Padak, pas d’accord

L’actualité n’a pas d’importance en soi, l’important c’est ce qu’on fait de l’actualité, si on la juge ou non digne d’intérêt. Ainsi, le 4 janvier  2008, c’était la joie dans la Biosphère, le rallye Lisbonne-Dakar 2008 avait été annulé. Padak, personne ne pouvait être d’accord avec le Dakar. Selon Al Qaida, il ne rassemblait qu’un ramassis de « croisés, d’apostats et de mécréants ». ; on était presque proche de la vérité quant aux participants.

En fait il s’agissait uniquement d’un événement spectacle qui n’existait que parce le début du mois de janvier est en général assez vide d’informations ; il faut donc meubler ce vide existentiel par l’essence de compétiteurs motorisés. En conséquence cette organisation mercantile, organisée depuis 1978 par l’ASO (Amaury Sport Organisation), gaspillait l’énergie fossile, agressait la flore et la faune, occasionnait nombre d’accidents et devenait la vitrine de l’idiotie occidentale. Ce jeu de grands enfants représentait une approche peu respectueuse des biotopes traversés et agressés par cette furie mécanique. Vélorution réclamait à juste titre l’abandon du Dakar… le « Dakar » a lieu depuis 2009 en Amérique du Sud !

Aujourd’hui Hervé Kempf s’interroge : « Le bilan carbone » du « Dakar » serait à plus de 20 000 tonnes de CO2. Faut-il interdire les courses d’autos ? » (LeMonde du 3-4 janvier 2009). A Copenhague, c’est une des mesures qui auraient du être prises, la lutte contre le réchauffement climatique manque de repères symboliques. D’autant plus que le sport automobile a bien d’autres inconvénients, bien analysés par Ellul et Illich :

« Il faut prendre divertissement non pas au sens d’amusement, mais au sens pascalien : l’homme est diverti, c’est-à-dire détourné de penser à soi-même, à sa condition humaine, mais aussi détourné des plus hautes aspirations, du sens de la vie, des objectifs supérieurs. L’importance du sport étant désormais dominante, il faut créer l’événement sportif, rien que pour le spectacle. On fabrique alors des monstruosités comme cette course de Paris-Dakar, insultante comme gaspillage au milieu des pays de famine, démonstration de la puissance occidentale parmi les impuissants du tiers-monde, parfaite vanité. » (Jacques ELLUL, Le bluff technologique, 1986)

« Entre des hommes libres, des rapports sociaux productifs vont à l’allure d’une bicyclette, et pas plus vite. » (Ivan Illich)

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Sarkozy et la langue de bois

Nous ne voyons pas pourquoi un Président de la république se forcerait aux vœux télévisés quand il n’a rien à dire. Lors de ses premiers vœux de nouvel an en décembre 2007, Sarko avait tenté de lancer un débat sur la « politique de civilisation ». Il n’a jamais réussi à lui donner un contenu. Pourtant les crises financières et écologiques à répétition qui ont déjà commencé nous obligent au changement de civilisation. Les recettes sont déjà connues :

– le facteur nature doit devenir la catégorie essentielle de la pensée sociale ; ce sont les possibilités de la planète qui conditionnent l’activité humaine ;

– nous devons comprendre que l’humanité sans la nature ne serait plus humaine. Opposer l’amour des hommes et l’amour de la nature serait une erreur, l’espèce humaine n’étant qu’un élément de la nature ;

– tous les revenus doivent être encadrés par des normes minimales ET maximales, par exemple le RMA ou revenu maximal admissible ;

– les membres de la classe dominante doivent s’engager à pratiquer la simplicité volontaire pour une sobriété heureuse ;

– à l’opposé de la croyance en une mégapolisation du monde, littéralement hors-sol, on doit réhabiliter la notion du territoire comme unité vivante de la nature et de la culture ;

– l’Etat central doit abandonner la plupart de ses prérogatives au profit des entités territoriales ; des systèmes de partage équitable doivent été mis en place à l’échelle locale ;

– l’approche fiscale de la fécondité est remplacée par la formation des jeunes et des adultes en matière de capacité de charge de la planète, ce qui entraîne la baisse volontaire de la natalité ;

– le complexe agroalimentaire va faire faillite. Pour atténuer les conséquences néfastes sur la production agricole, la population occidentalisée doit diminuer sa consommation de viande et se rapprocher de la terre ;

– l’innovation doit se recentrer sur les besoins fondamentaux de l’humanité (alimentation, santé, lien social) ; nous devons abandonner nos moyens techniques disproportionnés (pesticides, OGM , nanotechnologies, géo-ingénierie…) ;

– le slogan du XXe siècle, « plus vite, plus loin, plus souvent et moins cher » doit devenir « moins vite, moins loin, moins souvent et beaucoup plus cher » ;

– les décideurs doivent prendre conscience que « l’ensemble du peuple » ne se réduit pas aux générations actuelles d’un pays déterminé. Chaque membre d’une instance délibérative doit se faire l’avocat des acteurs-absents, à savoir les habitants des autres territoires, les générations futures, mais aussi les non-humains (la biodiversité).

Mais que fait donc Sarkozy face à l’urgence socio-écologique? Il tente d’adopter un style, en fait ce n’est qu’un verbatim en langue de bois (LeMonde du 2 janvier 2009) :

– nous allons relever le défi de l’environnement ;

– il nous reste encore bien du travail ;

– il va nous falloir faire reculer le chômage ;

– nous réformerons notre justice ; 

– nous devons rester unis.

