La démesure de la société thermo-industrielle entraîne le règne des « SUR » : SURabondance, SURactivité, SURcommunication, SURconsommation, SURdéveloppement, SURemballage, SURendettement, SURéquipement, SURmédicalisation, SURpâturage, SURpêche, SURproduction… Le SURtourisme complète cette liste.
Dans un contexte de pénurie globale des ressources naturelles, l’avenir n’est plus dans l’expansion, mais dans son inverse. A la croissance économique doit donc succéder la DEcroissance conviviale, à l’effet rebond l’effet DEbond, à la mondialisation la DEmondialisation, à la pollution des sols et des esprits la DEpollution, au populationnisme la DEpopulation, à l’urbanisation la DEsurbanisation, à la voiture pour tous le Devoiturage, au réarmement actuel la DEmilitarisation et au tourisme de masse la Demobilité. Mais le passage à la décroissance socialement consentie ne peut se faire immédiatement.
Un éditorial du MONDE (5 octobre 2018) introduisait le terme surtourisme : « 90 millions de visites en France, 1,3 milliard de touristes sur cette petite planète dont la moitié à destination de l’Europe… Comme la plupart des destinations les plus courues, la France est désormais confrontée à un phénomène que les professionnels désignent désormais sous le néologisme de « surtourisme »… Mais en 2019, Valérie Pécresse , présidente du Conseil régional, pouvait encore s’exclamer : « Il n’y a pas de “surtourisme” en Ile-de-France, il faut y aller à fond. » Et en 2020, Colmar, vidée de ses visiteurs, en avait oublié les critiques sur le « surtourisme ».
Mais un nouveau élément de langage social était né, il ne pouvait que prendre de l’ampleur étant donné les effets néfastes du tourisme de masse. Quelques titres du MONDE en font foi, le rejet du surtourisme s’accélère :
11 août 2022, Sites naturels sur réservation : face au surtourisme, la France entre dans l’ère des quotas
10 avril 2023, Le village d’Etretat, rongé par le surtourisme, suffoque : « Il y a tellement de monde que les gens font n’importe quoi »
28 mai 2023, Des pénuries d’eau même en Cornouailles, avec le surtourisme et le gaspillage
18 juin 2023, Le surtourisme, un défi pour la France
20 juin 2023, Surtourisme : les bateaux de croisière affluent en Grèce
12 juillet 2023, Entre exode urbain et surtourisme : à Amsterdam, la mairie voit rouge
28 août 2023, A Venise, le surtourisme, une réalité difficile à contourner
7 mars 2024, En Polynésie, Teahupoo se réjouit d’accueillir les Jeux olympiques 2024 mais redoute le surtourisme
24 avril 2024, Aux Canaries, le surtourisme exaspère la population
25 avril 2024, Venise lance son billet d’entrée à 5 euros, afin de lutter contre le surtourisme
26 avril 2024, Au Japon, une ville va masquer une vue sur le mont Fuji pour éviter le surtourisme
3 mai 2024, « Une salle devrait être construite au Louvre pour “La Joconde”, afin de sauver les autres œuvres éclipsées et polluées par le surtourisme »
6 juillet 2024, Espagne : manifestation à Barcelone contre le tourisme de masse
Et le dernier paru le 11 juillet 2024, « Surtourisme » : quand voyage rime avec dommage
Sur ce blog biosphere, cela fait longtemps que nous critiquons le tourisme, une vraie imbécillité écologique, un tourisme qui tue le tourisme, la nécessité absolue de se déplacer moins vite, moins loin, moins souvent, et beaucoup plus cheer ! Nous sommes satisfaits de lire que de plus en plus de personnes dans les médias partagent notre point de vue d’écologiste… Même le gouvernement s’y met. Il avait dévoilé le 18 juin 2023 son plan afin de mieux réguler les flux touristiques et d’accompagner les collectivités locales en proie à des pics de fréquentation : créer un observatoire national des sites touristiques majeurs, mesurer l’acceptabilité des flux auprès des locaux, sensibiliser les touristes et les influenceurs. Aucun impact pour le moment.
Car il y en a qui ne voient pas plus loin que dans une lunette de sociologue, ainsi Jean Viard : « il n’y a pas assez de touristes. Un milliard et demi de Terriens seulement franchissent une frontière chaque année. Ils étaient 60 millions en 1968, je rêve qu’ils deviennent 3 milliards. »
Un bon sociologue se devrait d’être aussi un bon écologiste, sinon son discours hors sol ne signifie rien d’autre si ce n’est flatter les agences de tourisme dans le sens du poil et du profit. Démocratisation des voyages et décarbonation sont définitivement incompatibles.
