anthropisation

Yann Arthus-Bertrand transmet son héritage

« Legacy, notre héritage », ce documentaire de Yann Arthus-Bertrand est passé le mardi 26 janvier 2021sur la 6. Excellent et démoralisant , YAB s’exprime ainsi : « Faire un film sur la fin du monde, ce n’est pas facile… Les quatre cinquième de ma vie, je suis passé à côté de cette réalité… Désormais plus rien de naturel ne peut stopper l’expansion humaine… Dans quatre jours, nous serons un million de plus… L’humain a cru dominer les règles de la nature, elle se rappelle à lui… Nous sommes arrivés à la situation qui me faisait peur ; on pourrait décarboner nos vies, mais on a l’impression que c’est impossible tant nous sommes drogué à la croissance qui est pourtant en train de nous tuer… Disons à nos enfants qu’ils arrivent au début d’une histoire, je ne peux pas croire qu’il n’y aura pas un sursaut… » Sursaut il y a, du côté de jeunes activistes comme Greta Thunberg qui a fédéré un mouvement international contre le réchauffement climatique. Frémissement il y a même du côté des politiciens. Même aux États-Unis !

Le nouveau président des Etats-Unis, Joe Biden, a annoncé le 27 janvier 2021, un moratoire sur les forages d’hydrocarbures sur les terres et les eaux fédérales ainsi qu’un sommet international sur le climat le 22 avril 2021, le Jour de la Terre (célébré pour la première fois le 22 avril 1970). « De même que nous avons besoin d’une réponse nationale unie face au Covid-19, nous avons désespérément besoin d’une réponse nationale unie à la crise climatique, car il existe bien une crise climatique », a déclaré Biden. Il se rapproche de son objectif d’abandon progressif des énergies fossiles, et d’une neutralité carbone dans le secteur énergétique d’ici 2035 et dans l’ensemble de l’économie d’ici 2050. Les États-Unis vont aussi s’engager à préserver l’intégrité de 30 % des terres et des eaux fédérales d’ici 2030, afin d’enrayer la perte de la biodiversité. Mais il y a loin de la coupe aux lèvres. En matière d’émissions de gaz à effet de serre, les États-Unis sont les champions. : actuellement, chaque Américain émet 3 ois plus de CO2 qu’un Français. (et 8.5 fois plus qu’un Indien).

Du côté de la France, on est beaucoup plus précis puisque la CCC (convention citoyenne sur le climat) a propoau législatif 149 mesures de lutte contre le réchauffement climatique. Mais la mise en œuvre va se heurter aux intérêts acquis, à l’influence des lobbyistes, mais aussi à l’aveuglement pro-business de beaucoup trop de parlementaires. Un représentant d’une organisation professionnelle résume l’enjeu : « Le Parlement n’a pas été associé aux travaux de la CCC, il va vouloir jouer un rôle soit pour filtrer soit pour revenir à l’esprit de la Convention. » Le travail de cartographie des députés met en lumière le fait que les élus de sensibilité écolo sont nombreux, cela va-t-il faire pencher la balance dans le bon sens ? Un atout, la stratégie de la ministre de l’écologie de Macron. Un collègue ministre de Barbara Pompili déplore ce qu’il appelle « la méthode Pompili ». « Je lui ai dit très clairement d’arrêter de jouer les citoyens contre Bercy. Elle ne se cherche pas d’alliés, c’est le syndrome écolo. Elle triangule, avec les citoyens, avec les ONG, avec les parlementaires. » C’est-à-dire que la ministre compte sur ces alliés extérieurs pour l’aider à faire monter la pression au moment des arbitrages. De leur côté, les 150 citoyens de CCC ne devraient pas être en reste, ils sont eux-mêmes devenus un lobby. Mais pour une fois dans l’intérêt général, pas pour des intérêts privés.

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À qui appartient la forêt amazonienne ?

Quand Bolsonaro est arrivé au pouvoir, il disait que les cavaleries brésiliennes auraient dû faire comme aux Etats-Unis pour en finir avec les indigènes. Dès le premier jour de son mandat, le président Bolsonaro a placé la démarcation des terres indigènes sous la tutelle du ministère de l’agriculture, les livrant ainsi à l’agrobusiness. Un projet de loi remettant en jeu les droits des indigènes a été déposé en février 2020 alors que la Constitution brésilienne rend ces terres « inaliénables et indisponibles . En deux ans, Le gouvernement Bolsonaro a mis en place la violations des droits constitutionnels des indigènes, le démantèlement des agences gouvernementales de protection de l’environnement, l’autorisation de pesticides toxiques… Pendant ce temps, la forêt amazonienne brûle.

Le cacique Raoni Metuktire accuse Jair Bolsonaro de crimes contre l’humanité : meurtres, extermination ou mise en esclavage, transferts forcés dess population autochtones de l’Amazonie : « Le Blanc n’a pas l’air de comprendre que si les indigènes veulent préserver l’eau et la terre, ce n’est pas seulement pour eux, mais c’est pour préserver la vie en général, celle des générations futures. » Sa plainte a été déposée le 22 janvier 2021 devant la CPI (Cour pénale internationale) aux Pays-Bas. Le Brésil a ratifié le traité de la CPI en 2002, lui donnant ainsi compétence pour enquêter sur les crimes commis sur son territoire et par ses ressortissants. Deux réactions sur lemonde.fr :

BCG : Cela interroge tant sur le destin commun des habitants de la planète que sur le droit des États : à force de considérer la foret amazonienne comme nécessaire à tous, beaucoup réagissent et pensent comme si elle appartenait à tous, zappant ainsi le droit le plus élémentaire d’un État à s’organiser et se gérer en autonomie.

Michel SOURROUILLE @ BCG : La question de fond c’est  de déterminer à qui appartient la forêt amazonienne. Du point de vue des colonisateurs dont Bolsonaro est un sinistre descendant, la propriété résulte d’un rapport de force, le vol à main armée fait la loi. Du point de vue des autochtones, la forêt appartient à ceux qui en vivent directement sans dilapider le capital naturel. Du point de vue des nationalistes, l’État fait ce qu’il veut de son territoire, il peut en abuser si ça lui chante. Mais du point de vue des générations futures, l’Amazonie, un des pôles de captage du CO2, appartient à tous les peuples de la terre ; sa conservation permet en effet de lutter contre le réchauffement climatique. C’est pourquoi on devrait aussi parler de crime écologique quant aux délires de Bolsonaro. Il fomente un crime contre la Terre-mère, ce droit traditionnel des peuples premiers que nous devrions remettre à l’ordre du jour au niveau international.

Du point de vue des écologistes, on peut transposer l’analyse de Mr Sourrouille à bien d’autres éléments de la nature. Par exemple, à qui appartient le pétrole enseveli depuis des millions d’années sous la terre ? Aux potentats locaux qui n’ont absolument rien fait pour fabriquer le produit de leur sous-sol ? Aux multinationales qui s’engraissent sans risque en distribuant l’or noir ? A l’OPEP qui fixe le prix du baril à sa convenance sur une marché oligopolistique ? Aux conducteurs et conductrices d’automobiles thermiques qui bénéficient d’une essence données gratuitement par la nature et qu’on fournit à si bas prix qu’on peut la gaspiller à son aise. Aux générations futures qui ne trouveront que les vestiges des ressources fossiles ? Ou plus fondamentalement à la Terre-mère qui avait enfoui profondément en son sein ces restes de la vie passé sur Terre pour qu’on ne l’y trouve pas si on avait été raisonnable ! Comme l’exprimait le chef Raoni, « nous pouvons beaucoup vous apprendre sur la façon de vivre en harmonie avec la nature. La nature est comme l’homme, le sol est sa peau, les forêts sont ses cheveux et les rivières sont ses veines. Nous respirons tous un seul air. Nous buvons tous une seule eau. Nous vivons tous sur une seule terre. Nous devons tous la protéger. La sauver, c’est nous sauver nous-mêmes. »

Pour en savoir plus sur Raoni Metuktire grâce à notre blog biosphere :

16 mai 2019, Raoni peut-il encore sauver l’Amazonie ?

17 octobre 2007, Chef Raoni

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Catastrophe OUI, catastrophisme NON

Les mots « catastrophe » et « catastrophisme » deviennent des incontournables du monde présent. Ainsi ces deux articles récents du MONDE, La peur de l’apocalypse écologique, entre catastrophisme et claivoyance, et « L’une des leçons du Covid-19 est que la catastrophe n’est pas complètement à exclure ». Il ne s’agit pas d’avoir peur, ce gros mot utilisé par les anti-écolos pour avoir peur des collapsologues. Nous affrontons actuellement sans peur la Covid-19 au niveau mondial, mais au prix d’atteintes aux libertés de se réunir, de se déplacer et de consommer. La population fait avec, et si on chope personnellement le virus, cela apparaît comme dans l’ordre des choses. Le problème n’est pas la peur, mais l’ignorance ou l’indifférence de nombre de citoyens et de responsables publics face à l’urgence écologique. Le problème, c’est qu’il faudrait changer complètement de comportements au niveau de nos déplacements et de nos consommations, et cela est inimaginable car nous sommes immergés dans une culture consumériste où la société du spectacle permet d’oublier les réalités.

Nous sommes entrés dans une nouvelle ère, l’« anthropocène », sans que ce soit perceptible ou audible pour la plus la grande partie de nos populations. Leffondrement écologique qui se prépare ne repose pas sur d’incertaines prophéties religieuses apocalypiques : « Je vis les sept anges qui se tiennent devant Dieu, et sept trompettes leur furent données. Le premier sonna de la trompette. Et il y eut de la grêle et du feu mêlés de sang, qui furent jetés sur la terre; et le tiers de la terre fut brûlé, et le tiers des arbres fut brûlé, et toute herbe verte fut brûlée… (apocalypse selon saint Jean)» L’apocalypse est prévue et bien documentée par les modèles scientifiques élaborés par les climatologues, les spécialistes de l’énergie fossile en voie de disparition, les connaisseurs de la biodiversité et de son extinction, etc. Mais l’horizon tragique des prévisions collapsologiques contraste de manière saisissante avec l’aveuglement des politiciens. La catastrophe n’est pas jugée possible parce qu’elle entre en confit avec la prochaine échéance électorale où madame/monsieur voudrait être (re)élu. D’ailleurs, la catastrophe à venir est toujours ignorée historiquement par le peuple et ses dirigeants. De la seconde guerre mondiale, avant qu’elle ne se déclare, on entendait le bruit des bottes et l’événement probable fut pourtant jugé impossible. Du premier choc pétrolier avant qu’il ne se déclare en 1974, on disait que le bas prix du baril était une bénédiction et nous en sommes restés là en 2020, attendant ce qu’on croit impossible, le choc pétrolier ultime. Il n’y aura pas que le réchauffement climatique dans la vie des générations futures, il y aura la baril à 100 dollars, l’épuisement des ressources halieutiques et des nappes phréatiques, etc. etc. Il ne faut pas confondre catastrophe écologique et catastrophisme, il nous faut pratiquer la pédagogie de la catastrophe avant que la catastrophe ne se transforme en apocalypse. Pour en savoir plus grâce à notre blog biosphere, ces extraits :

28 avril 2008, catastrophisme ou catastrophe ?