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LE VILAIN CHASSEUR

Etre chasseur, c’est une façon d’être, une manière d’agir dans la nature. Le chasseur ne devrait pas être cette fourmi motorisée qui envahit les continents avant d’avoir appris à « voir » le jardin à côté de chez lui. Un bon chasseur, c’est une personne qui connaît les goûts, les habitudes, les comportements du gibier. Savoir chasser, savoir pêcher, c’est savoir penser comme un canard, une perdrix, ou une truite. C’est se mettre à leur place, c’est adopter leur point de vue. Aldo Leopold était un bon chasseur, ce qui lui a permis d’élaborer une land ethic. Toute les éthiques reposent sur un seul présupposé : que l’individu est membre d’une communauté de parties interdépendantes. L’éthique de la Terre élargit simplement les frontières de la communauté de manière à y inclure le sol, l’eau, les plantes et les animaux. Comme les autres éthiques, celle-ci implique le respect des membres de la communauté. Donc Leopold cultivait les vertus de l’autolimitation du désir de  capture. Il s’agit, par respect pour l’animal qu’on traque, d’imposer des freins  l’action des chasseurs ; il faut par exemple chasser léger, une cartouche seulement par animal, tirer les perdrix à la volée, etc. Une éthique, écologiquement parlant, est une « limite imposée à la liberté d’agir ».            

Ce code de bonne conduite des chasseurs n’est pas appliqué par Serge Dassault qui se permet de chasser la biche juché sur une tourelle installée sur son 4×4, fusil 7.64 à lunette en main (8 biches dans la journée à lui tout seul). Il n’est pas appliqué par Patrick-Louis Vuitton qui poursuit des cervidés jusque sur des terrains privés : « Quand le cerf est aux abois, j’en deviens propriétaire. Je dois donc l’achever au plus vite », même si c’est en barque, à la dague, là où les cervidés n’ont plus pied. Il n’est pas tolérable que les trop riches comme Vuitton puissent s’adjuger les droits de chasse à courre sur 5370 hectares de forêt domaniale. La culture des chasseurs ne repose plus sur le rapport avec les animaux, mais sur le rapport avec la propriété. Il n’est pas moral que les chasseurs ordinaires utilisent des fusils à répétition. La chasse même devient anormale en France : ce qui persiste d’animaux libres dans les forêts ne ressemble plus qu’à du cheptel d’élevage agrainé et réintroduit pour alimenter le stand de tir des « gestionnaires ». D’ailleurs, comment un million de chasseurs pourraient-il évoluer en France de façon éthique dans des paysages urbanisés, fragmentés et « désanimalisés » ?

source documentaire :

Aldo Leopold, Almanach d’un comté des sables

Catherine et Raphaël Larrère, Du bon usage de la nature

Gérard Charollois, Pour en finir avec la chasse  (la mort-loisir, un mal français)

LeMonde du 1er janvier 2010 : scènes de chasse et noms d’oiseaux

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responsabilité carbone

Aux dernières Assises de la Consommation, on soulignait que 79 % des Français se disent prêts à consommer de façon responsable, mais ils ne sont que 4 % à le faire vraiment. Le Conseil constitutionnel a donc toutes raisons de rappeler aux Français les termes de leur Loi fondamentale : « Toute personne doit, dans les conditions définies par la loi, prévenir les atteintes qu’elle est susceptible de porter à l’environnement ou, à défaut, en limiter les conséquences. » (article 3 de la Charte de l’environnement) et que « Toute personne doit contribuer à la réparation des dommages qu’elle cause à l’environnement » (Article 4). En d’autres termes, cela veut dire que nous devons tous payer la taxe carbone, mais sans exemptions ni exonérations de notre responsabilité dans les émissions de gaz à effet de serre.

Pourtant l’éditorial du Monde (31 décembre) n’a pas du tout les mêmes conclusions : « Après l’échec du sommet de Copenhague, nul doute que les Français seront encore moins prêts à se laisser convaincre » (par une taxe carbone). Pour un grand quotidien de référence, l’essentiel ne devrait pas être le fait que les Français n’apprécient pas la taxe carbone (dont la première mouture a été invalidée par le Conseil constitutionnel). Le Monde aurait du souligner la nécessité absolue de lutter tous ensemble contre le réchauffement climatique dont nous sommes responsables.

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bonne année 2050

En ce jour de réveillon en 2050, Léa confectionne un repas 100 % local, ce qui réduit considérablement la variété des mets possibles. Elle se souvient comme d’un rêve des papayes que ses parents lui achetaient à la fin du XXe siècle, sans se soucier du fait qu’il avait fallu dépenser pour cela plusieurs litres de pétrole. De toute façon elle est bien seule, il ne lui reste plus qu’un dernier descendant. Ses deux autres petits-enfants sont décédés il y a trois ans, ils ont succombé à l’une de ces nouvelles maladies à côté desquelles l’épidémie de grippe aviaire, qui avait frappé la France en 2010, n’avait été qu’une discrète entrée en matière. Ils avaient été victimes d’un virus apparu en Sibérie du Nord, là où le permafrost a cédé la place à des marais à partir de l’année 2025. Maintenant des millions de personnes sont au chômage. Le gouvernement français vient d’interdire toute manifestation et même les rassemblements de protestation. Le ministre de l’Intérieur vient de prendre un de ces décrets maudits, c’est l’armée qui réprimera d’éventuels troubles de l’ordre public.

Léa a renoncé depuis longtemps à l’idée d’acheter une automobile ; en 2035, l’Union européenne avait réservé l’usage des biocarburants aux véhicules utilitaires. Même l’utilisation du charbon liquéfié a été proscrite car les sols et surtout les océans qui séquestraient le carbone depuis toujours, ne jouaient plus leur rôle, renforçant ainsi très brutalement l’effet de serre anthropique et les dérèglements du climat. Cet été, Léa avait appris par une amie que le thermomètre était monté jusqu’à 45°C à Caen.

La Biosphère vous souhaite un bon réveillon 2009, coloré de sobriété joyeuse.

