spiritualités

Rejoignez notre Alliance des gardiens de Mère Nature

Dans une tribune au « Monde », quatorze représentants de peuples indigènes de différents continents, dont ceux de l’Amazonie brésilienne, lancent un appel à protéger le caractère « sacré » de la nature et à s’opposer aux projets du président du Brésil : « Nous, gardiens et enfants de la Terre Mère, peuples indigènes et alliés, nos prophéties, notre sagesse et nos savoirs nous ont permis de constater que la vie sur la Terre Mère est en danger et que l’heure d’une grande transformation est arrivée. Nous appelons l’humanité à prendre des mesures pour protéger le caractère sacré de l’eau, de l’air, de la terre, du feu, du cycle de la vie et de tous les êtres humains, végétaux et animaliers. Il est vital de transformer notre approche de la nature en l’envisageant non comme une propriété, mais un sujet de droit, garante de la vie… Nous devons évoluer vers un paradigme basé sur la pensée et la philosophie indigènes, qui accorde des droits égaux à la Nature et qui honore l’interrelation entre toute forme de vie. Il n’y a pas de séparation entre les droits des peuples indigènes et les droits de la Terre Mère… Il est plus que jamais urgent que le monde adopte une Déclaration universelle des droits de la Terre Mère… Il est vital de sanctuariser de toute urgence la totalité des forêts primaires de la planète qui sont traditionnellement sous la garde des peuples indigènes, puisque l’Organisation des nations unies a déjà reconnu que leur présence est un facteur garantissant la non-détérioration de ces environnements inestimables… Nous avons la responsabilité de dire à la terre entière que nous devons vivre en paix les uns avec les autres et avec la Terre Mère, pour assurer l’harmonie au sein de ses lois naturelles et de la création… Nous souhaitons qu’il en soit ainsi, avec le soutien de tous les peuples du monde, notamment de tous les citoyens. Rejoignez notre Alliance des gardiens de Mère Nature pour œuvrer et veiller tous ensemble aux générations futures.« 

DOMINIQUE GREUSARD sur lemonde.fr : Pas grand-chose à ajouter ou à retrancher à cette tribune. Elle montre que des peuples extraordinairement différents doivent pouvoir s’entendre sur un socle commun pour ce que, massivement, nous percevons désormais comme essentiel : laisser une planète en état de vie à nos enfants. Défendre une Amazonie gravement menacée, ce n’est pas seulement défendre le peu de ses autochtones qui ont réussi à survivre, c’est aussi défendre l’air que nous pourrons respirer demain.

Fantasmes Écolos-Bobos  :Pourquoi devrions-nous prendre au sérieux tous ces poncifs pour écolos-bobos: la « Terre-Mère » (mère de quoi? de qui? Avec quel père ? ), le « caractère sacré de l’eau, du feu, du ciel » (vive la religion!) ou encore « les relations interpersonnelles avec la Nature » (n’oublions pas la majuscule, c’est une dame !) ?Et pourquoi devrions-nous accorder du crédit à un anathème envers les entreprises ? Halte aux fantasmes des ONG !

JEAN-PIERRE ROUSSET : Que vous le vouliez ou non, d’un point de vue strictement scientifique la vie est le résultat de l’action du soleil (le père) sur la terre (la mère). Vous n’êtes pas obligé de considérer la vie comme sacrée, ni l’eau que vous buvez, ni l’air que vous respirez, mais quand ils seront devenus toxiques à cause des industries (et c’est déjà le cas un peu partout), vous viendrez pleurer comme ces Indiens dont on vole le territoire ancestral. Mais il sera trop tard.

MARC PIEPLU : Je ne suis ni bourgeois ni bohème. Il est plus que temps de considérer que les humains font partis du vivant qui se trouve sur terre et que nous ne vivons que grâce à l’interaction au sein du vivant. Si nous poursuivons la destruction de ce vivant, y’a pas besoin d’être bobo pour comprendre ce qu’il va se passer.

G F : S’ils espèrent que l’UE va se priver d’un juteux accord de libre-échange, alors que c’est sa raison d’être .. S’ils pensent que les citoyens européens ont leur mot à dire, alors que le CETA est appliqué ´provisoirement’ depuis 2 ans sans vote…

OLIVIER RIOU @ GF : Ils se contentent de nous rappeler que nous ne pouvons vivre sans eau, air et aliments. Trop difficile pour nous de comprendre? Bolsonaro, trump, etc…incarnent notre fuite en avant: à nous de réfléchir

le sceptique : Je ne reconnaîtrais aucune valeur à un texte quelconque (et aucune légitimité à un gouvernement quelconque) s’engageant à reconnaître un caractère « sacré » à la nature ou utiliser l’expression « terre mère » comme dénomination de la planète. Je comprends et respecte le point de vue de ces autochtones, mais je n’entends pas pour autant renier ma propre vision dénuée de sacré, qui est aussi celle des sciences et (à mon avis) des majorités de citoyens dans les sociétés modernisées.

Michel PHILIPS au sceptique : La notion de « sacré » fait ici référence, non pas à une religion, mais à l’absolue nécessité de respecter la terre qui nous permet tout simplement d’être là, de vivre. En ne respectant pas cette planète, nous scions la branche sur laquelle nous sommes assis

SARAH PY : Terre mère, jolie formule qui met de l’affectif à notre rapport à notre Planète. Et ce lien de subjectivité est essentiel pour vouloir la défendre et la protéger. Ce lien de l’affectif est ce qui fait le propre de l’homme et c’est avec les hommes qui ont du cœur qu’il est heureux d’échanger : les qualités du cœur l’emportent toujours sur celles du seul esprit. …. même le sceptique a un cœur, je n’en doute pas :).

Jub : Terre mère, terre nourricière etc, c’est juste le bon sens de ceux qui vivent au contact de la nature et qui survivent avec ce que la nature offre. Nos sociétés sont remplis de sceptiques qui croient que les poissons sont carrés. Ils vénèrent le Carrefour qui les nourrit.

* LE MONDE du 11 avril 2019, Appel des peuples indigènes : « Depuis l’élection de Jair Bolsonaro, nous vivons les prémices d’une apocalypse »

Les signataires : Cacique Ivanice Pires Tanone, peuple Kariri Xocó, Brésil ; Cacique Paulinho Paiakan, peuple Kayapó, Brésil ; Cacique Ninawa Inu Pereira Nunes Huni Kuí, peuple Huni Kuí, Brésil ; Jorge Quilaqueo, peuple Mapuche, Chili ; Mindahi Crescencio Bastida Munoz, peuple Otomi, Mexique ; Magdalene Setia Kaitei, peuple Maasaï, Kenya ; Hervé Assossa Soumouna Ngoto, peuple Pygmée, Gabon ; Vital Bambanze, peuple Batwa, Burundi ; Tom B.K. Goldtooth, peuple Navajo, Etats-Unis ; Mihirangi Fleming, peuple Maori, Nouvelle-Zélande ; Edouard-Jean Itopoupou Waia, peuple Kanak, Nouvelle-Calédonie ; Hairudin Alexander, peuple Dayak, Indonésie ; Su Hsin, peuple Papora, Taïwan; Appolinaire Oussou Lio, peuple Tolinou, Bénin.

Rejoignez notre Alliance des gardiens de Mère Nature Lire la suite »

L’Écologie sera l’idéologie première du XXIe siècle

André Malraux aurait prononcé au siècle dernier cette phrase devenue mythique : « Le XXIe siècle sera religieux ou ne sera pas. » En novembre 1975, Malraux déclara ne jamais l’avoir prononcée : « On m’a fait dire : “Le XXIe siècle sera religieux. ” Je n’ai jamais dit cela, bien entendu, car je n’en sais rien. Ce que je dis est plus incertain : je n’exclus pas la possibilité d’un événement spirituel à l’échelle planétaire. » La même année il précisait dans un livre : « Je pense que si l’humanité du siècle prochain ne trouve nulle part un type exemplaire de l’homme, ça ira mal… Et les manifestations de mai 68 et autres ectoplasmes ne suffiront pas à l’apporter. »

Aujourd’hui une classe de 4ème d’un collège « André Malraux » peut écouter le message de Nicolas Borde : « Il est temps d’agir pour la planète et vite ! ». Ce dernier a abandonné son précédent métier fait de multiples voyages en avion par delà le monde au profit d’une nouvelle vie sur le chemin de l’écologie. Il est aujourd’hui « paysan » comme il aime à le dire et ne cultive qu’en agriculture biologique sans engrais et sans produits chimiques. Ses ouvriers sont les insectes qui, en tant qu’auxiliaires de culture, lui permettent de cultiver sainement et naturellement dans le respect de notre planète. Ce choix de vie est le fruit d’une véritable prise de conscience : l’article s’intitule « L’ECOLOGIE, notre AVENIR »*. Mais de là à aboutir à une religion de la nature, il y aura encore beaucoup de chemins de traverses. Notre rapport à la nature est fondamentalement anthropocentrique, centré sur les humains. Les bribes de biocentrisme ou d’écocentrisme ne sont que spiritualités en devenir. Même ceux qui se veulent en pointe sur l’écologie, les membres d’EELV, ont toujours refoulé les amoureux de la nature au rang de minorités à ignorer. C’est ce que démontre sans le vouloir le livre d’Arthur Nazaret sur l’histoire de l’écologie politique**.

Arthur conclut sans doute que ce courant politique incarne « la seule idéologie nouvelle du XXIe siècle », mais il en reste au niveau des conflits interpersonnels qui ont émaillé l’histoire des Verts. Il est vrai que la lutte pour les places a toujours été rude pour les membres de ce qu’on a pu un jour désigner comme « la firme ». Les Verts peuvent se serrer les coudes lorsqu’il y a un combat à mener de Fessenheim (14 avril 1971) à Notre-Dame-des-Landes (17 janvier 2018), mais leurs dirigeants n’ont pas leur pareil pour s’étriper dès lors qu’il s’agit de parler cuisine électorale. La famille écologiste est divisée depuis sa naissance entre les partisans du « ni droite, ni gauche », et ceux qui veulent arrimer l’écologie politique à la gauche. Il ne s’agit pas de raisons écologistes, mais de rationalisations électoraliste, pour obtenir un jour un groupe parlementaire, ce qui avait abouti en 2012 avec l’arrimage au PS. Cette expérimentation politicarde s’est terminé par un fiasco total avec la présidentielle 2017. Des plus les débats de fond se sont toujours mélangés aux affinités et rivalités interpersonnelles. Il est donc dommageable pour le mouvement écolo que Nazaret s’attache davantage à l’histoire des acteurs de l’écologie politique qu’à celle des idées qu’ils portent. Comment s’y retrouver entre opportunistes éparpillés entre courants, chapelles et tendances ? Nazaret, hélas, ne propose ni enseignement ni mise en perspective. Mieux vaut aller au fond des choses, accorder son attention à ces prémices d’une nouvelle spiritualité qui est portée par l’écologie profonde d’Arne Naess ou les différentes versions de la Terre-mère. Un siècle est devant nous, puissions nous tous agir pour que l’écologie sectaire devienne un mouvement spirituel basé sur les capacités biophysiques de notre biosphère et non sur les échéances électorales…

* http://www.clg-mazan.ac-aix-marseille.fr/spip/spip.php?article1325

** LE MONDE du 10 avril 2019, La turbulente histoire des écologistes

PS : le livre de Nazaret n’est que la suite de nombreux ouvrages sur l’histoire de l’écologie, entre autres :

– La naissance de l’écologie politique en France : Une nébuleuse au cœur des années 68 (2017) d’Alexis Vrignon

L’écologie à l’épreuve du pouvoir (2016) de Michel Sourrouille

– Quand l’écologie politique s’affiche (2014) de Dominique Bourg

– Histoire de la révolution écologiste (2007) d’Yves Frémion

– Histoire de l’écologie politique : Comment la Gauche à redécouvert la nature (1999) de Jean Jacob