D’un côté il y a les 35 habitants de Mimina Place, au cœur de la mégalopole de Los Angeles. Vélo et sobriété énergétique pour 35 personnes sur une ville de 20 millions d’habitants. Ce sont des purs écolos par rapport au mode de vie de l’Américain moyen, surtout à Los Angeles où il n’y a pas de transports en commun et des autoroutes larges comme des pistes d’aéroport… Seuls 35 personnes et quelques autres poussières humaines montrent la voie de la simplicité volontaire. Ce n’est pas assez pour que la planète ne connaissent pas les convulsions humaines qui vont s’amplifier un peu partout, des révoltes incessantes, une police omniprésente et de plus en plus débordée… Il ne faut pas voir dans ce constat du catastrophisme, mais la simple description de la catastrophe en marche.

14 juin 2014, Pédagogie de la catastrophe n’est pas catastrophisme

courriel de la responsable académique de l’EEDD (Education à l’environnement et au développement durable) : « Le terme de « pédagogie de la catastrophe » me semble trop fort et peu adapté. Je suis comme toi globalement inquiète sur l’avenir  mais  le catastrophisme ne peut, selon moi convenir pour les enfants ou même les jeunes à qui nous laissons un monde difficile, ce n’est pas à eux de porter ce fardeau que nous n’avons su assumer; alors pédagogiquement, pour moi, il ne s’agit pas de masquer les choses mais de voir aussi le verre à moitié plein. Leur avenir professionnel est déjà tellement sombre… »

23 avril 2015, Collapsologie : catastrophe et non catastrophisme

« Nous disposons aujourd’hui d’un immense faisceau de preuves et d’indices qui suggèrent que nous faisons face à des instabilités systémiques croissantes qui menacent sérieusement la capacité de certaines populations humaines – voire des humains dans leur ensemble – à se maintenir dans un environnement viable. C’est ce que le prince Charles appelle un « acte de suicide à grande échelle ». Mais a-t-on vu un réel débat, par exemple sur le climat, en termes de changement social ? Non, bien sûr. Trop catastrophiste. D’une part on subit des discours apocalyptiques, survivalistes ou pseudo-mayas, et d’autre part on endure les dénégations « progressistes » des Luc Ferry, Claude Allègre et autres Pascal Bruckner. Les deux postures, toutes deux frénétiques et crispées autour d’un mythe (celui de l’apocalypse vs celui du progrès), se nourrissent mutuellement par un effet « épouvantail » et ont en commun la phobie du débat posé et respectueux, ce qui a pour effet de renforcer l’attitude de déni collectif qui caractérise si bien notre époque… C’est une sensation étrange que de faire partie de ce monde, mais d’être coupé de l’image dominante que les autres s’en font. »

Comment tout peut s’effondrer » de Pablo Servigne & Raphaël Stevens

16 décembre 2018, Serge Latouche et la pédagogie des catastrophes

« Lorsque j’ai commencé à prêcher la décroissance, j’espérais que l’on puisse bâtir une société alternative pour éviter la catastrophe. Maintenant que nous y sommes, il convient de réfléchir à la façon de limiter les dégâts. En tout cas, la transition douce, je n’y crois plus. Seul un choc peut nous permettre de nous ressaisir…

27 avril 2020, Covid-19, une pédagogie de la catastrophe ?

Je croyais à la pédagogie de la catastrophe dès le début des années 2000 avec le pic pétrolier. Désabusé par l’inertie sociale, j’ai alors pensé grâce au réchauffement climatique que la catastrophe servirait de pédagogie. Aujourd’hui je suis désespéré, la sensibilité écologique a progressé mais les politiques économiques restent suicidaires. Les avertissements multiples des différentes branches de la science sur l’imminence des catastrophes écologiques et démographiques n’ont entraîné que quelques brèves dans quelques médias sans rien changer au modèle croissanciste soutenu par les politiciens de tous bords. La crise profonde liée à la maladie Covid-19 montre encore une fois que l’histoire n’est qu’une lanterne accrochée derrière notre dos et qui n’éclaire que notre passé…

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APD, l’aide au développement, une illusion

L’Élysée veut réformer l’aide publique au développement (APD). Action vouée à l’échec car développement impossible. On hésite aujourd’hui sur le qualificatif à adopter, pays en développement, pays émergents, pays sous-développés, pays en difficulté, pays pauvres, pays les plus pauvres, pays à bas revenu, pays endettés, pays en faillite. Le terme « pays sous-développés » est daté, il remonte au discours du président américain Truman en 1949 : « Nous devons nous engager dans un nouveau programme audacieux et utiliser notre avancée scientifique et notre savoir-faire industriel pour favoriser l’amélioration des conditions de vie et la croissance économique dans les régions sous-développées ».  La société thermo-industrielle devenait ainsi une référence universelle, il fallait passer obligatoirement par les cinq étapes de la croissance économique, c’est-à-dire dépasser l’état de société traditionnelle, faire son décollage économique pour aboutir à l’ère de la consommation de masse. Cela n’a que trop bien réussi aux pays du Nord et entraîné une catastrophe au Sud. En définitive ce n’est qu’une spirale d’appauvrissements constants. Il nous faut donc déconstruire à la fois l’idée de développement et les pratiques d’aide.

Le développement n’a été que la poursuite de la colonisation par d’autres moyens .Ce n’est qu’une entreprise visant à transformer les rapports des hommes entre eux et avec la nature en marchandises. Quel que soit l’adjectif qu’on lui accole, le contenu du développement c’est la croissance économique, l’accumulation du capital avec tous les effets que l’on connaît : compétition sans pitié, croissance sans limites des inégalités, pillage sans retenue de la nature. Peu importe que les uns estiment que le « développement » adviendra grâce à l’aide financière alors que d’autres prônent le commerce (trade not aid), dans le domaine du « développement », tout est possible, et surtout son contraire.Si à chaque fois l’entreprise tourne court, c’est faute de se détacher de la notion de « développement » qui est piégée dès l’origine car assimilé à « croissance ». Il faut reconsidérer la notion de pauvreté. Cette notion est absente du vocabulaire de toutes les langues pendant des millénaires. « Pauvre » existait en tant qu’adjectif et ce, pour indiquer que quelque chose n’était pas à la hauteur de ce qu’il devrait être, comme par exemple un sol pauvre, une santé pauvre. Les gens vivaient de très peu, sans jamais penser qu’ils étaient pauvres. En effet, si l’on prend la pauvreté dans le sens d’un mode de vie qui se suffit du nécessaire, la pauvreté était la condition normale des humains. La façon de vivre ensemble était le rempart le plus durable de leur communauté contre la misère. Comme le dit un proverbe tswana : « Là où il n’y a pas de richesse, il n’y a pas non plus de pauvreté. » Dans l’Afrique traditionnelle, on considère comme pauvre non pas celui qui manque de moyens matériels, mais celui qui n’a personne vers qui se tourner, devenant ainsi un orphelin social, un pauvre en relations. En fait, ériger la pauvreté en problème, c’est occulter le fait qu’elle constitue un rapport social et qu’elle ne peut se définir que par rapport à la richesse économique. « Laissez les pauvres tranquilles ». Cette phrase est de Gandhi qui, lui, connaissait bien ce dont les pauvres avaient besoin. Il savait notamment que les pauvres avaient rarement les besoins socialement fabriqués que leur créaient les riches. Ils n’avaient pas besoin de technologies, de produits, de « services » et de gadgets de toutes sortes qui les rendaient systématique dépendants des autres. Mais on ne discute jamais de ce qui fait la vraie richesse des pauvres.

Le texte du gouvernement Macronprévoit d’augmenter son montant à 0,55 % du revenu national brut d’ici à 2022, contre 0,44 % en 2019. Les pays occidentaux n’ont jamais atteint leur objectif de prêter 1 % de leur PNB, dont 0,7 % d’aide publique. C’était pourtant l’objectif fixé par les Nations unies… en 1970 ! De toute façon l’investissement public et privé, pas plus que la globalisation des échanges commerciaux, n’ont conduit à un monde plus équitable et durable. L’aide au développement est même devenue une menace pour le pays en difficulté. Il sera entraîné dans une série de dépendances qui en feront un instrument entre les mains de l’institution « donatrice ». Ce n’est pas sans raison que le gros des dépenses va à l’aide militaire, l’aide pour les infrastructures du « développement » et l’aide financière pour sauver des institutions bancaires de la faillite. Aujourd’hui un experts nobelisé comme Esther Duflo pensent que la solution consiste à mettre en place au Togo des transferts financiers rapides par téléphone avec un système de porte-monnaie électronique ! Selon les derniers chiffres publiés fin septembre 2020 par le Fonds monétaire international (FMI), la moitié des pays à bas revenu frôlent le surendettement ou y sont déjà tombés. Pékin détient 46 % de la dette africaine en 2017, contre 28 % en 2005. La Chine a dépensé en aide au développement ces dix dernières années autant que la Banque mondiale, soit près de 500 milliards d’euros. De nombreux pays se sont embarqués dans des financements chinois et ils réalisent aujourd’hui qu’il est difficile de renégocier leur dette. A l’Elysée, on souligne « les possibles risques de déstabilisation » d’une crise économique sur un continent, l’Afrique, en pleine croissance démographique.

Dans la déclaration d’Arusha en 1967, on estimait à juste titre qu’il est « stupide d’imaginer que la Tanzanie pourra enrayer sa pauvreté avec l’aide financière étrangère plutôt qu’avec ses propres ressources (…) Etre indépendant, cela veut dire compter sur soi (…) Qu’elles proviennent de l’impôt ou de l’extérieur, les ressources financières de l’Etat doivent être affectées en priorité aux paysans et non aux villes (…) Il convient de viser l’autosuffisance alimentaire… ».L’aide au développement est une absurdité quand on connaît l’absurdité du type de développement capitaliste : des voitures pour tous et bonjour l’effet de serre, une société de services payants et non plus gratuits, des facultés qui accueillent la majorité des jeunes futurs chômeurs. Cette construction sociale est un faux modèle impossible à généraliser dans le monde entier.