NB : pour en savoir plus sur l’histoire de Léa, lire « Le développement durable, maintenant ou jamais, de D.Bourg et G.Rayssac

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la fin du capitalisme mondialisé

Le capitalisme mondialisé  va être brisé par son succès. Une concurrence entre nations qui porte sur les mêmes biens industriels va rendre les échanges intenables pour les plus faibles, y compris la France. Abou Dhabi préfère les centrales nucléaires coréennes à l’EPR français, c’est à l’allemand Siemens que la Chine a confié ses trains à grande vitesse, même la commission européenne choisit l’Allemagne pour ses satellites du réseau Galileo. L’éditorial du Monde (29 décembre 2009) conclut : l’équipe France semble avoir bien du mal à produire les champions industriels de demain. » Triste conclusion car on ne voit pas d’issue à l’heure où la Chine, remontant les filières (depuis sa spécialisation passée sur le textile et les jouets) est en passe de maîtriser scientifiquement et techniquement tous les produits les plus sophistiqués. Dès 2009, les exportations chinoises devancent le premier exportateur mondial, l’Allemagne.

Les anciens pays industrialisés sont d’autant plus perdants que la Chine possède des matières premières stratégiques. Contre les règles léonines de l’OMC, elle pratique des restrictions sur la bauxite, le coke, le germanium, le manganèse, le silicium, etc.  Pour élever le niveau de vie de sa population, Pékin mène une politique habile de grande puissance pour contrôler le plus de filières technologiques possibles. Ces filières dépendent de la maîtrise de 29 métaux rares et de 17 terres rares. Utilisées en quantités infinitésimales, ces éléments améliorent les propriétés physico-chimiques des autres métaux. Les écrans à cristaux liquides contiennent de l’indium, les ampoules basse consommation  du gallium, les cellules solaires du sélénium, etc. Or la Chine assure 95 % de la production mondiale de terres rares (LeMonde du 30 décembre). Les anciens pays industrialisés vont donc être doublement étranglés.

 En fait, c’est le système capitaliste mondialisé global (y compris la Chine) qui est confronté à une limite encore plus forte que la concurrence internationale. Le sous-sol contient plus de 90 % de nos énergies (charbon, pétrole, gaz, uranium) ; vous connaissez déjà le pic pétrolier (pour le pétrole conventionnel), il y aura bientôt le pic énergétique global. Mais il y a aussi tous les métaux. Votre voiture, votre ordinateur, votre téléphone mobile sont entièrement constitués à partir des matières du sous-sol. De même que vos panneaux solaires photovoltaïques, votre éolienne et vos diodes électroluminescentes. Bientôt vous vous heurterez à un seuil, la « barrière minéralogique », en dessous duquel la trop faible teneur du minerai interdit toute extraction économiquement rentable. Les profils temporels de production des grandes mines du monde ressemblent à la  courbe en cloche de la production de pétrole : ça croit pendant un certain temps jusqu’à atteindre un maximum pour décroître ensuite inexorablement. En outre, tout comme pour le pétrole, le minerai de la partie descendante de la courbe est de moins bonne qualité et demande plus d’énergie à l’extraction que celui de la partie ascendante. De nombreuses parties du monde ont déjà épuisé leurs réserves minérales : L’Europe abritait plus de 60 % des mines du monde en 1860, elle n’en a plus que 5 % aujourd’hui. Face à ces constats accablants, les solutions ne sont pas technologiques, mais civilisationnelles.

La décroissance n’est même plus un objet de débat, pour ou contre. La décroissance est notre destin.

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Claude Allègre n’est qu’un saltimbanque

Claude Allègre va encore râler, lui qui est à classer parmi les négationnistes (négateurs) du réchauffement. En effet, depuis environ un siècle et demi que les températures sont régulièrement relevées, aucun décennie ne s’est révélée plus chaude que 2000-2009. Et l’année 2010 pourrait battre tous les records malgré un soleil en faible activité (LeMonde du 29 décembre). Pourtant Allègre se permettait de dire dans le Figaro magazine du 28 novembre que les climatologues, gens « scientifiquement pas sérieux », se consacrent à la modélisation « sans aucune considération pour l’observation » et qu’« il faudrait un grand plan spatial pour améliorer nos connaissances sur l’atmosphère et l’océan, car il n’y a plus de grandes missions sur le climat depuis vingt ans ».

Un démenti cinglant lui ait apporté par Jacques Blamont, conseiller du président du CNES (centre national d’études spatiales) dans le Figaro magazine du 24 décembre : « De nombreux instruments portés par des satellites fournissent quotidiennement les bases de la discussion en cours sur le climat. La constellation de cinq satellites A-Train (2004) étudie els nuages et les aérosols ; les glaces polaires sont connues grâce aux images de EOS, Envist et DMSP, et aux mesures de gravité de Grace et Goce ; le niveau des mers par Topex-Posédion, Jason I et II ; les variations spatio-temporelles des émissions des gaz par Iasi, OCO et Gosat ; la salinité de la surface océanique par Smos, lancé il y a peu. Le cycle de l’eau sous les tropiques sera étudié par Megha, et j’en oublie. A partir des données recueillies s’élaborent des modèles qui tentent de traduire la complexité des phénomènes. Contrairement à ce qu’affirme l’ex-ministre (qui, lorsqu’il était au gouvernement, a diminué les crédits du CNES deux années de suite), la communauté scientifique et ses agences spatiales assurent aujourd’hui le programme mondial de recherches climatiques qu’exige la situation. Il est constitué d’une quantité de missions, déjà fort coûteuses, loin de l’idée d’une « grande mission », bonne pour les tréteaux médiatiques. »

Malgré la qualité de cette intervention, Le Figaro magazine donne la parole à Jacques Blamont uniquement dans le « courrier des lecteurs ». Et Claude Allègre conserve les faveurs du Figaro, média qu’on peut donc classer parmi les climato-sceptiques. En effet, dans ce même numéro du 24 décembre, le dossier «  2000-2010, Dix révolutions qui ont changé notre vie », privilégie encore Allègre sous la rubrique « L’éveil de la conscience verte » : 