L’Écologie sera l’idéologie première du XXIe siècle Lire la suite »

En Uttar Pradesh, le cauchemar de la vache errante

Notre planète souffre à la fois de sacralisation de la consommation et de conservatismes sacralisés. Depuis que les nationalistes hindous au pouvoir dans l’Uttar Pradesh ont fermé les abattoirs clandestins, le bétail épargné est devenu une source de nuisance et un fardeau. Les commissariats ont été obligés d’adopter une vache pour « montrer l’exemple ». Des groupes extrémistes ont mené des rondes de nuit pour lyncher des acteurs supposés de la filière bovine. Ce qu’ils n’avaient pas prévu, c’est que les vaches en liberté deviendraient si nombreuses qu’elles saccageraient les champs et encombreraient les villes*. Yogi Adityanath, le moine extrémiste nommé à la tête de l’Etat indien le plus peuplé, ferait mieux de lire Malthus :

« Le fermier doit désirer que ce nombre absolu croisse. C’est vers ce but qu’il doit diriger tous ses efforts. Mais c’est une entreprise vaine de prétendre augmenter le nombre de leurs bestiaux, avant d’avoir mis les terres en état de les nourrir. Je crois que l’intention du Créateur est que la terre se peuple ; mais qu’il veut qu’elle se peuple d’une race saine, vertueuse et heureuse ; non d’une race souffrante, vicieuse et misérableSi nous prétendons obéir au Créateur en augmentant la population sans aucun moyen de la nourrir, nous agissons comme un cultivateur qui répandrait son grain dans les haies et dans tous les lieux où il sait qu’il ne peut pas croître. Il n’y a aucun chiffre absolu : garnir une ferme de bestiaux, c’est agir selon la grandeur de la ferme et selon la richesse du sol qui comportent chacune un certain nombre de bêtes. »**

Notre époque, qui a atteint le sommet dans l’accumulation de richesse et le consumérisme désordonné, nourrit des extrémistes de toutes sortes qui provoquent les conditions pour mettre la planète à feu et à sang. Le dirigeant de l’État de l’Uttar Pradesh est aussi le chef d’une milice hindoue qui sème la terreur parmi les musulmans. Ce moine de 45 ans a été emprisonné en 2007 pour avoir organisé des émeutes, et il est poursuivi pour tentative de meurtre, intimidation criminelle et incitation à la haine. Nous détournons les principes sacrés et oublions le meilleur. La vache sacrée est le terme occidental pour nommer Gao Mata (en hindi), c’est-à-dire « Mère Vache », une Mère universelle qui donne son lait à tous. Elle représente la sacralité de toutes les créatures. Aujourd’hui nous devrions tous célébrer la Terre-mère, et pas ses succédanés, qu’ils s’appellent Vache, Homme, Mahomet ou Trump.

* LE MONDE du 7-8 avril 2019, En Inde, le cauchemar de la vache errante

** Malthus en 1803, Essai sur le principe de population (Flammarion 1992

En Uttar Pradesh, le cauchemar de la vache errante Lire la suite »

Françoise d’Eaubonne, une icône de l’écoféminisme

Écoterrorisme : L’essai sur le féminisme que Françoise d’Eaubonne écrivit en 1971-1972 se termine sur la découverte du problème écologique, le jour où elle fut scandalisée d’entendre un ami lui dire : « Le problème de la révolution passe au second plan devant l’urgence écologique. Le prochain acte réellement révolutionnaire sera l’attentat contre une centrale nucléaire en construction. Le Capital en est au stade du suicide, mais il tuera tout le monde avec lui ». Il lui aura fallu plus d’un an pour assimiler la profondeur de cette vérité. Au nom de la « contre-violence », Françoise d’Eaubonne participera à la lutte contre l’énergie nucléaire en commettant avec d’autres contre la centrale de Fessenheim un attentat à l’explosif le 3 mai 1975, retardant de quelques mois son lancement. Elle assume cette position radicale jusqu’au bout puisque dans ses derniers tomes de mémoires elle écrit encore : « La contre-violence, nom véritable de ce qu’on appelle aujourd’hui terrorisme, semble très indiquée comme retournement de l’arme de l’ennemi contre lui-même ; il va de soi que les attentats ne visent que des points de rupture précis du front ennemi, économisant au maximum les vies humaines, n’employant la prise d’otages qu’à bon escient et jamais avec n’importe qui, utilisant les moyens destructifs pour supprimer les coupables les plus évidents ou instruire le plus grand nombre possible d’abusés du sens de cette guérilla urbaine. »

Malthusianisme : Françoise d’Eaubonne dénonce l’imposture de la croissance démographique, en appelant carrément à la grève des ventres, dans une révolution écoféministe et en même temps tiers-mondiste. Ayant dévoré le premier rapport du club de Rome établi par les experts du MIT en 1972, elle insiste sur les limites de la planète : « Aucun régime politique, fût-ce celui de l’Age d’or, aucun invention géniale ne changera ce petit fait désolant : notre planète ne compte que 40 000 km de tour, et rien ne lui en ajoutera un seul. » Ces limites impliquent une limitation de la population. Pour elle, le lapinisme et le patriarcat vont de pair. Donc pas de révolution sans contrôle drastique des naissances. Elle identifie dans l’illimitation, ce qu’elle appelle l’illimitisme de la société patriarcale, le paradigme de la modernité économique. « La destruction des sols et l’épuisement des ressources signalées par tous les travaux écologistes correspondent à une surexploitation parallèle à la sur-fécondation humaine. » La surpopulation est donc, selon elle, la conséquence du « lapinisme phallocratique ». La décroissance doit être aussi, voire surtout, démographique, mais néanmoins sélective. Elle insiste sur le fait que ce qu’on appelle désormais l’empreinte écologique est, pour les enfants du Nord, beaucoup plus forte que celle du Sud : « Quand on sait ce que coûte à des ressources déjà si compromises et si abîmées la naissance d’un seul enfant des pays moins surpeuplés (ceux du bloc capitaliste-privé) par rapport à un enfant de l’autre camp, le sous-développé, et qu’un petit Américain ou Suisse va détruire davantage que dix Boliviens, on mesure avec précision l’urgence d’un contrôle démographique mondial par les femmes de tous les pays… La seule solution à l’inflation démographique, c’est la libération des femmes, partout à la fois. »

Ecoféminisme (terme créé en 1974 par Françoise d’Eaubonne) : «  Quand en 1978 j’ai fondé le mouvement de réflexion Ecologie-féminisme qui estimait utile de confier les soins du sauvetage planétaire au courant de libération des femmes – non en vertu de « valeurs féminines » plus ou moins imaginaires, mais de la part spécifique que la patriarcat réserve au deuxième sexe -, j’ai bien pris soin dans mon livre Écologie/féminisme de distinguer cette analyse et cet appel de tout idéalisme philosophique, essentialisme ou naturalisme, et en soulignant que la mutation est le but final de toute révolution. »

Françoise d’Eaubonne, « Écologie et féminisme (révolution ou mutation ?) », première édition en 1978, réédition 2018 aux éditions Libre & Solidaire – 212 page pour 18,90 euros

NB : Françoise d’Eaubonne est née en 1920, elle est morte le 3 août 2005

Françoise d’Eaubonne, une icône de l’écoféminisme Lire la suite »

BIOSPHERE-INFO, Hans Jonas et notre responsabilité

Pour recevoir gratuitement le mensuel BIOSPHERE-INFO,

il suffit d’envoyer un mail à biosphere@ouvaton.com

Le philosophe Hans JONAS (1903-1993) a fait éditer son livre « Le principe responsabilité » pour la première fois en 1979, juste au moment du deuxième choc pétrolier. Il pensait que le marxisme poursuivait les mêmes buts que le capitalisme, l’extension de la sphère marchande et la croissance économique, c’est-à-dire une « utopie » dangereuse. C’est pourquoi selon lui la Nature ne fait pas de différence entre le fait que l’attaque vienne de « droite » ou de « gauche ». Voici un bref résumé de cet ouvrage en utilisant le plus possible les expressions de Hans Jonas (qu’on a actualisé par une expression entre parenthèse).

(Le principe responsabilité, éditions du  Cerf 1990)

1/3) la dynamique du progrès technique

Dès l’origine, ce fut une thèse marxiste que par son travail l’homme « humanise » la nature et qu’une fois la révolution accomplie, le marxisme réalisé humanisera l’homme lui-même. Manifestement cette conception donne au terme « humaniser » deux interprétations contradictoires : pour l’homme, il veut dire que l’homme n’est plus soumis à la nature et c’est ainsi seulement qu’il peut être pleinement lui-même. Pour la nature, le marxisme implique qu’elle est totalement au service de l’homme et qu’elle ne peut donc plus être elle-même. Par exemple la monoculture réduit un habitat écologique diversifié à la présence exclusive d’une culture unique qui peut seulement se maintenir sous les conditions artificielles imposées par l’agriculteur (# agriculture biologique).

De plus l’agir technologique n’a pour objectif que de réaliser des objectifs à court terme. L’expérience prouve que ces développements techniques ont tendance à se rendre autonome, échappant ainsi à la volonté humaine et même à la planification  de ceux qui agissent (technicisme). Le mouvement d’expansion est trop rapide et ne laisse aucune place pour des stabilisations automatiques ou concertées (sur-programmation). Même la source d’énergie la plus permanente et la plus pure de toutes ne pourra satisfaire qu’une fraction de la voracité de la civilisation moderne. Cependant (à l’heure actuelle) la disponibilité de l’abondance matérielle permet la satisfaction des besoins de tous (la classe globale), ce qui favorise l’acceptation de ces  processus techniques de reconstruction de la nature et de mécanisation de l’organisation du travail (méga-machine).

Le progrès technique et la recherche de l’abondance entraîne la détérioration du milieu naturel au risque de notre perte. Le châtiment des techniques de maximisation agraire commence déjà à se manifester par la contamination chimique des eaux avec tous les effets néfastes que cela entraîne pour l’interdépendance des différents organismes (biocide). De plus il existe une barrière plus fondamentale, l’élaboration d’engrais synthétiques est une forme d’utilisation de l’énergie, ce qui pose non seulement le problème de l’obtention de ressources, mais aussi l’irréalisme d’utiliser l’énergie à l’intérieur du système fermé de la planète : la combustion des matières fossiles entraîne en effet l’augmentation de leffet de serre et le réchauffement global. C’est là une limite implacable aux rêves extravagants d’une humanité plusieurs fois démultipliée qui vivrait dans l’exubérance technologique. La thermodynamique est intraitable, la loi infrangible de l’entropie veut que lors de chaque production de travail, l’énergie se dégrade en chaleur et que la chaleur se disperse.

Un héritage dégradé dégradera nos héritiers. En dernière instance, la question n’est pas de savoir combien l’homme sera encore à même de faire, mais celle de savoir ce que la Nature peut supporter (empreinte écologique). Cette question fait partie du champ de la science encore jeune de l’environnement.

2/3) l’éthique du renoncement

Le fait que tant de choses, à commencer par l’état de la biosphère, dépendent de ce que l’homme peut faire a quelque chose d’effrayant. Mais le pouvoir, associé à la raison, entraîne de soi la responsabilité. Dans l’homme, la nature s’est perturbée elle-même, et c’est seulement dans notre faculté morale qu’elle a laissé ouverte une issue : mon agir ne doit pas remettre en question l’intérêt entier des autres également concernés, c’est-à-dire les générations futures (développement durable). Les pays riches ont la possibilité d’inverser la tendance à la croissance en consommant moins et réduisant ainsi les capacités de production (simplicité volontaire). Pour les pays développés, cela signifie des renoncements car l’ascension des pays sous-développés ne peut se faire qu’à leurs dépens. Mais il n’y a objectivement aucun doute que dans les pays sur-développés, il existe une marge confortable pour des restrictions qui nous placeraient encore loin devant nos grands-parents, et même nos parents (décroissance soutenable).Cependant la réaction subjective de la population en l’absence d’une nécessité visible est une autre affaire, et pour les Etats-Unis par exemple une résistance spontanée à la baisse du niveau de vie serait pratiquement certaine et inclurait la classe ouvrière.

