« Délié de ses semblables, l’homme démocratique est peu disposé à la citoyenneté active tant ses intérêts privés l’absorbent » (A. Tocqueville).
Jusqu’à présent, tout projet industriel majeur faisait automatiquement l’objet d’un débat ou d’une concertation préalable sous l’égide de la Commission nationale du débat public (CNDP). Ce sont des étapes-clés lors desquelles les populations locales, regroupées ou non en associations, sont informées des impacts environnementaux des projets mais aussi sociaux et économiques. Mais le 4 décembre 2024, le gouvernement de Barnier a publié un projet de décret minimisant le périmètre de la CNDP. Sous prétexte de gagner du temps, ce texte représente une attaque frontale contre la démocratie environnementale et les droits des citoyennes et des citoyens. Le débat est-il encore possible aujourd’hui ?
Alice Mazeaud et Guillaume Gourgues : Qui se souvient, à part ses membres, que la convention citoyenne sur la fin de vie a rendu un avis ? L’absence de lien à la décision n’était pas une faiblesse des dispositifs, mais bien une condition de leur succès auprès des gouvernants. Le « succès » des innovations délibératives accompagne en réalité le démantèlement progressif des maigres acquis institutionnels de la participation publique, et plus précisément, la marginalisation grandissante de la Commission nationale du débat public (CNDP). Pourtant c’est la seule institution publique indépendante en mesure de garantir un droit à la participation un tant soit peu contraignant pour les acteurs publics et privés. Nos inquiétudes sont fondées, ce décret vise à supprimer le dixième motif de saisine de l’instance concernant les « équipements industriels ». L’argumentaire de ce projet est bien rodé : le débat public allongerait les projets, ferait perdre du temps et de l’argent, et gripperait presque à lui seul toute promesse de réindustrialisation. En fait, cette suppression entraînerait une baisse de 54 % des débats publics confiés à la CNDP, lui retirant de facto toute possibilité de mener les débats sur les améliorations d’équipement, leur décarbonation, la production énergétique ou le traitement des déchets nucléaires. On sacrifie a participation citoyenne sur l’autel d’une compétition économique sans fin.
Tribune d’un collectif : Mine de lithium, plateforme industrialo-portuaire de production de molécules et de carburants « bas-carbone », unité de production d’engrais, réouverture d’une ligne ferroviaire : les projets industriels font actuellement l’objet d’une concertation approfondie qui pourrait ne plus l’être demain. En une décennie, les gouvernements successifs n’ont cessé d’affaiblir ce droit constitutionnel : relèvement du seuil financier de saisine de la CNDP (de 300 millions à 600 millions d’euros), rétrécissement du champ de l’enquête publique, réduction du délai dont disposent les tiers (citoyens, associations et collectivités) pour solliciter une concertation préalable (de quatre à deux mois). Le nouveau gouvernement doit retirer ce décret. Accélérer les projets industriels ne doit pas se faire au détriment de l’information, de la participation, et du respect des principes démocratiques qui doivent rester au cœur de notre modèle de société.
Le point de vue des écologistes
Dans notre système social actuel, croissanciste et court-termiste, le passage à l’écologisme est incertain, la recherche du consensus balbutiante. Depuis 2005 ce blog biosphere existe pour essayer de montrer comme on peut passer du débat au consensus. Nous faisons en sorte sur ce blog biosphere de montrer à chaque fois que le point de vue des écologistes peut devenir un élément essentiel de l’intelligence collective. Encore faut-il accepter le débat !
Nos articles antérieurs question « débat »
CNDP, le débat public en lambeaux
En 1832, le débat sur la mécanisation
AIE versus OPEP, un débat truqué
Tik Tok, la responsabilité parentale en débat
Le faux débat démographie/niveau de vie
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PMA, le débat censuré par Macron
Conférence-débat sur la Décroissance démographique
Grand débat, vers une conclusion courue d’avance
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Macron : le débat écolo a avorté avant de commencer
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Trois débats fondamentaux parmi les décroissants écolos
Débat sur l’antériorité de l’individu… ou de la société
Sapin naturel ou sapin artificiel, le faux débat
Débat sur la peine de mort : midazolam ou thiopental !?
Immigration, débat entre malthusiens et écosocialistes
Mourir dans la dignité, un débat qui n’en finit pas
La COP 21, un débat globalisé qui nous empêche d’agir
Parler « trans » et sans débat aux journées d’été
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Le grand retour du débat sur le natalisme
Transidentités, un débat faussé et inutile
Fin de vie, débat au dîner, lobbies acceptés
Le débat sur l’IVG, bloqué par la morale ?
Manger ou ne pas manger des animaux, débat
Fin de vie et suicide, un débat actuel
8 milliards d’humains, débat avec Emmanuel Pont
Manger cru ou manger cuit, un débat pas si anodin
Low tech contre low cost, le débat qui préfigure l’avenir
Débat feutré entre l’anthropocentrisme et le biocentrisme
La peine de mort, les termes du débat dans LE MONDE
La décroissance est-elle malthusienne ? Vaste débat !