Nicolas Hulot est qualifié de « très alarmiste sur le réchauffement climatique », et dénigré sciemment : « On lui reproche le mélange des genres et un certain affairisme ». Al Gore, n’est que « l’ex-vice-président de Bill Clinton », qui « milite activement contre le réchauffement climatique », mais « à contre-courant de l’opinion américaine » ! Par contre Allègre est entièrement valorisé : « Ancien directeur de l’institut de physique du globe, Claude Allègre est à ranger dans le camp des climato-sceptiques. Pourfendeur des théories d’Al Gore, il dénonce sans relâche la menace d’une dictature des khmers verts. L’imposture climatique  sera le titre de son prochain ouvrage. »

 Qui se ressemble s’assemble, Figaro-Allègre même combat contre la planète !

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notre Terre-mère Pachamama

Il y a des jours où nous sommes heureux : LeMonde fournit l’information que nous aimerions donner ! Ainsi la chronique d’Hervé Kempf « Pachamama » (27-28 décembre) mérite d’être diffusée à tous les internautes de notre Biosphère. Quelques extraits :

La mère nature semblait inépuisable, aujourd’hui les géologues parlent d’anthropocène. Ce n’est pas par la voie technique que nous trouverons la solution à la  crise écologique. Elle est une crise civilisationnelle qui appelle une analyse spirituelle. Evo Moralès, président de la Bolivie, milite pour la reconnaissance de Pachamama, nom de la Terre mère dans les cultures indigènes. La Terre, dit-il, ne peut pas être considérée comme une simple ressource naturelle, elle est la maison de tous les êtres vivants.

Pour guérir Mère Terre, continue Moralès, il est nécessaire de comprendre que sa maladie a un nom : le système capitaliste mondialisé. Il n’est pas suffisant de dire que le changement climatique est le résultat de l’activité humaine. Il est nécessaire de dire que c’est un système, une façon de penser et de sentir, une façon de produire la richesse et la pauvreté, un mode de « développement » qui nous conduisent au bord de l’abîme. Afin de préserver la planète, la vie, et l’espèce humaine, nous devons en finir avec le capitalisme.

Il est heureux de voir qu’un politique, Président d’un pays, a la même orientation spirituelle que les auteurs de ce blog. Il faut féliciter le journaliste qui relate les propos d’Evo Moralès. Le fait que LeMonde permette la critique du capitalisme et l’expression d’une philosophie de l’écologie témoigne peut-être qu’un autre monde est possible …

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les apprentis sorciers de la techno

« Imaginons un monde où l’électricité serait abondante, bon marché et non-émettrice de gaz à effet de serre. » C’est ainsi que se termine l’article dithyrambique de Stéphane Foucart sur l’arbre artificiel qui va piéger le CO2 : demain y’aura des lendemains qui chantent ! Encore un exemple de la géo-ingénierie qui prend pour un fait acquis le fait que nous allons encore produire 70 millions d’automobiles chaque année : il n’est pas besoin d’économiser l’énergie, il suffit de trouver des remèdes technologiques aux conséquences négatives de la technologie. La résine miracle qui piège le carbone, fabriquée avec du pétrole pour éviter les effets de la combustion de pétrole, débute ses essais préliminaires dans un baraquement d’une douzaine de mètres de longueur, et déjà on parle de l’invention d’un des « types les plus intelligents de la planète ».

Juste en dessous, pour nous rassurer, un autre article (LeMonde du 26 décembre) sur l’immense supercherie d’un biologiste moléculaire dont les résultats ont été citées un demi-milliers de fois pour être invalidés aujourd’hui. Croyez vous encore à l’histoire de l’apprenti sorcier ? Ce n’est plus un dessin animé, les apprentis sorciers sont là tout autour de nous, dansant leur danse macabre techno avec l’aide des médias. Bien sûr les commentateurs récurrents de ce blog vont condamner le totalitarisme des technophobes verts. Cela ne changera pas le fait que notre système cultive la contre-productivité en croyant faire des progrès. Exemple :

Dans les années 1970, Ivan Illich avait déjà réfléchi à l’inefficacité de certains systèmes sociaux. Par exemple la « vitesse généralisée » d’un mode de transport n’est pas le simple rapport entre la distance parcourue et le temps du parcours. Elle ajoute à ce temps de parcours le temps passé à gagner de quoi se payer l’usage d’un mode de transport. Jean-Pierre Dupuy a calculé que la vitesse généralisée d’un automobiliste est de 7 kilomètres à l’heure, soit un peu plus que celle d’un piéton. La contre-productivité des transports automobiles fut renforcée depuis cinquante ans par une politique d’urbanisme et d’aménagement du territoire conçue autour de l’automobile. La construction du mythe de la vie heureuse en pavillon avec jardin entraîna un étalement urbain. Si bien que dans les pays de l’OCDE, le temps passé entre le domicile et le travail n’a pas diminué depuis 1850, malgré la prétendue augmentation de la mobilité et de la vitesse de la modernité automobile. Le gain de vitesse des engins fut intégralement absorbé par l’étalement des faubourgs, l’éloignement géographique des lieux d’habitation et de travail, des écoles et des hypermarchés. Au lieu d’abandonner ce système  débile, on veut cultiver des arbres artificiels pour piéger le CO2

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le père Noël est une ordure

La fête de la Saint Nicolas (Nicolas de Lycie, protecteur de tous les enfants) était célébrée le 6 décembre. Entre le XIX et le XXe siècle, des chrétiens associent cette « fête des enfants » à celle de l’Enfant Jésus : Saint Nicolas fera désormais sa tournée la nuit du 24 décembre. A partir de 1930, une série de publicités pour la marque Coca-Cola fixe le costume rouge et blanc. Le système marchand s’empare dorénavant des mythes religieux. En 1900, il suffisait d’une orange donnée à un enfant pour avoir l’impression d’un immense cadeau. En l’an 2000 les consoles de jeux vidéos du père Noël finissent par intoxiquer les jeunes esprits.

