« Les microbes auront le dernier mot »
Selon Louis Pasteur,« Les microbes auront le dernier mot ». Donnons-leur la parole.
Sur ARTE, un documentaire au titre éloquent, Vive les microbes ! (mardi 8 octobre à 20h55) : « On considère souvent que les bactéries sont nos ennemies, mais la très grande majorité sont nos partenaires sans qu’on le sache. Depuis les années 1960, la fréquence de l’asthme, de l’eczéma et des allergies a doublé tous les dix ans dans les pays industrialisés, où elles touchent aujourd’hui 35 % de la population. Partout, immunologistes et écologues explorent les pistes microbiennes, comparent les défenses immunitaires des enfants des villes à celles des enfants des campagnes. Les enfants des campagnes peuvent être des modèles pour ceux des métropoles : ils sont bien mieux armés contre les maladies allergiques. C’est l’« effet de la ferme » : en exposant précocement les enfants à une grande diversité de microbes, cet environnement rural entraîne leur système immunitaire à reconnaître et à tolérer les « bons antigènes » – et à ne pas surréagir en créant une inflammation. Un antidote à la bétonisation, au manque de contact avec la nature, à l’aseptisation des aliments industriels et à l’hyperhygiénisme des citadins, en somme. »
A tout javeliser comme d’avoir systématiquement recours aux antibiotiques on se rend malade, ce devrait être une évidence…
Voici quelques pensées sur la sélection naturelle
sociétés premières : « Les Indiens Pirahãs réagissent à l’hostilité de l’environnement par un stoïcisme implacable est souvent difficile à supporter pour l’hôte. Comme la mort sans soin de la jeune Xaogíoso, au bord de l’eau, tandis qu’elle est en train d’accoucher dans l’indifférence de son entourage. » Cette société première estime que chacun doit affronter par lui-même les épreuves de la vie : c’est une forme de sélection. (LE MONDE du 10 juin 2010, « Le Monde ignoré des Indiens Pirahãs », de Daniel Everett : la langue la plus étrange)
1798, Malthus Thomas Robert : « Tournons maintenant nos regards sur les diverses contrées de l’Amérique. On expose généralement les enfants difformes ; et quelques peuplades du Sud font éprouver le même sort aux enfants dont les mères ne supportent pas bien les peines de la grossesse et le travail de l’enfantement, de peur qu’ils héritent de la faiblesse de leurs mères. C’est à de telles causes qu’il faut attribuer l’exemption remarquable de difformité qu’on observe chez ces sauvages. Et lors même qu’une mère veut élever tous ses enfants sans distinction, la mort en enlève un si grand nombre, par la manière dure dont on les traite, qu’il est à peu près impossible que ceux d’une constitution délicate puissent atteindre l’âge d’homme (…) Ainsi la faible population de l’Amérique répandue sur son vaste territoire n’est qu’un exemple de cette vérité évidente, que les hommes ne peuvent multiplier qu’en proportion de leurs moyens de subsistance. » (Des obstacles à la population dans les nations indigènes de l’Amérique / Malthus, Essai sur le principe de population (Flammarion 1992, tome 1, page 91 à 113))
1871, Charles Darwin : « Chez les sauvages, les individus faibles de corps ou d’esprit sont promptement éliminés, et les survivants se font ordinairement remarquer par leur vigoureux état de santé. Quant à nous, hommes civilisés, nous faisons, au contraire, tous nos efforts pour arrêter la marche de l’élimination ; nous construisons des hôpitaux pour les idiots, les informes et les malades ; nous faisons des lois pour venir en aide aux indigents ; nos médecins déplient toute leur science pour prolonger autant que possible la vie de chacun (p.179)… Comme l’a remarqué M.Galton, si les gens prudents évitent le mariage, pendant que les insouciants se marient, les individus inférieurs de la société tendant à supplanter les individus supérieurs (p.750). » (La descendance de l’homme – 1871) extraits tirés du livre de Ivo Rens, Entretiens sur l’écologie (de la science au politique)
1926, Jean Rostand : « Nos sociétés donnent la possibilité de survivre et de se reproduire à des milliers d’êtres qui eussent été autrefois implacablement éliminés dès le jeune âge. La diminution de la mortalité infantile, les vaccinations généralisées entraînent un affaiblissement de la résistance moyenne de l’espèce. Il s’ensuit un avilissement progressif de l’espèce. Donc par l’effet de la civilisation, nul progrès à espérer pour l’animal humain, mais une décadence à craindre. » (L’homme, éditions Babelio)