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Qu’est-ce qu’être français ? Réponse écolo

Du point de vue des écologistes, être Français n’a pas grande signification puisque nous habitons tous et toutes la même planète qui se fout des frontières. Nous sommes tous cosmopolites dans un monde recroquevillé dans ses égoïsmes nationalistes. Qu’en pense Emmanuel Macron ? Il engage le débat sur l’identité dans un entretien à « L’Express » le 22 décembre 2020 : « Qu’est-ce qu’être français ? Au fond, vous n’aimez pas la France si vous choisissez des prénoms qui ne sont pas vraiment français. Être français, c’est habiter une langue et une histoire. Nous renforcerons les cours de français et nos exigences en histoire, en particulier pour accéder à la nationalité. On a dit que j’étais un multiculturaliste, ce que je n’ai jamais été. Ma matrice intellectuelle et mon parcours doivent beaucoup à Jean-Pierre Chevènement et à une pensée républicaine. Nous avons la volonté farouche de reprendre le contrôle de notre vie intime et de la France comme nation. » Être français est donc ineffable, un subtil mélange entre le camembert bien fait et Chanel numéro 5, un fumet immédiatement perceptible par n’importe quel allogène à 200 mètres à la ronde. Faire du nucléariste Chevènement un modèle est promouvoir un anti-écolo, lui qui disait dans L’Obs du 16 juin 2020 : « Sonner l’heure de la décroissance serait une erreur magistrale. C’est une vague de préconisation absurdes, écologie punitive, recommandations malthusiennes, technophobie galopante. Tomber dans le piège de la facilité serait l’assurance du déclin… »

Lors de la COP à Copenhague en 2009 sur le climat, l’ineffable Eric Besson estimait déjà qu’il faut « réaffirmer la fierté d’être français ». Ce n’est pas ainsi que nous préparons le monde de demain à l’heure du réchauffement climatique et de l’urgence écologique. Parce que les uns se sentent plutôt Français pendant que d’autres se veulent Hutu ou Tutsi nous n’arriverons jamais à conclure quelque conférence internationale que ce soit. A Copenhague en 2009, funeste échec, ou à Paris en 2015, succès illusoire, les négociateurs ne participent pas aux COP pour résoudre les problèmes de la planète, mais pour préserver les intérêts de la nation qu’ils représentent. Il ne devrait plus jamais y avoir de débat sur les identités nationales, il devrait y avoir une prise de conscience planétaire que nous appartenons tous à la même biosphère, que c’est la Terre qui est notre patrie, que nous dépendons du substrat qui nous fait vivre. A ce moment-là seulement, nous pourrons prendre des décisions qui puissent aller dans le sens de l’intérêt général. Un écologiste reconnaît qu’il n’est né français que par inadvertance, par le hasard du lieu de sa venue au monde et des pérégrinations de ses parents.

Ceci dit, un écolo n’est pas pour la libre circulation des personnes, l’absence totale de délimitations territoriales. C’est un adepte des biorégions et de l’attachement à un lieu déterminé. L’écolo veut une réorganisation de la société à l’échelle d’un territoire défini par des frontières naturelles qui puissent permettre l’autonomie alimentaire et énergétique. Il pense global, cosmopolite, mais en même temps il vit local, enraciné dans son terroir. Ni nationaliste ni internationaliste, écolo tout simplement !

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L’essentiel du mois de novembre 2020

En ce mois de reconfinement face à la pandémie, le gouvernent a décidé de différencier ce qui est essentiel de ce qui est dérisoire. Vaste débat dans une société déboussolée où la mort d’un footballeur est considéré comme un drame international. Débat biaisé quand M, le Magazine du MONDE, se permet de titrer « le luxe de l’essentiel » pour faire la promotion de Vuitton, Rolex, Van Cleef & Arpel ainsi que d’autres superflus. La première contribution du dessinateur Wolinski paru en 1976 à la une du journal est à connaître. L’Humanité présentait deux dessins : sur le premier, une bourgeoise affalée sur son divan explique à sa petite fille que le luxe, c’est les bijoux, les toilettes, le parfum, le champagne. Sur le deuxième, une prolétaire explique à son jeune fils que le luxe, c’est la viande et les oranges. Société aujourd’hui bloquée dans sa boulimie consumériste, le luxe ET la viande ?
Il est fort probable que dans un avenir proche la problématique du retour à l’essentiel deviendra un passage obligé pour mettre en œuvre une société post-croissance. On parlera de sobriété partagée sur une planète au pillage que nous avons rendue exsangue. « Allons à l’essentiel », voici notre article du mois de novembre développant cette idée :

Reconfinement, allons à l’essentiel

NB : Le blog biosphere existe depuis début 2005, il propose une analyse quotidienne du « point de vue des écologistes ». Comme l’écologie est multiple, chaque article est soumis à vos commentaires. Vous pouvez aussi proposer un texte afin d’alimenter le débat d’idées, il suffit de l’envoyer à biosphere@ouvaton.org.
– Seuls les textes ne dépassant pas 4000 caractères (espaces compris) seront pris en considération.
– Précisez clairement votre identité et votre qualité, mais on peut préserver votre anonymat à parution.

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Décroissance maîtrisée ou récession sévère

« Il est erroné de penser comme Christian Jacob que décroissance est synonyme de récession », écrit Stanislas Rigal, biologiste de la conservation :

«  La seule écologie réaliste, notamment dans les sociétés occidentales, est celle qui fait décroître l’impact humain sur la biosphère et les quantités d’énergie et de matière extraites de l’environnement. Alors que la récession touche la quasi-totalité des secteurs sans discernement en créant un chômage massif, la décroissance est une entreprise prévue, se concentrant sur les secteurs ayant l’impact environnemental le plus négatif, améliorant le quotidien des plus nombreux, réduisant les inégalités par une redistribution des ressources et une démarchandisation du monde. La décroissance permet le passage d’un système obèse reposant sur les énergies fossiles vers un système sobre et convivial. L’humain n’est pas un ennemi de la nature. S’il y a un ennemi, c’est le capitalisme extractiviste et productiviste et il y a des gens derrière chaque activité mortifère ou législation laxiste. Eux sont les vrais ennemis de la nature. Les attaques contre « l’idéologie écologiste » peuvent se retourner facilement, en partant de chiffres précis concernant la réalité physique. Les flux de matière et d’énergie ont atteint des niveaux non soutenables, même à l’échelle de la France. L’empreinte carbone y est de 11,2 tonnes équivalent par habitant au lieu de 2 tCO2eq. L’empreinte matérielle est à 13,2 tonnes par habitant et devrait être divisée au moins par deux pour redevenir soutenable, etc.
Les incantations sont le fait de ceux qui refusent la réalité physique, à savoir que la croissance des flux de matière et d’énergie extraits d’un environnement fini admet des limites physiques. Les minerais radioactifs sont des ressources limitées (et non souveraines) tout comme les ressources carbones fossiles. C’est donc de paradigme qu’il faut changer, à savoir baisser la consommation et la production d’énergie… Une modification des mobilités est indispensable, vers des véhicules partagés, mais cela ne remplacera pas une nécessaire réduction des distances parcourues. C’est d’autant plus vrai pour l’aviation pour laquelle il n’existe pas de moyen crédible de réduire les émissions ; l’honnêteté consiste à proposer aux travailleurs du secteur aérien des plans de formations qui assurent leur avenir. La question n’est pas d’avoir un gâteau toujours plus gros, surtout quand le four n’a plus la taille suffisante pour le cuire. La question est de découper plus équitablement ce gâteau et de lui rendre une taille qui permette de le passer dans le four. Finalement, le point principal n’est pas tant de savoir si la décroissance est, ou non, une utopie de néo-hippies nécessitant de rester confinés trente ans, mais de savoir si nous allons la prévoir ou la subir.
 »

Formidable tribune de Stanislas Rigal qui fait le tour de l’opposition fondamentale entre religion de la croissance et ses dévots d’une part et politiques concertées de sobriété partagée d’autre part. Les prétendants écolos à la présidentielle vont-ils avoir le courage de parler aux médias de décroissance maîtrisée ? Nous suivrons avec intérêt les déclarations publiques de Yannick Jaodt, Eric Piolle et Sandrine Rousseau…
Pour en savoir plus sur la décroissance maîtrisée :

La droite envisage l’idée de décroissance

EELV face au concept de « décroissance »

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Violer la Terre-mère, un simple délit

La convention citoyenne pour le climat avait voté pour la création d’un crime d’écocide, le gouvernement a décidé de n’en faire qu’un délit : « Nous allons créer un délit général de pollution. Les pénalités seront modulées en fonction de l’intentionnalité de l’auteur. Les peines encourues vont de trois ans d’emprisonnement à dix ans d’emprisonnement selon qu’on est en présence d’une infraction d’imprudence, d’une violation manifestement délibérée d’une obligation et la plus lourde, d’une infraction intentionnelle. » Les amendes, qui se veulent dissuasives, iront de 375 000 à 4,5 millions d’euros. « Autrefois vous polluiez, vous gagniez, demain vous polluerez, vous paierez jusqu’à dix fois le bénéfice que vous auriez fait  », assure le garde des sceaux. Un deuxième délit de « mise en danger de l’environnement » devrait aussi voir le jour. Voici quelques réactions :

Marie Toussaint : Les ministres se saisissent enfin de l’enjeu crucial de la répression pénale des atteintes à l’environnement. Parmi les propositions formulées nous ne trouvons toutefois trace ni d’une approche écocentrée, ni de la condamnation des atteintes autonomes à l’environnement, c’est-à-dire sans qu’elles ne soient rattachées à la violation d’une règle en vigueur.
Marine Yzquierdo (Notre Affaire à Tous) : Ce délit général de pollution est sans rapport avec le crime d’écocide, censé punir les atteintes les plus graves à l’environnement en intégrant une approche écosystémique en référence aux limites planétaires. Ce délit devrait s’ajouter au crime d’écocide et non le remplacer. Reste une avancée intéressante avec la création d’un délit de mise en danger de l’environnement, mais le critère de “violation délibérée” est à discuter car s’il faut en plus que cela soit “manifeste”, cela posera une condition supplémentaire et donc limitera le champ de la répression. »
Victor M : Et en même temps, le gouvernement a supprimé progressivement les effectifs des inspecteurs de l’environnement qui constatent les pollutions et mène des enquêtes, en outre, il a créé une cellule spéciale (demeter) pour intimider et poursuivre les lanceurs d’alerte qui dénoncent les pollutions !
Gérard Pinard : Un petite loi qui fait semblant de et qui ne changera rien. Pendant ce temps, le pôle nord est 12 degrés au dessus des moyennes historiques. Quand on se décidera d’agir pour Les différences entre un délit et un crime sont au niveau des tribunaux compétents pour les traiter et des peines encourues. Considérer l’atteinte à l’environnement comme un crime impliquerait une peine minimale de 15 ans de prison,
Pour en savoir plus grâce à notre blog biosphere

crime écologique, crimes verts, écocide

D’une définition de l’écocide à une application pénale

Crime d’écocide, bientôt la reconnaissance officielle

Violer la Terre-mère, un simple délit Lire la suite »

