). Les sciences sont citoyennes, ou bien elles ne sont qu’appendices de la société libérale capitaliste. Pour de plus amples informations, http://sciencescitoyennes.org/spip.php?article1442

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liberté contraceptive ou planification ?

La pilule contraceptive est âgée de 50 ans aux Etats-Unis (autorisation en mai 1960). Liberté de  contraception ? Planification indicative ou impérative ? En France, la loi Neuwirth de 1967 stipule : « Nous estimons que l’heure est  désormais venue de passer de la maternité accidentelle et due souvent au seul hasard à une maternité consciente et responsable. » Un enfant quand je veux, si je veux ? Les naissances planifiées sont passées de 59 % en 1970 à 83 % en 1995. Mais cette « planification » repose majoritairement sur des choix personnels. (LeMonde du 13 mai 2010). Pour l’instant, la maîtrise de la fécondité ne résulte que d’un choix de la femme, la pilule participe de sa libération, de la libre disposition de son corps. C’est un progrès énorme pour les femmes, pour la liberté sexuelle, pour la limitation volontaire des naissances. Cela ne suffit pas.

Il s’agit aujourd’hui de reprendre le contrôle des conditions d’existence de nos sociétés. Avec les moyens contraceptifs, nous avons une certaine prise sur  la croissance démographique alors que nous avons toujours le problème des ventres creux : plus d’un milliard de personnes ne mangent pas à leur faim. Les démographes pensent que nous allons passer de 6 milliards à 9 milliards en moins de 40 ans. Yves Cochet a un point de vue contraire : « Il existe une corrélation historique entre la quantité totale d’énergie dans le monde et, d’un autre, le niveau démographique et le niveau de vie. Cette corrélation est si forte qu’on peut émettre l’hypothèse d’une causalité : moins il y aura d’énergie disponible, moins la planète pourra accueillir d’individus à un certain niveau de vie. Si cette hypothèse est vraie, comme je le crois, le nombre maximal d’humains sur terre, au niveau de vie moyen actuel, déclinera d’environ 7 milliards vers 2025 à environ 5 milliards en 2050, puis 2 à 3 milliards en 2100. » Que ce soit à la hausse ou à la basse de la population mondiale, il n’y a pas de fatalité puisque nous avons la pilule, le préservatif, le stérilet, etc.  

La contraception n’est pas qu’un moyen de libérer les femmes, c’est aussi un moyen de maîtriser l’évolution démographique. Au début des années 1970, Paul Ehrlich proposait de créer aux USA un organisme de planification, un « bureau de la Population et de l’Environnement » qui apprécierait le niveau de peuplement optimal, et préconiserait les mesures permettant d’y arriver. Pour Paul Ehrlich, l’éducation sexuelle, c’était la présentation de la fonction reproductrice comme une composante parmi d’autres de l’activité sexuelle, qui demande à être maîtrisée selon les besoins de l’individu et de la société. Il aurait voulu que les Etats-Unis inaugurent une politique malthusienne pour avoir la possibilité d’exporter l’idée à l’échelle mondiale. Les Etats-Unis ont préféré exporter Walt Disney, Coca Cola, McDo et les GI’s ! Et la population de grimper…

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l’effondrement de notre société (suite)

Notre société a poussé la division du travail à son extrême, chacun de nous est  dépendant d’une suite de travaux parcellaires de plus en plus éloignés de notre lieu de vie et nécessitant une énergie fossile de plus en plus importantes. Tout peut s’effondrer brutalement comme un château de cartes. Joseph Tainter avait analysé l’effondrement de sociétés anciennes complexes, comme l’Empire romain ou la civilisation Maya. Voici ce que cela donnerait transposé aux sociétés modernes :

Lorsqu’une société se développe au-delà d’un certain niveau de complexité, elle devient de plus en plus fragile. Une simple crise du crédit aux USA entraîne déjà des conséquences mondiales. Les crises écologiques à venir sont porteuses d’une déstabilisation encore plus grande. Pourtant nous accroissons constamment notre complexité, prenons l’exemple de la santé. Comme les généralistes ne suffisent plus à satisfaire une demande de soins de plus en plus sophistiqués, nous construisons des  hôpitaux. Avec les progrès des techniques médicales, il faut installer des centres hospitaliers dans les villes, des services de plus en plus spécialisés, des appareillages de plus en plus onéreux. Les dépenses augmentent encore plus vite que le PIB. Comme l’hôpital commence à coûter trop cher, il faut mettre en place un système de cotisations sociales généralisées, et la financer en ponctionnant l’épargne de la population. Comme cela ne suffit pas, on soigne à crédit par l’emprunt pour couvrir le déficit de la sécurité sociale. Comme la population se plaint des charges croissantes, il faut faire payer de plus en plus de choses par les patients eux-mêmes tout en augmentant le nombre de fonctionnaires des impôts. Tout cela s’accompagne de plus de spécialistes, de plus de ressources à gérer, de plus de coercition – et, in fine, moins de retour sur l’argent dépensé.