La conception libérale dominante dans le monde occidental laisse l’espace le plus large possible au libre-jeu des forces, mais la revendication de droits qu’il faut garantir occulte l’exigence des obligations à respecter. Néanmoins la solution, de plein gré si possible, forcée si nécessaire, se trouve dans la direction d’une éthique du renoncement.

pour un pouvoir fort

Aussi avons-nous trouvé un principe qui interdit certaines expériences dont la technologie est capable : comme jamais l’existence ou l’essence de l’homme ne doivent être mis en péril par les paris de l’agir, il faut dans toute décision  accorder la préférence aux pronostics de malheur sur les pronostics de salut (principe de précaution).

Notre thèse est que les nouvelles dimensions de l’agir réclament une nouvelle éthique de la responsabilité et la prophétie de malheur est faite pour éviter qu’elle ne se réalise. On ne pourra contester à l’homme politique le droit de mettre en jeu l’existence de la nation au profit de l’avenir si vraiment l’extrême est en jeu. Le péril qui menace la communauté devient une puissante impulsion de l’homme de courage à proposer sa candidature et à s’emparer de la responsabilité.

Pour appliquer cette nouvelle éthique, un système libertaire serait préférable pour des raisons morales, mais les systèmes moralement bons sont des systèmes précaires ; l’Etat peut seulement être aussi bon que le sont les citoyens. De plus l’homme politique peut supposer idéalement dans sa décision l’accord de ceux pour qui il décide en tant que leur chargé d’affaires, mais des générations futures on ne peut obtenir de facto un accord (acteurs-absents). Par conséquent « La tyrannie communiste paraît mieux capable de réaliser nos buts inconfortables que le complexe capitaliste-démocratique-libéral ».

3/3) Explicitations de Hans Jonas en 1992

Der Spiegel : Hans Jonas, comment en êtres vous venu à établir « le principe responsabilité » en 1979 ?

Hans Jonas : « Il suffisait de regarder autour de soi, de reconnaître ce qui s’était passé. De prendre conscience de la situation du monde, ce qui était à la portée de tout un chacun. C’est désormais à partir de nous que s’ouvrent les trouées et les brèches à travers lesquelles notre poison se répand sur le globe terrestre, transformant la nature tout entière en un cloaque. Nous sommes devenus extrêmement dangereux pour nous mêmes, et ce, grâce aux réalisations les plus dignes d’admiration que nous avons accomplies pour assurer la domination de l’homme sur les choses. C’est nous qui constituons le danger dont nous sommes actuellement cernés et contre lequel nous devons désormais lutter. Il s’agit là de quelque chose de radicalement nouveau.

Nous étions en train de créer les conditions de notre propre perdition… que nous ne nous autorisions les bonnes choses dont nous jouissons présentement qu’au détriment du futur… et que nous n’en avions pas le droit. Nous n’avons pas le droit d’hypothéquer l’existence des générations futures à cause de notre simple laisser-aller. J’ai formulé le principe suivant : lorsqu’il existe deux pronostics opposés quant aux grandes révolutions technologiques, l’un bénéfique, l’autre néfaste, il faut, en vertu de la dimension de notre puissance et de ce qui est en jeu, accorder la préséance au pronostic défavorable et renoncer ou, tout au moins, ralentir le processus. Compte tenu de la puissance colossale de la technique nucléaire, il devient d’une aveuglante clarté que la prévention est la principale mission de la responsabilité. Même le nucléaire civil, dont bénéfice l’homme, recèle un potentiel de malheur qui, pour n’être ni intentionnel ni soudain, n’en est pas moins sournois.

On ne pouvait pas méconnaître que les conséquences de la technique avaient commencer à devenir ambiguës. La technique pré-moderne était macroscopique, comme l’étaient également les instruments anciens. En manipulant les grandeurs relatives au monde corporel visible, la technique se tenait encore à la superficie des choses. Depuis elle a pénétré jusqu’au niveau moléculaire ; elle peut désormais crée une matière qui n’a jamais existé, modifier les formes de la vie, libérer des forces. Cette capacité de créer au cœur des choses implique l’apparition des nouveaux dangers, liés à la nouvelle puissance. L’un d’entre eux consiste à charger l’environnement de substances dont les métabolismes ne peuvent venir à bout. A la dévastation d’ordre mécanique s’ajoute l’intoxication chimique et radioactive. L’accroissement de la puissance a pour origine un accroissement de connaissance. La théorie pure, en devenant pratique, événement unique en son genre lié à l’Occident, a consacré une supériorité unilatérale de l’homme dont les interventions sur les ordres de grandeurs et sur l’espèce.

(Der Spiegel, 11 mai 1992, repris par « Une éthique pour la Nature » (Arthaud poche 2017)

CONCLUSION

Hans Jonas, qui écrivait bien avant la chute du mur de Berlin (1989), se trompait lourdement sur l’efficacité d’un système centralisé à réguler les équilibres planétaires. De l’autre côté un parti libéral, au service des entreprises et donc du pillage de la planète, au service du marché et donc du court terme, ne peut avoir un tel objectif de maîtrise.

Non seulement il faudrait que les partis au pouvoir acquièrent la fibre écologique qui leur manque tant, mais il leur resterait encore à mettre en œuvre ce que Hans Jonas envisageait incidemment : « Naturellement il serait préférable qu’on puisse confier la cause de l’humanité à une conscience authentique qui se propagerait ». Si chacun de nous ne devient pas éco-citoyen, consomm’acteur, peuple écolo, un gouvernement quel qu’il soit sera impuissant à aller dans le bon traitement de l’urgence écologique.

BIOSPHERE-INFO, Hans Jonas et notre responsabilité Lire la suite »

Biosphere-info septembre, l’espérance en mouvement

Pour recevoir gratuitement le mensuel BIOSPHERE-INFO,

il suffit d’envoyer un mail à biosphere@ouvaton.com

extraits de « L’espérance en mouvement » de Joanna Macy et Chris Johnstone (labor et fides 2018)

1/4) Résumé du livre

On fait comme d’habitude : Le pétrole constitue notre carburant principal et nous consommons maintenant plus de 80 millions de barils par jour. Le 7 mai 2001 Ari Fleischer, l’attaché de presse du président Bush, a invité les journalistes à poser des questions sur la hausse du coût de l’énergie. Le journaliste : «  Compte tenu de la quantité d’énergie que les Américains consomment par personne, et aussi de combien elle dépasse la consommation de tout autre citoyen de n’importe quelle partie du monde, est-ce que le président pense que nous devons adapter nos modes de vie pour répondre au problème de l’énergie ? »

Réponse d’ Ari Fleischer : « Absolument pas. Le président estime que c’est le mode de vie américain, et que l’objectif des décisions politiques devrait être de le protéger. »

On fait plus que d’habitude : Avant 1970, quatre achats seulement étaient considérés comme essentiels en Chine : une bicyclette, une machine à coudre, une montre et une radio. Dès les années 1980 se rajoutaient un réfrigérateur, une télévision couleur, une machine à laver et un magnétophone. Une décennie plus tard, il était devenu normal pour une tranche croissante de la population chinoise d’avoir une voiture, un ordinateur, un téléphone potable et un climatiseur. Et cette liste s’allonge encore. Le PDG de Walmart Asie explique : « Il y a beaucoup moins de bicyclettes, ce qui réduit le facteur exercice, les gens prennent du poids, les ventes d’équipement sportif marchent bien et nous aurons bientôt Slimfast et tous ces types de produits. » Certains considèrent que c’est le progrès.

La Grande Désintégration : Chaque choc pétrolier a été suivi par une récession économique. Avec le réchauffement climatique qui atteindrait les 4 à 6°C et une population de neuf milliards en 2050, on pourrait n’avoir qu’un demi-milliard de survivants (Kevin Anderson du centre Tyndall). La réalité dominante du « On fait comme d’habitude » est de plus en plus perturbée par les mauvaise nouvelles de « La Grande Désintégration ». En 2010, les sondages américains montraient qu’une majorité du public pensait que les conditions de vie seront plus difficiles pour la prochaine génération que pour les gens qui vivent aujourd’hui. Pourtant la presse moderne scrute de préférence les potins sur les célébrités.

Le Changement de cap : Pour rester motivés dans les moments les plus difficiles, nous avons besoin de la volonté inébranlable de voir notre vision se réaliser. Une petite voix intérieure peut nous dire : « Cela ne sert à rien, cela n’arrivera jamais. » C’est la pensée statique qui suppose que la réalité est fixe et rigide, et qu’elle résiste au changement. Avec la pensée dynamique nous considérons la réalité comme un flux dans lequel tout passe continuellement d’un état dans l’autre. Puisque nous ne pouvons jamais savoir avec certitude ce que l’avenir nous réserve, il est plus logique de nous concentrer sur ce que nous aimerions qu’il se passe, et de jouer notre rôle pour rendre cela plus probable. Dans son livre Blessed Unrest, Paul Hawken décrit ce qu’il appelle le plus grand mouvement social de l’histoire : « Il y a déjà un à deux millions d’organisations qui œuvrent pour la durabilité écologique et la justice sociale. »

2/4) Toute la folie du monde en cinq citations

– Il y a des problèmes qu’on ne peut pas résoudre sur le plan de la conscience où ils ont été créés (Albert Einstein)

– Un producteur de bois a déclaré un jour qu’en regardant un arbre, tout ce qu’il voyait était un tas d’argent sur une souche.

– Parce que notre culture industrialisée a oublié le principe de réciprocité, les forêts continuent à rétrécir et les déserts à croître.

– Les États-Unis ont dépensé plus de 3000 milliards de dollars pour la guerre en Irak (The Three Trillon Dollar War, Stiglitz et Bilmes, 2008)

– L’énergie atomique, qui repose sur la fission des particules d’uranium, constitue le symbole par excellence de la nature brisée et de la séparation de l’être humain avec la Terre. Produire et abandonner des substances qui dégradent les conditions d’existence des générations futures n’est moralement pas acceptable.

Citations extraites de « L’espérance en mouvement » de Joanna Macy et Chris Johnstone (labor et fides, 2018)

3/5) Toute la sagesse du monde en dix citations

– Le même fleuve de vie qui court à travers mes veines court nuit et jour à travers le monde (Rabindranath Tagore)

– Chaque être humain a le devoir sacré de protéger le bien-être de notre Mère Terre d’où provient toute vie (chef Iroquois devant l’Assemblée générale des Nations Unies en 1985)

– Lorsque les Iroquois se réunissent en conseil pour examiner des décisions majeures, leur pratique est de se demander : « Comment cela affectera-t-il la septième génération ? » Chaque génération devrait s’engager à préserver les fondations de la vie et du bien-être pour les générations futures.

– Ce dont nous avons le plus besoin, c’est d’écouter en nous l’écho de la Terre qui pleure (maître Zen vietnamien)

– Chacun de nous est tellement plus vaste qu’un simple « soi » séparé ; notre soi relié repose sur la reconnaissance que nous faisons partie de nombreux cercles plus élargis, la famille, les amis, notre groupe d’appartenance, la planète, la toile de la vie. C’est à partir de nos êtres reliés qu’émerge ce que les gens apprécient le plus dans la vie : l’amour, la loyauté, la confiance, l’engagement, la gratitude, l’entraide, la raison d’être…

– Lorsque la définition du soi change, les notions d’intérêt personnel et de motivations égocentrées changent en conséquence (Marilynn Brewer, psychologue)

– J’essaie de me rappeler que ce n’est pas moi, John Seed, qui essaie de protéger la forêt tropicale. Mais plutôt que je fais partie de la forêt tropicale qui se protège elle-même. Je suis la partie récemment émergée de la forêt tropicale qui a le pouvoir de se penser.