Voici venu le temps de l’immobilité…

En 1968, 2 % seulement de l’humanité franchissait une frontière, 60 millions de personnes. Aujourd’hui 20 %, soit un milliard et demi. Face à ce bougisme pendulaire (on part d’un endroit pour revenir au même endroit), la période de confinement est propice à la réflexion sur place. Ainsi Jean Viard divague sur les chemins de traverse, de cette pandémie doit naître un code mondial du voyage. A son avis voyager, c’est l’internationalisme qui triomphe, une humanité en cours de construction, au-delà de ses différentes cultures et nationalités. Il n’attend qu’une chose du post-Covid, la remise en route des activités touristiques : «  On devrait retrouver la passion de découvrir cette terre dont les hommes ont fait un monument… » Mais avec un minuscule bémol,  « des voyages qui respectent un code mondial du voyage, avec des séjours moins intrusif et moins polluant. Viard ajoute le fond de sa pensée : « Ne laissons pas les ennemis des mobilités régir le monde. L’humain est une espèce migrante. » Encore un anti-écolo qui croit que les migrations de masse sont encore de saison sur une planète close et saturée d’humains. Rétablissons les faits.

Le réchauffement climatique et la déplétion pétrolière impliquent inéluctablement de refuser les voyages en avions et le tourisme d’éloignement. Les périodes de confinement ne sont qu’un avant-goût de ce qui nous attend, attestations de sortie, contrôles aux frontières, limitations des déplacements. « Voyager local », cette expression de Viard ne veut rien dire. La relocalisation des activités va faire disparaître au niveau socio-culturel toute idée de « voyage ». Comme l’exprime Michel Sourrouille dans un livre collectif « >Moins nombreux, plus heureux, l’urgence écologique de repenser la démographie : « Contrairement à la conception commune selon laquelle la mobilité est une constante de la société humaine, nous constatons historiquement qu’il n’y a jamais eu libre circulation des personnes. Partout dans le monde ancien, les peuples donnaient un caractère sacré aux portes de leur territoire, village ou ville : aller au-delà impliquait toutes sortes de précaution. Même le roi de Sparte s’arrêtait à la frontière de la Cité pour y effectuer des sacrifices ; à l’extérieur était le domaine de l’étranger et du combat. Jusqu’au XVIIIe siècle, seule une minorité de personnes se déplaçait : les soldats, les marchands, les aventuriers et les brigands. La masse de la population était peu mobile et le vagabondage proscrit ; on naissait, vivait et mourait dans le même village. Les frontières nationales érigées au XIXe siècle n’ont fait qu’actualiser cette constante humaine, la délimitation d’une appartenance territoriale. »*

Notre blog biosphere a pris position de multiples fois contre le tourisme, par exemple :

Pourra-t-on voyager après l’apocalypse ?

Tourisme de masse et écologie, incompatibles

Voici venu le temps de l’immobilité… Lire la suite »

Pablo Servigne, covid-19 et effondrement

Des intellectuels que nous estimons visionnaires nous montrent la voie d’une spiritualité écologique qui s’épanouira au XXIe siècle. Ainsi Pablo Servigne, inventeur avec Raphaël Stevens de l’expression collapsologie :

« La pandémie montre l’extrême vulnérabilité de nos sociétés, leur degré d’interconnexion, de dépendances et d’instabilité. J’anticipais beaucoup de crises graves, en particulier financière, climatique ou énergétique, mais celle-là, je ne l’ai pas vue venir, alors que je la connaissais en théorie. J’ai « lissé » ma présentation des risques : dans les conférences ou les articles, je ne citais même plus les pandémies, parce qu’elles font très peur. Le piège serait de considérer cette crise comme uniquement sanitaire. C’est une crise globale, systémique. Si la finance s’effondre, provoque des politiques autoritaires ou identitaires, cela pourrait déboucher sur des guerres, des maladies et des famines, qui, elles, interagissent en boucle. Les catastrophes sont désormais la réalité de la génération présente : nous en vivrons de plus en plus tout au long du siècle. Reste que le confinement est une expérience très intéressante de renoncement : on renonce aux transports, aux voyages, etc. Dans quels cas est-ce désagréable ou agréable ? Quand le déconfinement viendra, on aura goûté à ce qui était vraiment essentiel. Les questions de vie ou de mort nous amènent à une certaine sagesse. Cela nous apprend l’auto-limitation et l’humilité, ce qui est capital pour la suite. Il faut retrouver de l’autonomie à toutes les échelles (individuelle, locale, nationale). Bref, des principes inverses au monde actuel, globalisé, technicisé et libéral… » Quelques réactions sur lemonde.fr :

Philippe Clément : Je rends un immense hommage à ce monsieur qui a la franchise de dire ce qui de fait résume les théories de collapsologie :  » Cette crise, je ne l’ai pas vue venir, même si je la connaissais en théorie ». Même Yves Cochet, personnalité très estimable, mais perdu dans ses délires bobos sur fond de confinement provincial dans un bel espace, hindouistes maison et toilettes sèches, n’avait pas une telle distance vis-à-vis de lui même !

Thibaut : Intéressant, mais aussi désespérant. Je me demande dans quelle mesure les collapsologues ne sont pas encore trop optimistes, notamment quand ils affirment que l’humanité serait encore capable de bifurquer.

Titouan : Si je comprends bien ce mec est génial parce qu’il dit que le pire peut toujours arriver, et tout ça serait la conséquence du libéralisme et de notre mode de vie occidental. Je ne vois pas le rapport avec le virus, on peut juste dire que les gains de productivité ont permis à la population mondiale de croître à tel point que les chauves-souris sont au contact de l’homme. A part supprimer les 3/4 de l’humanité et revenir 200 ans en arrière, quelle autre conséquence en tirer ?

Lithopedion : La proposition est la décroissance. La décroissance est un effondrement planifié et contrôlé dans la mesure du possible afin de limiter les dégâts. Dans le cas présent, cela signifierait de créer des zones autonomes, indépendantes énergétiquement, économiquement, pour éviter la propagation de la maladie et pour offrir plus de résilience en cas d’autres catastrophes. Imaginez si nous avions la possibilité d’être autonome en France ? Il aurait suffit de fermer les frontières et personne n’aurait été contaminé. Mais ce n’est pas possible dans un monde globalisé.

Eljulio : Manifestement beaucoup de contributeurs n’ont pas lu son livre « Comment tout peut s’effondrer« . D’une part il évoque le risque d’une pandémie qui provoquerait potentiellement un recul du PIB mondial de 12.6% d’après certaines études (la réalité pourrait dépasser la fiction !). Plus largement, il réalise une très bonne synthèse très pédagogique, des risques qui menacent des domaines malheureusement variés : la finance, les écosystèmes, l’accessibilité aux ressources naturelles, les infrastructures vieillissantes, les rendements agricoles etc. Il explique également très bien l’aspect systémique des problèmes, et les blocages socio-techniques, cognitifs et psychologiques qui ne nous permettent pas de les traiter (ou seulement de manière très cloisonnée et parcellaire). Je vous invite à mettre à profit le temps dont on dispose pour LIRE le livre qui bousculera certainement les certitudes de certains, mais qui apportera un éclairage peut être salutaire!

NB : Pablo Servigne a été aussi contributeur en 2014 du livre collectif « Moins nombreux, plus heureux (l’urgence écologique de repenser la démographie »

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L’effondrement actuel de l’empire humain

Pablo Servigne : dans l’univers d’un élevage de dindes, tout va pour le mieux dans le meilleur des monde, l’éleveur vient tous les jours donner des graines et il fait toujours chaud. Les dindes vivent dans un monde de croissance et d’abondance… jusqu’à la veille de Noël ! S’il y avait une dinde statisticienne spécialiste de la gestion des risques, le 23 décembre elle dirait à ses congénères qu’il n’y avait aucun souci à se faire pour l’avenir…

Jean Jouzel : pas besoin de faire du catastrophisme, la situation est catastrophique. Je le répète, on n’est plus dans le futur : ce sont les enfants d’aujourd’hui, ceux des cours d’école, qui pourraient subir ces étés à 50°C.

Nicolas Hulot : on est en train de perdre la guerre sur le climat, on va le payer plein pot et nos démocraties vont s’e-ffon-drer.

Yves Cochet : par effondrement, j’entends un phénomène démographique qui verrait environ la moitié de la population mondiale disparaître en moins de dix ans… et dans les autres domaines de la vie, l’ampleur du bouleversement serait du même ordre.

Vincent Mignerot : l’acceptation que nous ne sommes pas tout-puissants me semble prioritaire. Nous devons déconstruire cette illusion en tenant compte des limites physiques de notre planète. Cela me paraît essentiel afin de réduire la souffrance et les crispations dans un monde qui va devenir de plus en plus contraint, quoi qu’il arrive.

Derrick Jensen : Que feriez-vous si des extraterrestres avaient envahi la planète, vidaient les océans, rasaient les forêt naturelles, modifiaient le climat, contaminaient le lait maternel et la chair de tous ainsi que la vôtre ? A que point la situation devrait-elle empirer avant que vous ne vous décidiez à arrêter ceux qui détruisent la planète, qui tuent ceux que vous aimez, et qui vous tuent, vous ?

Nicolas Casaux : contrairement à ce que prétend la doxa, l’effondrement de la civilisation serait une bonne chose.

Carolyn Baker : ce qui me fascine, ce n’est pas tant l’engloutissement de l’humanité dans les ténèbres, mais le type de culture que nous allons construire à partir des décombres de celle-ci.