« Le Père Noël est un des pires flics de la terre et de l’au-delà, le Père Noël est le camelot immonde des marchands les plus fétides de ce monde. Les marchands de rêve et d’illusion, véritables pirates des aspirations enfantines, colporteurs mercantiles de l’idéologie du flic, du fric, du flingue… Face à la grisaille géométrique des cités-clapiers, bidonvilles de la croissance, face aux arbres rachitiques, aux peuples lessivés, essorés, contraints, s’étale la merde plaquée or-synthétique, la chimie vicieuse des monceaux de jouets, un dégueulis de panoplies criardes, avec, derrière la porte capitonnée le ricanement malin des marchands. » Ce texte n’a pas vieilli. Pourtant, il a été écrit en janvier 1973 (La gueule ouverte n° 3)

 Conclusion : La puissance des illuminations installée pour Noël en France est équivalent à celle d’un réacteur nucléaire, soit 1300 MW. La part des jouets importés dans les achats du Père Noël européen est de 90 %. Mais, alors que la Chine fabrique 65 % des Barbie dans le monde, la part de  ces poupées vendues en Chine n’est que 2,5 %. Quand on sait aussi que 95 % des Français comptent revendre leurs cadeaux de Noël, une seule solution s’offre à nous, zigouiller le père Noël.

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soyons sexy

Pour Monsieur, achetons Jean Paul Gaultier « Le male », pleine page de pub pour un parfum : beau biceps, beau tatouage, on en mangerait. Soyons sexy, achetons pour Madame Jean Paul Gaultier « classique », pleine page de pub pour un parfum : belle poitrine, cuisses bien en vue, on en redemanderait. Achetons Trésor de Lancôme car « l’amour est un trésor », surtout quand on peut s’offrir en prime Kate Winslet en page entière. Oublions la souris avec Acer Touch Technology, autre pleine page de pub, et mettons notre « poche en rêve » avec iPhone3G, dernière page et pub toujours dans LeMonde du 24 décembre.

  Passons aux choses sérieuses, un peu moins sexy. Après l’échec de Copenhague, l’Europe pleure et l’OPEP rit. L’Inde est ébranlée par des tensions régionalistes. La burqa divise la majorité et l’invasion touristique menace l’île de Pâques. La population guinéenne voit passer les trains de bauxite sans en profiter et une vague de condamnations à mort  frappe les opposants en Ethiopie. Tout cela dans LeMonde du 24 décembre.

 Finalement LeMonde est schizophrène, la touche sexy enveloppe de couleurs les misères du monde. Finalement la société occidentale est schizophrène, qui refuse sa responsabilité dans les malheurs du monde pour s’étourdir à coup de parfum et de gadgets électroniques. Finalement les médias sont à l’image d’une population privilégiée… et réciproquement…                                                                

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le vrai bilan de Copenhague

Quelques mots suite au fiasco de Copenhague.

Désolé, ils ne sont pas très sexy !

– Le patronat d’un grand pays industrialisé fêtait au champagne au Bella Center, vendredi soir, l’échec de la convention de Copenhague.

– Sarkozy, Obama, Hu Jintao, Manmohan Singh sont absolument d’accord pour que la production de choses inutiles augmente encore, encore, encore.

– Il n’existe aucun accord puisque les 192 nations réunies à Copenhague n’ont fait que prendre acte d’un texte sans l’approuver. Il n’y a aucun accord puisqu’il n’y a aucun engagement.

– Il est désormais clair qu’il n’est plus possible de faire confiance aux politiques, devenus des hommes d’affaires et non des responsables politiques. Le  court terme et les visions géostratégiques l’emportent sur le fondamental : notre survie.

– Chacun doit éviter que ce fiasco se transforme en succès pour les climato-sceptiques, les pétroliers et autres lobbies – dont la cupidité, l’esprit de rentier, et pour certains le simple ego, l’emportent sur tout, y compris leur simple intérêt d’être humain.

– Notre niveau de vie repose sur l’échange entre nos réacteurs nucléaires et leurs jouets, leurs ordinateurs, leurs vêtements, leurs objets programmés pour la benne.

– Ce que les politiques n’ont pas été capables de faire, les consommateurs, s’ils le décidaient pourraient le faire, par exemple en boycottant les produits chinois.

– La viande mobilise 70 % des terres arables et l’élevage est responsable de 18 % des émissions totales de gaz à  effet de serre.

– Si la tendance se poursuit, on peut s’attendre à avoir une concurrence entre l’alimentation animale et humaine.– La viande est un signe extérieur de richesse.

– Manger moins de viande, c’est bon pour la planète.

– L’interprofession bovine a vite riposté à ce feu nourri de critiques.

– Non, on ne fait pas un monde juste avec de beaux sentiments.

Source : LeMonde du 23 décembre, peu avant le gaspillage démentiel provoqué par les « fêtes » de Noël.

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Droit à la croissance, crime contre la Biogée

La Chine est satisfaite de l’échec de Copenhague, le droit au développement des pays en développement est ainsi respecté. Les Chinois sont en effet très fiers de pouvoir imiter le modèle illusoire basé sur l’automobile et le pétrole ; leurs sociétés (BAIC, CNPC, Sinopec…) font désormais concurrence aux multinationales occidentales. Les villes chinoises sont censées accueillir bientôt des millions de nouveaux citadins grâce à l’assouplissement du hukou, le permis de résidence : on souhaite relancer l’économie en accroissant la demande intérieure. Comme Sarko, les Chinois ne parlent qu’en termes de croissance soi-disant verte. Pourtant nous savons que la Chine est devenue le premier pays pollueur de la planète. Nous savons que la croissance économique a déjà dépassé les limites de notre globe. Nous savons que, suite aux non-résultat de la conférence de Copenhague, la température globale pourrait atteindre 3°C d’ici à 2050.

