Nucléaire et gaz, le greenwashing à l’UE
L’exécutif communautaire a fini par publier, le 2 février 2022, son décret sur la taxonomie verte, classement des activités selon leur contribution à la lutte contre le réchauffement climatique. Le nucléaire classé énergie « verte » et le gaz « énergie de transition », se révèle pour ce qu’elle est, un exercice purement politicien. Le propre de l’oxymore est de rapprocher deux réalités contradictoires. Nucléaire vert, moteur propre, développement durable, agriculture raisonnée, financiarisation durable, vidéoprotection, etc. La montée des oxymores constitue un des faits révélateurs de la société contemporaine. Ces zombies nous suggèrent perfidement la possibilité de concilier l’inconciliable, c’est du pur greenwashing (écoblanchiment).
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Virginie Malingre, journaliste : Les investissements dans une centrale à gaz seront jugés durables si le permis de construire a été délivré avant 2030. Les investissements dans le nucléaire, pour leur part, bénéficieront du label « vert » s’ils financent des travaux de modernisation de centrales qui auront obtenu un permis avant 2040 ou la construction de réacteurs de troisième génération qui aura été autorisée avant 2045. « Le texte doit permettre de mobiliser des fonds privés car, comme le souligne Bruxelles, « il n’y a pas beaucoup d’argent public pour ça ». Certes, ni le nucléaire, dont l’exploitation génère des déchets hautement radioactifs, ni le gaz, qui émet du CO2, « ne sont verts ou durables », admet la Commission. Mais, dans une Europe où 15 % de la production d’électricité provient encore des centrales à charbon et où les énergies renouvelables ne garantissent pas un approvisionnement stable, ils permettent de réduire l’empreinte carbone des Vingt-Sept. Trois représentants se sont déclarés contre l’acte délégué : l’Autrichien Johannes Hahn, chargé du budget, l’Espagnol Josep Borrell, haut représentant des Vingt-Sept pour les affaires étrangères, et la Portugaise Elisa Ferreira, responsable des réformes. Le Luxembourgeois Nicolas Schmit, chargé de l’emploi, et le Lituanien Virginijus Sinkevicius, de l’environnement avaient fait valoir leurs réticences. Mais les opposants au texte de la Commission n’ont aucune chance de rassembler la majorité qualifiée de vingt Etats membres représentant 65 % de la population européenne qu’il leur faudrait. Le Parlement européen peut s’opposer à l’acte délégué sur la taxonomie par une majorité absolue et l’état des forces à ce stade ne rend pas la chose inenvisageable.
Jean-Baptiste Chastand, journaliste : La petite Autriche, 8,8 millions d’habitants, a pris la tête du front du refus. Dans ce pays qui s’enorgueillit de n’avoir jamais eu de centrale nucléaire en activité sur son territoire et de produire près de 80 % de ses besoins en électricité par des sources durables, cette position fait l’objet d’un consensus transpartisan, de la gauche à l’extrême droite. Dans le combat autrichien, la France de Macron fait figure de principale adversaire.
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