Source : citations en exergue de chaque interview dans le livre « L’effondrement de l’empire humain », édition rue de l’échiquier, août 2020

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EELV face au concept de « décroissance »

Le concept de « Décroissance » semble pour certains membres d’Europe Ecologie Les Verts utilisable politiquement, mais pour d’autre à rejeter. Exemple, Alain Coulombel (membre du Bureau exécutif) avec Claire Lejeune (Les jeunes écologistes) se positionnent dans un projet de Charte et principes de gouvernance pour un « Principe de décroissance choisie et sélective (ou principe de post-croissance choisie et sélective) ». Ils justifient ainsi leur point de vue : « Parce que le PIB, la croissance pour la croissance, ne peuvent plus être notre boussole, nous nous engageons à réévaluer l’ensemble de nos activités à l’aune du bien vivre et des limites de la planète. Contre le productivisme et son pendant consumériste, certaines activités doivent décroître rapidement (automobile, aérien, activité spéculative, industrie du luxe, élevage industrielle, industrie touristique…) et laisser la place à d’autres activités (énergie renouvelable, low tech, mobilité douce, soin…) . De l’autre côté Esther Benbassa, sénatrice EELV : « Si les écologistes d’EELV étaient décroissants, les Français n’auraient pas voté pour eux ! Je tiens à vous dire que les écologistes ne sont pas décroissants. Il y a peut-être eu des branches de la pensée décroissante parmi la pensée écologiste, mais il n’y a pas d’écologie pratique qui soit décroissante ! » ( CNews, 29 juin 2020)

Le débat sur le concept de décroissance est ouvert à EELV depuis longtemps. Le 21 avril 2011, une motion de Thierry Pradier proposait que les futurs programmes électoraux d’EELV intègre l’idée d’une société de décroissance et proposait 12 mesures concrètes pour une décroissance sélective, solidaire et favorable à l’emploi. Depuis il existe une commission post-croissance à EELV (motion du 14 mars 2017) : « La croissance vide de sens, telle qu’elle est comptabilisée aujourd’hui, n’est autre qu’une fuite en avant… Nous savons que la croissance illimitée se réalise forcément au détriment de l’écosystème de la planète, à travers les « incrémentations cumulatives »… Une décroissance du PIB semble inévitable, tellement nous vivons à crédit sur la planète, mais elle ne doit pas être synonyme de chaos. C’est tout l’enjeu de la période transitoire qui doit être anticipée… » Le 16 janvier 2020, le projet écologiste d’EELV (programme Bien Vivre) intitule le premier de ses 6 piliers « Vers une société de post-croissance » : «  à la démesure, les écologistes opposent la conscience des limites ; au dogme de la croissance infinie, la décroissance des excès ; à la dictature du PIB, les indicateurs de bien être, d’égalité et d’émancipation... ».

Les tenants de la société thermo-industrielle accusent les écologistes d’être des apôtres de la décroissance, c’est ce que montrait un article récent sur ce blog biosphere. Les représentants médiatisés de l’écologie politique peuvent retourner l’argument, ce sont les Croissancistes qui nous amènent à la crise économique, en d’autres termes à la décroissance. Nous écologistes, nous voulons une activité économique en équilibre durable avec les possibilités de la biosphère, donc une société post-croissance qui nécessite forcément une décroissance sélective. L’écologie politique présente une vision complexe des réalités humaines face aux contraintes biophysiques. La forte probabilité d’une crise durable du système croissanciste est bien documenté depuis le rapport de 1972 sur les limites de la croissance. Nos adversaires idéologiques confondent la décroissance sélective et maîtrisée que nous voulons et la décroissance forcée où nous mène la perpétuation d’un système croissanciste dans un monde fini dont nous avons déjà dépassé les limites. Il faut leur rappeler que le système marchand traverse depuis son origine au XIXe siècles des décroissances économiques récurrentes dont la grande crise de 1929 ou plus récemment la récession de 2008. Une récession cyclique du système actuel qui se transforme en dépression économique, c’est bien l’équivalent d’une décroissance, sauf qu’elle est forcée, induite par l’expansion désordonnée du capitalisme marchand. L’écologie politique veut au contraire éviter la crise économique en mettant en place une décroissance sélective permettant de revenir à un état d’équilibre durable entre l’activité humaine et les possibilités de la planète. Une société post-croissance implique que l’on décide collectivement des arbitrages entre la décroissance de certains secteurs économique carbonés et le soutien à des activités créatrices d’emploi et économes en énergie. Quelques exemple de ce qui devrait décroître : énergies carbonées, centrales nucléaires, circuits alimentaires longs, produits ultra-transformés, alimentation carnée issue des élevages intensifs, pesticides et engrais chimiques, artificialisation des sols, hyper-concentrations urbaines, transports routiers, paquebots de croisière, aéroports surdimensionnés, publicité pour des produits superflus, etc. Bien entendu il y a tout ce qui devrait au contraire croître, énergie renouvelable, sobriété énergétique, circuits courts, alimentation végétale, agriculture biologique, etc. Cette écologie n’est pas punitive, elle est positive et réaliste.

Le résultat final se concrétisera sans doute par une décroissance globale du PIB, mais la sobriété partagée peut devenir une source meilleure de bien-être qu’une addiction à l’accumulation de marchandises. Il nous faut aussi préciser publiquement que le PIB est un indicateur de croissance très imparfait puisqu’une pollution entraîne des dépenses pour réduire cette pollution et donc on mélange à la fois un mal et un bien. Il est même fort possible que si on enlevait toutes les externalités négatives du PIB, on mesurerait déjà une décroissance de la richesse réelle produite. Il nous faut collectivement utiliser des indicateurs alternatifs comme l’IBED (indicateur de bien-être véritable). En clair, atteindre le bonheur national brut est un meilleur projet politique que sacraliser le produit intérieur brut comme le font les Croissancistes. Ceux qui attaquent les écologistes en simplifiant indûment la complexité de la notion de décroissance ne font que soutenir le système « business as usual ». Les Croissancistes nous mènent au désastre et à l’appauvrissement collectif en retardant la rupture écologique nécessaire pour enrayer les émissions de gaz à effet de serre, l’extinction des espèces, le stress hydrique, l’épuisement des ressources non renouvelables, etc.

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Le faux dualisme entre nature et culture

« Fin de la nature, nature out ? » Catherine Vincent s’attaque à cette question à la fois philosophique et cruciale. Pour les uns la na­ture, ça n’existe pas, ce n’est qu’une construction de l’esprit, tout est culture. Or ce dualisme a mené l’humanité à une exploitation effrénée et suicidaire des res­sources naturelles. Pour d’autres comme l’anthropologue Philippe Descola, les tribus amérindiennes entrent en connivence avec les autres « existants », tous dotés d’une vie autonome dont dépend la qualité de vie des humains. Des forêts luxuriantes de l’Amazonie aux étendues glacées de l’Arctique canadien, certains peuples ne se conçoivent pas comme des collectifs sociaux gérant leurs relations à un écosystème, mais comme de simples composantes d’un ensemble plus vaste. Pour Bruno Latour, Nature et Kultur constituent les deux parties d’un même concept reliées « par un fort élastique » qui se battent à coups de poing sans cesser de partager le même tronc. Baptiste Morizot préfère référer au « tissu du vivant ». Isabelle Stengers l’affirme, « L’idée que “la nature n’existe pas” me semble faire partie de l’arsenal académique destiné à choquer. Au fond, les scientifiques qui s’occupent d’aspects dispersés de ce qu’on appelle “nature” se révoltent si on leur dit que “ce n’est qu’une construction”. Non, la nature “tient” indépendamment des humains. » Satish Kumar a fait une formidable « Déclaration de dépendance » :

« Vous remarquerez que Descartes dit deux fois « je » dans son « je pense, donc je suis ». Il fonde tout seul sa vérité, tout ce qui vit autour de lui n’existe plus ! D’ailleurs il a eu cette révélation en méditant enfermé dans une chambre. S’il avait réfléchi dans la nature, entouré d’arbres, d’animaux, caressé par le vent, il n’aurait pas conclu à une prise de conscience solitaire. En posant l’ego comme le moteur de l’être humain, votre Descartes a institué un dangereux dualisme, il a isolé l’homme de son environnement, il l’a proclamé indépendant. Les bouddhistes indiens se sont évertués au contraire à libérer l’homme des illusions de l’ego, ont développé le principe de co-dépendance entre tout ce qui vit. »

Voici le genre de « dialogue » qui peut s’instaurer entre commentateurs sur lemonde.fr :

Alazon : Sidérant comme certains ont l’impression de faire preuve de génie en redécouvrant l’animisme le plus naïf, pour ne pas dire niais. Il y a quelques millénaires pourtant de vrais penseurs s’en sont extraits pour dire que l’homme n’est pas juste un petit bout d’un grand tout mais la seule conscience de l’univers. Ils ont posé les fondements d’une autre pensée : l’humanisme, qui fait de l’humain la mesure de toute chose. La vision de la nature a été revue en conséquence. On a découvert qu’elle est le plus souvent hostile à l’homme. On a découvert l’horreur du sort qu’elle nous réserve, avec la mort pour perspective mais aussi la cruauté de voir périr la plupart des ses enfants avant même qu’ils sachent marcher. Peu à peu le progrès est apparu dans sa dimension émancipatrice. Malgré les résistances des esprits obtus, il a permis à une majorité d’humains de sortir de la famine, de réduire la mortalité infantile, de conquérir des loisirs. C’est ces progrès que menace l’animisme écolo.

Michel SOURROUILLE @ Alazon : Une nature profondément détérioré grâce à notre « humanisme » ne pourra plus permettre à une très grande partie de nos générations futures de survivre dignement. On pourra même s’entre-tuer un jour pour quelques gouttes d’eau, on verra périr des enfants avant même qu’ils sachent marcher. Cela a déjà commencé. Appeler cela le « progrès », c’est ne pas connaître le sens des mots qu’on utilise. Il n’est que temps que l’humanité cesse de se croire le nombril du monde et arrive plus d’humilité et de sens du terroir. On ne peut vivre qu’en fonction de ce que nous offrent comme services (de moins en moins gratuits) les écosystèmes. Et çà, ce n’est pas de l’animisme, c’est à la fois du réalisme culturel et économiques. Mais les poncifs d’Alazon resteront sans doute bien ancrés dans sa tête, les évidences biophysique ne peuvent rien contre les croyances humaines.