– Quand nous percevons notre identité profonde comme un soi écologique qui ne se limite pas à nous-mêmes, mais qui inclut toute la vie sur Terre, alors agir pour le bien de notre monde ne semble pas un sacrifice. Cela paraît tout à fait naturel (Arne Naess, le philosophe de l’écologie profonde)

– Il est facile de dénigrer une action hors contexte en pensant : « Cela ne sert pas à grand chose. » Pour se rendre compte du pouvoir d’une simple action, il faut au contraire se demander : « De quoi fait-elle partie ? »

– Si une personne devient écologiste, alors toutes les autres le peuvent aussi.

Citations extraites de « L’espérance en mouvement » de Joanna Macy et Chris Johnstone (labor et fides, 2018)

4/5) PARABOLE significative du comportement politique

Voici un vieux conte du Danemark au sujet d’une rencontre entre deux rois. « Vous voyez cette tour ? Dit le premier roi au second, montrant du doigt une partie imposante, hautement fortifiée de son château. Dans mon royaume, je peux ordonner à n’importe lequel de mes sujets de monter au sommet de cette tour, et en un saut, de se donner la mort. Mon pouvoir est tel que tous m’obéiront. » Le second roi, qui était en visite, regarda autour de lui ; puis il désigna une humble petite demeure. Dans mon royaume, dit-il, je peux frapper à la porte d’une maison comme celle-ci et, dans n’importe lequel des mes villages, je serai accueilli. Mon pouvoir est tel que je peux y rester la nuit, et bien dormir sans aucune crainte pour ma sécurité. «  Le premier roi avait le pouvoir sur, celui de la domination, et le second roi avait le pouvoir partagé.

Pour actualiser l’histoire de ces deux rois, nous constatons que d’envoyer des jeunes gens à la mort pour faire la guerre n’est pas si différent que de leur ordonner de sauter du haut d’une grande tour fortifiée. En revanche le changement de cap tend à créer le genre de communautés où les gens peuvent dormir tranquilles la nuit dans le monde entier. Plus l’appétit de ressource d’un pays est grand, plus il est probable qu’il fasse la guerre, qu’il ordonne le saccage des forêts pour créer des mines à ciel ouvert, et le forage des fonds océaniques pour en extraire les dernières gouttes de pétrole. Nous pouvons choisir une autre voix, celle des communautés de résilience qui seront en mesure de fonctionner de manière autonome au niveau alimentaire et énergétique lorsque l’âge du pétrole prendra fin. C’est la communauté qui donne un sens à notre sentiment d’appartenance.

5/5) QUESTIONS à se poser à soi-même

Les phrases ouvertes offrent un point de départ efficace pour la réflexion . Chacun des questions suivantes est un tremplin pour aborder un domaine habituellement exclu de la conversation ordinaire. Exemples :

– Quand je considère l’état de notre monde, je pense que cela devient… (trouver un adjectif et développez) => Les réponses démontrent en général le niveau élevé d’inquiétude quant à notre avenir.

– Quand j’imagine le monde que nous laisserons à nos enfants, il ressemble à…

– Parmi les sentiments qui m’envahissent quand je pense à cela, il y a…

– Ce que je fais de ces sentiments, c’est…

– Parmi les stratégies pour éviter ces sentiments, j’ai…

– Dis-moi, qu’arrive-t-il à travers toi ?

– Si la Terre parlait, que nous dirait-elle ? On peut le découvrir en imaginant que la Terre écrit à travers nous…

– Est-ce que ma façon de vivre est en harmonie avec les changements que je veux instaurer ?

=> Le but du jeu est de voir comment vous pouvez diminuer vos dépenses tout en augmentant votre qualité de vie…

Biosphere-info septembre, l’espérance en mouvement Lire la suite »

Verbatim. Le pape François face à l’homosexualité

Aux cris de « L’homophobie tue, le pape la banalise », munies de pancartes barrées des slogans : « C’est votre homophobie qui nous rend malades » ou « Le pape nous rend folles », une centaine de personnes se sont mobilisées mardi 28 août, dans la soirée, pour dénoncer les propos du pape François sur l’homosexualité. Les médias et les LGBT raffolent de petites phrases tirées de leur contexte. Il faut bien lire les propos du pape sur l’homosexualité avant de hurler à l’homophobie. Le chef de l’Église catholique a répondu à un journaliste qui lui demandait ce que pouvait dire un père catholique à son fils lorsqu’il apprend que celui-ci est homosexuel : « Je lui dirais premièrement de prier, de ne pas condamner, dialoguer, comprendre, donner une place au fils ou à la fille, donner une place pour qu’il s’exprime. C’est une chose quand cela se manifeste dans l’enfance, il y a beaucoup de choses à faire par la psychiatrie, pour voir comment sont les choses. C’est autre chose quand cela se manifeste après 20 ans. Je ne dirai jamais que le silence est un remède. Ignorer son fils ou sa fille qui a des tendances homosexuelles est un défaut de paternité ou de maternité. Tu es mon fils, tu es ma fille, comme tu es. Je suis ton père ou ta mère : parlons. » Quand le pape se réfère à lapsychiatrie”, il est clair qu’il le fait comme un exemple de prise en charge psychologique d’un mineur ; il n’avait pas l’intention de dire qu’il s’agissait d’une maladie psychiatrique. Notons que c’est seulement le 17 mai 1990 que l’OMS (Organisation mondiale de la santé) retirait l’homosexualité de la liste des maladies mentales.

La psychanalyste Monette Vacquin précise : « Il n’y a plus de limites naturelles et on ne peut plus interdire puisqu’on vit sous le règne de l’amour ! Mais l’amour est une relation vécue qui donne un sens à la vie, il ne fonde pas la loi ! Nous qui proclamons sans cesse notre intérêt pour la différence, semblons avoir un sérieux problème avec l’altérité. Il y a perte de la pensée sous le joug de ce qu’on peut nommer « le dieu égalité et le diable discrimination » ! Au nom de ce mode de pensée, les homosexuels hommes vont revendiquer la gestation pour autrui (GPA) au nom de l’égalité de leurs droits avec ceux des femmes. Puis on aura droit à l’ectogenèse pour « libérer » les femmes de la maternité et sortir des embarras liés à la question des mères porteuses. Et nous serons entrés dans la science-fiction, dans la mutation, dans l’horreur, sans même nous en apercevoir ! Notre génération a rompu avec ses pères par toutes les rationalisations possibles. Dans quel rapport sommes-nous avec notre généalogie pour tenter un tel coup de force sur le lien de filiation, nommé traçabilité dans certains services de Fécondation in vitro ? Les mots de père et de mère ont disparu d’un grand nombre de textes de loi. On parle de progéniteur 1 et 2 en Espagne. Les groupes LGBT, une très petite minorité d’homosexuels mais à la pointe de l’idéologie ont proposé la « neutralisation des parents » et soutiennent que l’impossibilité de procréer, cette loi de la nature, est une discrimination ! Et, vous verrez, le chantage à l’homophobie sera aussi efficace que le chantage à l’islamophobie… »

Comme l’écrivent les Chimpanzés du futur gascons, peut-on fonder une société humaine décente sur la transgression perpétuelle des limites biologiques et sociales afin de satisfaire des désirs particuliers ? Nous, simples humains qui souhaitons le rester, on ne nous trouvera ni dans les défilés des techno-progressistes des lobbys LGBT, ni avec les catho réactionnaires de Civitas et consorts.

Verbatim. Le pape François face à l’homosexualité Lire la suite »

Pour connaître l’écopsychologue Joanna Macy

Nous semblons penser que nous pourrions survivre sans le sol, les arbres et l’eau, le tissage complexe de la vie. Alors que la Terre est en train de mourir, nous avons oublié que sous sommes la terre de la terre, les os de ses os. En dépit de notre conditionnement issu de deux siècles de société industrielle, nous pouvons retrouver l’aspect sacré de la Biosphère.

C’est pourquoi Joanna Macy pense que nous avons besoin d’un travail d’écologie profonde. Il lui semble nécessaire de nous appuyer sur le sentiment de l’interdépendance entre tous les êtres vivants. Elle imagine que les générations futures nommeront ce XXIe siècle le « Changement de cap ». Il s’agira d’un passage radical d’une société de croissance industrielle autodestructrice à une société compatible avec la vie. Dans le changement de cap vers une civilisation soutenable, nous, membres de la Société de croissance industrielle, devons nous rendre compte à quel point nous sommes coupés du monde naturel. Parce que le travail sur soi fait dans ses stages nous relie les uns les autres et avec tous les êtres vivants, nous pouvons l’appeler plus simplement le « travail qui relie ».

Molly Young Brown ajoute : « La plus grande destruction sur notre planète n’est pas infligée par des terroristes ou des tyrans psychopathes. Elle est le fait de personnes ordinaires, respectant la loi, allant à l’église, aimant leur famille, des personnes moralement normales qui profitent de leurs quatre-quatre, de leurs croisières et de leurs hamburgers, inconscientes de la provenance de ces plaisirs et de leur coût réel ».

Source : Ecopsychologie pratique, retrouver un lien avec la nature de Joanna Macy et M.Y. Brown

Pour connaître l’écopsychologue Joanna Macy Lire la suite »

Pour connaître John Seed et l’écologie profonde

Il semble que nous devons porter en nous une vision fondamentale de ce à quoi nous croyons. Dans « Thinking Like a Mountain », John Seed  correspond à cette attente. Tout a commencé à Terrania Creek, une forêt située en Australie :

« En 1979, je vivais dans une communauté située aux abords de la forêt. Alors que l’État s’apprêtait à abattre les arbres, des voisins ont organisé une manifestation, la première du genre en Australie, et m’ont appelé à l’aide. Je ne me sentais pas particulièrement concerné par la situation. Durant la manifestation cependant, j’ai tout à coup senti que j’agissais non seulement pour moi-même, en tant qu’humain, mais aussi au nom de la forêt dont je faisais partie intégrante. Celle-ci se défendait à travers moi, je me suis senti appelé à parler en son nom. En devenant profondément conscient de mon lien avec la forêt, je me suis éveillé à toute la Terre. J’étais renversé par cette révélation. Encore aujourd’hui, je n’arrive pas à expliquer ce qui s’est passé, mon expérience demeure pour ainsi dire miraculeuse. À partir de là, ma vie a pris une toute nouvelle direction… Humblement, nous pouvons nous rappeler que nous ne sommes pas le pilote ou le contrôleur de la Biosphère, mais plutôt un être parmi les dix millions d’espèces différentes sur la Terre. On peut alors prendre conscience de toute la beauté de la nature, on peut trouver l’inspiration et se sentir guidés dans notre action.

En 1982, j’ai lu un essai du maître zen Aitken Roshi. C’est alors que j’ai découvert l’écologie profonde. Selon cette approche, le problème écologique provient de l’anthropocentrisme qui place les humains au sommet de la création et les considère comme la mesure de toutes choses. Dans l’écologie profonde au contraire, les humains sont plutôt un fil dans la toile de la vie ; si nous détruisons les autres fils, nous nous détruisons nous-mêmes. En découvrant l’écologie profonde, je me suis senti profondément soulagé car elle rejoignait et conceptualisait mon expérience initiale dans la forêt. Pour moi, il s’agit presque d’une religion car je n’avais plus besoin de vivre par l’intermédiaire de Bouddha, Dieu, Jésus ou Mahomet. Ma vie est devenue une prière car au rythme où nous allons, nous allons détruire le tissu même de la vie en quelques centaines d’années ou moins. De timides réformes et quelques lois environnementales ne suffiront pas. Je ne sais pas si cette transformation fondamentale de notre conscience se généralisera, mais sans cette transformation, il n’y a pas d’avenir pour les humains.