1965, Jean Dorst : « L’humanité, envisagée comme une population animale, a réussi à se débarrasser de la plupart des freins à sa prolifération au risque non négligeable de multiplier les maladies héréditaires, autrefois éliminées en plus grande proportion par la sélection naturelle. On a parfois tenté de se poser la question : faut-il condamner Pasteur en raison de ses découvertes ? Certes non. Mais l’homme se doit de trouver dans les plus brefs délais, un moyen de contrôler une prolificité exagérée, véritable génocide à l’échelle de la planète. Un premier moyen de régulation est l’émigration. Or cela n’est plus guère possible à l’heure actuelle car toute la planète est strictement compartimentée et coupée de barrières. Un deuxième procédé est l’augmentation du taux de mortalité. Certaines sociétés primitives éliminent les vieillards, tandis que d’autres préconisent l’infanticide. C’est impossible à envisager dans le cas de l’humanité évoluée. Le troisième procédé consiste à une diminution du taux de natalité. Aucune religion, aucune morale et aucun préjugé ne doivent nous en empêcher. Le jour où les peuples se jetteront les uns contre les autres, poussés par des motifs en définitive écologiques, cela serait-il plus hautement moral que d’avoir maintenu les populations humaines en harmonie avec leur milieu ? » « Avant que nature meure de Jean Dorst, éditons Delachaux et Niestlé)
2003, William Stanton : « L’avortement ou l’infanticide sont obligatoires si le fœtus ou le bébé s’avèrent très handicapés (la sélection darwinienne élimine les inaptes). Quand, par l’âge avancé, par un accident ou une maladie, un individu devient plus un poids qu’un bénéfice pour la société, sa vie est humainement arrêtée… Le plus grand obstacle dans le scénario ayant le plus de chance de succès est probablement (à mon avis) la dévotion inintelligente du monde occidental pour le politiquement correct, les droits humains et le caractère sacré de la vie humaine… Aux sentimentalistes qui ne peuvent pas comprendre le besoin de réduire la population de la Grande-Bretagne de 60 millions à environ 2 millions sur cent cinquante ans, et qui sont outrés par la proposition de remplacement des droits humains par une froide logique, je pourrais répondre : ’Vous avez eu votre temps. » (William Stanton , The Rapid Growth of Human Population 1750-2000 : Histories, Consequences, Issues, Nation by Nation, Multi-Science Publishing, 2003) in Serge Latouche Le pari de la décroissance, Arthème Fayard/Pluriel, 2006, pp. 142-143)
2011, Alain Hervé : « Nous échappons aux régulations naturelles comme les épidémies. Pasteur a conjuré la mortalité infantile naturelle. Il ne savait pas qu’il contribuait ainsi à rompre l’équilibre démographique. Maintenant le milliard d’hommes qui naissent et meurent affamés n’accède plus vraiment à l’état humain, il en reste à un état infra-animal. On peut me traiter d’antihumaniste ; le politiquement correct est devenu une peste intellectuelle… » (Propos recueillis par Michel Sourrouille, chronique de mars 2011 parue sur lemonde.fr)
2015, Didier Barthès : « Aujourd’hui les individus mêmes porteurs de faiblesses physiques notables (n’y voyez pas un jugement moral ou dévalorisant) ne sont plus soumis à la sélection naturelle et donc, du point de vue génétique, peuvent transmettre ces faiblesses à leurs descendants. Ainsi aujourd’hui, l’augmentation du nombre de myopes est liée, certes au mode de vie – on regarde de près plus souvent que de loin désormais dans la vie quotidienne – , mais aussi au fait qu’une forte myopie n’est plus un handicap rédhibitoire comme elle le fut auparavant. Ce qui est vrai pour la myopie l’est pour beaucoup d’autres choses. Beaucoup de mécanismes de défense de l’organisme (ne serait ce que la force physique ou la résistance à certaines maladies) ne constituent plus des avantages et ne sont donc plus sélectionnés. Nous dépendrons de plus en plus de la médecine et de moins en moins de nos propres forces. Le jour où la société ne pourra plus assumer de lourdes charges en matière de soins, il est possible que la vie de beaucoup d’entre nous soit menacée. Je suis bien conscient du caractère dérangeant du point de vue que je défends et je ne suis pas un adversaire de la médecine dont je suis heureux à titre personnel de bénéficier comme chacun d’entre nous. Toutefois cela ne saurait me faire oublier que le problème se pose et que peut-être un jour l’humanité le paiera cher. »