Clabbez : Si je ne m’abuse, le travail de l’anthropologue Descola n’était pas tant de dire que la nature n’existe pas mais plutôt de détricoter les concepts introduits par les humanistes qui voulaient opposer la culture « humaine » à la « nature » vue comme hostile, sauvage et dangereuse. Il est temps de changer de mythe avant que l’on finisse de couper la branche sur laquelle nous sommes assis…

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Virus humain, virus porcin, virus des végétaux

Comment ne pas penser au virus Sars-Cov-2 quand il s’agit du virus PPA ? L’Allemagne, la Belgique, la Chine, la France, le monde entier est concerné par la peste porcine. La gravité et la contagiosité du virus rend nécessaire l’identification de la zone infectée, l’élimination des animaux touchés, la désinfection complète du site et le contrôle des déplacements des suidés et matières à risque. La peste porcine africaine (PPA) est une maladie animale qui touche exclusivement les porcs domestiques et les sangliers. Faute de traitement efficace connu, les porcs et autres suidés malades doivent être abattus, enterrés ou incinérés dans les conditions sanitaires appropriées. Comme pour la pandémie humaine, le confinement devient obligatoire et le contrôle aux frontières omniprésent :

– Les trois régions frontalières de l’Allemagne avec la Pologne se barricadent, elles ont annoncé la construction d’une clôture, haute de 1,50 m et longue de 62 km, qui suivra le tracé de la frontière. A terme, cette structure prolongera les quelque 248 km de clôtures partiellement électrifiées, que les autorités régionales du Brandebourg et de Saxe ont déjà érigées depuis le début de l’année, le long de la ligne Oder-Neisse.(19 juillet 2020)

– Peste porcine, après les premiers cas déclarés en 2018 dans le nord de la Chine, l’épidémie s’est diffusée comme une traînée de poudre. Les pertes pourraient s’élever à 200 millions de bêtes sur l’année 2019. Soit le tiers de la production annuelle du premier pays producteur et consommateur de porc au monde, avec environ 55 millions de tonnes consommées en 2017. (16 mai 2019)

– Après la découverte de deux sangliers contaminés par la peste porcine en Belgique, à moins d’un kilomètre de la frontière française, le 6 janvier, le gouvernement français a décidé de délimiter une zone dite blanche de 141 km2. Toute activité économique ou de loisirs y est interdite. Le grillage, enfoui à 50 cm dans le sol et s’élevant à 1,50 m ou 2 mètres selon les endroits, est censé résister aux tentatives d’évasion et d’intrusion des animaux. Quarante-cinq kilomètres de barrière devraient être déployés.(7 mars 2019)

L’élevage en batterie des humains et des animaux ne présage rien de bon, la concentration accentue les risques de contamination. La pandémie humaine s’est propagée à la planète entière, il en est de même de la peste porcine. Et les végétaux ne sont pas à l’abri d’une infection virale. Dans un livre sur la surpopulation à paraître en octobre 2020, Michel Sourrouille écrit : « À population nombreuse, consommation de masse, production de masse dans des conditions désastreuses, risque croissant d’épidémie. Le risque de contamination entre animaux humains et non-humains se double du risque alimentaire au niveau végétal. La bactérie Xylella fastidiosa ravage 200 espèces et tout particulièrement les oliviers. Il n’existe aucun traitement curatif, les végétaux contaminés sont arrachés dans un rayon de dix mètres en France, et une surveillance renforcée est instaurée, avec des visites mensuelles ainsi que des prélèvements de végétaux. Autre exemple récent, le Tomato Brown Rugose Fruit Virus (ToBRFV) détruit les cellules de la tomate et peut décimer jusqu’à 100 % des plants contaminés sur un site de production. Ce virus est apparu dans une exploitation bretonne qui a été placée sous séquestre… »

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Croissance verte ou décroissance écologique ?

Le terme décroissance commence à être utilisé au plus haut niveau sans en comprendre le sens profond. Quel pourrait être le point de vue des écologistes ?

11 juin 2019, Édouard Philippe lors de sa déclaration de politique générale : « Je ne me ferai pas passer pour un autre. Je ne suis pas un défenseur de la décroissance. Je crois en l’économie de marché régulée par le politique, en l’innovation et en la force de la croissance. Je crois possible un nouveau modèle économique qui produise des richesses, donc de l’emploi, sans salir, sans contaminer, sans détruire, sans condamner ceux qui viendront après nous ou ceux qui vivent loin de nous. »

15 juillet 2020, Jean Castex lors de sa déclaration de politique générale : « L’écologie, c’est notre affaire à tous. Elle doit être créatrice de richesses. Je crois en la croissance écologique, pas à la décroissance verte. »

Face à ces slogans croissancistes et simplificateurs, il me semble qu’un écologiste devrait dès qu’il en a l’occasion rebondir sur le mot-valise « décroissance » en précisant que le mouvement écologiste est contre une croissance du PIB impossible à poursuivre sur une planète dont on a dépassé les limites. Une telle option, caricaturée sous une dénomination « croissance verte ou écologique » qui ne fait qu’escamoter le « business as usual », nous amène en effet inéluctablement à des crises économiques, donc à des récessions (ou dépression) synonymes de décroissance subie. Par contre les écologistes réalistes sont pour une décroissance maîtrisée, sélective. Certaines activités économiques peuvent être développée, mais d’autres, carbonées, disparaître progressivement. Il s’agit de construire une société post-croissance en équilibre durable avec une pérennité des ressources naturelles. Il faut montrer dans toutes les occasions possibles que les problèmes socio-écologiques sont complexes ; par exemple on ne peut soutenir politiquement le secteur automobile ou aérien au nom d’une croissance « verte » utilisant des moteurs « propres » sans être en contradiction avec ses propres déclarations d’intentions. Emmanuel Macron avait dit juste avant Castex croire à une « écologie du mieux, pas du moins ». On présente l’enjeu écologique comme un sujet clivant plutôt que comme un impératif qui devrait nous rassembler autour de fondamentaux thermo-dynamiques comme les mécanismes de l’entropie et du réchauffement climatique. Quelques réactions sur lemonde.fr face au discours du nouveau premier ministre :

Melvin : Castex, ‘ La croissance écologique, pas la décroissance verte ‘ encore un qui a le niveau scientifique d’un enfant de 10 ans. Un ‘anti-science’ à la Trump ou Bolsonaro dont les incantations n’atteignent pas le niveau de l’idiotie. Il comprend la thermodynamique comme un singe une équation différentielle… A pleurer. Il ne peut pas y avoir de croissance sans destruction de l’environnement. Simplement parce que la croissance récompense, de façon ultime, toujours par des biens physiques. Et qu’il faut les créer. Mais ça, les politiciens actuels ne le comprennent pas.

Ricardo Uztarroz : « Croissance écologique » ??? Mais qu’est-ce que cela veut dire ? Croissance et écologie sont antinomiques pour la simple raison que la croissance (produire toujours plus) est la cause de la dégradation de la nature. La croissance saigne la planète de ses ressources et l’épuise. Tout le discours de Castex est au diapason de cette formule vide de sens. Il n’a été que du verbiage ronflant accompagné d’une gestuelle de colonel de gendarmerie à la retraite parodiant le gendarme de Saint Tropez. Par exemple « séparatisme ». Ces « territoires » dits « perdus » ne cherchent pas à se séparer de la France, comme le souhaitent les indépendantistes corses, basques, bretons, mais à faire tâche d’huile, à s’épandre, à imposer leur loi à tout l’hexagone. Idem à propos des retraites : qu’entend-il par concertation et dialogue social ? Simple consultation ou réelle négociation ? Le vrai dialogue, c’est la négociation. Enfin, il a rendu hommage aux « réalisations considérables » d’Edouard Philippe. Lesquelles ? Les cadeaux aux riches ?

le sceptique @ Ricardo Uztarroz : vous avez raison si vous prenez le programme écologique dans son entièreté, à savoir que non seulement il faut arrêter le réchauffement, mais aussi arrêter les extractions, les artificialisations, les pollutions etc. Nous souffrons justement que peu de gens, même parmi ceux se disant une sensibilité « verte », ont réellement lu et réfléchi la littérature de l’écologie scientifique. On voit déjà que pour une large part des commentaires, l’écologie se résume à la lutte contre le réchauffement. Si tel est le cas, alors en effet, une croissance écologique ou une écologie industrielle est possible (au moins sur 20-30 ans, terme raisonnable d’investissements). Voir ce que fait l’Allemagne. Mais l’Allemagne, ce sont aussi des paysages de plus en artificialisés, des résultats médiocres en biodiversité, etc. Si l’on veut la totalité du programme écolo, c’est une régression massive : vivre du produit d’un lopin de terre en touchant un minimum aux milieux.

Sejas : Croissance écologique ? Quand vous développer les transports électriques et le nucléaire, quand vous développez la production d’hydrogène pour stocker l’électricité intermittente des ENR, quand vous isolez les bâtiments, quand vous développez les carburants à base de produit agricole (carburant avion non carboné), quand vous développez la productivité des cultures (précision farming, semis sans labour..) etc vous faite de la croissance non carbonée. La vraie écologie ce n’est pas les combats d’arrière garde contre les OGM ou le glyphosate qu’il faut pouvoir utiliser une fois par an pour les semis sans labour.

Ricardo Uztarroz @ Séjas : parce que vous pensez sincèrement que toutes les solutions que vous avancez sont écologiques. Transports électriques ? Avec quoi fabrique-t-on les batteries et comment les recycle-t-on ? Comment produit-on l’hydrogène ? Avec une baguette magique ? L’isolement des bâtiments ? Avec quoi ? Avec de la laine de verre. Celle-ci est-elle une création spontanée ? Les carburants « agricoles », comment cultive-t-on les plantes d’où ils sont extraits. J’ai vécu au Brésil à l’époque où les voitures roulaient à l’alcool de cane à sucre (j’en ai eu une). Les conséquences écologiques ont été désastreuses. La croissance écologique (nouvelle formule pour croissance durable) n’est que foutaise, un gros mensonge. Une politique écologique implique la décroissance. Mais personne n’en veut, même pas les écolos. L’humanité court à sa perte malgré elle. Mais ce qu’il adviendra à la planète dans mille ans, je m’en tape allègrement. La société industrielle est une course irréversible vers l’abîme. Lucide le mec !