  Il n’est pas suffisant de savoir qu’on fait partie de la Terre, il faut aussi le ressentir. Les autochtones, qui vivent en harmonie relative avec leur milieu environnant, pratiquent tous des rituels pendant lesquels ils se rappellent que les humains font partie du corps même de la Terre et de la grande communauté terrestre. Avec la philosophe et activiste américaine Joanna Macy et d’autres, nous avons développé des rituels et autres processus adaptés aux humains contemporains. Il me semble important de passer du temps dans la nature. Un peu partout dans le monde, des gens se réunissent déjà régulièrement en l’honneur de la Terre. Ces rituels pourraient s’insérer dans la vie quotidienne de nos sociétés contemporaines bien mieux que le consumérisme qui est un bien piètre substitut pour l’expérience religieuse authentique. L’industrie publicitaire dépense plusieurs milliards de dollars pour nous inciter à acheter notre chemin vers l’illumination et le bonheur. Mais les humains sentent qu’il leur manque quelque chose, ils se sentent vides à l’intérieur d’eux-mêmes. Ils essaient de combler ce vide avec un plus gros téléviseur, un four à micro-ondes ou une nouvelle voiture. Comme ils n’arrivent jamais à la satisfaction finale, ils achètent encore davantage. Pour produire tous ces objets, il nous faut ouvrir la Terre, la couper en morceaux et détruire le fondement même de notre être. Mais ce que nous faisons à la Terre, c’est à nous que nous le faisons. Pendant nos rituels, nous entrons en contact avec toute la souffrance que la destruction de la Terre provoque en nous ; il est important de ressentir le désespoir, l’horreur, la colère, la peur et la tristesse engendrés par ce qui arrive à la Terre. Nous exprimons ces émotions difficiles dans un cercle sécurisant de personnes qui vivent la même chose que nous. Une fois reconnues et validées, ces émotions se transforment en une conscience de nos capacités et une détermination à vouloir travailler de façon positive pour la Terre. Parfois, j’imagine que le monde entier deviendra prêt à travailler en harmonie avec la Terre. En même temps, je ne vis pas dans l’attente de résultats, j’essaie plutôt de vivre de façon intègre et en harmonie avec ce que je crois. Cette expérience est d’autant plus remarquable que j’ai grandi en ville. Que ce soit arrivé à quelqu’un d’aussi perdu et ignorant que moi à cette époque me donne espoir que cela peut arriver à tout le monde. »

Pour connaître John Seed et l’écologie profonde Lire la suite »

Nudité ou burka sur les plages, à chacun son propre choix

L’histoire de la plage est liée au lent dévoilement des corps. Au XIXe siècle, les femmes qui se hasardent au bord de l’eau portent un pantalon qui descend jusqu’aux genoux, une chemise, un bonnet et des chaussures. En 1907, la nageuse et comédienne australienne Annette Kellerman revêt, sur une plage de Boston, un maillot « une pièce » qui lui vaut des poursuites judiciaires. Au début des années 1930 le « deux-pièces » montre pour la première fois le ventre. En 1964, le monokini apparaît sur la Côte d’Azur ; le ministre de l’intérieur de Georges Pompidou fait savoir aux maires que cette pratique relève de l’outrage public à la pudeur. Le code de la « décence estivale » est toujours présent actuellement sur les plages.* Le nudisme intégral est enfermé dans des camps. Le centre de vacances naturiste de Montalivet date de 1950, la même année que la créations de la FFN (Fédération française de naturisme). Il s’agit là d’un naturisme social et familial qui deviendra un produit touristique comme un autre ; nous sommes loin de la liberté d’aller et venir à poil là où on veut et quand on veut. Les codes de la décence varient fortuitement selon les époques, ce qui montre qu’il n’y a pas de norme objectivement fondée. Pour un écologiste, le nudisme est un droit que l’on acquiert dès la naissance en sortant sans voile aux yeux de tous. Sur une plage, une société de tolérance réciproque laisserait coexister les naturistes et les textiles côte à côte, ceux qui sont gênés ne doivent pas imposer leur point de vue moraliste.

Une loi sur l’interdiction du port du voile intégral est entré en vigueur le 1er août au Danemark.** Si une femme veut se cacher aux yeux des autres comme on obligeait à le faire sur nos plages d’autrefois, cela la regarde. Selon le code de la laïcité, l’État n’a pas à intervenir dans notre sphère privée et la façon de se vêtir relève de notre libre arbitre ; c’est la séparation de l’Église et de l’État qui permet normalement la coextensive pacifique entre toutes les croyances.  A chacun sa religion. Sur les trottoirs de nos cité ou le sable de nos plages, une société de tolérance réciproque laisserait coexister aussi bien voiles des religieuses et des islamistes que le nudisme intégral. Nudité, minijupe ou burka, une société n’a pas à imposer de tenue vestimentaire car il n’y a dans tous les cas aucun dommage envers autrui ou envers la planète. Ne détournons pas nos regards de l’essentiel, bientôt nous n’aurons plus de pétrole mais nous aurons beaucoup de périodes caniculaires.

* LE MONDE du 4 juillet 2018, Ces règles tacites qui dictent nos comportements sur la plage

** LE MONDE du 3 juillet 2018, Le port du voile intégral interdit au Danemark

Nudité ou burka sur les plages, à chacun son propre choix Lire la suite »

ADMD, pour le droit de mourir dans la dignité

L’association ADMD (Association pour le droit de mourir dans la dignité) a été fondée en 1980. L’ADMD revendique aujourd’hui plus de 68715 adhérents. Jean-Luc Romero-Michel, président de l’ADMD depuis le 2 juin 2007, répond aux questions du MONDE*.

Comment êtes-vous entré dans ce mouvement ?

Parce que j’ai vu mourir Hubert (en mai 1994). C’était un samedi soir, dans sa chambre d’hôpital. Il souffrait tellement que j’ai demandé aux infirmières de le soulager. L’une d’elles m’a répondu : « Ah non, la morphine, ça va accélérer sa mort. » Je lui disais : « Mais madame, il est en train de mourir ! » La nuit fut terrible, et je m’en voulais de ne rien pouvoir faire. J’avais déjà, à l’âge de 13 ans, vu mourir mon père d’un cancer des poumons. Il s’étouffait. Et puis, il y a eu tous ces amis morts du sida. Ils avaient 20 ans, 25 ans, et l’immense majorité disaient : « Laissez-moi partir. » On a oublié qu’en 1983 les premiers malades qui s’étaient réunis aux Etats-Unis avaient, dans leur déclaration de Denver, demandé à avoir le droit de mourir dans la dignité, de dire stop. Ils ont été précurseurs. Je ne suis pas un intellectuel. Mon combat au sein de l’ADMD a été naturel, lié aux événements que j’ai vécus. Je me souviendrai toujours des mots de Mireille Jospin [la mère de Lionel Jospin], lors d’une des premières réunions à laquelle j’ai assisté : « Moi, le jour où je veux mourir, je sais ce qu’il faut faire. Vous, vous n’aurez pas les médicaments, c’est pour cela qu’il faut une loi pour tout le monde. » Je ne suis pas un militant de l’euthanasie mais de la liberté et du choix. C’est un droit supplémentaire qui n’enlève rien à personne.

Vous venez de publier « Lettre ouverte à Brigitte Macron » sur la question de la fin de vie. Avez-vous eu un retour de sa part ?

Non, et je pense qu’elle ne me répondra pas. Son mari m’avait invité à un dîner où étaient réunis des représentants de toutes les religions et une majorité de médecins. Ce qui me choque, c’est qu’on fasse du droit de mourir dans la dignité une question médicale, alors qu’il s’agit d’une affaire citoyenne. Pendant la campagne présidentielle, Emmanuel Macron avait déclaré : « Moi, je souhaite choisir ma fin de vie, oui. » J’espère que les parlementaires vont s’emparer du sujet. Dans chaque groupe politique, il y a désormais des partisans du droit de mourir dans la dignité. Pour la première fois, il existe une majorité à l’Assemblée sur cette question.

Textes de référence :

LE MONDE du 8 août 1980,  » Choisir le moyen et le moment de terminer sa vie

Une Association pour le droit de mourir dans la dignité que préside M. Michel Landa vient d’être créée en France. Elle s’intéresse à la dignité de la personne humaine face à la mort et entend « aider ceux qui vivent cette situation dans la solitude et l’angoisse, et agir auprès de l’opinion pour que cette dignité soit reconnue ». Dans un premier temps, l’association mène campagne contre l’acharnement thérapeutique et propose notamment de faire signer à ses membres un  » testament biologique  » dont elle entend que les pouvoirs publics et le corps médical reconnaissent la valeur légale. À plus long terme, l’association vise « l’inscription dans la Constitution du droit pour chaque individu de disposer librement de son corps et de sa vie et de choisir le moyen et le moment de terminer sa vie ». L’association française et toutes les autres organisations militant pour le droit à la mort doivent se réunir à Oxford en septembre prochain pour une conférence internationale sur l’euthanasie volontaire et le suicide.

LE MONDE du 4 juin 1981, L’Association pour le droit de mourir dans la dignité prépare un guide de l’autodélivrance

A l’instar du mouvement Exit écossais, l’Association française pour le droit de mourir dans la dignité a décidé de préparer un guide de l’autodélivrance destiné à aider ceux qui, pour des raisons diverses, souhaitent quitter la vie sans violence, par la « mort douce ». Bien que cette décision ait été prise lors d’une assemblée généraleà l’unanimité des membres présents ou représentés (ils sont 1 400 à ce jour), des divergences et des réserves ont été exprimées, non sur le principe du droit qu’a chacun de choisir le moment et les modalités de sa mort, mais sur les modalités de diffusion d’une telle brochure et sur son contenu. « C’est à des êtres désespérés mais sans voix que s’adresse notre action », conclut le président de l’Association française. M. Landa.

* LE MONDE du 1er et 2 juillet 2018, Jean-Luc Romero-Michel : « Ma séropositivité m’a rendu meilleur »

ADMD, pour le droit de mourir dans la dignité Lire la suite »

La religion écologique n’est pas une religion

Définissons d’abord les termes. Le savoir scientifique est incontestable, il repose sur des connaissances argumentées, démontrées, vérifiées. Les découvertes scientifiques ne sont pas des constructions dogmatiques : elles ont la particularité d’être réfutables. Leur registre n’est pas moral, il ne renvoie pas à des valeurs mais à des faits. La connaissance scientifique accumulée a l’immense mérite de proposer « une représentation partagée du monde réel », un bien public à partir duquel fonder des droits et devoirs pour toutes et tous. Les croyances religieuses, elles, font l’objet d’un sentiment de vérité, mais ne sont pas démontrables.* L’écologie politique n’est pas une religion, elle s’appuie sur la science écologique, elle devrait donc promouvoir des décisions démontrables. Difficiles à mettre en place !