Faut-il débattre avec les climatosceptiques ? NON
Contribution du vert Yves Cochet au débat politique
transition énergétique, un débat qui n’en est pas un
Troisième révolution industrielle, débat Gadrey/Rifkin
A qui profitent les OGM ? L’enjeu du débat démocratique
à qui profitent les OGM ? Débat entre Deshayes et Testart
retour à la bougie contre société industrielle, le débat
débat Commoner/Ehrlich, le débat démographique
nature et sexualités : le débat sur le genre humain
la dissuasion nucléaire, un débat pour 2012
Les arguments de Claude Allègre en débat (janvier 2010)
le climat ne fait pas débat (octobre 2009)
Notre plus ancien article sur la question du débat
13.10.2005 Processus délibératif
Sur les questions d’environnement, il n’y a pas de décideur, il n’y a que des mécanismes de décision qui font interagir des individus ou des groupes qui ont à la fois des représentations différentes du problème débattu et des poids différents dans la discussion. Donc nécessairement le processus délibératif devient sans fin. Une conférence des citoyens sur un sujet (par exemple les OGM) n’aura que des impacts politiques et décisionnels faibles, que la préparation soit bâclée comme en France ou dure deux années comme en Suisse. Les politiques se contentent d’un affichage de volonté réformatrice en ne s’engageant que pour des actions minimales ou illusoires. En conséquence, un forum de citoyens doit être assuré de durer longtemps car seule la continuité permet les itérations successives nécessaires pour aboutir à un consensus efficace.
La Biosphère ne sera pas sauvée par des démarches participatives car plus rien dans la société actuelle n’a le pouvoir de durer quand les scientifiques s’opposent aux scientifiques, les politiques aux politiques, sans parler de l’impossible dialogue entre scientifiques et politiques, politiques et opinion publique, opinion publique et réalité. Seule la catastrophe réalisée (une pétroapocalypse ?) rassemble. Alors en attendant, que les plus courageux d’entre vous passent à l’action directe !
Notre commentateur préféré verse dans le nihilisme : « ça ne sert à RiEN d’essayer de débattre, pour de vrai, comme de discuter, réfléchir… » .
Nous pouvons en rajouter : Quelques grandes entreprises technologiques dominent le marché et modifient les algorithmes pour générer le plus de profits possible. Il y a donc une incitation structurelle à cultiver et à diffuser davantage de désinformation, de fausses nouvelles et de théories du complot, plutôt que la vérité et une discussion honnête et respectueuse.
Mais même dans un camp de concentration, on peut imaginer avec d’autres un monde meilleur…
Vous pouvez appeler ça du nihilisme, ça ne me dérange pas. De toute façon c’est l’époque qui veut ça, et Biosphère est autant touché que moi.
Pour ce qui est de l’imagination dans un camp de concentration, je suis entièrement d’accord avec vous. Nous pouvons rajouter que dans un asile de fous c’est pareil.
Comme quoi rien n’est foutu, à trois pelés et un tondu ON peut encore arriver à trouver un consensus. 🙂
– « Délié de ses semblables, l’homme démocratique est peu disposé à la citoyenneté active tant ses intérêts privés l’absorbent » (A. Tocqueville)
Juste pour se faire une petite idée de ce que Tocqueville aurait pensé de nos roitelets et autres «aristocrates» aussi modernes que lamentables et décadents… et en même temps de «l’homme démocratique» du 21ème siècle, mieux connu sous le nom de «con-sot-mateur» :
– La démocratie morale selon Tocqueville (libertepolitique.com)
– Tocqueville, ses idées sur la démocratie et la liberté (cours-de-droit.net)
Puisque nous sommes tous concernés, je me sens donc le premier con cerné.
Planté, piégé, fait comme un rat. Déjà parce que le Débat y’en a pas !
Et pour tout et n’importe quoi. Et c’est comme ça ! (à suivre)
(à suivre) Puisque ça ne sert à RiEN d’essayer de débattre, pour de vrai, comme de discuter, réfléchir… puisque la parole du Citoyen ne vaut pas mieux que la voix de l’Électeur… puisqu’ON ânarien à foot de ce qui se dit dans les dits débats publics, et blablabla… les dites conventions citoyennes, les tribunes, conférences etc. les urnes et la rue n‘en parlons même pas … eh ben yapluka supprimer tout ça ! Ainsi ON gagnera du temps.
Et le temps c’est de l’argent, hi-han !
Au stade où nous en sommes… finissons-en de toutes ces délibérations à n’en plus finir, de ces recherches de con sensus qui ne mènent à RiEN, de ces principes de précaution et j’en passe… bref de tous ces débats à la con qui nous empêchent d’avancer.
Vers où peu importe, ON verra ça plus tard. Misère misère !
Pour ceux qui ne comprennent pas le second degré et l’ironie, j’essaie juste de peindre le tableau comme je vois les choses. Je précise que la peinture et moi ça fait deux, je fais donc ce que je peux.
Pour faire le portrait d’un oiseau… Jacques Prévert nous a donné la recette :
– « Peindre d’abord une cage avec une porte ouverte [etc. etc.] »
Maintenant que l’oiseau est dans la cage… il ne veut plus en sortir.
Comme l’esclave de sa caverne. Et depuis Mathusalem ON cherche la recette pour lui donner le goût de la Liberté. ON a beau peindre de beaux tableaux… une porte ouverte… quelque chose de joli, quelque chose de simple, quelque chose de beau, quelque chose d’utile pour l’oiseau… eh ben ça ne marche pas. ON a beau s’appliquer sur les couleurs, faut pas qu’elles fassent peur à l’oiseau, pas plus de noir qu’il en faut… pas trop de rose, le rouge n’en parlons pas… rien n’y fait.
Le pauvre piaf est fait comme un rat !