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Vomissures croissancistes sur la décroissance

Les Croissancistes croient que parce nous avons marché sur la lune, nous pouvons mettre le soleil en boîte (ITER) et terraformer la planète Mars. Fiers de leurs élucubrations, ils se soucient comme d’une guigne de l’état réel de la planète, n’ont jamais lu le rapport de 1972 sur les limites de la croissance, n’ont jamais entendu parlé de l’empreinte écologique, ne savent pas que nous avons déjà dépassé depuis des années les possibilités de la Terre, ignorent la 6ème extinction des espèces, etc. Bref les Croissancistes ne connaissent rien à rien et se contentent dans les médias de vomir sur le concept de décroissance. Exemples (citations extraites du numéro juillet-août 2020 de La Décroissance) :

– Ceux qui rêvent d’un monde en décroissance sont des ignorants qui n’ont jamais eu faim. Les décroissants veulent moins d’enfants, une planète vide et réservée à quelques happy few. Il faut lutter jusqu’au bout plutôt que d’accepter de vivre sous le joug des décroissants verts, bruns ou rouges. (sur le site de Jean-Philippe Delzol, 25 mai 2020)

– L’absurdité de la décroissance est une leçon à retirer de la galère où l’on se trouve (suite au coronavirus). Voilà ce que ça donne, la décroissance. c’est très concret la décroissance, c’est la misère. (Raphaël Enthoven, France 5, 30 mai 2020)

– On ne va pas protéger l’environnement avec de la décroissance. (Bertrand Piccard, Europe 1, 4 juin 2020)

– La pandémie est l’expérimentation en vraie grandeur de la société de décroissance prônée par un certain nombre d’écologistes extrémistes et collapsologues. Si la décroissance économique apparaît comme une méthode radicale pour réduire les gaz à effet de serre, elle représente parallèlement davantage de pauvreté et d’inégalités ainsi qu’une restriction significative des libertés. La croissance économique reste le principal levier du développement humain. (Philippe Charles, Contrepoints, 5 juin 2020)

– La décroissance est plus un poison qu’un remède. Cette idée de décroissance n’est évidemment ni responsable, ni réalisable dans la mesure où elle reviendrait à éteindre la vie doucement et éliminer toute chance d’améliorer le quotidien des habitants de la planète. (Jean-Marc Sylvestre, Atlantico, 9 juin 2020)

– Sonner l’heure de la décroissance serait une erreur magistrale. C’est une vague de préconisation absurdes, écologie punitive, recommandations malthusiennes, technophobie galopante. Tomber dans le piège de la facilité serait l’assurance du déclin. (Jean-Pierre Chevènement, L’Obs du 16 juin 2020)

– Le réchauffement de la planète est une réalité, mais pas moins que le cataclysme économique qui nous attend. Comment mener ces deux fronts à la fois avec pertinence ? Certainement pas en écoutant les apôtres de la décroissance, qui nous conduiraient tout droit au chaos généralisé. (éditorial du Figaro, 19 juin 2020)

– Ce n’est pas la peine de crier « Décroissance ! Décroissance ! » si c’est pour aboutir à une crise majeure, à un taux de chômage et de pauvreté record ainsi qu’à un bouleversement de notre mode de vie. Est-ce que l’on veut sauver le climat en tuant les gens ? (Daniel Cohn -Bendit, Le Point, 19 juin 2020)

– Je formule le souhait qu’Emmanuel Macron ait le courage de soumettre à référendum les propositions lunaires de la Convention climat : que le peuple français tranche entre la décroissance et le progrès, l’écologie punitive néo-marxiste et une écologie humaniste. (Julien Aubert, Les Républicains, 19 juin 2020)

– Nous venons de vire une expérience grandeur nature de la décroissance avec la pandémie. Les hérites new look du communisme que sont les fondamentalistes verts se sont réjouis haut et fort de ce répit accordé à la planète. Ils poussent la Convention citoyenne à plaider pour une décroissance punitive tous azimuts : décroissance énergétique, réduction de la consommation, de la production, du temps de travail, de la vitesse sur les autoroutes, des voyages en avion, de la publicité pour des grosses cylindrées. Pour imposer des mesures destinées à punir nos modes de vie, les décroissants veulent limiter les libertés. (Luc Ferry, Le Figaro, 25 juin 2020)

– Les Bobos veulent imposer la décroissance. (Michel Chassier, Rassemblement National, dans la Nouvelle République du Centre-Ouest, 27 JUIN 2020)

– Si les écologistes d’EELV étaient décroissants, les Français n’auraient pas voté pour eux ! Je tiens à vous dire que les écologistes ne sont pas décroissants. Il y a peut-être eu des branches de la pensée décroissante parmi la pensée écologiste, mais il n’y a pas d’écologie pratique qui soit décroissante ! (Esther Benbassa, sénatrice EELV, CNews, 29 juin 2020)

Commentaire du blog biosphere : Notons d’abord que tout le monde semble d’accord, de l’extrême droite jusqu’aux Verts en passant par les intellectuels. Notons ensuite qu’ils ne disent rien des décroissances économiques récurrentes que connaît le système capitaliste depuis son expansion au XIXe siècles jusqu’aux crises de 1929 et 2008. Or une récession cyclique qui peut même se transformer en dépression économique est bien l’équivalent d’une décroissance, sauf qu’elle est forcée, induite par l’expansion désordonnée du capitalisme marchand. Il ne faut pas confondre cette décroissance subie avec une décroissance voulue et maîtrisée pour revenir à un état d’équilibre durable entre l’activité humaine et les possibilités de la planète. Une société post-croissante implique que l’on décide collectivement des arbitrages entre la décroissance de certains secteurs économique carbonés et le soutien à des activités créatrices d’emploi et économes en énergie. Le résultat final se concrétisera certes pas une décroissance globale du PIB, mais la sobriété partagée peut devenir une source de bien-être meilleure qu’une addiction à l’accumulation de marchandises. De toute façon le PIB est un mauvais instrument de mesure puisqu’une pollution entraîne des dépenses pour réduire cette pollution et donc on ajoute à la fois un mal et un bien. Il est même fort possible que si on enlevait toutes les externalités négatives du PIB, on mesurerait une décroissance du système actuel. C’est ce que fait l’IBED (indicateur de bien-être véritable). Il peut être défini comme la somme [consommation marchande des ménages + services du travail domestique + dépenses publiques non défensives + formation de capital productif (investissement)] moins [dépenses privées défensives + coûts des dégradations de l’environnement + dépréciation du capital naturel]. (cf. Les nouveaux indicateurs de richesse de Gadrey et Jany-Catrice (édition La Découverte, 2005))

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Constitutionnaliser l’écocide par référendum

« Ce serait la meilleure façon pour que n’importe quelle association ou citoyen ait la possibilité de saisir le juge pour faire arrêter une activité humaine, une entreprise, une association ou même son voisin » s’exclame le premier ministre Edouard Philippe. Marie Toussaint, Eurodéputée écologiste, donne un point de vue contraire dans  « Référendum sur l’écocide: “Il faut faire confiance aux Français”:

« L’écocide implique une atteinte grave à un ou plusieurs écosystèmes: les océans, les forêts, les rivières etc. Deux versions en ont été formulées, qui font débat : pour que soit répréhensible, on peut en effet exiger que l’atteinte grave soit intentionnelle ou,comme c’est le cas pour les crimes contre l’humanité, on peut se contenter que l’auteur de l’infraction ait eu connaissance du risque. Cette notione est née de la prise de conscience des crimes conjoints contre la nature et l’humain.  C’est dans les années 70, après l’utilisation massive par l’armée américaine de l’agent orange dans la guerre du Vietnam, qu’on a commencé à y faire recours d’une manière plus concrète. Onze pays répriment déjà depuis 1990 l’écocide. Le premier a été le Vietnam. En décembre 2019, les Maldives ont formellement demandé que l’écocide figure parmi les infractions jugées par la CPI, alors que quasiment en même temps, lors de la COP 25, l’Etat des Tuvalu dénonçait l’inaction des Etats-Unis en matière climatique comme crime contre l’humanité.

L’adoption de l’écocide en France serait un véritable basculement philosophique et juridique. Elle permettrait de punir les atteintes graves aux écosystèmes perpétrées non seulement sur le territoire national, mais aussi à l’étranger si les auteurs ou les victimes sont  français. La France pourrait même s’octroyer une juridiction universelle, c’est-à-dire la capacité de juger de cette infraction quels que soient le lieu où le crime est commis et la nationalité des auteurs ou des victimes. Intégrer l’écocide en droit français renforcerait en outre les démarches de la France pour qu’il soit reconnu au niveau international, par exemple devant la CPI. Le droit de l’environnement déjà en vigueur en France reste encore largement en deçà des besoins. Le préjudice écologique, que la jurisprudence a reconnu en droit civil dès 2012, et que la loi a adopté en 2016, vient tout juste de connaître ses premières applications. Les infractions pénales existantes se limitent à punir des violations de normes très précises, comme par exemple celles réglementant les déversements dans les cours d’eau. Ces infractions ne reconnaissent pas le droit de la nature à être protégée. Qui protège la terre protège l’humanité ; il ne faut pas oublier que l’écocide implique une atteinte à la capacité de l’humanité à vivre sur la planète.

Je suis ravie que la CCC (Convention citoyenne sur el climat) ait proposé de pénaliser en France l’écocide, et ce à 99,3% des voix, ce qui en fait l’une des propositions les mieux votées par ses 150 membres. Je trouve en outre qu’elle a mené un travail extraordinaire, en élaborant une fiche légistique très convaincante. J’apprécie notamment l’idée soutenir l’écocide par la création d’une Haute autorité des limites planétaires : elle permettra aux juges de se baser sur une évaluation transparente des atteintes à l’environnement susceptibles d’être réprimées ou d’être prévenues via des mesures conservatoires. Soumettre la création de l’écocide à un référendum est ue bonne chose puisque le Parlement français a déjà rejeté deux fois la notion d’écocide et que le gouvernement actuel s’est déjà exprimé contre l’adoption de la notion en droit français. »

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Histoire de planètes parlant du virus humain

Histoire de planètes, j’en connaissais déjà une bien bonne :

La Terre rencontre une planète qu’elle n’avait pas vue depuis longtemps : « Tu as bien pâle mine, lui dit celle-ci. – Je suis malade, dit la Terre, j’ai attrapé l’humanité. – Oh ! Ne t’inquiète pas, la rassure l’autre, je l’ai eue moi aussi, ça passe tout seul. (Eloge de la simplicité volontaire d’Hervé-René Martin p. 236).