Au bout du compte, on atteint un point où toutes les énergies et les ressources à la disposition d’une société sont nécessaires uniquement pour maintenir un niveau de complexité croissante dont le système de soins n’est qu’un des aspects. Puis, quand une crise économique systémique ou un blocage énergétique survient, les institutions complexes n’ont plus les moyens de survivre et les malades se retrouvent livrés à eux-mêmes. Alors émerge une société moins complexe, organisée sur une plus petite échelle, avec une médecine de proximité, si l’effondrement se passe en douceur…

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l’effondrement de notre société complexe

D’un côté on a peur que les plans d’austérité ne compromettent la croissance, de l’autre on nous voudrait « rationnés, mais heureux » (contre-enquête du Monde  / chronique d’Hervé Kempf, 12 mai). D’un côté il y a la pensée dominante selon laquelle bonheur et emploi dépendent de la croissance économique, de l’autre l’idée nouvelle que, confrontés au pic pétrolier et au réchauffement climatique, si nous ne pratiquons pas le rationnement choisi, ce sera un rationnement violent qui s’imposera. Qui croire ?

Il faut d’abord constater que la rigueur budgétaire qui s’impose à la Grèce, la France ou l’Espagne pour résorber les déficits est une nécessité absolue. Que ce soit un ménage ou un pays, il est impossible de vivre indéfiniment à crédit. Il faut ajouter que la planète nous a fait une avance non remboursable en mettant gratuitement à notre disposition des ressources naturelles non renouvelables. Cette période faste est en train de se clore par épuisement du crédit et des ressources minières. Ces deux éléments réunis nous montrent que la société de croissance est derrière nous, il faut inventer autre chose. L’analyse de Joseph Tainter (dont le livre The Collapse of Complexe Societies est malheureusement non traduit en français) pousse au pessimiste. L’avenir est sombre pas simplement pour des raison financières ou écologique, mais parce qu’une société trop complexe s’effondre sous son propre poids et que les dirigeants refusent le passage en douceur : « Les élites qui profitent de la complexité refusent tout changement qui réduirait leur prélèvement sur la richesse produite. C’est le blocage ! » (cité par Yves Mamou qui cite Clay Shirky).

J.Tainter affirme que le propre de l’histoire humaine a été la création de mécanismes sociaux et technologiques de plus en plus complexes permettant de s’approprier l’énergie disponible dans l’environnement. L’augmentation de l’apport énergétique permet l’expansion de la communauté humaine. La population augmente en nombre, la vie sociale s’intensifie et se diversifie. La quantité d’énergie disponible ne suffit plus à satisfaire les besoins d’une population de plus en plus nombreuse, à défendre l’Etat contre les envahisseurs ni à entretenir les infrastructures. Le déclin se manifeste à travers la réduction des surplus alimentaires, la diminution de la consommation d’énergie par habitant, la déréliction des infrastructures de base, une méfiance croissante à l’égard de l’Etat, une anarchie grandissante, le dépeuplement des zones urbaines et les incursions de plus en plus fréquentes de bandes de pillards. Selon Tainter, une civilisation pleinement développée est au bord de l’effondrement lorsqu’elle atteint un seuil au-delà duquel le simple maintien en l’état de ses structures requiert une dépense d’énergie croissante, tandis que la quantité d’énergie qu’elle est en mesure d’assurer à chaque habitant ne cesse de diminuer. La société civilisée s’effondre brutalement lorsque cesse soudainement l’afflux d’énergie. Nous y sommes ! (in L’économie hydrogène de Jérémy Rifkin (éditions La découverte, 2002)

Sans les combustibles fossiles, la civilisation industrielle moderne cesserait immédiatement d’exister. Refuser la sobriété énergétique et l’égalisation des conditions aujourd’hui, c’est subir un rationnement violent et inégalitaire demain.

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