En savoir plus grâce à notre blog biosphere
Les écolos, pour ou contre le tourisme ?
extraits : L’explosion du transport aérien depuis le premier vol « charter » en 1954, la baisse considérable des prix de vente des billets corrélée au développement du modèle « low cost » ont favorisé la croissance d’une forme de tourisme dite « de masse ». Ce modèle, basé sur des séjours de courte durée déconnectés de toute notion de distance, mettant les destinations en concurrence et contribuant à une surconsommation intenable de transports carbonés, qu’ils soient par avion ou par paquebot, est destructeur pour la planète et les populations d’accueil. Il est absolument nécessaire de supprimer un passe-temps créée au XIXe siècle pour les privilégiés qui faisaient leur tour d’Europe. Le » droit au voyage » pour loisirs n’existe pas….
Surtourisme : 1,3 milliard de déplacements inutiles
extraits : Le touriste, c’est triste, déambule en foule, de plus en plus souvent vieux et gros, cachant mal son ennui d’être là derrière son appareil photo et son envie pressente de retrouver enfin son chez soi, à faire semblant d’admirer tout et n’importe quoi. Un déplacement pendulaire, inutile, coûteux pour la planète et destructeur des réalités du lieu. Le touriste est symbolique de notre temps où tout est devenu marchandise, le tourisme, c’est la soumission au fantasme de croire qu’il existe un ailleurs jouissif dans le bruit et la foule. Le tourisme de masse est le droit donné à tous d’accéder à un bien qui n’existe plus ! Le tourisme de masse n’aurait jamais dû exister…
Pour des vacances sans touristes
extraits : Bernard Charbonneau et Jacques Ellul : Le tourisme est le domaine de la publicité, l’agence Havas provoque les mouvements des masses bourgeoises qui, selon les saisons, montent à la montagne pour faire du ski ou descendent vers la mer pour se baigner. Le hasard des intérêts financiers, des lignes de transports et des sociétés de lotissement accumule les touristes à certains endroits. Il y a des foules plus effroyables que celles qui s’entassent à heures fixes dans les métros, ce sont les foules de nos grandes plages. Comme la classe bourgeoise est hiérarchisée, il existera toute une échelle de stations balnéaires, la station chic, la station sportive, le trou à instituteurs. Le programme est établi à l’avance selon quelques standard : visitez le Maroc – un palmier, la Norvège – un fjord pâle. Certains, qui se disent révolutionnaires, songent pourtant à ce spectacle avec plaisir, ils s’indignent seulement que ces « loisirs » soient réservés aux bourgeois. (article paru en juin 1937 dans le Journal des groupes personnalistes du Sud-Ouest)
Tourisme de masse et écologie, incompatibles
extraits : L’industrie touristique figure parmi les mauvais élèves en matière de rejets de gaz à effet de serre et de polluants. Le tourisme de masse met sous tension les ressources, déséquilibre les écosystèmes locaux et met en péril les sites naturels et patrimoniaux. La révélation du « vrai prix des choses » aurait l’avantage d’amener les consommateurs à prendre conscience de leur empreinte écologique d’une part, et d’autre part à effectuer des arbitrages de consommation salutaires. Adopter une telle démarche demanderait de rompre avec la vision stratégique gouvernementale française qui a érigé en objectif prioritaire l’accueil de 100 millions de visiteurs étrangers par an.
Pourra-t-on voyager après l’apocalypse ?
extraits : Longtemps on a vécu comme les « gentils membres » des clubs de vacances qui bronzaient en autarcie dans un camp retranché avec la misère tout autour. Tant que le buffet était plein, la mer chaude et les strings achalandés, pas une seule question à se poser. Tourisme, j’oublie tout. Et puis le niveau de la mer a monté et aussi le prix du baril. Le soleil est devenu notre ennemi… Voilà qu’on ne peut plus consommer la planète ! Le buffet n’est pas à volonté. (Didier Tronchet, éditorial de juillet 2008, l’Écho des savanes p.3)
Les voyages forment-ils la jeunesse ?
extraits : On disait encore, il y a peu, que les voyages forment la jeunesse. Mais le réchauffement climatique est passé par là. Doit-on alors se résigner à ce que nos enfants ne connaissent le lointain qu’à travers les images du monde ? La réponse est simple, c’est oui. Que les jeunes adultes partent à pied ou en vélo faire connaissance avec la brutalité uniformisée de notre monde, pourquoi pas. Ce sont des voyageurs, pas des touristes. Pour les hordes qui envahissent les « lieux de rêve », j’espère que les révoltes des habitants du cru pour les rejeter ou les rançonner prendra une juste ampleur…Faire le tour de son jardin potager va bientôt devenir le passe-temps préféré des jeunes et des moins jeunes….