 Le philosophe Michel Serres souligne que l’échec de Copenhague était écrit d’avance car on avait oublié d’inviter un partenaire essentiel, composé d’air, de feu, d’eau et d’êtres vivants, la Biogée (pour dire en un seul mot la Vie et  la Terre). C’est pourtant un pays dont nous sommes tous issus, mais qui n’a pas ni ambassadeur ni langue diplomatique. Le philosophe ajoute : « Le jeu institutionnel de demain doit se jouer à trois : nous ne pourrons plus rien faire sans tenir compte de la Biogée. » C’est ce que s’efforce de faire ce blog biosphere, défendre les intérêts de la Biogée. Mais le vacarme des croissancistes empêche toute réflexion philosophique sur l’avenir de notre civilisation thermo-industrielle. Il empêche aussi que nous écoutions un autre acteur important, absent à Copenhague, les générations futures.

NB : Toutes les informations de ce post sont dans LeMonde du 22 décembre et son supplément économique.

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un éditorial trop mou

Fabriquer l’éditorial du Monde est un exercice de haute voltige, rester incisif tout en ne déplaisant à personne. Celui du 20-21 décembre sur Copenhague est donc trop mou. Ce n’est pas d’une « déception » dont il faut parler à propos de la foire d’empoigne danoise, mais d’un lamentable fiasco dont Obama est le principal responsable. Selon le climatologue Hervé Le Treut, les engagements qui résultent de Copenhague sont loin de permettre à l’humanité de rester en-deçà des 2°C. Un accord politique aurait du déboucher sur une réelle contrainte pour les pays développés, par exemple limiter la vitesse sur autoroutes et la quantité même de ce que chacun peut dépenser comme essence. En fait, il n’y a pas une compréhension en profondeur des enjeux écologiques, d’abord parce que les dirigeants ne sont pas soumis sur ces problématiques mondiales à la pression de leur propre opinion publique.

            Ce n’est pas la faiblesse de l’ONU qu’il faut dénoncer, mais l’incapacité maintenant notoire d’Obama à mesurer les conséquences internationales du niveau de vie américain, à la fois fort émetteur de gaz à effet de serre mais aussi modèle de comportement exporté aux quatre coins de notre planète. Pourtant l’éditorial du Monde n’accuse en rien les USA et s’acharne sur la Chine, « au cœur de l’échec de Copenhague », qui « ne supporte pas l’idée d’un contrôle international ». Mais c’est la cylindrée des automobiles américaines qui devrait être contrôlée, c’est la taille démesurée de leurs villes (qui oblige à la voiture) qui devrait être limitée, ce sont les Américains qui devraient se sentir les plus responsables (les plus coupables) du réchauffement climatique.

En définitive, seule la récession économique qui accompagnera le peak oil atténuera le changement climatique, mais cela se passera dans la douleur. Puissent les Américains souffrir plus que les autres…

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l’essentiel du Monde

Né le 18 décembre 1944, LeMonde a 65 ans. Bon anniversaire, nos vœux les plus sincères. Mais que ce quotidien soit notre journal de référence ne veut pas dire qu’il soit exempt de critiques. Voici nos propres codicilles en réponse aux deux questions posées (cf. supplément rattaché au Monde du 19 décembre).

1) Aujourd’hui, « Le Monde», indépendant politiquement et économiquement, est-il encore essentiel ?

biosphere : cette question est biaisée car elle tient pour acquis l’indépendance du Monde. Or la forte dépendance d’un quotidien envers les recettes publicitaires empêche une véritable liberté de parole. En effet, pour faire plaisir aux annonceurs, le journal est bien obligé de célébrer la société de consommation. Alors, quand on a ignoré mentalement toutes les pages de pub apparentes ou camouflées, on peut certes aller à l’essentiel. Mais toute vérité étant relative et en gestation chaque lecteur doit faire évoluer sa propre synthèse : si l’information apportée par notre quotidien est essentielle, elle n’est qu’un préalable. Si tout journaliste est un passeur des faits et gestes de nos sociétés, il lui est difficile dans le cadre d’un journal événementiel de ranger les idées dans un ordre convenable. Nous ne pouvons pas nous contenter de ce savoir en miette, il nous faut une grille préalable d’analyse. Construire un tel tamis, chausser des lunettes théoriques, c’est l’objectif de ce blog « biosphere ».

2) Quel rôle « LeMonde »  a-t-il joué dans votre propre histoire ?

biosphere : Le problème des lecteurs, c’est qu’ils peuvent difficilement faire entendre leur voix. Le courrier des lecteurs est une approche partielle que nous avons déjà utilisée, mais le miracle est arrivé : lemonde.fr permet à tous les abonnés de créer leur propre blog. Ce serait d’évidence un outil formidable pour progresser ensemble dans la recherche de la vérité si les commentateurs ne cherchaient pas souvent l’affirmation de soi au lieu de construire une cohérence collective. Mais encore une fois merci au quotidien d’avoir mis en ligne les blogs lemonde.fr et quand Le Monde cessera d’être croissanciste grâce (entre autres) à notre action, tout sera presque parfait.

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Copenhague et la F1

Le mécanisme actuel des négociations climatiques est dans le coma (cf. communiqué de presse FNE + CFDT ce jour 18 décembre). Heureusement, loin des bavardages diplomatiques entre chefs d’Etat, la société civile commence à bouger : la formule 1, incitation vociférante aux émissions de gaz à effet de serre, est à l’agonie. L’industrie automobile  est dans l’impasse financière, Honda a abandonné la F1 en 2008, imité cette année par BMW et Toyota ; Renault suit la même voie, cédant la majeure partie du capital de son écurie. Mais cela relève de la crise financière, il y a plus grave pour l’avenir de la F1. Les protagonistes des sports mécaniques sont confrontés au glissement des valeurs. La crise écologique pousse à abandonner le culte de la vitesse, le culte du bruit, le culte de l’abrutissement des masses qui font vroom vroom au volant par procuration puisque maintenant le radar les attend au tournant.