Le problème principal de l’écologie en politique n’est pas la controverse religion/écologisme, mais le conflit entre économie et écologie. Prenons l’exemple du caractère cancérogène ou non du TiO2 (dioxyde de titane). Les études d’accumulation après franchissement de ces barrières, chez l’animal de laboratoire, montrent que certains organes comme le foie, la rate, le rein, le cerveau et les organes reproducteurs sont des cibles avec une accumulation qui persiste dans le temps, lit-on dans le rapport du HCSP. Chez le rat, une exposition par voie orale à l’additif alimentaire E171, qui contient de l’ordre de 20 % à 30 % de nanoparticules de TiO2, montre une réponse inflammatoire de la muqueuse intestinale pouvant conduire à la formation de lésions précancéreuses avec un effet promoteur. Mais de son côté, l’Association des producteurs de dioxyde de titane (TDMA) assure que son produit est « sans danger » et qu’il a été « évalué par un grand nombre d’autorités de régulation, qui ont systématiquement conclu à son innocuité pour toutes les applications désignées ». Les spécialistes de la manipulation de la science ont encore frappé ! Trois pays européens font activement valoir la nécessité de classer dangereux le TiO2 sous toutes ses formes. La position de Paris pourrait être déterminante. En France, le dossier oppose d’une part le ministère de la transition écologique et solidaire et, d’autre part, les ministères de l’économie et du travail. Selon nos informations**, le ministère de Nicolas Hulot appuie une classification du produit sous toutes ses formes, de liquide et de poudre, tandis que Bercy et la rue de Grenelle sont plus attentifs à l’impact industriel et économique d’une mesure de classification. La politique donne trop de place à l’économisme.

Comme redonner toute son importance à l’écologie ? L’écologie politique doit s’appuyer sur la science écologique mais aussi sur la philosophie de l’écologie***. Il s’agirait de transformer l’écologisme en une religion de type matérialiste à l’opposé des conceptions abstraites sur lesquelles reposent les religions du Livre avec leur Dieux dans les Cieux. L’adoption d’un système de valeur du type « biocentrisme » ou « écocentrisme », portée par l’écologie profonde, permet de lutter efficacement contre l’anthropocentrisme dominant qui donne une telle place aux humains qu’il en finit par étouffer toute forme de vie durable. Les discours antispécistes poussent par exemple à la destitution de l’homme-roi. Mais le véganisme pourrait aussi aboutir à un nouvel obscurantisme. La sur-considération des valeurs animales pourrait pousser à un nouvelle religion nous transformant en herbivores. Or la science de la biodiversité nous montre clairement la diversité des conditions d’existence de millions d’espèces existante, la complexité des chaînes alimentaires, la grave détérioration des écosystèmes par l’activité humaine. L’écologie politique a encore de dures controverses à affronter au cours du XXIe siècle, mélangeant science, socio-économique et religion… L’écologie politique se transformerait alors en religion, avec tous les Conciles, Consistoires et Synodes qui pourraient s’ensuivre dans les siècles des siècles !

* LE MONDE science&médecine du 27 juin 2018, La science, laïque par essence

** LE MONDE du 28 juin 2018, Bataille sur les nanoparticules de dioxyde de titane

*** LE MONDE des livres du 29 juin 2018, L’animalisme est un anti-humanisme

La religion écologique n’est pas une religion Lire la suite »

Les végans occultent notre rapport complexe à la mort

Le site internet de Libération* a failli exploser après la publication d‘une tribune de deux pages intitulée « Pourquoi les végans ont tout faux ». Cette philosophie radicale, qui refuse tout recours aux produits animaux (viande, poisson, œuf, lait, miel, laine, cuir, etc.), compte peu d’adeptes en France. On estime la part des végétariens entre 3 et 5 % de la population. Parmi eux, les végans sont minoritaires. Un phénomène de mode ? Le véganisme nourrit la presse, la couverture des magazines amplifie le phénomène en retour… Voici un résumé de cette tribune co-signée par Paul Ariès, Frédéric Denhez et Jocelyne Porcher :

« Nous dénonçons le mauvais coup que porte le véganisme à notre mode de vie, à l’agriculture, à nos relations aux animaux et même aux courants végétariens traditionnels. Depuis douze mille ans, nous travaillons et vivons avec des animaux parce que nous avons des intérêts respectifs à vivre ensemble plutôt que séparés. Les animaux domestiques ne sont plus, et depuis longtemps, des animaux «naturels». Ils sont partie prenante du monde humain autant que de leur propre monde. Ainsi est-il probable qu’ils ne demandent pas à être «libérés». Ils ne demandent pas à retourner à la sauvagerie. Si les famines ont disparu de notre sol, c’est parce que le XVIIIe siècle a connu la plus grande révolution agricole après celle de son invention : l’agronomie. Et la polyculture-élevage, pourvoyeuse de ce qui se fait de mieux pour nourrir un sol, le fumier. L’agriculture sans élevage, c’est l’agriculture famineuse parce qu’elle épuise les sols. Quant aux études démontrant la longévité supérieure des végétariens, elles sont biaisées par le constat que ces publics consomment aussi très peu de produits transformés, peu de sucres, ils font du sport, boivent peu, ils ont une bonne assurance sociale, etc. En comparaison, manger végan, l’absolu des régimes «sans», c’est se condamner à ingurgiter beaucoup de produits transformés, c’est-à-dire des assemblages de molécules pour mimer ce qu’on a supprimé. Sans omettre d’ajouter la précieuse vitamine B12 à son alimentation. Car sans elle, ce régime ultra-sans détruit irrémédiablement la santé, à commencer par celle de l’esprit. Le véganisme est dangereux. Il menace de ruiner les pratiques alternatives, comme le bio, en annihilant la polyculture-élevage qui est son fondement. Il menace de nous condamner à dépendre d’une alimentation industrielle 4.0. Car, après tout, la meilleure façon de ne plus abîmer la nature est de s’en couper totalement. De s’enfermer dans des villes, alimentées par des flux de molécules et des flux de données. »

Pour avoir une approche plus circonstanciée, lire le livre d’une ancienne vegan, Lierre Keith, qui n’y va pas avec le dos de la cuillère : « Les végétariens sont animés du désir (estimable) de protéger la vie, mais semblent ignorer ou censurer une notion importante : la vie n’est pas possible sans la mort. Quoi que vous mangiez, un être vivant a dû mourir pour vous nourrir. Cette loi de la nature est aussi valable pour les végétaux, les champignons, ou les bactéries. Les végétariens politiques ignorent les méthodes d’élevage autres que les méthodes industrielles, ils ne semblent pas savoir que les vaches mangent de l’herbe et que le sol mange les bouses des vaches. Quelle que soit la noblesse de leurs intentions, ils projettent un régime alimentaire planétaire en complète ignorance de l’origine de la nourriture. Lorsque les végétariens prétendent, par exemple que la Grande-Bretagne pourrait nourrir 250 millions d’individus suivant un régime totalement végétarien, ils se basent sur les chiffres d’une production qui n’est possible que par l’usage d’engrais issus de combustibles fossiles… »

http://www.liberation.fr/auteur/12255-frederic-denhez

Les végans occultent notre rapport complexe à la mort Lire la suite »

L’obscure clarté d’un humanisme anthropocentrique

Certaines méchantes langues traitent certains écologistes d’anti-humanistes. L’analyse ci-dessous montrent que c’est plutôt un humanisme étroit qui empêche d’être vraiment écologiste. L’humanisme qui consiste à tout ramener à l’homme – surtout occidental – instaure un anthropocentrisme aussi dévastateur pour le reste de la création qu’il est hégémonique. Relisons Claude Levi-Strauss pour qui notre  humanisme est « dévergondé » :

Claude Lévi-Strauss dans un entretien télévisé : « Lorsque les hommes commencent à se sentir à l’étroit dans leurs espaces géographiques, une solution simple risque de les séduire, celle qui consiste à refuser la qualité humaine à une partie de l’espèce . »

Claude Lévi-Strauss en 1955 : « Tout abus commis aux dépens d’une espèce se traduit nécessairement, dans la philosophie indigène, par une diminution de l’espérance de vie des hommes eux-mêmes. Ce sont là des témoignages peut-être naïfs, mais combien efficaces d’un humanisme sagement conçu qui ne commence pas par soi-même mais fait à l’homme une place raisonnable dans la nature au lieu qu’il s’en institue le maître et la saccage sans même avoir égard aux besoins et aux intérêts les plus évidents de ceux qui viendront après lui (…) Un humanisme bien ordonné ne commence pas par soi-même, mais place le monde avant la vie, la vie avant l’homme, le respect des autres avant l’amour-propre  (Tristes tropiques »)

Dans son allocution à l’UNESCO en 1971, Claude Lévi-Strauss concluait : « Le respect que nous souhaitons obtenir de l’homme envers ses pareils n’est qu’un cas particulier du respect qu’il devrait ressentir pour toute forme de vie. En isolant l’homme du reste de la création, en définissant trop étroitement les limites qui l’en séparent, l’humanisme occidental, hérité de l’Antiquité et de la Renaissance l’a privé d’un glacis protecteur. Il a permis que soient rejetées, hors des frontières arbitrairement tracées, des fractions d’une humanité à laquelle on pouvait d’autant plus facilement refuser la même dignité qu’au reste, qu’on avait oublié que si l’homme est respectable, c’est d’abord comme être vivant plutôt que comme seigneur et maître de la création. »

Claude Lévi-Strauss en 1983 : « …Que règne, enfin, l’idée que les hommes, les animaux et les plantes disposent d’un capital commun de vie, de sorte que tout abus commis aux dépens d’une espèce se traduit nécessairement, dans la philosophie indigène, par une diminution de l’espérance de vie des hommes eux-mêmes, ce sont là autant de témoignages peut-être naïfs, mais combien efficaces d’un humanisme sagement conçu qui ne commence pas par soi-même mais fait à l’homme une place raisonnable dans la nature au lieu qu’il s’en institue le maître et la saccage sans même avoir égard aux besoins et aux intérêts les plus évidents de ceux qui viendront après lui. » (« Le regard éloigné » Plon)

Discours de Claude Lévi-Strauss en 2005 à l’occasion de la remise du XVIIe Premi Internacional Catalunya : « Si l’homme possède d’abord des droits au titre d’être vivant, il en résulte que ces droits, reconnus à l’humanité en tant qu’espèce, rencontrent leurs limites naturelles dans les droits des autres espèces. Les droits de l’humanité cessent au moment où leur exercice met en péril l’existence d’autres espèces. Le droit à la vie et au libre développement des espèces vivantes encore représentées sur la terre peut seul être dit imprescriptible, pour la raison très simple que la disparition d’une espèce quelconque creuse un vide, irréparable, à notre échelle, dans le système de la création. Seule cette façon de considérer l’homme pourrait recueillir l’assentiment de toutes les civilisations. La nôtre d’abord, car la conception que je viens d’esquisser fut celle des jurisconsultes romains, pénétrés d’influences stoïciennes, qui définissaient la loi naturelle comme l’ensemble des rapports généraux établis par la nature entre tous les êtres animés pour leur commune conservation ; celle aussi des grandes civilisations de l’Orient et de l’Extrême-Orient, inspirées par l’hindouisme et le bouddhisme; celle, enfin, des peuples dits sous-développés, et même des plus humbles d’entre eux, les sociétés sans écriture qu’étudient les ethnologues. Par de sages coutumes que nous aurions tort de reléguer au rang de superstitions, elles limitent la consommation par l’homme des autres espèces vivantes et lui en imposent le respect moral, associé à des règles très strictes pour assurer leur conservation. Si différentes que ces dernières sociétés soient les unes des autres, elles concordent pour faire de l’homme une partie prenante, et non un maître de la création. Telle est la leçon que l’ethnologie a apprise auprès d’elles, en souhaitant qu’au moment de rejoindre le concert des nations ces sociétés la conservent intacte et que, par leur exemple, nous sachions nous en inspirer. »

Pierre Jouventin, un digne successeur de Lévi-Strauss, en 2016 : « Victor Hugo, ce généreux humaniste, écrivait : « Ouvrez des écoles, vous fermerez des prisons. » C’est de moins en moins évident aujourd’hui. « L’homme est la mesure de toute chose », répète-t-on, mais on oublie qu’aux disciples de Protagoras, Socrate demanda pourquoi le cochon ou le babouin ne serait pas la mesure de toutes choses. A quoi sert une homme aujourd’hui ? A rétablir une harmonie du monde, celle que l’humanisme a détruite pour avoir élevé l’humain à une fin en soi en le plaçant au-dessus de tout. Comme Dominique Lestel l’écrit, il faut donc remettre l’humanisme en question et lui faire avouer que sous des dehors bienfaiteurs et malgré quelques victoires non négligeables, il a été une catastrophe pour le monde. Le propre de l’homme n’est plus vraiment un problème de science, et, comme le roi nu, il apparaît pour ce qu’il est en réalité, un jugement de valeur, un simple point de vue, sans doute respectable, mais pas indiscutable. Il faut élargir l’humanisme à l’ensemble du monde vivant comme les autres civilisations moins nombrilistes, moins anthropocentrées que la nôtre l’ont fait, afin de rétablir les liens rompus depuis trop de temps avec notre famille animale. L’antispécisme, qui n’établit pas de hiérarchie entre les espèces, se veut la continuation logique de l’antiracisme. De même le bio-centrisme, qui s’oppose à anthropocentrisme faisant de l’homme le seul être pensant, se considère comme le prolongement de l’humanisme. » (L’homme, cet animal raté (Histoire naturelle de notre espèce) » aux éditions Libre & Solidaire

pour approfondir : l’humaniste est-il écolo ?