Je viens d’en trouver une variante de la part d’un internaute sur lemonde.fr :

Saturne, Venus, et la Terre échangent autour d’un verre sur leurs maux. Venus : « Il fait tellement chaud chez moi que j’ai un mal de tête épouvantable. » Saturne : « Moi avec tous ces anneaux qui tournent sans cesse autour de moi, j’ai un tournis insupportable.
Et puis la Terre qui a le temps devant elle : « Moi, j’ai un petit virus humain qui m’exaspère, mais je suis tranquille, je vais bientôt m’en débarrasser… »

moralité : Dans les situations les plus désastreuses, les humains trouvent toujours le moyen d’en rigoler, et ça que c’est une bonne idée…

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Le virus humain, plus mortel que le CoV-2

Philippe Descola : «  Les grandes pandémies sont des zoonoses, des maladies qui se propagent d’espèce en espèce et dont la diffusion est donc en grande partie dépendante des bouleversements écologiques ; la dégradation et le rétrécissement sans précédent des milieux peu anthropisés du fait de leur exploitation par l’élevage extensif, l’agriculture industrielle, la colonisation interne et l’extraction de minerais et d’énergies fossiles. Cette situation a eu pour effet que des espèces sauvages réservoirs de pathogènes se sont trouvées en contact beaucoup plus intense avec des humains vivant dans des habitats beaucoup plus denses… Le capitalisme se propager comme une épidémie, sauf qu’il ne tue pas directement ceux qui le pratiquent, mais les conditions de vie à long terme de tous les habitants de la Terre. Nous sommes devenus des virus pour la planète. Un virus est un parasite qui se réplique aux dépens de son hôte, parfois jusqu’à le tuer. C’est ce que le capitalisme fait avec la Terre depuis les débuts de la révolution industrielle, pendant longtemps sans le savoir. Maintenant, nous le savons, mais nous semblons avoir peur du remède, que nous connaissons aussi, à savoir un bouleversement de nos modes de vie. L’idée que les humains vivent dans un monde séparé de celui des non-humains nous a fait oublier que la chaîne de la vie est formée de maillons interdépendants. Le « nous » n’a guère de sens si l’on songe que le microbiote de chacun d’entre « nous » est composé de milliers de milliards d’« eux », ou que le CO2 que j’émets aujourd’hui affectera encore le climat dans mille ans. Les virus, les micro-organismes, les espèces animales et végétales que nous avons modifiées au fil des millénaires sont nos commensaux dans le banquet parfois tragique de la vie. Il est absurde de penser que l’on pourrait en prendre congé pour vivre dans une bulle… Dans plusieurs pays des petits collectifs ont fait sécession par rapport au mouvement continu d’appropriation de la nature et des biens communs qui caractérise la croissance économique depuis la fin du XVIe siècle. Ils mettent l’accent sur l’identification à un milieu et l’équilibre des rythmes de la vie plutôt que sur la compétition, l’appropriation privée et l’exploitation maximale de la Terre… On peut appeler ça un tournant anthropologique,devenue moins anthropocentrique. L’un des moyens pour ce faire fut d’introduire les non-humains comme des acteurs de plein droit… Que serait-il important de changer rapidement ? En vrac : développement des conventions citoyennes tirées au sort ; impôt écologique universel proportionnel à l’empreinte carbone ; taxation des coûts écologiques de production et de transport des biens et services ; développement de l’attribution de la personnalité juridique à des milieux de vie, etc. »*

Quelques commentaires sur lemonde.fr :

Precis : Saturne, Venus, et la Terre échangent autour d’un verre sur leurs maux. Venus : « Il fait tellement chaud chez moi que j’ai un mal de tête épouvantable. » Saturne : « Moi avec tous ces anneaux qui tournent sans cesse autour de moi, j’ai un tournis insupportable. » Et puis la Terre s’exprime : « Moi, j’ai un petit virus humain qui m’exaspère, mais je suis tranquille, je vais bientôt m’en débarrasser… »

J.Dupond1 : L’homme un virus ? Chouette, les écologistes profonds ont trouvé leur idéologue pour justifier de prochaines tueries de masse. Les terroristes islamistes pourraient même s’y raccrocher car, après tout, ce système ce sont plutôt ces infidèles d’occidentaux qui en sont responsables.

le sceptique : Descola ne va pas au bout de sa logique, « la nature » n’est qu’un mode d’auto-transformation. La construction des artefacts n’est ni plus ni moins « naturelle » que la construction des tissus et organes, la vie est un programme de captation de ressources pour s’autorépliquer. Si le capitalisme est un « virus », alors il est une émergence de la vie dont il a parfaitement compris la logique, d’où son grand succès ! Les cultures aussi co-évoluent, en compétition, coopération, hybridation. Difficile alors de dire qu’un état (passé, présent ou futur) de « la nature » serait une référence de quoi que ce soit.

Bernard l. @ le sceptique : Vous n’êtes pas sceptique, vous êtes désespéré. Et, oserais-je ajouter, désespérant. La vie évolue par essais successifs, au hasard. Des résultats de ces essais, le chemin parcouru. Mais l’homme, bien que partie intégrante de ce cheminement, à ceci de différent, qu’il est capable de comprendre ce fonctionnement et d’anticiper les conséquences de ses actions. Donc non, il ne me semble pas que ses choix soient à mettre au même niveau que les évolutions des autres composantes de la nature. On a le choix de notre futur, encore ne faut-il pas le sacrifier à notre présent.

le sceptique @ Bernard : je lis dans votre réponse le reflet de votre propre désespoir. Il n’y a rien de désespéré ni désespérant à observer l’incroyable trajectoire de la vie, la puissance du devenir qui se déploie et l’insignifiance quasi-complète du présent d’un Terrien dans ce processus. Je ne crois pas que la conscience humaine a tant de prise que cela, en fait nous bricolons comme le reste du vivant. Par ailleurs, si l’environnement émerge comme question au sein du capitalisme, assez vite finalement à échelle du temps historique, cela fait partie de l’auto-ajustement, non ?

Philippe Marrel : Sauf qu’il faut tenir compte des échelles temporelles! C’est sûr, à l’échelle de la biosphère, en centaines de millions d’années, le problème humain sera réglé et oublié, au catalogue des essais et erreurs de l’évolution. Une grande extinction parmi d’autres. Mais en tant qu’êtres vivants d’un temps bien plus bref, nous n’avons pas la possibilité de compter sur les auto-corrections, et nous devons donc nous référer à un schéma de principe, forcément simplificateur, forcément idéalisé, pour guider notre route. Du moins ce qui reste en notre pouvoir comme décision.

A. LE COMTE : Il y a une cinquantaine d’années, on me riait au nez quand je défendais les idées de René Dumont !! On voit où on en est maintenant !

Supergudule : Pour rappel la population mondiale de 1950 à 2017 est passée de 2 milliards à 7 milliards d’humains. c’est bien ? c’est mal ? c’est à cause du capitalisme ? Pensez vous que cela permet d’envisager cette coexistence sereine avec la nature ?? Sérieusement ???

Sybill : C’est le bon moment pour revisiter les écrits et la pensée de Nicolas Georgescu-Rogen : « Le processus économique n’est qu’une extension de l’évolution biologique et, par conséquent, les problèmes les plus importants de l’économie doivent être envisagés sous cet angle ». Tant que les dommages écologiques ne seront pris en compte que comme des externalités négatives, sorte de dommages collatéraux qu’il suffirait d’internaliser dans les coûts (principe pollueur-payeur), les choses ne changeront pas significativement…

* https://www.lemonde.fr/idees/article/2020/05/20/philippe-descola-nous-sommes-devenus-des-virus-pour-la-planete_6040207_3232.html

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Post-covid, il faut combattre l’urbanisation

Philippe Chiambaretta : « L’accélération exponentielle de l’urbanisation a conduit à un épuisement tel des ressources naturelles que la Terre est aujourd’hui en état d’urgence respiratoire. Les villes consomment 80 % des ressources de la planète sur seulement 2 % de sa superficie. En cette période de confinement, la chute spectaculaire des niveaux de pollution et de production de déchets fait prendre conscience à l’opinion publique de l’impact des villes sur leur environnement. Le concept de « ville-métabolisme », qui s’attache à comprendre les interactions entre les différentes strates de la ville – mobilités, nature, infrastructures, usages, bâti – ne passera pas au stade de recherche appliquée sans le recours à la « data », qui permet de quantifier ces phénomènes. L’expérimentation de voiries temporaires dédiées au vélo peut permettre de mesurer une évolution du trafic, entraînant la libération d’espaces qui peuvent donner lieu à des systèmes de végétalisations susceptibles d’accueillir à leur tour de nouveaux usages, et jouer un rôle sur les niveaux de pollution, le bien-être, renforcer la biodiversité ou supplanter des infrastructures. Des projets pilotes à l’échelle d’une décennie devront pouvoir déroger aux normes habituelles qui brident l’innovation par principe de précaution et court-termisme politique. »

Chiambaretta pose pour incontournable l’existence des villes, il suffirait de les améliorer pour qu’elles soient moins polluantes et destructrice des ressources. L’idée de désurbanisation ne l’effleure jamais, il suffit de s’adapter, rengaine de ceux qui ne veulent rien changer vraiment à nos modes d’existence. L’idée de surpopulation, une des causes première de l’entassement dans les villes et leurs immeubles à (nombreux) étages, n’est pas du tout le cadre de sa pensée. Son idée fixe est du genre « donnez moi le pouvoir, fi du principe de précaution, vous allez voir ma capacité d’innover. » Mais il ne peut rien contre la réalité : une ville mise sous cloche verrait mourir rapidement presque tous ses habitants, un village isolé peut arriver rapidement à son autonomie alimentaire et énergétique. La révolution industrielle a détruit la paysannerie, socle fondamental de nos besoins primaires, alimentaires. Le système de classification moderne a bien octroyé au secteur agricole la qualification de « primaire » (qui vient en premier), mais c’est pour mieux glorifier l’extension du secteur secondaire puis tertiaire. Pourtant que ce soit clair : ouvriers, employés et cadres urbanisés ne sont que des parasites qui vivent au crochet des agriculteurs. Avec les crises écologiques qui menacent, le besoin d’avoir de quoi se nourrir va redevenir l’exigence de tous les jours.

En cette période de confinement, nous avons appris où se trouvent nos besoins essentiels. Chacun devrait cultiver son jardin, les paysans seront de retour. La meilleure politique de la ville pour les années à venir doit consister à abandonner progressivement les grandes agglomérations pour revitaliser les campagnes ; en France notamment des milliers de villages sont abandonnés. Nous avons connu l’exode rural pendant des décennies, le moment et venu de faire le mouvement inverse. c’est la position de ce blog biosphere. Pour en savoir plus :

2005 Les paysans sont de retour de Silvia Pérez-Vitoria

20 octobre 2013, un mauvais choix gouvernemental, l’agro-industrie

24 janvier 2019, Cultiver la nature en ville ou désurbanisation ?

1er mai 2019, BIOSPHERE INFO, Small is Beautiful

29 juin 2019, Bidonvilisation démentielle de la planète

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