2016, Pierre Jouventin : « Darwin réalisa que les capacités de reproduction des espèces dépassaient très largement le nombre des descendants observés et donc qu’il existait une sélection naturelle qui triait en permanence les êtres vivants, ne laissant se perpétuer que ceux capables de s’adapter à leur milieu physique. Au fil des générations, seuls ceux qui sont parvenus à survivre et à se reproduire ont transmis leur patrimoine héréditaire. Cette sélection fut sans doute particulièrement rapide chez nos ancêtres parce que c’était urgent et vital pendant la délicate période d’adoption à un mode de vie radicalement différent de leurs ancêtres arboricoles. Le cerveau, qui était déjà remarquable par sa taille chez les primates, a été fortement sélectionné pour tripler en moins de deux millions d’années. Avoir une gros cerveau n’est pas nécessairement un avantage pour durer, tout au contraire puisque des plantes, des microbes et des animalcules sans système nerveux sont parvenus à se perpétuer pendant des millions d’années, et qu’ils risquent fort de nous survivre. La solution de l’accroissement du cerveau semble un échec inévitable et prévisible de l’Évolution. Sommes-nous une espèce ratée, pathologique, alors que les autres animaux sont fonctionnels, construits pour durer, avec sans doute moins de cervelle, mais moins d’excès et de démesure, avec peu de culture et beaucoup d’instinct pour éviter de se perdre comme nous dans des idéologies fumeuses ? La sélection s’est-elle un peu relâchée chez Homo sapiens et avons-nous régressé intellectuellement à cause de notre douce vie de civilisé ? C’est en tout cas ce qui est arrivé aux chiens qui ont perdu lors de la domestication un tiers du volume cérébral de leur ancêtre sauvage. Le loup il est vrai doit exploiter toutes ses aptitudes motrices et sensorielles pour survivre. » (L’homme, cet animal raté, aux éditions Libre et solidaire)
Si la nature utilisait les mêmes armes que les humains
Ah ! Si les arbres étaient équipés de tronçonneuses, ce serait la race des bûcherons qui serait en voie de disparition.
Si les lapins pouvaient utiliser un fusil aussi petit qu’efficace, il y aurait beaucoup moins de chasseurs.
Si les insectes pouvaient muter suffisamment pour rigoler des insecticides et transmettre à coup sûr chikungunya ou Zika.
Si les végétaux émettaient des doses létales systémiques au lieu de subir un herbicide non sélectif comme le Roundup.
Si les requins se précipitaient pour croquer à pleines dents surfeurs et baigneurs, il n’y aurait plus de stations balnéaires.
Si les microbes étaient immunisés contre les antibiotiques, ils pourraient proliférer dans ses variantes pathogènes.
Si les loups pouvaient pratiquer le tir d’abattage pour réguler la population française, on aurait besoin de moins de moutons.
Si l’eau secrétait des toxines à la seule vue d’une présence humaine, il n’y aurait plus d’eau potable.
Si les autochtones d’Amérique avaient éliminés au fur et à mesure de leur arrivée les colonisateurs anglo-saxons, il y aurait encore beaucoup de bisons dans les vertes prairies.
Si la nature savait se défendre contre l’ingéniosité humaine, la terre serait débarrassée de ce parasite destructeur qui aime par dessus tout tuer et assassiner, enlever la vie des plantes et des animaux, des microbes et des insectes, la vie dans l’eau dans les airs, et même la vie des humains.
Mais la nature est mal faite, elle a sélectionné un prédateur sans pitié qui sait éradiquer tout ce qui existe et se protéger contre presque toute les formes du vivant. Homo, plutôt demens que sapiens, a utilisé des armes de plus en plus sophistiquées pour arriver à ce résultat pitoyable : il se retrouve de plus en plus seul sans forêts primaires ni eau naturellement potable, au milieu de ses surfaces goudronnées et de ses immondices, acculé à retourner ses armes contre ses semblables pour s’accaparer les dernières ressources vitales. Comme l’écrit Pierre Jouventin, « L’homme, cet animal raté » !
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