L’obscure clarté d’un humanisme anthropocentrique Lire la suite »

La violence d’un humanisme qui nous sépare des animaux

Pour Aristote, « il n’y a ni amitié ni justice à légard des êtres inanimés mais il n’y en a pas non plus à l’égard d’un cheval ou d’un bœuf. En effet, on n’a rien de commun avec eux ». Au fond, c’est le mot « homme » qui opère comme un séparateur, puisqu’il s’agit avant tout pour lui de se distinguer, de s’extraire de l’ensemble du vivant dont il fait naturellement et originairement partie mais dont il s’est étourdiment exclu, emporté par son narcissisme. La tripartition – animal, homme, dieu – qui caractérisait la conception du monde jusqu’à la déchéance de Dieu aurait dû logiquement disparaître avec lui. Depuis Darwin, il n’est plus permis de douter que la vie se soit diversifiée depuis l’origine des temps par transformations, instituant une longue chaîne évolutive qui, des premières cellules à l’homme, a connu certes des inflexions, mais ne s’est jamais brisée, de sorte qu’il est impossible d’y repérer un saut qualitatif qui justifierait une quelconque différent ontologique entre les êtres vivants. Mais on a conservé le dualisme animal/homme dans une version où l’homme est de moins en moins animal et de plus en plus divin. Lorsque on voit un beauf savourer un cigare dans sa chaise longe, on ne peut que se réjouir, c’est la preuve absolue que le monde a échappé au non-sens.

Il n’est pas un seul domaine qui échappe au regard utilitaire. Ce regard est nécessairement totalitaire pour plusieurs raisons dont la première est qu’il représente la seule forme de rapport au monde que nous autorise désormais le renoncement au rapport contemplatif. Par exemple notre seul critère de classement des animaux est celui de leur utilité pour nous. On peut ainsi les répartir en cinq catégories : les animaux de compagnie, d’élevage, de dressage, d’expérimentation et les animaux sauvages. Pour les quatre premières de ces catégories, leur intérêt est à peu près clair puisque c’est par le type d’utilité qu’elles représentent qu’on les désigne. Pour la dernière, on pourrait, à première vue, penser qu’elle échappe a ce caractère utilitaire, qu’elle regroupe les animaux qui ne servent à rien, un élément de musée dédié à un état antérieur de nos relations avec eux, etc. En réalité les animaux sauvages sont utiles comme gibier potentiel, comme régulateurs biologiques (pollinisateurs, régénérateurs des sols, artisans de l’équilibre proies prédateurs…), certains enfin servent d’indice de degré de « naturel » dans les régions préservées. Pour ce qui est des animaux de mer, ils forment dans leur ensemble ce que les gestionnaires de l’écosystème marin nomment tout simplement le « stock halieutique ».

Ainsi, des animaux qui ne servent à rien, il n’en existe pas. Et c’est sans doute un critère de progrès que de mesurer le recul de l’inutilité originelle du monde, et l’extension de l’emprise humaine sur cet amas de matériaux installés là à l’origine sans la moindre raison, mais que l’ingéniosité de l’homme va œuvrer à soustraire à la contingence. Au lieu d’interroger le monde pour y chercher des réponses, nous avons choisi de l’exploiter sans retenue et sans nous soucier de ce qu’il pourra en advenir. Ce qui est inexploitable n’est pas ou ne mérite pas d’être. Aussi longtemps que l’homme se pensera comme étant à lui-même sa propre finalité (autotélique), il est à craindre que tout ce qui est non-humain sur cette planète ne connaisse un enfer ininterrompu. Il existe au sein de la nébuleuse écologiste des défenseurs de la nature en tant que telle, qui ont su se garder de toute vision utilitaire ; ils sont malheureusement rares.

Patrice Rouget, « La violence de l’humanisme (Pourquoi nous faut-il persécuter les animaux?) », aux éditions calmann-lévy, 2014

« Patrice Rouget montre dans son livre que le racisme, loin de signifier un échec de l’humanisme, en est au contraire l’affirmation la plus incandescente, car ce que forge l’humanisme métaphysique, c’est le mécanisme de l’exclusion dont il fait uniquement varier le curseur. » (Florence Burgat dans sa préface)

La violence d’un humanisme qui nous sépare des animaux Lire la suite »

A quoi sert Woody Allen, à rien, aucune utilité

Selon Woody Allen, la vie n’a pas de sens : « Aujourd’hui, on va sur la Lune et sur Mars, on a des ordinateurs et des robots, mais nous avons les mêmes problèmes émotionnels que les Grecs il y a cinq mille ans : la passion, la jalousie, la haine, la solitude, l’amour d’un autre et la frustration, rien de tout cela n’a changé, cela tourne en rond encore et encore, et dans cinq mille ans les gens continueront à aimer, à être jaloux et à se sentir trahis. C’est Wonder Wheel, la même grande roue qui n’amène nulle part. J’ai essayé de trouver un sens à la vie mais j’ai laissé tomber. Parce ce qu’elle n’en a aucun. Comme sur la grande roue, chacun se débrouille comme il peut. Le truc, c’est de trouver une raison de vivre. On peut se dire qu’un dieu viendra nous sauver à la fin. Ou penser que notre travail nous survivra… Ce sont des palliatifs. Pourquoi se battre si la vie est si moche et terrible ? Aucun philosophe ne m’a jamais donné une bonne raison à cela. Si vous vous réveillez à 3 heures du matin et que vous restez assis dans votre lit, dans le silence, sans personne à qui parler, sans enfant, sans télé, alors vous découvrirez la vérité des choses, et vous prendrez peur, car c’est terriblement effrayant… Et à la fin vous allumerez la télé. On vous y annonce que le virus Ebola se propage, c’est terrible, mais cela vous détourne de vos peurs. »*

Pauvre Woody Allen, pour qui la vie n’est qu’un mauvais film. Mais pour toi ? Quelle est le sens de la vie humaine sur cette planète ? Plus particulièrement, comment perçois-tu ta propre utilité ? Vastes questions, questions de fond. Réfléchis par toi-même sur cette problématique, passe une bonne (ou mauvaise) nuit là-dessus, puis reviens bientôtposer ton commentaire sur ce blog. A demain, merci !

* LE MONDE du 31 janvier 2018, Woody Allen : « La grande roue est une métaphore de la vie »

A quoi sert Woody Allen, à rien, aucune utilité Lire la suite »

Le Comité consultatif national d’éthique ne sert à rien

Qui a le droit de vivre et qui a le devoir de mourir ? Le Comité consultatif national d’éthique (CCNE) a été créé en 1983 pour mieux baliser le terrain, il n’est pas décisionnaire. Sa synthèse publiée le 4 juin n’est pas non plus un sondage, elle ne reflète pas le sentiment général des Français. Le président du CCNE, Jean-François Delfraissy, observe que « des opinions divergentes se sont exprimées » sur l’ouverture de la procréation médicalement assistée (PMA) à toutes les femmes. Sur la fin de vie, il y a désaccord entre ceux qui veulent conserver la législation actuelle et ceux qui veulent aller plus loin. La ministre de la santé, Agnès Buzyn, a déjà dit que la question de la fin de vie ne figurerait pas dans la future loi de bioéthique. Par contre certaines valeurs sont très majoritairement partagées, en particulier l’attachement à l’autonomie des personnes et à la non-commercialisation du corps humain. Cette dernière a toujours existé fortement en France et cela continue, contrairement à d’autres régions du monde où elle est remise en cause. L’objectif était seulement de retranscrire de façon neutre ce que le CCNE avait entendu de la part de ceux qui ont participé aux états généraux. Sur certains sujets, des positions militantes se sont exprimées.*

De toute façon les avis sur les questions sociétales divergent autant entre les philosophes qu’entre les individus lambda. L’éthique c’est du toc quand il n’y a plus de références communes dans une société, ce qui est le cas aujourd’hui. Ni les religions, ni aucun autre texte plus ou moins sacralisés ne peuvent donner de lignes de conduite incontestables. Les procédures démocratiques, elles-mêmes contestables, définissent temporairement ce qui paraît le plus acceptable étant donné l’état présent de l’opinion publique. Le consensus durable est impossible car chacun aura ses raisons d’avoir raison contre tous les autres. Il faudrait donc prendre la question éthique autrement.

Où sont les limites, limite de l’intervention de l’État sur nos vies, limite de l’utilisation des techniques, limite aux intérêts économiques et financiers ? On ne pourra pas définir de limites dans le cadre de délibérations sociales glorifiant la toute-puissance de l’espèce humaine, de ses désirs, de ses fantasmes. Il faut donc faire appel à des contraintes externes, celles qui sont imposées par la nature. L’activisme humain perturbe toutes les lois de la nature, les cycles de l’eau, du carbone, du phosphore, et même celles de la naissance et de la mort. Donner la vie malgré sa stérilité n’est que l’aboutissement d’une civilisation techno-industrielle qui donne aux humains la possibilité d’échapper à l’équilibre naturel dynamique qui empêche une espèce de proliférer continuellement au détriment de son milieu. L’avenir n’est pas à obtenir un enfant à tout prix, mais à faire moins d’enfants. L’avenir n’est pas à vivre 1000 ans, mais à savoir reconnaître et accepter quand vient l’heure de notre mort. Nous devrions avoir la lucidité de pouvoir choisir les techniques qui nous mettent en conformité avec les lois de la nature. Si nous ne le faisons pas, la pénurie énergétique nous obligera de toute façon à aller vers une « éthique » plus proche de nos aptitudes physiques directes sans passer par les structures médicales, institutionnelles ou technologiques. Il y a des techniques dures comme le DPI (diagnostic préimplantatoire) et les mères porteuses. Il y a des techniques douces comme le préservatif ou le stérilet. Il y a des techniques dures comme les soins palliatifs reliés à des tuyaux. Il y a le droit de mourir dans la dignité, en toute simplicité.