Malgré l’échec de Copenhague, on se prépare à arrêter les courses automobiles. Le peak oil du pétrole conventionnel est déjà passé, dans cinquante ans il va falloir nous passer complètement de 85 % de dépendance aux énergies fossiles, nous allons (si tout se passe au mieux) vers la jouissance dans la frugalité. La croissance était synonyme de gaspillage, il faut économiser l’énergie pour ne pas dépasser 2 °C, la mesure symbolique par excellence serait l’arrêt des compétitions de F1.

Source documentaire : LeMonde du 18 décembre

Renault lève le pied en formule 1 

Il peut y avoir du plaisir à agir pour l’environnement (Jean –Louis Etienne)

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le nationalisme à Copenhague

Eric Besson estime qu’il faut « réaffirmer la fierté d’être français », Nadine Moreno veut qu’un jeune musulman « se sente français lorsqu’il est français », les racistes  commencent à s’énerver. Ce n’est pas ainsi que nous préparons le monde de demain à l’heure de Copenhague. Parce que les uns se sentent plutôt Français pendant que d’autres se veulent Américains, ou Brésiliens, ou ethnocentrés, nous n’arriverons jamais à conclure quelque conférence internationale que ce soit. Car les quelque 120 chefs d’Etat et de gouvernement ne sont pas au Danemark pour résoudre les problèmes de la planète, ils ont été élus pour  représenter d’abord les intérêts de leur nation particulière. On va donc promettre un peu d’argent, mais surtout ne pas baisser ses propres émissions des gaz à effet de serre car «  maintenir le niveau de vie de nos nationaux est primordial. ».

Il ne devrait plus jamais y avoir de débat sur les identités nationales, il devrait y avoir une prise de conscience planétaire que nous appartenons tous à la même biosphère, que c’est la Terre qui est notre patrie, que nous dépendons du substrat qui nous fait vivre. A ce moment-là seulement, nous pourrons prendre des décisions qui puissent aller dans le sens de l’intérêt général. C’est ce qu’exprime d’une certaine manière le prince de Galles.

Charles d’Angleterre, inquiet de l’impact humain sur l’atmosphère de la planète, appelle à adopter une nouvelle approche : « Nous devons accepter l’idée que l’économie est dépendante de la nature, et non pas l’inverse. Après tout, la nature constitue le capital sur lequel se fonde le capitalisme. Au fur et à mesure de notre éloignement de la nature en faveur d’un recours aux inventions technologiques pour résoudre nos problèmes, nous voyons de moins en moins nos difficultés telles qu’elles sont, c’est-à-dire comme résultant de la perte de la notion d’équilibre et d’harmonie avec les rythmes de la nature, ses cycles et ses ressources limitées. Le fait que nous envisagions l’économie comme séparée de la nature n’est que l’un des signes de ce déséquilibre. Renouer des liens avec la nature, réaligner nos sociétés et nos économies sur ses possibilités, voilà, à mon avis, le véritable défi qu’il nous faut relever. Le sommet de Copenhague contribuera, je l’espère, à ce changement profond. »

Source documentaire :

 LeMonde du 16 décembre, Renouons notre lien avec la nature

LeMonde du 17 décembre, Le débat sur l’identité nationale dérape 

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nous n’avons aucune identité nationale

La IIIe république a idéalisé des personnages historiques et mythifié un territoire aux frontières idéales. Les langues régionales sont sacrifiées, l’école devient obligatoire, les paysans arrachés à leur terres pour nourrir l’industrialisation. Tel est le vrai visage de la nation française. Les historiens-hagiographes ont extrait de la complexité épisodes et figures exemplaires qui sont devenues autant de modèles pour une mémoire collective. En France, la géographie est fille de la défaite de 1870 ; c’est pour ancrer dans l’esprit des jeunes générations l’image d’un territoire national immuable qu’est née cette discipline. L’historien et le géographe forgent ainsi l’identité qui appelle le territoire, et du même coup les pulsions territoriales. Les trois peuples qui fondent la « France », les Gaulois, les Francs et les Romains, sont tous des envahisseurs. Mais Jules Ferry explique au parlement que le devoir des races supérieures est de civiliser les races inférieures. La création de l’école, le développement de l’idée de nation et la colonisation ont partie liée. C’est le triomphe de l’Etat-ethnie, et l’exacerbation de l’identité nationale devient une névrose totalitaire pour laquelle on accepte de mourir dans des guerres inutiles. L’Etat-nation se forme et se consolide aux dépens d’un ou plusieurs autres peuples, elle se nourrit des vitamines de la haine. Nous ne sommes pas Français ou Nigériens, nous sommes tous cosmopolites, citoyens de l’univers.