* LE MONDE du 6 juin 2018, Comité d’éthique : « Il n’y a pas de consensus sur la procréation médicalement assistée »

Le Comité consultatif national d’éthique ne sert à rien Lire la suite »

Brigitte Bardot et la maltraitance dans les abattoirs

Brigitte Bardot et Rémi Gaillard demandent à la veille de l’examen du projet de loi sur l’agriculture et l’alimentation que la vidéosurveillance soit imposée aux abattoirs comme l’avait promis le candidat Emmanuel Macron. Dans le collimateur des deux activistes, le ministère de l’agriculture, qui a retiré du projet de loi le contrôle vidéo obligatoire. « Pour le moment, Macron ne fait rien, et le peu qu’il fait est le contraire de ce qu’on demande : il fait ami ami avec les chasseurs, rétablit les chasses présidentielles… », critique Brigitte Bardot.* Quelques commentaires sur lemonde.fr qui font presque le tour du problème. Il se forme un peuple écolo même s’il y a encore des résistances à entrevoir notre avenir commun  :

NG : Un grand merci à ces deux personnes. Les élevages intensifs et les abattoirs sont un non sens total au regard des avancés de la science concernant les animaux, leur intelligence, leur ressenti (la mort terrifie les animaux autant que nous).

Michel : Deux zozos pour une cause de bobos!

Floflo : Comme quoi, maîtriser à un si haut niveau l’art de la rime n’est en rien un gage d’intelligence.

Jiembé : Je ne suis pas certain que de mettre les employés des abattoirs sous la surveillance permanente de vidéo-surveillance soit la mesure la plus INTELLIGENTE afin de réduire l’impact de l’homme sur la planète. Je ne suis même pas certain que cette mesure puisse y contribuer. C’est le drame de l’écologie politique qui s’attache à défendre des mesures symboliques et souvent simplistes, mais qui conduit à des actions chaotiques et parfois contre-productives.

M. : Le Ministre de l’Agriculture en place est le plus accommodant qu’il y ait eu depuis longtemps avec les lobbys agro-alimentaires et l’industrie chimique. Il a reculé absolument sur tous les dossiers. Y compris donc sur celui sur les caméras placées dans les abattoirs. Ce Monsieur ne cède que sous une pression extrême de l’opinion publique, ex: les néonicotinoïdes lors du vote européen.

pro toros : occuper vous plutôt des hommes avant de vous occuper des animaux !

Cécile : Quand on voit la catastrophique baisse de biodiversité, nombre de poissons, amphibiens, etc…. on ne s’en est apparemment pas assez occupé!

Ulysse : Travailler sous vidéo n’est pas forcément très agréable, mais il faudrait à minima des inspections impromptus. Il n’est pas normal de faire souffrir inutilement des animaux et dans certains endroits des sadiques le font.

Lunara Windrider : Je suis au regret de vous annoncer que la violence ne vient en général pas de personnes sadiques : elle vient d’individus débordés et maltraités, qui ne savent plus vers quel dieu se tourner et finissent par reproduire les brimades qu’on leur fait subir pour ne pas rester passifs. C’est injuste, mais dans des cas pareils, on n’est plus en mesure d’y réfléchir.

Yoram : L’un n’empêche pas l’autre. L’un renforce l’autre. Quand les animaux sont maltraités c’est que les hommes le sont aussi.

DOMINIQUE VITALYOS : Les inégalités s’aggravent, le comportement vis-à-vis des autres animaux a conduit à adopter le même type de hiérarchie sur les humains, on a créé toutes sortes de sous-hommes au fil du temps, l’esclavage existe encore… Pour moi, je m’occupe du monde vivant dans son ensemble, avec l’homme en sous-catégorie, comme il aurait toujours dû l’être. Ça ne peut pas lui faire de mal, puisqu’il fait partie du vivant.

Noodlefr : L’élevage intensif d’animaux, tels que les porcs, volaille, lapin etc… doit tout simplement disparaître et la consommation de viande doit baisser drastiquement par un contrôle renforcé des conditions d’élevage et d’abattage, qui entraîneront une hausse des prix et donc une baisse de la demande. Il faut étendre ces règles aux importations pour éviter le dumping et les collectivités doivent donner l’exemple en réorientant leurs politiques d’achat et les menus servis.

MF : Le problème concernant ces élevages relève davantage de l’économie de marché que de la législation, hélas, comme beaucoup de sujets actuels (cf : Monsanto et autres pesticides cancérigènes) : les organismes et institutions derrière ces élevages et autres produits surreprésentés ont beaucoup trop de poids.

* Le Monde.fr avec AFP | 21 mai 2018

Brigitte Bardot et la maltraitance dans les abattoirs Lire la suite »

La liberté de choisir la vie… ou la mort

De l’IVG à l’euthanasie, la revendication d’une même liberté, celle de rester maître de son destin… En 2018, l’interruption volontaire de grossesse est un droit reconnu. Et en dehors d’une poignée de militants anti-choix rétrogrades, nul ne le remet sérieusement en cause, même si la vigilance citoyenne reste indispensable à la protection de cette loi. Mais au fait, qu’est-ce que l’IVG ? Rappels…

L’IVG est un droit. OUI, mais seulement depuis le 22 juillet 1992 et le nouveau code pénal. Dans la loi du 17 janvier 1975, il s’agissait d’une « simple » dérogation à un délit, votée pour une période de 5 années seulement puis confirmée le 31 décembre 1979.

L’IVG est un acte qui doit être pratiqué avant la fin de la 12e semaine de grossesse (14e semaine d’aménorrhée).OUI, mais seulement depuis le 4 juillet 2001. Dans la loi du 17 janvier 1975, l’acte devait être pratiqué avant la fin de la 10e semaine de grossesse (12e semaine d’aménorrhée).

L’IVG s’adresse aux femmes enceintes, sans condition.OUI, mais seulement depuis le 4 août 2014. Dans la loi du 17 janvier 1975, la femme enceinte devait se trouver placée dans une situation de détresse.

L’IVG est remboursée à 100% par la Sécurité sociale.OUI, mais seulement depuis le 31 décembre 1982 puis le 31 mars 2013. Dans la loi du 17 janvier 1975, l’acte n’était pas pris en charge par la Sécurité sociale.

Simone Veil avait compris que pour passer outre les réticences – elles furent nombreuses – il fallait faire un premier pas, mettre le pied dans la porte, pour ensuite, patiemment, arriver à un texte au plus près des légitimes revendications en la matière.

Dans notre sujet, celui de l’aide active à mourir, et dès lors qu’il s’agit de légaliser un geste actif pour finir sa vie dans la dignité, il convient de rassembler le plus largement possible et de pas agiter trop violemment les chiffons rouges devant nos opposants les plus farouches. C’est pourquoi l’ADMD soutient toutes les propositions de loi d’origine parlementaire visant, d’une manière ou d’une autre, à permettre l’auto-détermination de chacun en fin de vie, tout en préparant dans les délégations et au niveau national un texte de loi de légalisation de l’euthanasie et du suicide assisté et favorisant un accès universel aux soins palliatifs qu’elle soumettra à l’ensemble de ses presque 70.000 adhérents lors de sa prochaine assemblée générale.

Prenons bien soin à être du côté de nos soutiens et des plus de 200 parlementaires qui appuient notre revendication et à ne pas les insulter en joignant nos voix, même involontairement, à ceux qui s’opposent à leurs propositions de loi et à notre ultime liberté. (ADMD, près de 70 000 adhérents)

http://www.admd.net/articles/decryptages/de-livg-leuthanasie-la-revendication-dune-meme-liberte-celle-de-rester-maitre

La liberté de choisir la vie… ou la mort Lire la suite »

Mourir pour des idées écolos, une très bonne idée

C’est au nom de la défense de l’environnement que David Buckel, un avocat et militant de renom, s’est donné la mort par immolation le samedi 14 avril à New York : « La plupart des humains sur la planète respirent maintenant un air rendu insalubre par les carburants fossiles et beaucoup, en conséquence, mourront prématurément. Ma mort prématurée au moyen d’un carburant fossile reflète ce que nous sommes en train de nous infliger… La pollution ravage notre planète et la rend plus inhospitalière par l’air, le sol, l’eau et le climat… Avoir des buts honorables dans la vie invite à avoir des buts honorables dans la mort » (avec l’espoir que) « donner une vie puisse attirer l’attention sur la nécessité de donner une voix à notre maison, la Terre »*

Brassens chantait : « Mourons pour des idées, d’accord, mais de mort lente… » Mais il précisait aussi : « Jugeant qu’il n’y a pas Péril en la demeure Allons vers l’autre monde en flânant en chemin Car, à forcer l’allure Il arrive qu’on meure Pour des idées n’ayant plus cours le lendemain... » Or il y a bien péril (écologique) en la demeure et le geste de David Buckel pourrait être aussi fondateur que l’a été la mort de Jan Palach qui s’est immolé par le feu à Prague le 16 janvier 1969. Jan a voulu faire prendre conscience aux Tchécoslovaques qu’ils restaient trop indifférents après l’invasion par les Russes de la Tchécoslovaquie en août 1968. Aujourd’hui la République tchèque et la Slovaquie sont membres de l’UE. Demain ou après demain il faut espérer que nous seront tous devenus écologistes. Ce n’est malheureusement pas encore le cas aujourd’hui, voici à propos de David Buckel les commentaires contrastés sur lemonde.fr :

SYLVIE MEYER : Cette nouvelle m’a sonnée, geste définitif et ultime protestation regrettable. Que n’ y a-t-il eu des voix de consolation dans son entourage. Mais cet avocat militant semblait lucide et désespéré. Qu’il repose en paix, son geste de courage mérite le respect. C’est ça la société américaine, des voix qui s’élèvent dans une grande solitude, et puis un jour cela s’amplifie, j’espère qu’il en sera ainsi de la protestation bien sûr, pas du suicide, effroyable.

le sceptique : Le geste pose question sur une idéologie qui inspire des suicides. Un certain écologisme est devenu une logorrhée apocalyptique de détestation du monde moderne, nourrissant la haine de soi ou la haine des autres chez les esprits fragiles.

Cartésien : Son acte peut paraître fou, excessif. Mais la destruction de notre planète au grand galop n’est-elle pas encore plus folle et excessive ?? Qu’il repose en paix.

Julien : Il ne devait pas être trop équilibré le gars…

yoyo @ Julien : J’ai plutôt un profond respect pour cet homme. Se sacrifier de la sorte pour aider une cause qui nous dépasse, quel courage !

Phinic : Son acte sera vite oublié. J’ai du mal à croire que ce sera plus efficace que toutes les actions qu’il pouvait encore mener.

E. P : « Ma mort prématurée au moyen d’un carburant fossile reflète ce que nous sommes en train de nous faire à nous-mêmes. » « Avoir des buts honorables dans la vie invite à avoir des buts honorables dans la mort ». Nos salutations respectueuses pour vos engagements et votre courage, puisse l’humanité entendre votre message. Reposez en paix, pour l’éternité.

JHS : Absurde. Un acte effrayant car absurde.

Yoyo @ JHS : Ce que vous n’êtes pas capable de comprendre est forcément absurde…

Palikao : le problème est que son geste fera PFFFt devant l’indifférence générale. Il me semble que l’humanité prend un malin plaisir de mener à son terme notre suicide collectif . Mais à la limite que l’homme disparaisse passe encore, mais il n’est pas forcément obligé d’emmener pas avec lui les autres espèces.

Democraquoi : Le printemps arabe avait débuté ainsi… Maintenant ce sera dur de créer un réel élan pour une cause souvent reléguée au second plan.

PAUL RASMONT : A quoi bon vouloir influencer le destin. L’humanité doit s’éteindre un jour, qu’elle se suicide (guerres, armes de plus en plus destructrices, produits phytopharmaceutiques de plus en plus virulents, produits synthétiques et industriels de plus en plus étouffants: plastics, déchets nucléaires) ou qu’elle meure de mort naturelle (ce qui n’est plus possible). Toute la création retournera au néant.

* LE MONDE du 16.04.2018, La mort prématurée « par carburant fossile » d’un avocat new-yorkais

Mourir pour des idées écolos, une très bonne idée Lire la suite »