Une fois l’histoire des nations dépassée, c’est le temps qui est restitué à tous les humains, et avec lui l’harmonisation des relations interethniques. Nous sommes cosmopolites par essence et d’une nationalité quelconque par nécessité temporaire. Si on obéit à des raisons d’humanité, on ne peut plus faire de distinction entre les nationalités, les races et les religions. Il n’y a structurellement ni homme ou femme, ni noirs ou blancs, ni Palestiniens ou Israéliens, ni n’importe quelle autre ethnie, il n’y a que des humains. Un jour, les citoyens du monde éliront des délégués à un congrès des peuples. Restera alors à appliquer la sagesse : « Si je savais quelque chose qui fut utile à ma patrie et qui fut préjudiciable au genre humain, je la regarderais comme un crime. Si je savais quelque chose qui fut utile à l’humanité et préjudiciable à notre planète, je la regarderais comme un crime. »

 Source documentaire : Dossier LeMonde du 16 décembre, Quand l’histoire raconte des histoires

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des économistes inconséquents

La pensée économique dominante avait complètement oublié l’analyse des interactions entre le capital naturel et la création de richesses par l’homme ; on ne considérait que les deux facteurs de production, capital physique et travail. Kirk Hamilton propose de prendre en compte trois dimensions : le capital naturel, calculé comme la valeur actualisée des rentes issues de l’exploitation des ressources naturelles, évaluée aux prix internationaux et aux coûts locaux ; le capital produit, qui inclut les machines, les infrastructures, le patrimoine urbain ; enfin, le capital dit « intangible », qui comprend le capital humain à travers l’éducation, mais aussi la qualité des institutions et de la gouvernance. Il ne s’agit là que d’une méthode anthropocentrique qui veut ignorer l’importance fondamentale de la nature, extérieure à l’homme mais exploitée par l’homme.

            A de rares exceptions près comme l’agriculture (« Le capital humain d’un agriculteur, son savoir-faire pour cultiver la terre, ne peut s’exprimer qu’avec de la terre à sa disposition »), Hamilton considère que les facteurs ne sont pas complémentaires, mais substituables : « Les recettes de l’exploitation d’une ressource épuisable peuvent être utilisées pour accumuler d’autres formes de capital, par exemple à travers l’investissement physique ou le soutien à l’éducation. On peut transformer des ressources non durables en développement durable. La « malédiction des ressources naturelles » provient en partie de l’incapacité à opérer cette substitution et à la tentation permanente de consommer le revenu au lieu de l’investir. » Cette hypothèse de substitution entre facteurs (capital humain, capital manufacturier et capital naturel), dite « soutenabilité faible » est une approche défendue traditionnellement par la Banque mondiale, donc par le rapport d’Hamilton. Elle repose sur une confiance aveugle dans un progrès technique qui pourrait toujours compenser la déperdition irréversible des ressources naturelles non renouvelables. C’est donc une croyance religieuse parmi d’autres.

            Yves Cochet à une analyse complètement différente : « Il faut environ 100 millions d’années pour « produire » du pétrole ; si la nature était une marchande capitaliste, à combien nous offrirait-elle le litre de super ? Contrairement à l’économie « écologique » (ndlr : rectification, économie « environnementaliste »), l’économie biophysique ne cherche pas à quantifier en euros le coût des services fournis par les écosystèmes, elle ne  cherche pas à faire entrer la nature à l’intérieur du cadre de l’économie néoclassique, elle s’efforce de créer un nouveau paradigme. Le travail de la nature possède en effet une valeur si incommensurable avec tout ce que l’on peut chiffrer en euros qu’il paraît absurde de tenter même de le faire. Les économistes officiels répètent à satiété que le coût de l’énergie dans le PIB est d’environ 5 %, et que de cette façon nous n’avons pas à nous inquiéter. A quoi nous rétorquons que si l’on soustrayait ces 5 % de l’économie, les 95 % restants n’existeraient plus. »

 

 

Source documentaire : LeMonde du 15 décembre, Kirk Hamilton calcule « l’autre » richesse des nations

Yves Cochet, Antimanuel d’écologie (Bréal, 2009)

rapport de Kirk Hamilton publié par la Banque mondiale en 2006 (« Where Is the Wealth of Nations »).

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Contrôle des Imbéciles Voraces

Le CIV est partout. Dans les journaux, à la télé, à la radio, avec les enfants, avec les seniors, dans les concours, sur les podiums, au Salon de l’agriculture, etc. Il s’agit d’« informer », tout en étant payé par les filières industrielles et en partie par l’Etat, via le ministère de l’agriculture. On cherchera, mais en vain, une meilleur définition du mot lobby. Ainsi en 2002, alors que la filière bovine commençait à sortir des affres de la vache folle, le CIV avait un budget de fonctionnement de 4,5 millions d’euros, mais il dépensait 8 millions d’euros pour la pub. Sous un titre inquiétant – « le CIV contrôle le buzz  » -, l’hebdo du marketing révèle que le CIV « veille à tout ce qui se dit dans les forums les blogs. Bras d’information d’Interbev, le syndicat chargé de la promotion de la viande bovine, le Centre d’Information des Viandes pondère sur la toile certains arguments développés par les lobbies végétariens ».

            Je comprends mieux maintenant la pub « A l’occasion du sommet de Copenhague, nous rappelons que l’élevage herbivore français est un atout essentiel à nos équilibres environnementaux et alimentaires » (LeMonde du 12 décembre). Toute cette force de frappe médiatique (une page entière du Monde) pour contrer Sir Paul McCartney qui « tente de mettre en avant le modèle végétarien ». En fait le Beatles propose une journée sans manger de viande en Europe pour lutter contre le réchauffement climatique. Il est vrai que la fabrication de bidoche est une aberration énergétique. La FAO estime qu’il fut de 4 à 11 calories végétales pour obtenir 1 calorie de viande. Le bétail gaspille par millions de tonnes des céréales qui font défaut dans une multitude de maisons humaines, toutes situées au Sud, il est vrai. Quant au réchauffement climatique, un rapport de la FAO en 2006 (Livestock’s Long Shadow) indique que l’élevage émet davantage de gaz à effet de serre que tous les transports planétaires, soit 18 % des émissions anthropiques : CO2, méthane (issue de la fermentation des aliments dans l’estomac des ruminants), protoxyde d’azote  (lisiers et purins).

Mais les risques qui pèsent sur notre planète, le CIV et Interbev sans foutent totalement, seul importe le fric qui nourrit l’élevage industriel.

Source documentaire : Fabrice Nicolino, Bidoche (édition Les liens qui libèrent, 2009)

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